Veillez pour prier (1 Pierre 4: 7)

Quelques mots spécialement au sujet des réunions de prières

ME 1901 page 247

 

La prière est sans contredit un des privilèges les plus précieux de l'enfant de Dieu. Elle est sa grande et indispensable ressource en tout temps. C'est dans la prière que tous les sentiments de la nouvelle nature qui est en lui, se donnent libre cours et trouvent leur expression. Dans la prière, l'homme prend sa vraie place, celle d'être dépendant, et reconnaît celle qui appartient à Dieu qui nous donne toutes choses et qui fait tout pour nous. Toutefois nous ne pouvons occuper cette place devant Dieu qu'en vertu de l'oeuvre de Christ qui nous a amenés à Dieu, le Père et il nous faut aussi pour la prière la puissance de l'Esprit Saint qui nous a été donné, qui forme en nous le sentiment de tous nos besoins selon Dieu, et qui enfin nous rend capables de les exprimer à Dieu comme il convient.

Notre intelligence entre pour sa part dans l'acte de la prière, selon ce qui est dit en 1 Corinthiens 14: 15: «Je prierai avec l'esprit, mais je prierai aussi avec l'intelligence»; mais dans ce passage, elle est nommée après l'esprit qui est la partie supérieure de notre être immatériel, celle dans laquelle Dieu se fait connaître par son Esprit. L'intelligence est donc la partie subordonnée. Si je puis dire ainsi, l'Esprit Saint se sert de notre intelligence pour exprimer nos demandes, ainsi nous savons ce que nous demandons. Mais notre intelligence ne peut se servir du Saint Esprit, puisque dans la prière elle est la partie subordonnée et dépendante. Aussi n'y a-t-il rien de plus misérable et de plus insipide qu'une prière qui sort de l'intelligence seule, si éloquemment dite qu'elle soit. Au contraire, quel bien pour l'âme, quel soulagement pour le coeur tant de celui qui la prononce que de ceux qui l'entendent, qu'une prière dite simplement, sans phrases destinées à produire de l'effet, sans aucune recherche de langage, exposant des besoins formés et exprimés par le Saint Esprit et ressentis dans le coeur! Une telle prière est un vrai rafraîchissement. Car dans la prière, le croyant se décharge de tout souci, de toute crainte et de toute inquiétude; le faible y trouve de la force, le simple de l'intelligence, l'âme perplexe une direction, et le combattant la victoire. Aussi Paul, tout grand apôtre qu'il était, réclamait-il dans presque toutes ses épîtres le secours des prières des assemblées et des saints en particulier, et il leur attribuait les succès de ses travaux et la victoire dans ses combats (voyez Romains 15: 30, etc.; 2 Corinthiens 1: 11; Ephésiens 6: 18; Colossiens 4: 2-4; 2 Thessaloniciens 3: 1-4). Nous voyons aussi que l'état désiré par l'apôtre pour les Philippiens (1: 27-30), est réalisé de la manière la plus efficace par la prière.

La prière ne sert pas seulement à nous dégager et à nous décharger de tout ce qui pourrait nous inquiéter et nous oppresser; elle est aussi un moyen pour garder nos coeurs et nos pensées dans le Christ Jésus (Philippiens 4: 1), et c'est la voie normale pour être fortifié dans le témoignage et dans le service au milieu d'un monde où tout nous est opposé (Daniel 10: 18-20; Actes des Apôtres 4: 29-31; 13: 3; 14: 26), même dans les afflictions et sans les mauvais traitements que l'on peut avoir à endurer pour le nom du Seigneur (Jacques 5: 13-18).

Si nous considérons ce que notre adorable Sauveur communiquait à ses disciples au sujet de l'Esprit Saint, cet autre Consolateur, et des avantages qui découleraient de sa présence en eux et avec eux, nous voyons qu'il insiste surtout sur le fait qu'ils pourraient avoir des rapports directs avec le Père en priant par le Saint Esprit, faisant ainsi valoir le beau nom de Jésus en relation avec tous leurs besoins (Jean 16: 23, etc.). Ces passages et d'autres, tels que Ephésiens 6: 18, et Jude 20, nous montrent que l'état normal d'un chrétien animé et guidé par le Saint Esprit, est d'être souvent et même toujours en prières et en supplications: «Priez sans cesse», dit l'apôtre (1 Thessaloniciens 5: 17).

En considérant toutes ces précieuses vérités qui se rapportent à la prière, on ne peut qu'être profondément affligé quand on constate la négligence et l'indifférence que les chrétiens de nos jours manifestent généralement à l'égard de la prière et des réunions de prières. Comment s'étonner qu'il y ait autant de faiblesse, tant de chutes, tant de choses de nature à courber nos fronts dans la poussière et à nous couvrir de honte! Dieu n'abaisse pas ceux qui sont humbles, mais il abaisse les orgueilleux. Si l'on ne sait pas et si l'on ne veut pas l'honorer et le satisfaire, en s'abaissant et en fléchissant les genoux, en le priant et en s'humiliant devant Lui, il a des moyens pour produire ce que nous Lui refusons, et souvent c'est en nous frappant dans les choses auxquelles nous tenons le plus, ou dans les personnes qui nous touchent de plus près. C'est douloureux à constater, mais il est vrai aussi que Dieu aime les sacrifices qui sont un esprit brisé. «O Dieu!» dit le psalmiste, «tu ne mépriseras pas un coeur brisé et humilié». — «L'Eternel est près de ceux qui ont le coeur brisé; il sauve ceux qui ont l'esprit abattu». — «Il guérit ceux qui ont le coeur brisé, et il bande leurs plaies» (Psaumes 51: 17; 34: 18; 147: 3).

Il est vrai qu'il y a eu en tout temps des Anne (Luc 2: 36, 37) et des Epaphras (Colossiens 4: 12, 13), et il y en aura toujours, grâces au Seigneur qui suscite de telles âmes ferventes et persévérantes dans la prière, ayant à coeur les besoins des saints et des assemblées. Mais en général, l'esprit de prière va plutôt en s'affaiblissant, témoin le petit nombre de ceux qui assistent aux réunions de prières, là où il en existe; car c'est une chose pénible à constater que plusieurs assemblées n'en ont pas une. On invoque toutes sortes de raisons pour s'excuser et même se justifier, mais ces raisons ne soutiennent pas l'épreuve de la Parole, ni la lumière du sanctuaire de Dieu.

Je ne puis à cet égard entrer dans tous les détails. Je me bornerai à signaler quelques-unes des raisons qu'on allègue, et je le fais pour aider à les juger, afin qu'elles ne soient plus une entrave pour ceux qu'elles auraient retenus de la fréquentation des réunions de prières.

Il y a des chrétiens qui prétendent que les réunions de prières sont plutôt l'affaire de frères doués, spirituels et âgés. Ils se trompent grandement, car que fait-on principalement dans ces réunions, sinon de demander à Dieu ce qui nous manque. Elles sont donc bien la place de ceux qui reconnaissent qu'ils manquent de dons et de spiritualité. Faut-il qu'ils restent dans cet état? Où iront-ils chercher le remède, sinon auprès de Dieu, dans la prière avec les saints? L'âge non plus n'a rien à faire en cela. Un jeune converti ne devait pas avoir la charge de surveillant, mais tous les chrétiens d'une assemblée ont leur place dans la réunion de prières.

Nous lisons dans le livre des Actes (4: 23 et suivants), que les apôtres Pierre et Jean ayant été relâchés, «vinrent vers les leurs et leur rapportèrent tout ce que les principaux sacrificateurs et les anciens leur avaient dit. Et l'ayant entendu, ils élevèrent d'un commun accord leur voix à Dieu». Puis au verset 31: «Et comme ils faisaient leur supplication, le lieu où ils étaient assemblés fut ébranlé, et ils furent tous remplis du Saint Esprit, et annonçaient la parole de Dieu avec hardiesse». Quelle bénédiction que celle qui répondit à leurs prières! Quelle perte pour ceux des leurs (s'il y en eût) qui ne se trouvaient pas là! Ils ne participèrent pas à la merveilleuse réponse de l'amour de Celui que l'on venait invoquer.

Au chapitre 12: 12-17 du même livre des Actes, nous avons un autre exemple. L'apôtre Pierre, miraculeusement délivré de la main de ses adversaires, «se rendit à la maison de Marie, mère de Jean surnommé Marc, où plusieurs étaient assemblés et priaient». Pierre leur raconta comment le Seigneur l'avait fait sortir de prison et leur dit: «Rapportez ces choses à Jacques et aux frères». Certainement Jacques et les frères auxquels il fallait rapporter ces choses, ne jouirent pas de la réponse que Dieu venait d'accorder, dans la même mesure que ces «plusieurs» qui l'avaient imploré. Ces deux cas me semblent bien montrer que l'on ne se prive jamais d'une réunion de prières sans faire une perte, et inversement que jamais on n'y participe sans y trouver un gain positif pour l'âme.

D'autres croyants avoueront qu'ils n'ont pas le temps d'assister aux réunions de prières. Tous leurs moments sont pris, disent-ils, surtout certains jours, comme le samedi soir, par exemple, où l'on a du travail à terminer, et où les mères de famille ont tout à préparer en vue du dimanche. Ces raisons-là peuvent être prises en considération, et l'assemblée doit s'attacher à fixer les heures et les jours de réunion, de manière à faciliter autant que possible à tous le moyen de s'y rencontrer. Mais dire que l'on n'a pas le temps ni le moyen d'assister aux réunions de la semaine, c'est beaucoup dire. J'admets qu'il y ait des exceptions, et le Seigneur en tient compte, Lui qui a dit: «Elle a fait ce qui était en son pouvoir». Jamais il ne nous demande quoi que ce soit au delà de notre pouvoir. Mais c'est Lui qui peut fournir et le temps et les forces et les moyens de participer à tout ce qui contribue à nous maintenir dans un bon état d'âme, et à être en bénédiction à son Assemblée. C'est là certainement une des choses que nous pouvons demander au Père en son nom, et elle nous sera accordée (Jean 16: 23).

Bien des chrétiens pourraient aussi apporter une simplification dans leur manière de vivre, et auraient ainsi plus de temps pour s'occuper du Seigneur et de sa Parole. Dût-on même prendre quelques moments sur son sommeil, n'en vaudrait-il pas la peine? N'est-il pas dit: «Veillez pour prier»? On y trouverait certes une compensation dans le calme, la paix, la bénédiction dont on jouirait. Beaucoup d'âmes qui prétendent manquer de temps, seraient plus vraies, si elles disaient qu'elles n'éprouvent aucun besoin d'aller aux réunions de prières. Cela me conduit à examiner des raisons que l'on n'avance pas en général.

Nous avons fait remarquer que la prière dépend de l'action de l'Esprit Saint en nous. Or cette action est très facilement entravée. Par exemple, si l'on ne se juge pas et qu'on laisse libre cours à ses tendances et à ses affections charnelles et mondaines, l'Esprit est obligé de nous occuper du mal qui est en nous, et de celui qui est autour de nous, lorsque nous nous y sommes attachés. Comment dans une telle condition l'Esprit Saint pourrait-il former en nous des sentiments pour Christ et pour les siens? Sentiments qui seuls ont la puissance de nous faire désirer et aimer les réunions de prières, et qui nous y conduisent, nous faisant surmonter les obstacles qui se présenteraient, et rejeter toute excuse pour ne pas nous y rendre. C'est aux réunions de prières que les sentiments formés par l'Esprit prennent leur essor et s'épanchent en requêtes, en supplications et en actions de grâces. Si le coeur n'est pas sensible aux intérêts de Christ, au bien de son Assemblée, et à celui de ses rachetés en particulier, s'il est tiède ou froid à cet égard, on n'est pas attiré dans ces réunions, on n'y éprouve que de l'ennui, tandis que, dans le cas contraire, si notre coeur brûle pour Christ et les siens, et aussi pour ceux qui ne jouissent pas du bonheur de le connaître, nous trouvons dans nos rassemblements pour la prière, un charme tout spécial, un soulagement et une consolation pour le coeur, une bénédiction précieuse.

En étudiant dernièrement l'évangile de Matthieu, j'ai été frappé d'un fait qui se rapporte à ce que je viens de dire. Dans les chapitres 5, 6 et 7, le Seigneur a exposé les principes du royaume. Puis dans les chapitres 8 et 9, nous le voyons descendu dans la plaine et déployant sa grâce et sa puissance en faveur de plusieurs personnes, dont chacune présentait un des caractères de l'homme irrégénéré. Mais aux versets 36-37 du chapitre 9, Jésus voit les foules, et «il fut ému de compassion pour elles, parce qu'ils étaient las et dispersés, comme des brebis qui n'ont pas de berger. Alors il dit à ses disciples: La moisson est grande, mais il y a peu d'ouvriers: suppliez donc le Seigneur de la moisson, en sorte qu'il pousse des ouvriers dans sa moisson». Voilà donc un sentiment qui remplissait le coeur du Seigneur; il était ému de compassion envers les pécheurs qui périssaient, et il désire que les siens partagent ce sentiment qui les pousserait à prier pour les âmes inconverties. Chers amis, afin de pouvoir faire des demandes conformes aux désirs du Seigneur, il faut que nos sentiments soient conformes aux siens. C'était le cas chez l'apôtre Paul (voyez 2 Corinthiens 11: 28, 29; 2 Timothée 2: 8-10), ainsi que chez Epaphras qui était dans un grand travail de coeur pour ceux de Colosses, de Laodicée et d'Hiérapolis. Lorsque l'Esprit Saint peut nous occuper de Christ et de ce qui Lui est cher dans ce monde, savoir de son Assemblée et du salut des âmes, alors on vient aux réunions de prières avec des coeurs remplis de besoins et des bouches disposées à les présenter à Celui qui peut faire infiniment plus que tout ce que nous demandons et pensons, selon la puissance qui opère en nous. A Lui soit la gloire dans l'Assemblée, dans le Christ Jésus, pour toutes les générations du siècle des siècles! Amen (Ephésiens 3: 20, 21).

Encore un mot avant de terminer. On rencontre souvent des frères connus et estimés pour être pieux et spirituels, et qui n'ouvrent jamais la bouche pour prier dans les réunions. Si on leur demande la raison de leur mutisme, ils répondent les uns qu'ils n'ont pas le don de la prière; les autres qu'ils craignent de ne pas pouvoir s'exprimer assez bien; d'autres encore avouent franchement qu'ils sont trop timides pour oser prier en public.

Je répondrai aux premiers qu'il n'est jamais question dans la Parole d'un don pour prier. Prier est une capacité spirituelle que tous les enfants de Dieu possèdent, car c'est à tous que vont les exhortations: «Priez sans cesse»; «persévérez dans la prière», etc. Aux seconds, je dirai que Dieu regarde au coeur et non à la forme sous laquelle on s'adresse à Lui. Il n'a pas besoin de belles paroles, ni d'éloquents discours quand nous Lui présentons nos besoins. Au contraire, plus nous parlerons à Dieu simplement et mieux cela vaudra, car alors le plus faible et le plus ignorant pourra nous comprendre et dire Amen à notre prière ou à notre action de grâces. Enfin je ferai remarquer aux derniers qu'il ne faut pas croire que le Seigneur n'emploie que des hommes non timides, témoin Moïse, cet homme de Dieu si éminent, qui reculait devant la mission que l'Eternel lui confiait, parce qu'il n'était pas éloquent, et qu'il avait une bouche et une langue pesantes. «Qui suis-je?» disait-il, «pour que j'aille vers le Pharaon». Mais Dieu lui dit: «Je serai avec ta bouche, et je t'enseignerai ce que tu diras». Jérémie ne dit-il pas aussi: «Ah! Seigneur, voici, je ne suis qu'un enfant, et je ne sais pas parler». Et l'Eternel l'encourage en lui disant: «Ne dis pas: Je suis un enfant; tout ce que je te commanderai, tu le diras». Ne voyons-nous pas également que Timothée semble avoir été un homme timide, puisque Paul lui dit: «Dieu ne nous a pas donné un esprit de crainte», ou de timidité. Pour prier en public, comme pour accomplir toute autre chose, Dieu peut choisir les choses faibles pour couvrir de honte les choses fortes (1 Corinthiens 1: 27) Bien des frères qui maintenant ouvrent la bouche dans les réunions et y sont en bénédiction, l'ont fait la première fois avec émotion et tremblement, mais l'expérience qu'ils ont faite de la grâce du Seigneur pour les aider et les soutenir, les a peu à peu enhardis, et ils ont fini par obtenir une entière liberté pour devenir la bouche même d'assemblées nombreuses. Rappelons-nous que c'est l'ennemi des âmes qui cherche à mettre des entraves pour empêcher ou gêner l'enfant de Dieu dans l'exercice de la prière. S'il parvient à nous y rendre indifférents, ou à ce que nous y apportions de la négligence, il a remporté une grande victoire sur nous. C'est pourquoi, frères, soyons sobres de toutes manières, physiquement et moralement, et veillons pour prier.

Puis faisons attention à deux choses importantes. D'un côté nous avons le privilège de nous approcher de Dieu comme d'un Père qui nous aime et dont la faveur est sur nous, ses enfants. Nous pouvons donc venir, en toute liberté et avec confiance, Lui exposer tous nos besoins, prier pour tous les saints, ceux qui sont près et ceux qui sont loin, ceux que nous connaissons et ceux qui nous sont inconnus, prier aussi pour tous les hommes, car cela est bon et agréable à Dieu, notre Sauveur, qui veut que tous les hommes soient sauvés et viennent à la connaissance de la vérité (1 Timothée 2). Mais d'un autre côté, rappelons-nous que nous avons à servir Dieu dans la prière comme en toute autre chose «d'une manière qui lui soit agréable, avec révérence et crainte» (Hébreux 12: 28), à élever vers Lui des mains pures, sans colère, sans raisonnement et sans douter. Qu'il y ait en nous le sentiment que nous rappelle l'Ecclésiaste: «Prends garde à ton pied, quand tu vas dans la maison de Dieu… Ne te presse point de ta bouche, et que ton coeur ne se hâte point de proférer une parole devant Dieu; car Dieu est dans les cieux, et toi sur la terre: c'est pourquoi que tes paroles soient peu nombreuses» (Ecclésiaste 5: 1, 2).

«Priant par toutes sortes de prières et de supplications, en tout temps, par l'Esprit, et veillant à cela avec toute persévérance et des supplications pour tous les saints» (Ephésiens 6: 18).