Quelques aperçus sur l'épître aux Galates

ME 1900 page 448

 

Je désire placer devant le lecteur les grands principes qui sont à la base de la doctrine de l'épître aux Galates. Elle est élémentaire et s'adresse aux églises de Galatie qui couraient le danger imminent d'ajouter le judaïsme au christianisme, de manière à détruire ce dernier. Ce n'est pas la seule époque où l'on a été exposé à ce danger, et où l'on a eu à s'en garantir.

La loi est la pierre de touche de la nature humaine. Elle est destinée à éprouver si l'homme peut par lui-même avoir une justice qui satisfasse Dieu, et elle est une règle parfaite de justice pour lui en tout ce qu'il doit à Dieu et à son prochain. Ainsi elle réclame de l'homme la soumission et l'accomplissement de tout ce qu'elle requiert, sous peine de jugement. L'autorité de Dieu, la soumission de l'homme à ses commandements, et une parfaite règle de conduite pour l'homme dans son état actuel comme enfant d'Adam, tout cela est compris dans le système de la loi.

Mais l'homme, sentant qu'il doit accomplir la loi, sa conscience lui disant que cela est juste, et lui, ne soupçonnant pas sa faiblesse et la profondeur de sa ruine, voyant d'ailleurs qu'en la gardant il serait juste devant Dieu, l'accepte volontiers comme le moyen d'avoir cette justice, de jouir de la faveur divine, et d'être en état de rencontrer le jugement quand il viendra. Si l'on n'est pas réveillé, l'observation des exigences extérieures de la loi satisfait la conscience naturelle; si elle est comprise spirituellement, elle conduit à la découverte de cette loi qui est dans nos membres et qui empêche tout succès dans la tentative d'accomplir la loi.

Mais Dieu ayant établi la loi, c'était une chose très difficile et très délicate de montrer que, comme système, elle avait pris fin, non parce qu'elle n'était pas à sa vraie place et utile aussi pour le but en vue duquel elle avait été donnée, mais pour faire place à un système de grâce désigné et promis longtemps avant que la loi fût établie. Et cela était montré par la découverte qu'être sous la loi, c'était la condamnation et la mort; que la pensée de la chair (la nature avec laquelle la loi a affaire) ne se soumet pas à elle et ne le peut pas, et que nous échappons à la malédiction qu'elle prononce contre nous, non par la destruction de son autorité, mais en mourant comme étant sous son autorité, et cela par le corps de Christ en qui nous nous trouvons dans une nouvelle vie qui est au delà de la condamnation de la loi. La croix rend toutes choses claires.

Mais la confiance en la chair, c'est-à-dire en lui-même, est chère à l'homme naturel, et jusqu'à ce qu'il ait découvert qu'en lui, c'est-à-dire en sa chair, il n'habite point de bien, il lui répugne d'abandonner une règle qu'il sait être juste, et de confesser qu'il est un tel pécheur qu'elle ne peut être que sa condamnation; que la loi du péché est si forte dans ses membres, et lui-même si enclin au mal, que la loi, faible par la chair, ne peut que le condamner. Les docteurs judaïsants, orgueilleux dans leurs propres conceptions, zélés pour la loi comme étant l'honneur de leur nation, ne pouvaient pas supporter sa mise de côté, nécessaire pour établir la justice et la vie avec Dieu. Le ministère qui jugeait la chair dans le Juif et dans le gentil, et qui affranchissait le dernier de tout assujettissement au système juif, leur était intolérable. L'homme s'attache toujours à la loi en alléguant d'une manière spécieuse les droits et la sainteté de Dieu, jusqu'à ce qu'il ait reconnu expérimentalement (en découvrant le vrai caractère de la chair) son véritable état, c'est-à-dire que «tous ceux qui sont sur le principe des oeuvres sont sous la malédiction».

C'est pour cela que Paul, soit quant à son propre ministère, soit quant à la place que tenait la loi, était en conflit perpétuel avec ces docteurs judaïsants. Plus nous serons familiers avec ses écrits, plus nous verrons combien il était harassé par cette lutte, et combien ses épîtres insistent sur ce point que l'on ne peut mêler les deux systèmes, la loi et la grâce. C'est la racine de toute sa doctrine, dans ses développements les plus élevés, aussi bien que dans ses premiers éléments.

Les conseils de Dieu dans le second Homme, furent formés avant la création du monde et avant la responsabilité de l'homme, et ils ne furent révélés qu'après la venue du second Homme et l'accomplissement par lui de l'oeuvre sur laquelle était fondée la mise à exécution de tous ces conseils. La doctrine de l'apôtre, pleinement exposée, fait ressortir le fondement et le but de ces conseils dans leur entier développement en Christ, et, quant à nous, dans une position nouvelle et céleste de l'homme en Lui et avec Lui.

D'un autre côté, le véritable état du premier homme, responsable de sa marche dont la loi était la règle parfaite, donnait à l'apôtre l'occasion d'insister sur les premiers éléments de la vérité et sur la nécessité de mettre de côté le premier homme, et d'appuyer sur l'application de la loi, qui ne pouvait l'atteindre qu'aussi longtemps qu'il était en vie. Le but en vue était de substituer à la loi la grâce et la justice divine, non parce que la loi était mauvaise, mais parce qu'étant juste et bonne, elle apportait la mort et la condamnation à ceux qui étaient placés sous elle. Christ s'est chargé de cette responsabilité pour nous sur la croix; il a magnifié la loi en en portant la malédiction, et nous amène, morts au péché et vivants en Lui, en relation avec un autre — c'est-à-dire avec Lui-même ressuscité d'entre les morts. Dans la mort de Christ, Dieu a condamné le péché dans la chair, et a introduit à la place de l'homme ce qui était divin en justice et en vie, lorsque Christ était sur la croix pour le péché, un sacrifice pour le péché. L'épître aux Galates nous fait pénétrer dans ces éléments, sans toucher aux conseils dont, l'accomplissement est basé sur la croix. Ces derniers se trouvent ailleurs, d'une manière très complète, dans l'épître aux Ephésiens.

La première partie de l'épître aux Galates traite de l'indépendance du ministère de Paul. Il n'était ni de l'homme, ni par l'homme. Des autres apôtres, il n'avait rien reçu. Les révélations qui lui étaient données, ainsi que son autorité apostolique, venaient directement du Seigneur. Mais je n'ai pas le dessein de m'arrêter sur ce point. A la fin du chapitre 2, l'apôtre présente, en paroles sérieuses et pressantes, toute la portée de la loi relativement à l'Evangile, et comment ils se rattachent l'un à l'autre; mais je parlerai de cela en terminant. Pour le moment, je montrerai comment Paul place la loi et l'Evangile en opposition l'une avec l'autre.

Sauf par le témoignage des hommes pieux et des prophètes, Dieu n'intervient pas jusqu'au déluge, quoique l'histoire de la perversité de l'homme ait été complète en Adam et en Caïn. Cette histoire se termine par le jugement du déluge. Après cela, Dieu commence de nouveau à agir à l'égard de l'homme, afin de déployer ses voies envers lui dans l'état où il se trouvait. Elles se poursuivirent jusqu'à ce que la preuve complète de l'état irrémédiable de l'homme eût été fournie par le rejet de Christ. La première de ces voies, après la dispersion des hommes et leur division en nations, peuples et langues, fut le choix que fit Dieu d'Abraham, en le séparant de tout pour Lui-même et en le faisant être le tronc et la racine d'une nouvelle famille sur la terre, la famille de Dieu selon la chair ou selon l'Esprit: la première, Israël, la dernière, l'unique semence, Christ. Laissant pour le moment Israël de côté, la semence selon la chair, envers qui les promesses s'accompliront certainement en grâce, nous avons, au chapitre 12 de la Genèse, la promesse faite à Abram, et confirmée à sa semence au chapitre 22. Cela se rapporte à toutes les nations qui devaient être bénies dans sa semence, l'unique semence, dont Isaac offert et ressuscité en figure est le type. Or cette promesse, confirmée comme elle le fut à Isaac (chapitre 26), ne peut pas être annulée, et — ce qui est plus directement le point — rien ne peut y être ajouté. La loi ne pouvait pas y être annexée comme condition.

Les promesses se rattachant à l'observation de la loi étaient conditionnelles, et par conséquent il y avait deux parties; Dieu n'était qu'une de ces parties. L'accomplissement de ces promesses conditionnelles dépendait de la fidélité des deux parties, et par conséquent n'avait pas de stabilité. La promesse de Dieu faite à Abraham dépendait de Lui seul. Sa fidélité à Lui en était la sécurité, et elle ne pouvait faire défaut. Or la loi, venue quatre cent trente ans après, ne pouvait invalider la promesse confirmée, et ne pouvait rien y ajouter. La loi n'est pas contre les promesses de Dieu, mais a été introduite en attendant la semence à qui la promesse a été faite; elle fait ressortir la transgression et n'apporte pas la justice. La loi n'était pas de la foi; sa bénédiction était pour ceux qui étaient sous elle, s'ils l'accomplissaient. La promesse, et la foi dans la promesse et Celui qui était promis, allaient ensemble. La loi apportait avec elle une malédiction; Christ, la semence promise, a été fait malédiction pour ceux qui étaient sous la loi, et lorsque le christianisme (la foi) fut venu, ils ne furent plus du tout sous la loi. La loi était une chose intermédiaire ajoutée et qui n'a plus eu place lorsque la semence promise est venue. La loi et la grâce sont mises en contraste, parce que d'abord quant à la justification, la loi fait contraste avec la promesse, la foi et la semence. Un homme sous la loi est tenu de l'accomplir tout entière. Si un chrétien se place sur ce terrain-là, il est déchu de la grâce; Christ ne lui profite de rien. Un homme qui regarde à la loi perd le bénéfice de la grâce de Dieu; si la justice vient par la loi, Christ est mort en vain.

Mais le contraste est aussi appliqué à une marche selon la piété. L'Esprit est opposé à la chair. Dans leur nature ils sont contraires l'un à l'autre. Nous avons à marcher par l'Esprit, ayant devant nous les choses de l'Esprit, pour pratiquer ses oeuvres, pour produire ses fruits; mais si nous sommes conduits par l'Esprit, nous ne sommes pas sous la loi. Ce qui caractérise l'Esprit, c'est une vie, une puissance et un objet célestes, en contraste avec la loi qui s'occupe en vain de la chair, au lieu de nous en délivrer. Ainsi, quant à une marche pieuse, aussi bien que pour la justice, la loi est contrastée avec la grâce. D'un côté, il y a la grâce, la promesse, la foi, Christ et l'Esprit, et, je puis ajouter, une position de justice devant Dieu; de l'autre côté, c'est la loi réclamant l'obéissance de la chair qui ne s'y soumet pas et dont la loi ne peut nous délivrer. La loi ne donne pas la vie. Si elle avait pu donner la vie, alors en réalité, la justice aurait été par la loi. C'est ce contraste qui rend l'épître aux Galates si frappante.

Voici le résultat. Etant conduits par l'Esprit, nous ne sommes pas sous la loi. Quelle est donc notre position? Nous, par l'Esprit, nous attendons l'espérance qui lui appartient, c'est-à-dire la gloire. Comment cela? Etant justes en Christ, nous avons reçu l'Esprit, et, dans la puissance de l'Esprit, nous attendons ce qu'il révèle si richement. Le contraste entre la chair et l'Esprit et la puissance de ce dernier, laisse la loi sans utilité pour la marche, soit en puissance, soit en caractère. La loi est une règle et une règle parfaite pour la chair, mais non pour l'Esprit. Celui-ci révèle les choses célestes, Christ dans la gloire, et il nous transforme à l'image de Christ. Cela n'était en rien l'objet de la loi.

Quels sont donc, d'après l'épître, le vrai usage et la réelle puissance de la loi? Quand certaines personnes vinrent de chez Jacques, Pierre ne voulut plus manger avec les gentils. Paul lui résista en face, la faiblesse de l'un cédant à cause de la présence des Juifs, la foi énergique de l'autre tenant ferme la vérité de l'Evangile. Pierre avait abandonné la loi comme moyen d'obtenir la justice, et il y retournait, réédifiant ce qu'il avait détruit; il avait donc été transgresseur en le détruisant. Or Christ l'avait conduit à le faire. Christ était donc ministre de péché? Quel était l'effet de la loi? Nous avons par grâce, dans le sérieux d'une sainte conscience, sa véritable action. Elle opère la mort. La loi avait tué Paul (c'est-à-dire dans sa conscience, devant Dieu). Autrefois, il avait été vivant sans elle. Mais par la loi, il était mort à la loi, et cela afin que, d'une autre manière, dans une autre vie, il pût vivre à Dieu, ce que la chair ne pouvait pas. Si la loi avait eu simplement son effet en lui, ç'aurait été la malédiction et la condamnation aussi bien que la mort, mais l'effet avait été en Christ, qui était mort pour lui sous la malédiction de la loi; et lui était crucifié avec Christ, étant ainsi mort, mort à la loi et au péché en même temps, en ayant fini avec le vieil Adam, auquel la loi s'appliquait. Néanmoins, Paul vivait maintenant. Cependant ce n'était pas lui (ce qui aurait été la chair), mais Christ vivait en lui.

La loi, la condamnation et la chair avaient pris fin ensemble (pour ainsi dire) quant à la position de Paul devant Dieu, et avaient été remplacées par Christ et l'Esprit, sur lequel il insiste fortement dans ce qui suit (chapitre 3). Mais il y a plus; il y a un objet placé devant l'âme: «Ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu qui m'a aimé et qui s'est livré lui-même pour moi». C'est là le grand point. Cette Personne divine, qui nous a tant aimés et s'est livrée pour nous, que nous connaissons ainsi en parfaite grâce, dans un amour qui a été jusqu'à la mort, cette Personne-là est l'Objet sanctifiant de la vie tout entière. Nous vivons par elle. La loi ne nous présentait aucun objet, pas plus qu'elle ne donnait vie, ou force. Ici, nous avons ce qu'il y a de plus précieux, un coeur rempli d'amour, et qui conduit à se confier en un Objet qui rend le coeur semblable à Lui-même. Le principe d'action, la grâce, la vie, la puissance, l'objet, tout est en contraste avec la loi qui ne présente aucune de ces choses, et qui, par conséquent, ne peut pas plus produire la piété qu'elle ne peut donner une justice devant Dieu.

L'épître met donc en contraste la grâce, la promesse, la foi, Christ, l'Esprit, pour la justice comme pour la marche, avec la loi et la chair. La loi était utile en ce qu'elle nous apportait la mort, la mort du vieil homme, la condamnation ayant été subie par Christ, en qui nous sommes morts et à la loi et à la chair. Une nouvelle position, la vie et la justice, au delà de la croix, est ce en quoi nous sommes entrés, avec Christ dans le ciel devant nous. J'espère que les grands principes de l'épître sur ce point auront été assez clairement exposés pour être une aide à ceux qui voudraient étudier l'épître elle-même.