Les enfants des chrétiens

ME 1899 page 141

 

Dieu, dans sa grâce, a voulu placer les enfants de ses enfants dans une position privilégiée bien digne de remarque. Si, d'un côté, ils sont sur le même niveau que tous les enfants des descendants d'Adam, et héritiers de la condition de perdition dans laquelle Adam a entraîné toute sa race (*), d'un autre côté, Dieu montre combien il apprécie ses rachetés, en leur disant que leurs enfants ne sont pas impurs, mais saints (**) (1 Corinthiens 7: 12-14). Il était arrivé à Corinthe ce qui arrive partout. Des personnes mariées étaient saisies par l'Evangile et amenées au Seigneur; mais soit la femme, soit le mari, restait en arrière, de sorte que le mari ou la femme fidèle, qui se trouvaient ainsi unis à une personne inconvertie, se mettaient en peine de savoir s'ils pouvaient continuer d'habiter avec un infidèle. C'est en répondant à cette question que l'apôtre parle des enfants.

(*) Seulement nous savons que non seulement les petits enfants des chrétiens, mais tous les petits enfants, morts avant l'âge de responsabilité, sont sauvés de cet état de perdition héréditaire par l'oeuvre de Christ. Le Seigneur dit, en parlant des enfants: «Car le Fils de l'homme est venu pour sauver ce qui était perdu». Et il ajoute: «Ainsi ce n'est pas la volonté de votre Père qui est dans les cieux, qu'un seul de ces petits périsse». Le Père ne veut pas qu'un seul périsse. Le Fils est venu pour les sauver. Eux ne se refusent pas à être sauvés. Ainsi ils sont placés d'autorité divine dans le salut. De sorte que tous les enfants qui quittent ce monde avant l'âge de responsabilité, sont sauvés pour l'éternité.

(**) Comme le passage de Matthieu 18: 10-14, nous donne la pensée de Dieu à l'égard de tous les petits enfants quels qu'ils soient, de même, le passage de 1 Corinthiens 7: 12-14, nous révèle la pensée de Dieu relativement aux enfants des chrétiens. En Matthieu 18, il s'agit de l'état de perdition héréditaire des enfants, auquel répond l'oeuvre de Christ. Mais en Corinthiens 7, il s'agit d'une mise à part héréditaire des enfants des rachetés.

Il montre que, dans le christianisme, il n'en est pas comme dans le judaïsme. On était Juif par naissance; on devient chrétien par la réception de l'Evangile, qui, par l'Esprit Saint, opère une nouvelle naissance. Les Juifs ne devaient pas s'allier avec les nations païennes. Un Juif qui épousait une gentile se profanait, et ses enfants étaient profanes. On voit, au chapitre 10 d'Esdras, qu'il y eut un grand travail de conscience à cet égard, parmi les Juifs revenus de la transportation, et qu'ils renvoyèrent leurs femmes gentiles et les enfants qu'ils en avaient eus. Mais l'apôtre apprend aux Corinthiens que, dans le christianisme, c'est le contraire: la femme infidèle est sanctifiée par son mari, et le mari infidèle est sanctifié par sa femme. «Autrement», dit-il, «vos enfants seraient impurs, mais maintenant ils sont saints». Seulement il faut remarquer que cette sainteté n'est pas personnelle, c'est une mise à part qui découle du fait qu'au moins l'un des deux parents est un enfant de Dieu. Les enfants des chrétiens participent donc à la position de mise à part de leurs parents, laquelle consiste à faire partie de la maison de Dieu sur la terre, où il habite par son Esprit (Ephésiens 2: 22). C'est cette mise à part des enfants qui leur donne le privilège d'être introduits, comme officiellement, dans cette maison de Dieu par le baptême.

Quelle merveilleuse pensée de Dieu que celle de vouloir que les enfants des chrétiens soient mis à part, comme identifiés avec leurs parents! Aussi voit-on que la Parole les considère positivement comme étant introduits dans cette enceinte de bénédictions ici-bas. L'apôtre, écrivant aux Ephésiens et aux Colossiens, met dans chacune de ses lettres quelques paroles à l'adresse des enfants de parents qui faisaient partie de l'assemblée. Car l'épître aux Ephésiens et celle aux Colossiens n'étaient pas adressées à tous les habitants de la ville d'Ephèse ou de Colosses, mais aux enfants de Dieu rassemblés dans chacune de ces villes, en sorte que les enfants dont parlent ces épîtres, étaient bien les enfants de ceux qui composaient l'assemblée. C'est à ces enfants-là que l'apôtre adresse directement une exhortation: celle d'obéir à leurs parents (Ephésiens 4: 1, et Colossiens 3: 20). Or il est évident que la pensée de Dieu n'était pas de leur faire cette place privilégiée, pour que plus tard, en grandissant, ils s'éloignassent de la bénédiction en se lançant dans le monde et dans le mal. Car il faut remarquer qu'une fois à l'âge de responsabilité, cette position de mise à part n'équivaut pas pour eux à la nouvelle naissance, et n'exclut pas la nécessité de la conversion. Ils sont responsables, comme tout autre, de recevoir Christ pour leur Sauveur. Il faut en eux l'opération de l'Esprit Saint par la Parole, pour produire la nouvelle naissance. Mais, par cette mise à part, ils sont dans l'enceinte où se trouve l'enseignement du Saint Esprit par la Parole, pour arriver au salut. Un enfant juif, ou païen, n'a pas cette prérogative, tant que l'Evangile ne l'a pas atteint, là où il se trouve.

Dieu a donc voulu avoir, dans sa maison ici-bas, les enfants des chrétiens avec leurs parents, et ceux-ci sont tenus de les élever dans la discipline et sous les avertissements du Seigneur (Ephésiens 6: 4). En conséquence, les parents ne doivent faire aucune différence entre leurs enfants et eux-mêmes quant à la séparation du mal et du monde, sous prétexte que leurs enfants ne sont pas encore convertis. Ils doivent les tenir par la main dans le chemin de Dieu, où la grâce les a placés eux-mêmes, chemin qui aboutit au ciel.

Autrefois, Dieu habitait sur la terre au milieu du peuple juif racheté de l'esclavage d'Egypte (Exode 29: 45, 46). Il manifestait sa présence dans le tabernacle et, plus tard, dans le temple. En Israël était donc le seul endroit sur la terre où sa bénédiction se trouvât. Si l'on était dans l'enceinte du peuple d'Israël, on avait part aux privilèges qui s'y trouvaient. Si l'on était en dehors, on n'y avait aucun droit. La Parole parle d'un mur mitoyen de clôture qui bornait l'enceinte de cette bénédiction (Ephésiens 2: 14). C'est à ce point de vue que le Seigneur se plaçait, en disant à la femme cananéenne que les Juifs étaient les enfants, et les gentils les chiens (Matthieu 15: 21-28). Mais Israël a été rejeté (pour un temps); Dieu s'est retiré du milieu d'eux, et aujourd'hui, c'est l'Eglise sur la terre qui est l'habitation de Dieu. Dieu n'habite plus chez les Juifs, et il n'habite pas chez les païens. La maison de Dieu d'aujourd'hui est donc l'enceinte où la bénédiction se trouve. Si l'on est dans cette enceinte, on a part aux privilèges qu'elle renferme; si l'on est dehors, on en est privé. La pensée de Dieu est donc que les enfants des chrétiens y soient, et ceux d'entre eux qui sont baptisés (tous devraient l'être) y sont effectivement.

Mais outre la maison de Dieu, il y a le corps de Christ, l'Assemblée, dont on ne fait partie qu'en étant né de Dieu et scellé du Saint Esprit. Les enfants des chrétiens, en âge d'être responsables et qui sont nés de nouveau, manifestés comme enfants de Dieu, sont membres du corps de Christ. Or les membres du corps de Christ ont leur place à la Table du Seigneur.

Grâces à Dieu, un grand nombre d'enfants de chrétiens se sont laissé enlacer par les cordeaux d'amour du Sauveur, et se trouvent avec leurs parents, ou leur ont succédé dans le témoignage du Seigneur. C'est un grand sujet d'actions de grâces que ce fait, que les témoins du Seigneur se recrutent particulièrement dans les familles des saints. Ceux qui ne veulent point du Seigneur, ou qui veulent goûter un peu des délices du péché (Hébreux 11: 25) avant de se laisser saisir par Christ, sont en somme le petit nombre. Mais malheur à eux, s'ils persistent dans leur refus du Seigneur ou dans leur indifférence. L'Epoux vient; ceux qui seront trouvés n'ayant pas d'huile dans leurs lampes, seront laissés dehors, et la porte sera fermée!

Quant à ceux d'entre les enfants des chrétiens qui sont dociles, et dont l'esprit n'est pas incrédule, il est quelquefois difficile de discerner exactement le moment de leur conversion. Leur foi qui d'abord était, pour ainsi dire, celle de leurs parents, devient personnelle. Ils croient simplement la Parole, acceptant pour eux-mêmes qu'ils sont des pécheurs perdus, et que le Seigneur Jésus est mort pour eux sur la croix. Souvent une oeuvre plus approfondie s'opère en eux après leur conversion, par un travail semblable à celui qui est décrit à la fin du chapitre 7 de l'épître aux Romains, travail auquel succède un affranchissement plus complet. D'autres, moins dociles, plus raisonneurs, manifestant de bonne heure des allures mondaines, passent par un grand travail de conscience, avant d'arriver à posséder la paix: leur conversion est plus manifeste. D'autres encore qui ont, hélas! voulu goûter du monde et du mal, et ont mené une vie plus ou moins déréglée, s'ils se réveillent, doivent nécessairement passer par un travail de conscience semblable à celui d'un mondain corrompu, pire même, en sorte que leur conversion aura un caractère des plus évidents.

Ce que nous venons de dire rend souvent difficile et délicat de décider si un enfant de chrétien qui demande à prendre place à la table du Seigneur, est propre à y être reçu au moment où il le demande. Il est parfois plus difficile de prendre une décision dans un cas semblable, que lorsqu'il s'agit d'une personne du dehors. On se tromperait en pensant que les enfants des chrétiens, à l'âge de responsabilité, sont par le fait même sauvés, et que, lorsqu'ils demandent à entrer dans l'assemblée, il n'y a pas lieu à un examen semblable à celui qui est nécessaire à l'égard d'une personne du dehors. De même il serait dangereux de faire une règle générale pour les admissions des enfants de chrétiens, car, autant de personnes, autant de cas différents et variés. Il faut un discernement tout spirituel pour juger de chaque cas selon Dieu. On a vu de chers enfants (en âge d'être témoins responsables) réellement au Seigneur, ayant une marche irréprochable, mais délicats de conscience, qui n'osaient pas croire qu'ils avaient droit à la table du Seigneur aussi longtemps qu'ils voyaient du mal dans leur coeur, craignant de déshonorer plus tard le Seigneur. Il faut quelquefois pousser ceux-là à prendre leur place, en leur montrant que leurs raisonnements et leurs craintes ne viennent pas du Seigneur. D'autres, plus légers, déclarent qu'ils croient, puisqu'il n'y a qu'à croire, mais on ne trouve pas chez eux de manifestation de la nouvelle vie. Avec ceux-là, on ne doit pas se hâter. Pour ceux qui ont voulu goûter du monde et du mal, il faut qu'il y ait dans leur marche une manifestation bien évidente qu'ils sont régénérés. Si l'on est près du Seigneur, sans faire acception de personnes, ni relativement aux parents, ni relativement aux enfants, il donne le discernement pour chaque cas, car chaque cas doit être jugé selon son mérite.

Pour terminer, nous aimerions attirer l'attention du lecteur sur les versets 4 et 5 du 4e chapitre de l'épître aux Ephésiens: «Il y a un seul corps et un seul Esprit, comme aussi vous avez été appelés pour une seule espérance de votre appel. Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême. Il y a un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tout, et partout, et en nous tous». Il y à là comme trois cercles concentriques, désignant trois positions distinctes. Les mots «il y déterminent chacun d'eux. Nous avons d'abord le cercle intérieur: «Il y a un seul corps et un seul Esprit, etc.». Pour se trouver dans, ce cercle, il faut posséder la nouvelle vie produite par l'Esprit Saint et être scellé de cet Esprit. C'est le cercle de la réalité vitale; il est immuable; il n'y a là que les membres du corps. Le second cercle qui embrasse le premier, désigné par ces paroles: «Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême (*)», est celui de la profession chrétienne. Il est caractérisé par «le Seigneur», par Celui qui a des droits sur ceux qui se réclament de son nom. L'apôtre, écrivant à l'assemblée de Dieu, à Corinthe, aux sanctifiés dans le Christ Jésus, saints appelés, ajoute: «Avec tous ceux qui, en tout lieu, invoquent le nom de notre Seigneur Jésus Christ, et leur Seigneur, et le nôtre» (1 Corinthiens 1: 2). Le même apôtre écrit à Timothée: «Qu'il se retire de l'iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur» (2 Timothée 2: 19). Il est donc Seigneur de tous ceux qui invoquent son nom, que ce soit d'une manière vitale et réelle, ou seulement comme profession.

(*) C'est partout un: un corps, un Esprit, une espérance; un Seigneur, une foi, un baptême; un Dieu.

Autour de ce second cercle, et embrassant les deux cercles intérieurs, s'en trouve un troisième plus vaste que désignent ces paroles: «Il y a un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tout, et partout, et en nous tous». Il comprend toute la création. Son Auteur et son Maître, est le seul Dieu, qui est Père de tous, car tous ont leur origine en lui; il est le Tout-puissant, présent partout, mais, par son Esprit, il est en nous tous, c'est-à-dire en tous ses enfants. Dans ce grand cercle de la création, on entre par la naissance; dans celui de la profession, par le baptême; dans le cercle central, par la nouvelle naissance, qu'accompagne le sceau de l'Esprit Saint. Le cercle de la création comprend nécessairement toutes les créatures, mais les chers enfants de Dieu y occupent la meilleure place, le seul Dieu et Père de tous est en eux. Le cercle de la profession comprend tous ceux qui ont reçu le baptême chrétien, mais les rachetés y occupent la place importante: ils sont l'expression vivante de la profession chrétienne. Le cercle intérieur ne comprend que les membres du corps de Christ. Là ils sont seuls, tout en occupant la meilleure place dans chacun des deux autres cercles, dont ils font aussi partie. Ajoutons que l'on ne peut sortir du cercle de la création que par la mort; de celui de la profession que par l'apostasie; mais du cercle intérieur, grâces à Dieu, on ne peut pas sortir du tout.

En reportant encore une fois notre pensée sur les enfants des chrétiens, nous disons que ceux d'entre eux qui sont nés de nouveau, se trouvent nécessairement dans le cercle intérieur. Puis, ceux-là et ceux qui ne sont pas encore convertis, mais qui sont baptisés, se trouvent dans le cercle de la profession. Quant au cercle de la création, naturellement tous s'y trouvent.

Ces trois cercles assignent à l'enfant de Dieu une position bénie: le Dieu créateur est mon Père; j'ai une profession vitale sur la terre; je suis membre du corps de Christ, et j'ai part à l'espérance de cet appel, qui est de rencontrer bientôt le Seigneur et de lui être rendu semblable pour être dans la gloire avec tous les membres du corps, la plénitude de Celui qui remplit tout en tous (Ephésiens 1: 23). Tous les vrais croyants, membres du corps de Christ, constituent aussi, dans la gloire, l'Epouse, la femme de l'Agneau, ornée pour son mari (Apocalypse 19: 7-9; 21: 2, 8, 9). Aussi: «L'Esprit et l'Epouse disent: Viens!» (Apocalypse 22: 17). Que Dieu préserve tout enfant de chrétien, devenu responsable, d'être trouvé, par sa faute, en dehors de ces glorieuses et éternelles bénédictions!