Correspondance  -  Darby J.N.

 ME 1896 page 256

 

Monsieur le rédacteur,

Je viens vous prier de donner dans votre journal quelques explications sur Romains 6 et 7, et Galates 3 et 4. La doctrine touchant la loi et la grâce est une des parties de l'Ecriture que j'ai le plus de peine à saisir d'une manière nette; et la confusion des deux alliances est un des plus grands obstacles à l'affranchissement des âmes; elle jette de la confusion dans le coeur, et entrave le service et le témoignage.


Nous sommes heureux de pouvoir communiquer à nos lecteurs la réponse suivante:

Premièrement, aucune alliance n'est faite avec les chrétiens. La nouvelle alliance sera faite avec Israël comme l'a été l'ancienne. Mais nous en avons spirituellement toute la bénédiction et bien davantage. Le fondement de la nouvelle alliance a été posé dans le sang de Christ, mais les Juifs n'en ont rien voulu. En esprit nous y participons, c'est-à-dire au pardon de nos péchés et à la connaissance directe de Dieu. Cependant les privilèges de l'Eglise dépassent cela de beaucoup; ainsi, par exemple, l'union avec Christ et la vocation céleste qui l'accompagne.

Quant à la loi, la chose est très simple. La loi est une parfaite règle pour l'homme, enfant d'Adam, selon la chair. Les devoirs que constate la loi étaient toujours là; ils découlaient des relations dans lesquelles l'homme se trouve vis-à-vis des hommes, et vis-à-vis de Dieu lui-même; mais dans la loi nous avons une règle parfaite de ces devoirs, imposée par l'autorité de Dieu et sous menace de malédiction si l'on y manque. La loi exigeait, de la part de Dieu, la justice chez les hommes, — justice que l'homme n'avait pas; — elle est donc très utile pour convaincre de péché et pour produire (non pas le péché — il y était — mais) la transgression: «La loi est intervenue afin que l'offense abondât». Or Christ en a pris sur lui la malédiction, de sorte qu'il ne s'agit plus de cela pour le croyant, ni de ses péchés, car Christ les a portés.

Mais il y a plus que cela, et c'est à quoi Romains 6 s'applique, savoir la nature qui produit les péchés et qui est mise à découvert par l'opération de la loi, là où Dieu agit (Romains 7). Cette épître, jusqu'à la fin du verset 11 du chapitre 5, parle de nos offenses, de notre culpabilité et de la propitiation. Depuis le verset 12, elle traite la question de la nature pécheresse. «Je sais qu'en moi, c'est-à-dire en ma chair, il n'habite point de bien». Or le remède à cela, c'est la mort; toutefois, si la mort était venue sur nous, ç'aurait été aussi la condamnation; mais nous mourûmes en Christ. Le péché «dans la chair» a été condamné; mais puisque c'est sur et par la croix que cela a été accompli, la mort m'appartient. Je suis à cet égard au bénéfice de la mort de Christ. Je fais mon compte que je suis mort, mort au péché; — la condamnation, Christ l'a prise sur lui (Romains 6; 8: 3).

Maintenant la loi n'a d'autorité sur un homme qu'aussi longtemps qu'il vit, — mais je suis mort; par conséquent, la loi n'a plus d'autorité sur moi, non qu'elle ait perdu en soi son autorité; — aucune preuve de celle-ci n'est semblable au fait que Christ en a porté la malédiction; aussi ceux qui ont péché sous la loi seront-ils jugés par la loi; — mais je suis soustrait à son empire par le fait que je suis mort; elle ne peut plus m'atteindre; et je vis pour Dieu, non dans la chair à laquelle la loi s'adressait, mais en Christ. C'est le second mari du chapitre 7.

Galates 2, résume le même enseignement. Par la loi, je suis mort à la loi, afin que je vive à Dieu. Je suis crucifié avec Christ, néanmoins je vis, — non plus moi, mais Christ vit en moi.

Galates 3, fait voir qu'un contrat confirmé ne saurait être annulé, et ne permet pas qu'on y ajoute. On ne pouvait donc ajouter la loi à la promesse de la semence (Christ) faite à Abraham. Il montre que la loi avait été introduite en attendant la venue de la semence, pour qu'il y eût des transgressions (*); mais une fois la semence venue, il ne s'agissait plus de la loi.

(*) C'est le seul vrai sens des mots. Le péché y était. Dieu ne peut rien faire pour produire du péché; de toutes manières cela est impossible; mais la loi tourne le péché en transgression, et le péché devient «excessivement pécheur».

Un médiateur dans la loi montrait que Dieu n'était pas seul dans l'affaire; là, donc, tout devait manquer. Dans la promesse faite à Abraham et confirmée à Christ, Dieu était seul; ici, donc, rien ne pouvait manquer.

Galates 4, montre qu'il y avait des héritiers au temps de la loi; mais c'étaient des enfants encore en bas âge, et dans un état d'esclavage, jusqu'à ce que le Fils de Dieu et la rédemption plaçassent ceux qui avaient été ainsi sous la loi, dans la position de fils, — le Saint Esprit étant donné afin qu'ils en eussent la conscience. C'est là notre état à nous. Ensuite, l'apôtre montre qu'on ne peut pas lier les deux choses, ni concilier les deux états: les enfants d'Agar et l'enfant de Sara ne peuvent pas hériter ensemble. L'un chasse l'autre. L'Evangile a bien confirmé l'autorité de la loi; mais les deux ne peuvent se concilier, ni pour exercer autorité ensemble, ni quant à l'état d'âme produit sous cette autorité. On ne peut (Romains 7) avoir deux maris à la fois: l'enfant d'Agar ne peut hériter avec l'enfant de Sara.

La loi et la grâce sont toutes les deux parfaitement justes et ont Dieu lui-même pour auteur; mais elles sont inconciliables dans leurs principes, dans leur raison d'être. L'une exige la justice de l'homme, l'autre révèle en grâce celle de Dieu quand l'homme est pécheur et perdu. Bien d'autres vérités précieuses et importantes s'y rattachent; mais je me borne ici à répondre à ce qu'on demande.

 JND