Quelques remarques sur 1 Corinthiens 11: 26-34

ME 1899 page 101

 

Dans des articles publiés il y a quelques années, on a exposé ce qui concerne la Table du Seigneur et la Cène du Seigneur (*). Il y était traité de l'institution de la cène, de sa signification et des enseignements que nous donnent et la table et la cène, et du privilège qu'ont les rachetés, membres du corps de Christ, d'y avoir leur place et d'y participer. C'est essentiellement le côté de la grâce qui a ainsi été présenté aux lecteurs.

(*) Voir pages 353 et suivantes, année 1884, du Messager Evangélique.

Mais il y a un autre point à considérer, c'est celui de la responsabilité qui se rattache à la jouissance de ce précieux privilège. Il est nécessaire d'en dire quelques mots, et en même temps de chercher à éclairer les âmes qui nourriraient de fausses idées, à rassurer des coeurs timorés, et à exhorter et avertir ceux qui seraient insouciants ou négligents à l'égard de la cène du Seigneur.

L'apôtre s'adresse à «l'assemblée de Dieu qui est à Corinthe, aux sanctifiés dans le Christ Jésus». La cène est instituée, la table est dressée, dans l'Assemblée de Dieu, pour les rachetés de Christ, pour les membres de son corps. C'est une grâce, un privilège appartenant à chacun d'eux, et auquel chacun doit tenir, parce que le Seigneur lui-même y tient. Il y a là une expression de son amour à laquelle aucun coeur qui le connaît ne peut ni ne doit rester indifférent, et qui doit le presser de ne manquer aucune occasion d'y répondre, en se trouvant chaque premier jour de la semaine à la table du Seigneur pour se souvenir de lui et annoncer «sa mort jusqu'à ce qu'il vienne». Il peut y avoir des cas où il soit impossible de se trouver, bien qu'on le désire et que l'on en sente la privation, avec ceux qui sont rassemblés au nom du Seigneur dans ce but: ces circonstances particulières, il les connaît, lui qui les permet. Mais si, sans raisons valables, sans empêchement réel, on reste absent de la table du Seigneur, on contriste son coeur, on n'honore pas son nom, et on manifeste peu d'activité de vie spirituelle. Chez l'ancien peuple de Dieu, tous devaient célébrer la Pâque: «Toute l'assemblée d'Israël la fera», est-il dit (Exode 12: 47). Et nul ne pouvait s'en abstenir sans châtiment (Nombres 9: 13). Le châtiment pour les saints aujourd'hui ne sera pas de même nature, sans doute, mais la perte que fait l'âme par le déplaisir causé au Seigneur, n'en est-il pas un?

Il y a malheureusement dans les coeurs de plusieurs, comme une certaine légèreté, une sorte d'indifférence à l'égard de la participation à la table du Seigneur, qui montre qu'on ne l'apprécie pas comme elle devrait l'être. On se laisse parfois trop aisément arrêter de se rendre au rassemblement des saints par des circonstances en réalité de peu de valeur, et dont l'importance disparaîtrait, s'il y avait un peu plus de chaleur de coeur pour Jésus. Combien l'on devrait être heureux de venir le rencontrer à ce rendez-vous qu'il nous donne à sa table! Mais des affaires de ménage, l'amour de ses aises, le mauvais temps, etc., et l'on reste chez soi. S'il s'agissait d'intérêts terrestres, chers amis, vous laisseriez-vous si aisément arrêter? Ne sauriez-vous pas alors remettre à un autre moment vos arrangements intérieurs, secouer votre paresse, braver le mauvais temps, de peur de nuire à ces intérêts d'un jour? Et vous ne craignez pas de nuire à votre âme en négligeant Christ?

Chez d'autres personnes, cette négligence n'existe pas; au contraire. Elles ont un coeur sincèrement désireux de plaire au Seigneur, mais il y a de l'ignorance, de fausses idées quant à la cène, et un manque d'affranchissement qui les retient parfois loin de la table du Seigneur. Elles voient dans la cène quelque chose de redoutable, un je ne sais quoi de mystérieux qui les fait trembler, au lieu de considérer que, dans la cène, nous avons l'expression de l'amour parfait de Christ se donnant pour nous et à nous. Elles se replient sur elles-mêmes, voient leur indignité, se rappellent leurs fautes commises, sentent la mauvaise nature en elles et pensent qu'avant d'oser approcher de la table, il faut être meilleures qu'elles ne se sentent, et elles s'abstiennent. Elles veulent être en bon état d'âme pour prendre part à la fraction du pain et à la coupe. Elles regardent à elles-mêmes et non à Christ. Leurs scrupules sont respectables, mais il est à craindre que, tout en croyant en Christ comme leur Sauveur, elles ignorent la grâce dans laquelle Dieu les a placées en vertu de l'oeuvre de Christ, la position parfaite du croyant devant Dieu dans le Bien-aimé, leur mort et leur résurrection avec Christ, et par conséquent, que c'en est fait du vieil homme qui a été jugé et a pris fin à la croix de Christ. Sans doute, nous avons à nous juger, comme nous le verrons, mais non à nous éloigner de la table du Seigneur, où il nous convie lui-même, où il nous rappelle ce qu'il a souffert, et ce qu'il a accompli pour nous, afin de nous purifier de nos iniquités et de nous donner un libre accès auprès de Dieu, et par conséquent la cène nous dit: Tes péchés ne sont plus; approche-toi et jouis de ton Sauveur.

Ce n'est pas cependant que nous devions considérer la cène comme un moyen de grâce, comme l'on dit. Il en est qui la regardent comme devant nous rapprocher de Dieu, mais c'est parce que nous avons été et que nous sommes rapprochés de lui par le sang de Jésus, que nous venons et prenons part à ce qui nous rappelle son sacrifice. D'autres cherchent à y trouver l'assurance du pardon de leurs péchés, la paix et le repos; mais s'il est vrai qu'ils sont des rachetés du Seigneur, ils ont la paix par Jésus; Dieu les a pardonnés. Ce n'est pas dans la cène que l'on trouve pardon, paix et vie, mais en Christ, et les possédant, on vient à sa table pour lui en rendre grâces.

On entend dire: «Je ne trouve aucune édification spéciale dans le rassemblement pour prendre la cène. Je suis aussi heureux en lisant ma Bible à la maison, et je me trouve là dans la communion du Seigneur». Ou bien on préfère d'autres réunions que celles où l'on est rassemblé, comme autrefois les disciples à Troas, pour la fraction du pain. C'est tenir bien peu de compte du désir qu'exprime le coeur du Seigneur lorsqu'il dit: «Faites ceci en mémoire de moi». Sans doute, nous avons à nous souvenir de lui en tout temps; sa pensée ne devrait jamais être absente de nos coeurs; mais n'est-ce donc rien que de nous trouver ensemble, anticipant le moment où nous entourerons le trône de l'Agneau qui a été immolé, réunis maintenant autour de sa table, devant les signes qui nous rappellent son corps meurtri, son sang versé pour nous, l'adorant et faisant monter vers lui nos louanges et nos actions de grâces? Où est le culte, chers amis, le vrai culte, si ce n'est autour de la table du Seigneur?

On trouve aussi des personnes qui s'abstiennent de la cène du Seigneur, parce qu'elles voient, ou ont cru voir, chez d'autres, des fautes, des manquements non reconnus, et souvent des torts envers elles. Au lieu de s'abstenir du privilège précieux de rappeler la mort du Seigneur, l'Ecriture ne nous enseigne-t-elle pas ce que nous avons à faire dans des cas semblables? D'abord, aussi longtemps que l'assemblée qui a à coeur la gloire du Seigneur et la sainteté de sa table, n'a pas été obligée d'exclure une personne, j'ai à la supporter avec tous ses défauts et ses torts réels ou prétendus envers moi. Je suis en communion avec l'assemblée. Souvenons-nous de la parole du Seigneur: «Ne jugez pas, afin que vous ne soyez pas jugés», et de ce que dit l'apôtre: «Qui es-tu, toi, qui juges le domestique d'autrui? Il se tient debout ou il tombe pour son propre maître?» Et ensuite, quelle est la marche à suivre, si réellement nous voyons des fautes manifestes? Aux Galates, Paul écrit: «Frères, quand même un homme s'est laissé surprendre par quelque faute, vous qui êtes spirituels, redressez un tel homme dans un esprit de douceur, prenant garde à toi-même, de peur que toi aussi tu ne sois tenté» (Galates 6: 1). Que dit le Seigneur: «Si moi, le Seigneur et le Maître, j'ai lavé vos pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres» (Jean 13: 14). Paul nous donne de cela un bel exemple, lorsqu'il dit: «Je supplie Evodie, et je supplie Syntiche, d'avoir une même pensée dans le Seigneur» (Philippiens 4: 2). Il y avait entre elles un dissentiment qui eût pu avoir des suites fâcheuses; Paul, avec humilité et douceur, tourne leurs regards vers le Seigneur, près duquel tout dissentiment disparaît, et où l'on se pardonne l'un à l'autre, comme Christ nous a pardonné (Colossiens 3: 13). Et enfin, si vous estimez que votre frère, ou votre soeur, a péché contre vous, que dit Jésus: «Va, reprends-le, entre toi et lui seul; s'il t'écoute, tu as gagné ton frère; mais s'il ne t'écoute pas, prends avec toi encore une ou deux personnes, afin que par la bouche de deux ou de trois témoins, toute parole soit établie. Et s'il ne veut pas les écouter, dis-le à l'assemblée» (Matthieu 18: 15-17). Tels sont les préceptes de la Parole que nous avons à suivre, au lieu de nous abstenir de la cène, où l'on est en communion avec l'assemblée. C'est elle ou soi-même que l'on juge en s'abstenant de la cène. Combien il serait à désirer que l'on n'apportât à la table du Seigneur aucun sentiment d'aigreur, de rancune, aucune mauvaise pensée à l'égard les uns des autres, ce qui est une gêne dans l'assemblée, mais au contraire rien que des entrailles de miséricorde, de bonté, de douceur.

Tout cela étant posé, à l'égard de ceux qui, pour un motif ou un autre, se privent de la jouissance et du privilège d'annoncer la mort du Seigneur, et sont responsables à cet égard, entrons maintenant dans l'examen du passage que nous avons cité en tête de ces pages. L'apôtre vient de dire: «Toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez la coupe, vous annoncez la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne». Et il ajoute: «Ainsi, quiconque mange le pain ou boit la coupe du Seigneur indignement, sera coupable à l'égard du corps et du sang du Seigneur». Nous avons vu que, dans la cène du Seigneur, la coupe de bénédiction que nous bénissons est la communion du sang du Christ, et le pain que nous rompons, la communion de son corps, et que nous, qui sommes plusieurs à participer à la cène, nous sommes un seul pain, un seul corps. A tous ceux donc qui sont rachetés par le sang de Christ et membres de son corps, il appartient de s'asseoir à la table du Seigneur et à eux seuls. Comment un incrédule, un déiste, un arien, un mondain, y aurait-il sa place? En venant à cette table, en rompant le pain et en buvant la coupe, j'annonce la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne. Je professe donc que je suis sauvé par son sang, par sa mort; et de plus que je suis membre de son corps. Je professe croire à cette mort du Seigneur et être uni à lui dans la mort, et ainsi séparé du monde qui l'a crucifié. Je professe enfin que mes espérances sont en haut et que j'attends son retour pour les réaliser. Si toutes ces choses ne sont pas pour moi des réalités vivantes, et que je prétende avoir ma place à la table du Seigneur, que suis-je, sinon un menteur et un hypocrite? C'est manger et boire indignement, c'est manger et boire un jugement contre soi-même, en ne discernant pas le corps du Seigneur, c'est manquer de respect à ce qu'il y a de plus sacré, c'est le profaner; c'est se rendre coupable à l'égard du corps et du sang du Seigneur. Quelle terrible responsabilité

Ce que nous venons de dire ne doit pas avoir pour effet de jeter du trouble dans des âmes craintives, qui penseraient n'avoir pas saisi suffisamment les vérités divines que la cène rappelle, ou qui n'éprouveraient pas à un assez haut degré les sentiments que ces vérités sont appelées à produire dans le coeur. Il ne s'agit ni de connaissance de l'intelligence, ni de sentiments, il s'agit de Christ. As-tu trouvé en lui ton Sauveur? Te reposes-tu avec confiance sur son sang versé pour expier tes péchés, sur son sacrifice parfait qui a pleinement satisfait Dieu? Croîs-tu à cet amour de Christ qui surpasse toute connaissance et qui est venu te chercher et te sauver, et qui maintenant s'exerce constamment pour toi? Contemples-tu avec bonheur le Seigneur mort pour toi, et désires-tu le connaître toujours mieux pour le servir? Alors, si faible et si indigne que tu te saches et que tu te sentes, viens, prends ta place avec ceux qui annoncent la mort du Seigneur en attendant qu'il vienne; approche, et bénissons-le, et louons-le, et adorons-le ensemble. Certes, nous avons à nous éprouver nous-mêmes, et à nous juger nous-mêmes, mais ensuite, loin de nous écarter, suivons la bénie exhortation de l'apôtre: «Et qu'ainsi il mange du pain et boive de la coupe».

En second lieu — et ici je parle de ceux qui professent être chrétiens et qui peut-être le sont réellement — il est évident qu'un pécheur scandaleux, quelqu'un qui est tombé dans le péché, ou qui vit d'une vie de péché, ne saurait avoir sa place à la table du Seigneur. Si son péché ou son état de péché est découvert — et tôt ou tard, il le sera — le commandement du Seigneur est positif: «Otez le méchant du milieu de vous-mêmes» (1 Corinthiens 5: 13). Sa présence souillerait la table du Seigneur, l'associerait au péché, jetterait le blâme et l'opprobre sur le nom de Christ. S'il réussit pour un temps à cacher à l'assemblée la connaissance de ce qu'il est, croit-il échapper aux regards de Celui dont les yeux sont comme une flamme de feu? Qu'il sache qu'en attendant d'être dévoilé, il assume sur lui-même la plus terrible des responsabilités: il mange le pain et boit la coupe indignement; il est coupable — et combien coupable! — du corps et du sang du Seigneur; il mange et boit un jugement contre lui-même, et combien terrible sera ce jugement, s'il ne se juge pas lui-même et ne se repent point!

Examinons brièvement le passage des Corinthiens qui a suggéré ces réflexions. Il s'agit d'une assemblée chrétienne et de ce qui s'y passait à l'égard de la cène. L'apôtre Paul, dans son long séjour à Corinthe, avait enseigné à ces chrétiens ce que lui-même avait reçu du Seigneur touchant le mémorial de sa mort. Les Corinthiens semblaient avoir oublié ce qu'il leur avait dit, et des abus grossiers s'étaient introduits dans la célébration du souper du Seigneur, et lui avaient fait perdre son caractère. De là les enseignements, les avertissements et les exhortations de l'apôtre à ce sujet. Dans d'autres assemblées, et particulièrement de nos jours, les faits peuvent différer, mais les principes restent les mêmes; les avertissements et les exhortations ont donc leur valeur pour nous. La solennité et l'importance de l'acte par lequel nous rappelons la mort du Seigneur, son dévouement pour la gloire de Dieu et notre salut, son amour pour les siens, ressortent des paroles qu'emploie l'apôtre dans ses avertissements. On peut manger le pain ou boire la coupe du Seigneur «indignement». On est ainsi «coupable à l'égard du corps et du sang du Seigneur», qui sont méconnus et méprisés. On «mange et on boit un jugement contre soi-même». Certes, cela est bien propre à faire naître de sérieuses réflexions. De plus, prendre la cène indignement avait des conséquences fatales, et les Corinthiens les subissaient.

Ayant perdu de vue ce que Paul leur avait enseigné, et sans doute sous l'influence de leurs anciennes coutumes païennes, ils en étaient venus à faire de la cène un repas ordinaire pris en commun, lorsqu'ils se réunissaient en assemblée. A ce repas, qui avait plutôt le caractère d'une agape, ils apportaient des sentiments d'égoïsme et d'orgueil, n'ayant point égard aux pauvres. Au lieu de s'attendre pour exprimer leur communion, les premiers arrivés s'empressaient de manger, sans s'inquiéter de ceux qui avaient faim. De plus, ils se livraient à des excès dans le boire, allant jusqu'à s'enivrer, et méprisant et profanant ainsi le caractère saint et pur de l'assemblée de Dieu. Agir de cette manière était manger et boire indignement, car c'était ravaler les choses saintes destinées à attirer les regards de l'âme en dehors des choses terrestres et les fixer sur le Seigneur, au rang de la satisfaction des besoins naturels du corps et même des convoitises. Ils ne discernaient donc pas le corps, c'est-à-dire qu'ils ne distinguaient pas différence qu'il y avait entre ce qui représentait le corps du Seigneur et un repas ordinaire; ils ne voyaient pas ce qui est le fond et le caractère de la cène — la mort du Seigneur — et la conséquence en était que «coupables». à l'égard du corps et du sang du Seigneur, ils tombaient sous l'effet d'un jugement de Dieu qui les atteignait dans leur corps. C'était un jugement temporel: plusieurs étaient faibles et malades, et quelques-uns morts. Le Seigneur les châtiait ainsi, afin qu'ils ne fussent pas condamnés avec le monde. «C'était l'acte du gouvernement de Dieu, dont l'autorité est confiée aux mains du Seigneur qui juge sa propre maison». C'était pour ceux que ce jugement atteignait une perte évidente — être mis ainsi de côté à cause d'une marche qui était contraire à la sainteté que requiert le Seigneur à sa table, et qui profanait ce qui le rappelait au coeur.

Cherchons maintenant à appliquer à nos circonstances actuelles, l'enseignement de l'apôtre. Parmi nous, la cène ne vient pas à la suite d'un repas ordinaire. Nous la célébrons, extérieurement du moins, avec toute la simplicité qu'elle requiert. Il n'y a pas lieu d'y satisfaire son appétit, ni de s'y enivrer. Mais on peut cependant y apporter une disposition d'esprit et de coeur telle qu'elle ne différera pas d'un repas ordinaire aux yeux du Seigneur. On viendra souvent par routine et sans le sentiment du sérieux et de la solennité de cet acte, sans s'être jugé soi-même: c'est une légèreté coupable. Ici, nous citerons les paroles d'un autre: «C'est de la mort d'un Christ livré, que nous nous souvenons. Le corps offert était, pour ainsi dire, devant leurs yeux. Le sang versé du Sauveur réclamait les affections de leurs coeurs. S'ils prenaient part à la cène d'une manière indigne, ils étaient coupables du mépris de ces choses précieuses. Dans cette ordonnance, le Seigneur lui-même, de la manière la plus touchante et au moment même où il était trahi, a arrêté nos pensées sur son corps offert et sur son sang versé pour nous. Mais si Christ attirait ainsi le coeur pour fixer son attention sur ces faits, la discipline s'exerçait aussi d'une manière solennelle en rapport avec cette ordonnance. Le châtiment tombait sur ceux qui méprisaient le corps rompu et le sang du Seigneur, en y prenant part avec légèreté. Ainsi, plusieurs d'entre eux étaient devenus faibles et malades, et plusieurs dormaient, c'est-à-dire étaient morts.

« Il ne s'agit pas de s'enquérir si l'on est digne de participer à la cène». Il est dit que chacun s'éprouve soi-même, et qu'ainsi il mange du pain et boive de la coupe; «ce qui est blâmé, c'est qu'on y participe d'une manière indigne. Tout chrétien, à moins d'un péché qui l'exclue, est digne de participer à la cène, parce qu'il est chrétien». Mais un chrétien peut venir par habitude, parce que la chose est établie ainsi, comme il viendrait à une de ses occupations journalières, à ses repas, par exemple. «Il peut arriver qu'un chrétien vienne sans se juger lui-même, ou sans apprécier comme il le devrait ce que la cène lui rappelle, et ce que Christ y a rattaché. Il n'a pas discerné le corps du Seigneur; et il n'a pas discerné et n'a pas jugé le mal qui est en lui. Dieu ne peut pas nous laisser dans cette insouciance. Si le croyant se juge lui-même, le Seigneur ne le jugera pas; si nous ne nous jugeons pas nous-mêmes, le Seigneur juge; mais lorsque le chrétien est jugé, il est châtié par le Seigneur, afin qu'il ne soit pas condamné avec le monde».

Combien tout cela est sérieux! En sommes-nous suffisamment pénétrés? Plus ces choses sont précieuses, plus le privilège d'y participer est grand, plus est intime et profonde la jouissance qu'elles procurent, plus aussi est grande la responsabilité de ceux qui y prennent part, et si c'est indignement, comment le gouvernement de Dieu ne s'exercera-t-il pas à l'égard de ceux qui méprisent et traitent légèrement ce qui, dans la personne de Jésus, l'a le plus glorifié, et par conséquent ce à quoi il tient?

Citons encore quelques paroles: «Le gouvernement de Dieu est dans les mains du Seigneur qui juge sa propre maison: vérité importante et trop oubliée. Nul doute que le résultat de tout soit selon les conseils de Dieu, qui déploie, dans ce gouvernement, toute sa sagesse, sa patience, et la justice de ses voies; mais ce gouvernement est réel. Dieu veut le bien de son peuple à la fin, mais il veut sa sainteté, un coeur dont l'état réponde à ce qu'il a révélé (et il s'est révélé lui-même), et une marche qui en soit l'expression. L'état normal du chrétien, c'est «la communion avec Dieu selon la puissance de ce qui a été révélé. Si l'on manque à cela, la communion est perdue, et avec elle la puissance pour glorifier Dieu, puissance qui ne se trouve nulle part ailleurs». N'est-il pas évident que s'approcher de la cène avec insouciance, légèreté, sans s'être jugé, par habitude, sans discerner et apprécier ce qu'elle nous rappelle, c'est y venir en dehors de la communion avec Dieu qui prend ses délices en son Fils, que nous oublions en agissant ainsi? Quelle force spirituelle aurons-nous pour marcher dans la sainteté, pour glorifier Dieu qui nous appelle à son propre royaume et à sa propre gloire? Nous serons, au point de vue spirituel, faibles, malades, et même comme morts, sans énergie pour rendre témoignage à Christ dans le monde, n'annonçant pas la mort du Seigneur. «Mais», dit l'auteur que nous citons, «si l'on se juge, il y a restauration, le coeur étant purifié du mal en jugeant ce mal; la communion est rétablie», et avec elle la force pour marcher selon Dieu, et la puissance pour jouir de ce qu'il nous présente en Christ. «Si l'on ne se juge pas, il faut que Dieu intervienne, et qu'il nous corrige et nous purifie par la discipline — discipline qui peut aller jusqu'à la mort» (voyez Job 33, 34; 1 Jean 5: 16; Jacques 5: 14, 15).

Ajoutons encore ces quelques réflexions:

«Ce que nous avons à faire en venant à la cène, n'est pas seulement de juger un mal commis, mais de discerner notre état tel qu'il est manifesté dans la lumière — comme Dieu est dans la lumière — et de marcher dans la lumière. Cela nous préserve de tomber dans le mal, soit en actes, soit en pensée. Mais si nous y sommes tombés, il ne suffit pas de juger l'acte, il faut nous juger nous-mêmes, et l'état du coeur, la tendance, la négligence, qui ont occasionné notre chute dans le mal, en un mot, il nous faut juger ce qui n'est pas communion avec Dieu, ou qui empêche cette communion».

Faisons encore attention aux remarques suivantes: «Le fondement et le centre de tout cela est la position dans laquelle nous sommes envers Christ dans la cène, comme centre visible de communion et expression de sa mort dans laquelle le péché, tout péché, a été jugé. Or nous sommes en rapport avec ce saint jugement; il est notre portion. On ne peut pas mêler la mort de Christ avec le péché. Elle est, quant à sa nature et à son efficace, dont le plein résultat sera manifesté à la fin, l'entière abolition du péché. Elle est la négation divine du péché. Christ «est mort au péché», et cela en amour pour nous. Cette mort est la sainteté absolue de Dieu qui nous est rendue sensible et est exprimée dans ce qui a eu lieu à l'égard du péché. Elle est, sous ce rapport, le dévouement absolu à Dieu pour sa gloire. Apporter le péché ou la négligence dans ce qui la représente, c'est profaner la mort de Christ, qui est mort plutôt que de laisser le péché subsister devant Dieu. Nous ne pouvons être condamnés avec le monde, parce que Christ est mort et qu'il a aboli le péché pour nous, mais apporter le péché à ce qui représente la mort même de Christ, dans laquelle il a souffert pour le péché, est une chose qui ne peut être supportée. Dieu revendique ce qui est dû à la sainteté et à l'amour d'un Christ qui a laissé sa vie pour ôter le péché. On ne peut pas dire: «Je ne viendrai pas à la table», ce serait accepter le péché et abandonner la confession de la valeur de cette mort. Nous nous éprouvons nous-mêmes, et nous venons. Nous rétablissons dans notre conscience les droits de sa mort, car tout est pardonné et expié quant à la culpabilité, et nous venons reconnaître ces droits comme preuve de la grâce infinie.

»Le monde est condamné. Le péché chez le chrétien est jugé; il n'échappe ni à l'oeil, ni au jugement de Dieu. Dieu ne permet jamais le péché; il en purifie le croyant en le châtiant, quoiqu'Il ne le condamne pas, parce que Christ a porté son péché.

»Ainsi, la mort de Christ forme le centre de communion dans l'Assemblée, et elle est la pierre de touche de la conscience, et, pour ce qui regarde l'Assemblée, c'est dans la cène que se trouve l'application de cette vérité».

Puisse chacun de ceux qui, assemblés au nom de Jésus, ont le privilège, chaque premier jour de la semaine, de rappeler la mort du Seigneur, être pénétré de la grandeur de son amour, apprécier toujours plus sa Personne et son œuvre et se souvenir en même temps, pour jouir pleinement de sa communion, que nous sommes à la table de Celui qui est le Saint et le Véritable.