Le rassemblement des enfants de Dieu

L'oeuvre du Seigneur et ses voies pour opérer ce rassemblement

ME 1897 page 368

 

Tout lecteur attentif de la parole de Dieu remarquera sans peine que le Seigneur Jésus, en venant dans ce monde, a d'abord «voulu rassembler» les enfants de Jérusalem, c'est-à-dire Israël, (Matthieu 23: 37). En Esaïe 49: 1-6, nous entendons le Messie exposer la mission dont l'Eternel, son Dieu, l'avait chargé. «Et maintenant, dit l'Eternel, qui m'a formé dès le ventre pour lui être serviteur afin de lui ramener Jacob…; quoique Israël ne soit pas rassemblé, je serai glorifié aux yeux de l'Eternel, et mon Dieu sera ma force» (verset 3). Christ devait premièrement être présenté au peuple, responsable de le recevoir. Il fallait que la «pierre», si souvent mentionnée dans l'Ecriture (*), fût amenée sous les yeux de ceux qui bâtissaient, c'est-à-dire des chefs du peuple, qui professaient attendre la réalisation des promesses faites aux pères, promesses qui devaient se réaliser par la présence du Messie dans ce monde (**).

(*) Genèse 49: 25; Psaumes 118: 22; Esaïe 8: 14; 28: 16; Matthieu 16: 18; 21: 42, 44; Actes des Apôtres 4: 11; Romains 9: 32, 33; 1 Pierre 2: 4-8.

(**) Genèse 22: 15-18; 28: 13, 14; 26: 3, 4; 49: 10; 1 Chroniques 17: 9-14; Psaumes 72; Esaïe 11: 1-10; 25; 42: 1-9; 44: 1-5; etc.; Jérémie 31 à 33. Voyez encore, entre beaucoup de passages des petits prophètes, Zacharie 2; 8; 12; 14: 13-21.

En vertu de ces prophéties, le Seigneur naquit au sein du peuple d'Israël sous la loi (Galates 4: 5), et fut circoncis le huitième jour (Luc 2: 21). Puis il commença son service au milieu du peuple de Dieu. Il entra «par la porte» (Jean 10: 2), et, «afin qu'il fût manifesté à Israël», Jean vint baptiser d'eau (Jean 1: 31).

Pour faire partie de la nation d'Israël, il n'était pas nécessaire d'être «né de Dieu». Tout enfant mâle était circoncis le huitième jour après sa naissance, et, par ce fait, avait droit à tous les privilèges appartenant à Israël. Il était participant de l'alliance que l'Eternel établit avec Abraham; il pouvait manger la pâque, offrir des sacrifices, célébrer les fêtes de l'Eternel, et professait attendre le Messie et les bénédictions du siècle à venir (*). Jésus Jéhovah vint donc visiter son peuple: «Il vint chez soi» (Jean 1: 11). Par la grâce de Dieu, il y avait alors au milieu de la nation des âmes fidèles préparées pour sa venue: Zacharie et Elisabeth, Joseph et Marie, les bergers de Bethléhem, Siméon et Anne, et d'autres à Jérusalem qui, avec ceux-là, «attendaient la délivrance» que le Messie devait apporter (**).

(*) Genèse 17: 10-14; Lévitique 12: 3; Exode 12: 43-49. Comparez Romains 9: 4-6, et Ephésiens 2: 11, 12.

(**) Luc 1: 5, 6, 26-38; 2: 8-20, 25-38.

Le Seigneur, en entrant dans son ministère, s'entoura d'abord du résidu d'Israël, de ceux qui avaient cru en lui, mais il travaillait pour amener la nation à la repentance. Dans ce but, il parcourait les villes et les villages d'Israël, et prêchait dans les synagogues l'évangile du royaume (*). De plus, il envoya les douze apôtres avec cet ordre formel: «Ne vous en allez pas sur le chemin des nations, et n'entrez dans aucune ville de Samaritains; mais allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d'Israël» (**). Quelle réponse y eut-il de la part du peuple à toute cette activité de sa grâce? Hélas! les anciens, les principaux sacrificateurs et les scribes, ceux qui bâtissaient, le rejetèrent, et bientôt le peuple même excité par eux, cria à Pilate: «Crucifie, crucifie-le!» demandant avec instance qu'on relâchât Barabbas, un brigand, et que l'on mît à mort et fit disparaître le saint et le juste, Celui dont la présence, pleine de grâce et de vérité, les jugeait, parce que leurs oeuvres étaient mauvaises, et qu'ainsi leurs coeurs ne voulaient pas de lui (***).

(*) Matthieu 4: 23; Marc 1: 14, 15; Luc 4: 14-21.

(**) Matthieu 10: 5-7; 15: 24.

(***) Matthieu 16: 21; 27: 20; Marc 15: 11; Matthieu 27: 1, 20-26; Luc 23: 17-25; Jean 19: 15.

Le Seigneur a senti dans son âme toute l'amertume de ce rejet, car il savait tout ce qui devait lui arriver, aussi l'entendons-nous se lamenter sur la sainte ville. «Jérusalem, Jérusalem», dit-il, «la ville qui tue les prophètes et qui lapide ceux qui lui sont envoyés, que de fois j'ai voulu rassembler tes enfants comme la poule sa couvée sous ses ailes, et vous ne l'avez pas voulu! Voici, votre maison vous est laissée déserte, car je vous dis: Vous ne me verrez plus désormais, jusqu'à ce que vous disiez: Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur!» (Matthieu 23: 37-39). Et ailleurs, nous lisons: «Et quand il fut proche, voyant la ville, il pleura sur elle, disant: Si tu eusses connu, toi aussi, au moins en cette tienne journée, les choses qui appartiennent à ta paix! Mais maintenant elles sont cachées devant tes yeux» (Luc 19: 41, 42). Je ne m'arrêterai pas à citer d'autres passages établissant le fait si clairement enseigné dans l'Ecriture, du rejet du Christ par son peuple. Venons-en aux conséquences qui en sont résultées.

Israël ayant rejeté son Messie, était moralement (et bientôt il le fut de fait) rejeté de Dieu, et devait disparaître pendant un temps comme vase de témoignage et de bénédiction de la part de Dieu sur la terre. Mais son refus de recevoir le Seigneur a ouvert la porte à une bénédiction infiniment excellente, que ce peuple n'avait jamais connue, et qui ne devait être donnée que lorsque Israël serait rejeté de Dieu et nommé par lui «Lo-Ammi» (pas mon peuple) (Osée 1: 9, 10; comparez Romains 9: 23-26). Voici en quels termes l'évangile présente cette bénédiction: «Il vint chez soi; et les siens (les Juifs) ne l'ont pas reçu. Mais à tous ceux qui l'ont reçu (Juifs ou non), il leur a donné le droit d'être enfants de Dieu, savoir à ceux qui croient en son nom; lesquels sont nés… de Dieu» (Jean 1: 11-13). Jésus donc mourut rejeté par les siens, mais pourtant dans sa mort se trouvait le salut d'Israël, ainsi que Dieu le dit par la bouche de Caïphe qui «prophétisa que Jésus allait mourir pour la nation» (*). En effet, à la fin, au temps déterminé de Dieu, la nation se retrouvera telle qu'elle était aux jours du Seigneur. Ce sera la même génération (Matthieu 24: 34): une masse incrédule et un résidu croyant. à cause de la mort du Seigneur, la masse apostate sera jugée, mais le résidu sera sauvé en regardant à «Celui qu'ils ont percé» (2*). Christ étant aussi le Sauveur d'Israël, celui-ci obtiendra donc à la fin les bénédictions promises (3*).

(*) Jean 11: 52; Esaïe 53: 4-12; Zacharie 12: 8-14; 13: 8, 9.

(2*) Esaïe 10: 20-23; 1: 9; Romains 9: 27-29; 11: 26, 27; Zacharie 12: 10.

(3*) Actes des Apôtres 2: 36; 5: 31, 32.

En attendant, ceux qui, par la foi, avaient reçu Jésus, étaient nés de Dieu, étaient enfants de Dieu, et il en est ainsi de ceux qui maintenant le reçoivent. Mais que devenaient les «enfants de Dieu», alors que le Christ était rejeté? La parole de Dieu répond: «Jésus allait mourir… pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés» (Jean 11: 52). Jusqu'alors ceux d'entre les Juifs qui avaient cru et étaient enfants de Dieu, étaient mélangés avec la nation, ayant avec elle une espérance commune dans le Messie (bien que Dieu fit la distinction entre eux et les autres); et quoique les fidèles, animés d'une même piété, se rapprochassent les uns des autres, selon ce que nous lisons en Malachie 3: 16-18, ils étaient cependant dispersés. Mais la mort de Jésus, manifestant le monde sous son vrai caractère, celui d'ennemi de Dieu (Jean 15: 22-25), mettait à part ceux qui n'étaient pas du monde, et les rassemblait en un autour de Celui qui, après avoir passé par la mort, était ressuscité comme «le premier-né entre plusieurs frères» (*). Si donc, par grâce, nous pouvons dire: «Christ est mort pour nos péchés, selon les Ecritures» (1 Corinthiens 15: 3), les mêmes Ecritures nous apprennent que Christ est mort «pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés».

(*) Romains 8: 29; Hébreux 2: 12; Psaumes 22: 22; Jean 20: 17, 18.

Cher lecteur, je suppose que vous êtes un enfant de Dieu; laissez-moi donc vous demander si vous réalisez actuellement que Christ est mort «pour rassembler en un les enfants de Dieu dispersés»? Ou bien, vous contentez-vous du mélange tel qu'il existe aujourd'hui dans la chrétienté? Peut-être encore, êtes-vous satisfait de faire partie d'une dénomination quelconque, disant, comme beaucoup d'autres depuis St-Augustin, que «l'Eglise est invisible», mais que les enfants de Dieu sont un quand même, ayant un même Esprit? Dans ce cas, je vous prie de considérer qu'il n'est pas dit: «Afin que les enfants de Dieu soient un», mais «afin de RASSEMBLER EN UN les enfants de Dieu dispersés». Or on ne peut pas parler d'un rassemblement en un comme étant invisible. Le Seigneur n'a-t-il pas dit à son Père: «Je ne fais pas seulement des demandes pour ceux-ci, mais aussi pour ceux qui croient en moi par leur parole; afin que tous soient un… afin que le monde croie que toi tu m'as envoyé»? (Jean 17: 20, 21). Qui sont ceux qui devaient être un? «Ceux qui croient en moi», dit le Seigneur. Et dans quel but? Afin que le monde (en voyant cette unité des enfants de Dieu) crût que le Père avait envoyé Jésus. Le Seigneur ne parlait donc pas d'une unité invisible, mais d'un témoignage rendu devant le monde par l'unité de la famille de Dieu.

Si Jean nous parle du rassemblement des croyants comme formant une famille — tous les enfants, nés de Dieu, possédant une même nature — Paul présente le même ensemble de ceux qui ont cru, c'est-à-dire l'Assemblée, comme un corps, dont les membres (les croyants) sont unis, par le Saint Esprit, au Chef (la Tête), Christ dans la gloire, et sont individuellement membres les uns des autres. Les passages qui établissent cette vérité sont nombreux. Ainsi nous lisons: «L'Assemblée qui est son corps». «Il (Christ) est le chef (la Tête) du corps, de l'Assemblée» (Ephésiens 1: 22, 23; Colossiens 1: 18). De plus, en Ephésiens 4: 4, nous trouvons: «Il y a un seul corps et un seul Esprit». Il est évident que, pour faire partie de ce «seul corps», il faut avoir reçu le Saint Esprit, ainsi qu'il est dit en 1 Corinthiens 12: 13: «Car aussi nous avons tous été baptisés d'un seul Esprit pour être un seul corps, soit Juifs, soit Grecs, soit esclaves, soit hommes libres, et nous avons tous été abreuvés pour l'unité d'un seul Esprit». Les croyants ne sont pas appelés à garder l'unité du corps, puisqu'il est un, ainsi qu'il est écrit: «Nous qui sommes plusieurs, sommes un seul corps en Christ»; et: «De même que le corps est un, et qu'il a plusieurs membres, mais que tous les membres du corps, quoiqu'ils soient plusieurs, sont un seul corps» (Romains 12: 4, 5; 1 Corinthiens 12: 12), et que ce seul corps est formé tel par le seul Esprit, l'homme n'y étant pour rien; mais ils sont appelés à garder «l'unité de l'Esprit dans le lien de la paix», c'est-à-dire qu'ils sont responsables de réaliser l'unité que l'Esprit a formé d'eux tous en les baptisant par sa présence (Ephésiens 4: 3). à chaque chrétien incombe sa part de responsabilité quant à cette grande et importante vérité; la mettre en pratique est une affaire d'obéissance individuelle. Souvenons-nous-en tous.

Je n'entrerai pas davantage dans ce sujet que d'autres ont traité plus complètement; je renverrai seulement le lecteur aux versets qui suivent dans le même chapitre de l'épître aux Ephésiens. Il y verra que, dans ce corps qui est un, Christ, le Chef glorifié, a donné des dons: les uns, comme les évangélistes, en vue d'amener les âmes à lui; et d'autres, comme les pasteurs et docteurs, en vue de la perfection des saints… «afin que nous ne soyons plus de petits enfants, ballottés et emportés çà et là par tout vent de doctrine dans la tromperie des hommes, dans leur habileté à user de voies détournées pour égarer; mais que, étant vrais dans l'amour, nous croissions en toutes choses jusqu'à lui qui est le Chef, le Christ» (versets 14-16).

Mais la parole de Dieu qui nous révèle ces précieuses vérités relatives à l'Assemblée envisagée comme corps de Christ, nous la présente aussi sous un autre aspect. Elle est «la maison de Dieu» sur la terre (1 Timothée 3: 15); «une habitation de Dieu par l'Esprit» (Ephésiens 2: 22). Et ici intervient la responsabilité de l'homme, car cette maison devait être conservée pure, ainsi que Paul dit: «Si quelqu'un corrompt le temple de Dieu, Dieu le détruira, car le temple de Dieu est saint» (1 Corinthiens 3: 17). Or, comme il est toujours arrivé, l'homme a manqué à garder ce qui lui était confié, et l'infidélité se trouvant dans la maison, Dieu la jugera, selon ce qui est écrit: «Le temps est venu de commencer le jugement par la maison de Dieu» (1 Pierre 4: 17).

L'Ecriture nous montre amplement la vérité de ce que nous venons d'avancer. Nous voyons, dès le commencement, l'effort fait par l'ennemi pour introduire dans l'Eglise le judaïsme, la religion de la chair (*). Bientôt aussi, de leur côté, les chrétiens eux-mêmes en étaient venus à rechercher leurs propres intérêts et non pas ceux de Jésus Christ (Philippiens 2: 21). L'apôtre était en prison, et quelques-uns, au lieu de compatir à son épreuve, et d'annoncer l'Evangile avec un coeur pur et dévoué, prêchaient Christ par envie et par un esprit de contention, par un esprit de parti, croyant susciter de la tribulation à ses liens (Philippiens 1: 15-17). D'autre part, il voyait avec larmes plusieurs marcher comme ennemis de la croix de Christ, ayant leurs pensées aux choses terrestres (Philippiens 3: 18, 19). Ainsi le mal se glissait dans la maison de Dieu. Dans sa dernière entrevue avec les anciens de l'assemblée d'Ephèse (anciens établis par le Saint Esprit), l'apôtre les avait avertis solennellement qu'après son départ, il entrerait parmi eux «des loups redoutables qui n'épargneraient pas le troupeau», et que, «d'entre eux-mêmes», se lèveraient des hommes qui annonceraient des doctrines perverses pour attirer les disciples après eux (**) (Actes des Apôtres 20: 28-30). Avant de fermer les yeux, le cher et fidèle serviteur du Seigneur a vu l'accomplissement de ses paroles. Non seulement, il écrit avec douleur à Timothée, son «enfant bien-aimé»: «Tu sais ceci, que tous ceux qui sont en Asie, du nombre desquels sont Phygelle et Hermogène, se sont détournés de moi», mais encore: «Hyménée et Philète se sont écartés de la vérité, disant que la résurrection a déjà eu lieu, et renversant la foi de quelques-uns» (2 Timothée 1: 15; 2: 17, 18). La seconde épître de Pierre avertissait aussi les saints contre les faux docteurs qui introduiraient furtivement des sectes de perdition, ajoutant que plusieurs suivraient leurs excès et annonçant le jugement qui les atteindrait. Et Jude, dans son épître, les montre comme s'étant glissés parmi les fidèles, changeant la grâce en dissolution, et s'asseyant aux agapes des saints, tellement ils étaient mêlés avec eux! Jean, dans ses épîtres, parle d'un mal plus grand encore. Le dernier caractère que revêtira la chrétienté, c'est l'apostasie — la négation du Père et du Fils — et ce dernier trait du mal se montrait déjà du temps de l'apôtre bien-aimé du Seigneur (***).

(*) Voyez Galates 1: 6-10; 2: 4, 5; 3: 1; 4: 9-11; 5: 1-12; 6: 11-16, et comparez avec Actes des Apôtres 15: 1-29, et encore Colossiens 2: 4, 16-22.

(**) Remarquez que l'assemblée d'Ephèse n'est que l'expression locale de toute l'Assemblée de Dieu, acquise par le sang de son propre Fils.

(***) 2 Thessaloniciens 2: 3; 1 Jean 2: 18, 19, 22, 23; 4: 1-6; 2 Jean 6-11.

Dans les épîtres aux sept assemblées (Apocalypse 2 et 3), le déclin commencé à Ephèse par l'abandon du premier amour (2: 4), aboutit à Laodicée à l'état de tiédeur insupportable à Christ et qui fait dire au Seigneur: «Parce que tu es tiède, je vais te vomir de ma bouche» (3: 16), c'est-à-dire te rejeter entièrement, de sorte que l'église n'est plus du tout reconnue. N'oublions pas que, dans ce livre, le Seigneur est vu comme Juge (1: 12-16). Il juge d'abord la maison, l'Eglise, vase responsable du témoignage de Dieu sur la terre, tout en prenant avec lui hors de l'heure de l'épreuve (*) qui vient sur la terre habitée tout entière, les fidèles qui, avant cette heure, en l'attendant du ciel, gardent sa parole et ne renient pas son nom (3: 8-13). On voit, dans la suite du livre, les jugements qui tombent sur la chrétienté apostate et sur la terre habitée tout entière.

(*) Il est dit: «Je te garderai de l'heure de l'épreuve», et non pas «dans ou pendant l'heure».

Les passages de la Parole que nous avons cités nous ont fait voir la ruine qui s'était déjà introduite et s'accentuait toujours plus avant que le dernier apôtre eût quitté ce monde. Que fallait-il faire en face de cet état de choses? Et aujourd'hui, quand bien loin qu'il y ait une amélioration, le mal n'a fait que s'accroître, et que les erreurs pullulent de toutes parts et s'affichent librement dans la chrétienté; aujourd'hui, que la masse s'est «écartée de la vérité», que faut-il faire? Faut-il que les fidèles acceptent d'être mélangés et associés avec ceux qui sont incrédules ou avec ceux qui professent l'erreur, ou qui, d'une manière quelconque, déshonorent le nom du Seigneur? Faut-il dire, comme un grand nombre de personnes le pensent, que chacun a à répondre pour lui-même, et que l'on n'est pas souillé par le péché d'autrui? Ah! cher lecteur, ce raisonnement ne répond que trop bien au but que Satan voulait atteindre en introduisant le mélange — c'était la ruine de l'Assemblée sur la terre. Rien n'est plus faux, selon l'Ecriture, que de dire que l'on n'est pas souillé par le mal moral ou doctrinal, en restant lié à ceux qui s'en rendent coupables. Le péché existait dans l'assemblée des Corinthiens, et l'apôtre leur dit qu'ils seraient comme une pâte levée, s'ils toléraient le péché, car «un peu de levain fait lever la pâte tout entière» (1 Corinthiens 5: 6; comparez Galates 5: 9) (*). Aussi, puisqu'en Christ, l'Assemblée est sans levain (le péché étant ôté par sa mort), elle devait «ôter le vieux levain», afin d'être «une nouvelle pâte» (verset 7) et faire la fête «avec des pains sans levain de sincérité et de vérité» (verset 8). Pour cela, que devaient-ils faire? D'abord mener deuil à cause du péché d'un membre de l'assemblée, et ensuite obéir» à l'injonction de l'Esprit Saint: «Otez le méchant du milieu de vous-mêmes» (verset 13), jugeant ainsi ceux «du dedans» (verset 12). Le «dedans» est l'Assemblée, la maison de Dieu; le «dehors», c'est le monde où se déploie la puissance de Satan.

(*) Il est à peine besoin de rappeler que le levain représente toujours le mal, soit moral, soit doctrinal.

Le même principe existait dans l'assemblée d'Israël, parce que l'Eternel était là. Voici ce que dit l'Ecriture: «Mais les fils d'Israël commirent un crime au sujet de l'anathème: Acan… prit de l'anathème». Acan seul avait pris de l'anathème et l'avait caché dans sa tente. Mais que dit l'Eternel: «Israël a péché, et même ils ont transgressé mon alliance que je leur avais commandée, et même ils ont volé… Je ne serai plus avec vous, si vous ne détruisez pas l'anathème du milieu de vous» (Josué 7: 1, 10-12, 24-26).

Je sais que l'on s'appuie sur 1 Corinthiens 11: 27-29, pour prétendre que chacun est pur ou souillé pour soi-même, et que si même des inconvertis prennent la cène avec les chrétiens, ceux-ci n'en sont pas coupables, puisque, dit-on, c'est à la responsabilité de chacun de savoir s'il doit ou non participer à la cène: «Il mange et boit sa condamnation», s'il le fait indignement. Mais que le plus ignorant des lecteurs de la Bible examine sans préjugés et avec prière le passage tout entier de 1 Corinthiens 11: 20-32, et qu'y trouvera-t-il? Que les chrétiens de Corinthe déshonoraient le Seigneur, en manifestant un affreux manque d'amour fraternel au moment si solennel où ils avaient devant eux le mémorial du dévouement sans bornes du Seigneur s'offrant lui-même pour nous. Eux, au contraire, mangeaient et buvaient jusqu'à s'enivrer à côté de leurs frères qui n'avaient rien! Ce déshonneur jeté sur le Seigneur, ce mépris de l'Assemblée de Dieu, amenait la verge du Seigneur sur «les siens», «car celui qui mange et qui boit, mange et boit un jugement contre lui-même, ne distinguant pas le corps» (verset 29). Quel était ce jugement? Etait-ce l'enfer pour les inconvertis qui osaient prendre la cène? Il n'y a pas un mot de cela dans notre passage. Les Corinthiens, au contraire, étaient des «sanctifiés en Jésus Christ» (chapitre 1: 2), et c'était comme tels qu'ils étaient châtiés par le Seigneur, lorsqu'ils mangeaient le pain ou buvaient la coupe du Seigneur indignement, ainsi qu'il est dit: «C'est pour cela que plusieurs sont faibles et malades parmi vous, et qu'un assez grand nombre dorment. Mais si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne serions pas jugés. Mais quand nous sommes jugés, nous sommes châtiés par le Seigneur, afin que nous ne soyons pas condamnés avec le monde» (versets 30-32). C'est ainsi que l'apôtre, animé des pensées et de l'esprit du Maître (Lamentations de Jérémie 3: 33), invitait les Corinthiens à se juger eux-mêmes pour n'être point jugés, car Dieu ne peut passer légèrement sur le péché, où que ce soit qu'il le rencontre, soit chez les siens aujourd'hui, soit chez le monde plus tard (1*) à présent, c'est le temps de sa patience envers l'homme. Les enfants de Dieu, soit à Corinthe, soit ailleurs, ne viendront «pas en jugement» dans le jour a venir (2*); ils paraîtront devant le tribunal du Christ, mais ils y viendront dans des corps glorifiés, car c'est ainsi qu'ils ressuscitent, ou que seront transmués ceux qui demeurent jusqu'à la venue du Seigneur (3*). C'est pour cette raison-là que, ainsi que le dit notre passage, nous sommes jugés dans ce monde, si nous ne nous jugeons pas nous-mêmes. Ainsi la doctrine que l'on tire de ce passage est fausse; elle est contraire à l'Ecriture. Remarquons, d'ailleurs, que tous ceux qui participent à la cène du Seigneur déclarent, en partageant le seul pain (4*), qu'ils sont un seul corps, le corps de Christ «Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain» (1 Corinthiens 10: 17). Est-ce que les membres du corps de Christ peuvent, en y participant avec eux, déclarer dans cet acte solennel, qu'ils sont un même corps avec ceux qui n'ont pas même «la vie de Dieu»; ou bien qu'ils sont en communion, en étant à la même table du Seigneur, avec ceux qui retiennent des doctrines subversives de la vérité et souvent attentatoires à la Personne de Christ? Question bien sérieuse pour tout enfant de Dieu.

(1*) 1 Pierre 4: 17, 18; Hébreux 12: 4-14, 28, 29.

(2*) Jean 5: 24; 1 Jean 4: 17, 18.

(3*) 2 Corinthiens 5: 10; 1 Corinthiens 15: 42-49, 51-58; 1 Thessaloniciens 4: 13-18; Philippiens 3: 20, 21.

(4*) S'ils célèbrent la cène selon l'Ecriture, car sinon, il vaudrait mieux ne pas le faire, bien que ceux qui aiment le Seigneur, ne peuvent laisser de côté son mémorial.

Revenons à l'état décrit par Paul dans la 2e épître à Timothée. Que fallait-il faire en présence de la ruine de l'Assemblée, alors que l'autorité apostolique allait disparaître? Quel était le chemin tracé par l'Esprit de Dieu? L'apôtre le dit: «Le solide fondement de Dieu demeure, ayant ce sceau: Le Seigneur connaît ceux qui sont siens, et: Qu'il se retire de l'iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur» (2 Timothée 2: 10). Ainsi celui qui a à coeur la gloire du Maître aura du repos, car quelle que soit la quantité d'erreurs répandues dans la chrétienté, et le nombre considérable de sectes qui la divisent, il a cette parole: «Le Seigneur connaît ceux qui sont siens». Mais d'un autre côté, la responsabilité est gardée par la seconde face du sceau: «Qu'il se retire de l'iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur». Or n'est-ce pas une bien grande iniquité que celle qui se trouve dans les principes qui dispersent les enfants de Dieu, alors que, pour les rassembler en un, Christ a donné sa vie (*)?

 (*) Il est vrai qu'on trouve dans la chrétienté des Unions et des Alliances formées dans le but de rapprocher les chrétiens; mais n'affirment-elles pas, par leur existence même, le maintien d'un état de choses contraire à la volonté de Dieu? En effet, elles reconnaissent ainsi les sectes, au lieu qu'il faudrait pour être fidèle s'en retirer, afin de se trouver sur le terrain de l'unité du corps.

Après le passage dont nous venons de parler, l'apôtre compare l'état actuel de l'Assemblée à une grande maison, dans laquelle tout n'est pas pur. «Or, dans une grande maison, il n'y a pas seulement des vases d'or et d'argent, mais aussi de bois et de terre; et les uns à honneur, les autres à déshonneur» (verset 20). Qu'est-ce qui fait d'un homme un vase à honneur dans l'Eglise? Sera-ce parce qu'il est très en vue, un grand évangéliste, ou un savant docteur peut-être? Ce n'est pas ce que dit l'Ecriture. Elle répond: «Si donc quelqu'un se PURIFIE de ceux-ci (des vases à déshonneur), il sera un vase à honneur, sanctifié, utile au maître, préparé pour toute bonne oeuvre» (verset 21). Voilà ce qui fait d'un chrétien un vase à honneur. «Se purifier de ceux-ci», c'est reconnaître que la chrétienté dans son état actuel est une chose souillée devant Dieu (*), que l'on est souillé soi-même, en étant en relation avec les éléments qui s'y trouvent; c'est juger cet état de choses, c'est se juger soi-même (quant à toutes ces choses humaines introduites par l'ennemi), et se trouver ainsi replacé sur le terrain établi par Dieu lui-même. Aussi Paul exhorte-t-il Timothée, et nous avec lui, par ces paroles: «Fuis les convoitises de la jeunesse, et poursuis la justice, la foi, l'amour, la paix» — non pas avec tous, remarquez-le bien — mais «avec ceux qui invoquent le Seigneur d'un coeur pur» (verset 22). Voilà, cher lecteur, le sentier que Dieu nous a tracé pour ces jours de ruine. Tout autre chemin est un chemin de sagesse humaine; y marcher, c'est désobéir au Seigneur, c'est se souiller, c'est perdre «le prix du combat», l'honneur d'avoir suivi le chemin du Seigneur dans les jours de ruine, et, par conséquent, c'est manquer la récompense qui s'y rattache (Apocalypse 3: 11). Vouloir réformer, comme pensent devoir le faire plusieurs chrétiens — d'ailleurs bien sincères — est contraire à l'Ecriture; d'abord, parce que la ruine est complète, ainsi que nous l'avons vu, et que Dieu ne répare pas ce que l'homme a gâté, mais introduit quelque chose de meilleur: c'est le principe selon lequel il a agi de tout temps. En second lieu, parce que mon devoir (le devoir de chaque chrétien) est, selon les paroles de l'apôtre, de me retirer de l'iniquité (voyez Jérémie 15: 19, 20), si je veux que Dieu m'emploie pour le bien des autres, afin que je sois «comme sa bouche».

(*) Comparez Aggée 2: 11-13.

En Matthieu 13, le Seigneur nous enseigne que l'ivraie a été semée parmi le froment (verset 25), et qu'il faut laisser croître les «deux ensemble jusqu'à la moisson» (verset 30). Le champ, c'est le monde (verset 38) — car c'est une parabole du royaume; — arracher l'ivraie (les fils du méchant verset 38), serait faire une oeuvre de jugement en destruction (versets 41, 42), ce qui ne nous appartient pas; mais nous voyons se réaliser cette parole: «Liez-la en bottes pour la brûler» (verset 30). En effet, sous l'action de la providence (les anges; comparez verset 30 et verset 39), on voit, dans ces derniers jours, les hommes se coaliser, se syndiquer, se grouper en toutes sortes de sociétés et d'unions religieuses et irréligieuses, toutes fondées sur un principe humain, puisqu'elles laissent de côté la seule union divine (Ephésiens 4: 3, 4). Or, tandis que cela s'accomplit sous nos yeux, le Seigneur nous donne, dans les versets 47 et 48, le vrai caractère de son oeuvre à la fin des jours. Le filet de l'évangile a été jeté dans la mer des peuples, selon les paroles du Seigneur en Matthieu 28: 19, 20 (comparez Luc 5: 10). Mais Jésus nous dit que des poissons de toute sorte s'y trouvent rassemblés. Que font les vrais serviteurs du Seigneur? Quand le filet fut rempli, «ils le tirèrent sur le rivage, et s'asseyant, ils mirent ensemble les bons dans des vaisseaux, et jetèrent dehors les mauvais» (verset 48). Telle est l'oeuvre du Seigneur reconnue de lui: «les bons ensemble» et non, le mélange. Au verset 49, il est dit: «Il en sera de même… les anges sortiront, etc.», mais remarquez que «de même» se rapporte au triage qui a lieu à la consommation du siècle. Là les anges ne s'occupent que des méchants (ils sépareront les méchants du milieu des justes), tandis que les pêcheurs ne s'étaient occupés que des «bons» poissons pour les mettre dans des vaisseaux, jetant dehors les mauvais, opérant ainsi une oeuvre de séparation.

Mon cher lecteur, je vous prie, en terminant, de peser devant Dieu ce que vous venez de lire. Et si vous êtes comme les Béréens, qui «étaient plus nobles que ceux de Thessalonique», vous prendrez votre Bible, et vous examinerez si les choses qui vous ont été dites, sont conformes aux Ecritures (Actes des Apôtres 17: 11). Et s'il en est ainsi, que Dieu vous fasse la grâce de marcher dans le sentier qu'elles vous montrent, afin que, purifié à tous égards comme «un vase à honneur», vous soyez «accompli et parfaitement accompli pour toute bonne oeuvre» (2 Timothée 2: 21; 3: 16, 17). Si la ruine de la chrétienté est là, et si nous sommes au milieu de cette ruine, n'oublions pas que Dieu l'a permis afin d'éprouver notre fidélité et notre obéissance (voyez Juges 3: 1-4). Et si déjà vous avez le bonheur de vous trouver sur le terrain vrai du rassemblement selon Dieu, que le Seigneur vous donne d'y être fidèle et dévoué, y honorant le Seigneur, et recommandant la vérité à tous les autres par une vie qui lui soit consacrée, étant ainsi en bénédiction et en édification à tous les membres du corps de Christ, dans la mesure qui vous est départie (Romains 12: 3-8).

 «Le Seigneur est proche», et il se forme un peuple pour son nom. Puissions-nous tous faire partie du résidu à qui il peut dire: «Tu as peu de force, et tu as gardé ma parole, et tu n'as pas renié mon nom» (Apocalypse 3: 8). La chrétienté a devant elle l'heure de l'épreuve, et elle y succombera. Déjà l'apostasie commence, le mystère d'iniquité opère déjà (2 Thessaloniciens 2: 7). Que sera-ce, quand l'Antichrist sera là! Mais la promesse est faite aux fidèles: «Parce que tu as gardé la parole de ma patience, je te garderai de l'heure de l'épreuve qui va venir sur la terre habitée tout entière pour éprouver ceux qui habitent sur la terre. Je viens bientôt; tiens ferme ce que tu as, afin que personne ne prenne ta couronne» (Apocalypse 3: 10, 11).

Que le Seigneur nous accorde à tous cette grâce de tenir ferme ce qu'il nous a donné, jusqu'à ce qu'il vienne! Amen.