Ephèse – Le commencement & L'avertissement

 

Ephèse – Le commencement & L'avertissement 1

Ephèse – Le commencement 1

Ephèse — L'avertissement 16

 

Ephèse – Le commencement

ME 1902 page 41

Lisez Actes des Apôtres 19

 

La parole de Dieu trace, d'une manière bien digne d'attirer notre attention, l'histoire de l'assemblée d'Ephèse depuis son commencement (Actes des Apôtres 19), jusqu'à son déclin (Apocalypse 2), et même, on peut dire, jusqu'au temps où sa lampe est ôtée de son lieu. Ce fait remarquable ne se présente pour aucune autre des assemblées mentionnées dans l'Ecriture, aussi l'on peut y voir comme une image de l'histoire morale de l'Eglise universelle de son commencement à sa fin. C'est ce qui donne un grand intérêt à l'étude de ce qui nous est rapporté de l'assemblée d'Ephèse dans la parole de Dieu.

Le chapitre 19 des Actes nous apprend le commencement de cette assemblée. L'apôtre Paul avait passé une première fois à Ephèse, en allant de Corinthe à Jérusalem. Il n'y resta que peu de temps, et la seule chose qui nous est dite à cette occasion, c'est qu'il entra «dans la synagogue et discourut avec les Juifs» (Actes des Apôtres 18: 19). Cependant il y avait laissé ses fidèles amis Aquilas et Priscilla, et c'est là que l'éloquent Apollos, qui ne connaissait que le baptême de Jean, fut instruit plus exactement par eux de la voie de Dieu, de ce qui concerne les conseils de Dieu accomplis en son Fils bien-aimé.

Plus tard, comme il en avait exprimé l'intention, Paul revint à Ephèse. Ce qui le frappa d'abord en y commençant son ministère qui devait s'y continuer pendant près de trois années, fut la présence de personnes que la Parole mentionne sous la désignation de «certains disciples». La qualité de disciples qui leur est donnée montre qu'ils n'étaient pas simplement des Juifs attachés à la loi, ignorants de la venue de Christ, ni des Juifs d'entre ceux qui avaient rejeté le Messie. Ils étaient, comme Apollos, des croyants d'entre les Juifs, mais qui n'avaient été baptisés que du baptême de Jean. Ils étaient ses disciples et leur connaissance n'allait pas au delà de l'enseignement de leur maître. Or Jean était le précurseur du Christ. Sa mission était de préparer le chemin devant Lui, et pour cela, il prêchait le baptême de repentance pour ou en vue de la rémission des péchés. Il annonçait la venue du Seigneur qui accomplirait, comme Agneau de Dieu, l'oeuvre nécessaire pour la rémission des péchés, et qui baptiserait de l'Esprit Saint. Ceux qui avaient cru son message venaient à lui, reconnaissant et confessant leurs péchés. Ils étaient alors baptisés d'un baptême qui supposait en eux la repentance dans l'attente de la venue de Christ.

Mais la repentance n'est pas le salut. Elle suppose bien, lorsqu'elle est réelle, la nouvelle naissance, une nouvelle nature, capable d'apprécier les choses de Dieu, d'y prendre plaisir et de les désirer, ce que la chair, l'homme naturel, ne peut pas. Mais la repentance n'affranchit pas. C'est un pas vers Dieu, mais ce n'est pas la proximité de Dieu. Qu'est-ce que la repentance? N'est-ce pas le changement qui se fait dans tout notre être moral quand, par la Parole et l'action de l'Esprit Saint, nous sommes amenés en la présence de Dieu? C'est ce que nous trouvons dans les paroles de Job, après que l'Eternel s'est montré à lui dans sa grandeur: «Mon oreille avait entendu parler de toi, maintenant mon oeil t'a vu: c'est pourquoi j'ai horreur de moi, et je me repens dans la poussière et dans la cendre» (Job 42: 5, 6). Là, dans cette présence sainte, dans cette lumière pure, nous voyons et jugeons nos voies passées, les péchés que nous avons commis. Cette vue produit à la fois l'horreur de nous-mêmes et une sainte douleur, celle d'avoir offensé Dieu; c'est «la tristesse selon Dieu», compagne de la repentance à salut. C'est ainsi que David s'écrie: «Contre toi, contre toi seul, j'ai péché», et que Pierre pleure son reniement.

La vraie repentance doit avoir pour effet de conduire à Christ pour la rémission des péchés; de plus, lorsqu'elle est réelle, elle produit l'abandon du mal et le désir de plaire à Dieu et de le servir. C'est la conversion. Mais ce désir, si l'âme est mal enseignée, et n'est pas conduite directement à Christ, fait que souvent elle se place sous la loi et s'efforce de l'accomplir. Elle fait alors des expériences qui lui montrent ce qu'elle est, le péché qui est en elle, et son impuissance à le vaincre et à s'en débarrasser (chose que du reste nous avons tous à apprendre une fois ou l'autre). Ce n'est plus la repentance, sans doute, mais un état qui peut la suivre. En conséquence de la nouvelle nature qu'elle possède, de la vie qu'elle a reçue, elle voit toute la beauté, la sainteté et la justice de la loi, le droit qu'elle a sur nous, et, désirant plaire à Dieu, elle a la volonté de s'y conformer. «Je prends plaisir», dit-elle, «à la loi de Dieu, selon l'homme intérieur», cette partie de notre être immatériel où l'Esprit de Dieu produit la vie. Mais, hélas! quand elle veut faire le bien, elle ne le peut pas, et le mal qu'elle ne voudrait pas faire, qu'elle juge et qu'elle hait, elle l'accomplit. Elle trouve que le péché habite en elle, qu'il la domine et sous la loi duquel elle se sent captive; elle est sans force pour briser ses liens et le vaincre. Expérience douloureuse, mais salutaire. Ce péché en moi, comment être affranchi de sa puissance? Or, de même que la repentance conduit l'âme à Christ pour la rémission des péchés, de même ce travail dans l'âme vivifiée, mais sous la loi, l'amène à Celui en qui se trouve la pleine rédemption — la rémission des péchés, et l'affranchissement de la puissance du péché. «Misérable homme que je suis!» s'écrie l'âme dans l'angoisse de la lutte, «qui me délivrera?» Et son regard se tournant vers le Libérateur, le fardeau tombe, le conflit cesse, et soulagée, elle dit: «Je rends grâces à Dieu par Jésus Christ notre Seigneur» (Romains 7: 12-25).

Nous ne disons pas que les disciples de Jean à Ephèse aient passé par cet exercice d'âme, cela est possible, mais peut-être, puisque cela fait partie de l'enseignement de Paul, n'était-il pas hors de propos d'en dire un mot applicable dans les temps où nous vivons.

Les «certains disciples» d'Ephèse avaient été baptisés du baptême de Jean, du baptême de repentance, en vue de la rémission des péchés, et dans l'attente de Celui qui accomplirait cette rémission, mais ils n'étaient pas chrétiens. Ce n'était qu'une préparation pour le devenir, et Dieu ne voulait pas les laisser où ils étaient, car l'oeuvre qu'il a commencée, il l'achève. Etre né de nouveau n'est pas le christianisme, bien que la nouvelle naissance soit toujours nécessaire, puisque sans elle on ne peut ni voir le royaume de Dieu, ni y entrer; se repentir, dans le sens réel du mot, n'est pas le christianisme, quoique la repentance doive avoir lieu. Le fils prodigue rentre en lui-même, se juge, et revient vers son père en confessant son péché; mais il n'est délivré de ses doutes et de ses craintes que dans les bras de son père. Alors il connaît l'amour et goûte les joies du pardon.

Le christianisme, c'est Christ, Celui qui était dès le commencement; Christ connu dans sa Personne et dans son oeuvre, reçu dans le coeur par la foi et dans la puissance de l'Esprit Saint. Le christianisme est caractérisé par trois choses qui le différencient du judaïsme auquel Paul avait constamment affaire.

1° Au lieu d'un Messie terrestre, établissant son royaume sur la terre, et dispensant des bénédictions d'ici-bas — ce qui aura lieu pour les juifs dans les temps du millénium — le christianisme présente un Christ céleste qui, venu sur la terre, est descendu dans la mort sous le poids de nos péchés dont il s'était chargé, qui en est sorti ressuscité, victorieux de la mort et de la puissance de celui qui avait le pouvoir de la mort, et qui s'est assis en vertu de son oeuvre à la droite de la Majesté dans les hauts lieux. Le croyant, mort et ressuscité avec Lui, occupe en Lui cette position: il est assis en Lui dans les lieux célestes, il est participant de sa vie céleste et jouit en Lui des bénédictions spirituelles dans les lieux célestes.

2° La révélation de Dieu comme Père par le Fils, est un second caractère du christianisme. C'était un privilège inconnu aux saints de l'Ancien Testament, qui connaissaient Dieu comme le Dieu Fort, Tout-puissant, et comme l'Eternel, mais non comme Père du Fils unique. Nous le connaissons ainsi. Bien plus, ayant reçu le Fils par la foi en Lui, nous sommes introduits dans la relation d'enfants, nés de Dieu, possédant la vie éternelle. Le Dieu et Père du Seigneur Jésus Christ est notre Dieu et notre Père.

3° Le troisième caractère spécial et distinctif du christianisme est la venue du Saint Esprit envoyé du ciel par le Seigneur pour être en nous et demeurer avec nous éternellement (Jean 14). L'Esprit Saint, bien qu'agissant dans les hommes de l'Ancien Testament dans certaines occasions, ne faisait pas sa demeure en eux d'une manière permanente. Actuellement, il demeure dans le croyant comme sceau de son adoption, arrhes de son héritage, onction de sa consécration, lui donnant la jouissance de sa relation avec le Père, la connaissance et la réalisation de sa position en Christ et de son union avec Lui en haut, et étant la puissance de la vie divine qu'il a reçue, afin de jouir des bénédictions spirituelles et célestes en Christ qui lui appartiennent, et afin de marcher selon la relation et la position qui sont ses privilèges. Le corps du croyant est le temple de l'Esprit Saint; et c'est Lui aussi qui forme de tous les croyants un tabernacle — une habitation de Dieu où il demeure. Et enfin, unis à Christ par l'Esprit Saint, leur ensemble constitue le corps de Christ dont ils sont les membres et Lui la tête dans le ciel. Voilà, nous le répétons, le caractère distinctif du christianisme: la présence permanente sur la terre de l'Esprit Saint et son habitation dans l'Eglise et dans le croyant.

Or le ministère de Paul était celui de l'Esprit. Il ne considérait comme chrétien que celui qui avait l'Esprit de Christ. «Si quelqu'un», dit-il, «n'a pas l'Esprit de Christ, celui-là n'est pas de lui» (Romains 8). De là vient sa question à ces «certains disciples»: «Avez-vous reçu l'Esprit Saint après avoir cru?» Quelque chose dans leur langage décelait à l'apôtre, plein de discernement, qu'ils n'étaient pas dans l'état normal chrétien. C'est ainsi que souvent, dans un entretien, le serviteur de Dieu discerne qu'une âme n'est pas affranchie, faute de connaissance. Ces disciples ignoraient même si l'Esprit Saint était; non pas qu'ils ne crussent, comme tous les Juifs orthodoxes, à l'existence de l'Esprit de Dieu; Jean le Baptiseur d'ailleurs leur avait enseigné que le Christ qu'ils attendaient baptiserait de l'Esprit Saint, mais ils ne savaient pas qu'il fût venu. A combien de ceux qui se nomment chrétiens la question de Paul ne pourrait-elle pas être faite? Non pas qu'il soit possible qu'un vrai croyant, purifié par la foi au sang de Jésus, n'ait pas reçu l'Esprit Saint, mais combien n'y en a-t-il pas qui ignorent ce glorieux et précieux privilège de la présence et de la demeure de l'Esprit Saint en eux, et par conséquent ne jouissent pas ou très faiblement des grâces et des bénédictions qu'il apporte. Et dans la chrétienté, en général, comme cette grande et fondamentale vérité est oubliée ou défigurée ou même niée! Les églises orthodoxes confessent la personnalité et la divinité de l'Esprit Saint, et son action dans la nouvelle naissance et la vie du chrétien, mais sa demeure permanente ici-bas et dans le croyant est ignorée, preuve en soit la demande que l'on fait du Saint Esprit. D'un autre côté, le rationalisme plus ou moins accentué fait de l'Esprit Saint une simple influence divine. Combien on s'est éloigné de l'enseignement de l'Ecriture!

L'apôtre, après s'être enquis de la cause de leur ignorance, enseigne ces disciples qui, sans doute, sont heureux d'apprendre que Christ était venu, selon ce que Jean avait annoncé, qu'il avait accompli son oeuvre de grâce et que l'Esprit Saint avait été envoyé. Ils reçoivent les paroles de Paul, ils croient non plus en un Christ à venir, mais en un Christ venu et glorifié, ils cessent d'être dans un état d'attente quant à la rémission des péchés; en croyant, ils la possèdent avec la paix qui l'accompagne et avec la délivrance qui se trouve en Christ.

Mais avoir cru ne suffit pas — je ne dis pas pour le salut, car «vous êtes sauvés par la foi» — mais il faut, après avoir cru du coeur à justice, la confession de bouche à salut, c'est-à-dire la déclaration publique que l'on adhère à Christ mort et ressuscité. Ils sont donc baptisés pour le nom du Seigneur Jésus, suivant ce qui est dit par le Seigneur: «Celui qui aura cru et qui aura été baptisé sera sauvé». Ils sont «baptisés pour sa mort», en signe qu'ils sont ensevelis avec Lui, qu'ils ont part avec Lui dans sa mort, de même qu'ils ont aussi part avec Lui dans sa résurrection, suivant l'enseignement de Romains 8.

Une autre idée se rattache au baptême. C'est le rite qui introduit sur le terrain du christianisme, basé d'ailleurs sur la mort et la résurrection du Seigneur. C'est la porte pour entrer dans la maison de Dieu sur la terre, là où le Seigneur exerce ses droits, suivant ce qui est dit: «Il y a un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême». Nous avons là le cercle de la profession extérieure du christianisme. On reconnaît Christ comme Seigneur qui seul a autorité sur nous; on reçoit les vérités qui sont seules l'objet de la foi; et enfin, par le baptême, le seul baptême au nom du Seigneur, on déclare adhérer à ce seul Seigneur et à cette foi unique, la même pour tous ceux qui se trouvent dans ce cercle de la profession extérieure qui d'ailleurs peut être réelle.

Introduits ainsi dans la maison et possédant une foi réelle au Seigneur Jésus non plus seulement attendu, mais venu et actuellement glorifié, les douze disciples entrent dans la jouissance du privilège distinctif du christianisme. Paul leur impose les mains, et l'Esprit Saint vient sur eux. Ils font maintenant partie du «seul corps», formé par le «seul Esprit» qui les unit à Christ dans le ciel, et ils jouissent de la «seule espérance» de leur appel, appel céleste qui les a tirés du monde, appel céleste comme leur espérance qui est le retour de Christ pour les prendre avec Lui. C'est le cercle de la vie où ils se trouvent, et pas seulement celui de la profession extérieure. Ils réalisent ce que l'apôtre écrivait plus tard aux Ephésiens: «Ayant entendu la parole de la vérité, l'évangile de votre salut, auquel aussi ayant cru, vous avez été scellés du Saint Esprit de la promesse, qui est les arrhes de notre héritage». Le sceau de l'Esprit, que Dieu pose sur nous, comme étant ses enfants, nous assure la possession de notre héritage céleste, en même temps que, comme arrhes, il nous en donne les avant-goûts.

Les douze disciples, après avoir reçu l'Esprit Saint, sont revêtus des dons de puissance qui leur sont communiqués par l'Esprit: ils parlent en langues et prophétisent. C'était alors le signe extérieur, visible à tous, de l'action de l'Esprit qui demeurait en eux. C'était le témoignage manifeste rendu à Christ dans la gloire. Nous voyons le même effet dans le cas des disciples à la Pentecôte, dans celui des Samaritains convertis et celui de Corneille. L'Esprit Saint, le Consolateur, était venu sur la terre, et sa présence s'affirmait ainsi. Les dons de puissance ont disparu; nous n'avons plus à les attendre, mais la présence de l'Esprit Saint ici-bas, sa demeure dans le croyant et dans l'Eglise, sont choses qui nous restent avec tous les privilèges spirituels qui s'y rattachent. Le Seigneur a dit: «Le Père vous donnera un autre Consolateur pour demeurer avec vous éternellement, l'Esprit de vérité». L'Esprit Saint aujourd'hui comme alors scelle chacun de ceux qui ont saisi par la foi la pleine rédemption qui se trouve dans le Christ Jésus, qui le connaissent comme leur justice et leur sainteté devant Dieu, et qui, dans la conscience de leur relation d'enfants avec le Père, crient par l'Esprit d'adoption: «Abba, Père!» Il y a plus. Si l'Esprit ne se montre plus en eux par des dons de puissance, il n'en est pas moins la puissance de leur vie spirituelle, et se manifeste dans leur marche. Nous le voyons dans les premiers chrétiens à Jérusalem. Non seulement «ils persévéraient dans la doctrine et la communion des apôtres, dans la fraction du pain et les prières», mais l'action de l'Esprit en eux se montrait par leur amour les uns pour les autres, leur dévouement, la joie qui les remplissait, la sainteté de leur conduite, de sorte que leur témoignage dans le monde était une chose réelle. Or l'apôtre disait aux Galates: «Marchez par l'Esprit, et vous n'accomplirez point la convoitise de la chair… Si nous vivons par l'Esprit, marchons aussi par l'Esprit… Or le fruit de l'Esprit est l'amour, la joie, la paix, la longanimité, la bienveillance, la bonté, la fidélité, la douceur, la tempérance». Et quand ces choses sont manifestes dans le chrétien, n'est-ce pas un témoignage aussi puissant de la présence de l'Esprit que des dons de puissance? C'était afin que ce témoignage fût rendu que Paul écrivait aux Ephésiens: «N'attristez pas le Saint Esprit de Dieu par lequel vous avez été scellés pour le jour de la rédemption», et: «Soyez remplis de l'Esprit».

Rien n'a changé à cet égard depuis les jours de Paul. Le christianisme de l'apôtre est toujours le seul vrai christianisme. Il n'y a rien à en retrancher, ni rien à y ajouter. Mais on en a perdu de vue la portée; on l'a rabaissé et perverti. Pour le salut, on a voulu que les oeuvres y aient une part; l'assurance précieuse d'un salut présent et éternel a été traitée de présomption; on a oublié le grand fait de la présence permanente de l'Esprit Saint dans le croyant et dans l'Eglise, et en bien des choses on a donné satisfaction à la chair qui tend toujours à se glorifier, même et surtout dans le domaine religieux. Or, «si quelqu'un est en Christ, c'est une nouvelle création; les choses vieilles sont passées, toutes choses sont faites nouvelles». C'est ce que déclare Paul, ou plutôt l'Esprit de Dieu; la chair n'a rien à voir, ni à faire dans ce saint domaine.

Connaissez-vous, cher lecteur, ce christianisme-là? Marchez-vous dans ces choses nouvelles, toutes du ciel, toutes «du Dieu qui nous a réconciliés avec Lui-même par Christ?» En jouissez-vous? C'est Christ en haut, ayant fait la purification des péchés; Christ votre justice et votre sainteté; Christ en qui nous sommes devant Dieu, saints et irréprochables en amour; Christ par qui nous sommes adoptés de Dieu son Père, devenus des enfants bien-aimés; Christ qui a envoyé l'Esprit Saint pour demeurer en nous et nous unir à Lui comme membres de son corps, qui est l'Assemblée. Et l'Esprit Saint nous donne la jouissance de tous ces précieux privilèges; il prend des choses excellentes de Christ pour nous les communiquer et remplir nos coeurs de pensées du ciel, de la gloire de Christ et de l'espérance bienheureuse d'être bientôt là avec Lui. Il est en nous pour encourager et soutenir nos âmes pendant notre pèlerinage ici-bas, afin que nous glorifiions Christ. Toutes ces choses, cher lecteur, sont-elles pour vous et en vous des réalités dans lesquelles votre coeur se meut avec bonheur en se les appropriant, et qui exercent leur action puissante pour vous séparer du monde et vous faire vivre pour Christ?

C'est là ce que Paul enseignait aux douze disciples, à Ephèse et partout où il était conduit pour annoncer l'Evangile. Nous avons ainsi le caractère du ministère de Paul. C'est sur cette base que commence l'assemblée à Ephèse, c'est aussi maintenant le seul fondement — Jésus Christ et tout ce qui se rattache à sa Personne, et l'Esprit Saint qui nous le révèle.

Paul continue son oeuvre à Ephèse, et d'abord il entre dans la synagogue où il parle avec hardiesse, discourant pendant trois mois et persuadant ses auditeurs des choses du royaume de Dieu. Bien qu'apôtre de l'incirconcision, «établi prédicateur et apôtre et docteur des nations», Paul ne manquait jamais d'annoncer la Parole de la grâce tout premièrement aux Juifs, l'ancien peuple de Dieu. Deux raisons portaient Paul à le faire: d'abord l'affection ardente qu'il portait à ceux qui étaient du même sang que lui, «ses parents selon la chair», pour lesquels il éprouvait une grande tristesse et une continuelle douleur à cause de leur incrédulité, pour lesquels il aurait souhaité même d'être séparé du Christ afin qu'ils fussent sauvés, et ensuite le souvenir des paroles du Seigneur qui avait dit aux apôtres de prêcher la repentance et la rémission des péchés en commençant par Jérusalem. Dieu n'avait pas «rejeté son peuple, lequel il avait préconnu». Il y avait un résidu selon l'élection de la grâce. Paul en était un exemple, et c'est pourquoi il annonçait d'abord la bonne nouvelle de la paix à ceux qui étaient près, dans une plus grande proximité de Dieu, à cause de leurs privilèges, quitte à se tourner vers les gentils, si les Juifs refusaient la grâce qui leur était offerte (voyez Actes des Apôtres 13: 44-47).

C'était les choses du royaume de Dieu que, dans sa prédication, Paul annonçait aux Juifs, c'était d'elles qu'il s'efforçait de les persuader, en s'appuyant, comme il le faisait toujours, sur les Ecritures.

Mais qu'est-ce que le royaume de Dieu et les choses qui s'y rapportent? Est-ce quelque chose de différent de ce que Paul avait annoncé aux douze disciples, et de ce qu'il prêchait aux gentils? Nullement; Paul n'avait pas deux Evangiles. Toujours ce qu'il présentait aux âmes était l'Evangile de Dieu, la puissance de Dieu en salut à tout croyant, l'Evangile de la grâce de Dieu, l'Evangile de son Fils, de Christ, de la gloire de Christ, l'Evangile de la gloire du Dieu bienheureux. C'était là ce qui lui avait été confié, ce qu'il nomme son Evangile. Et cet Evangile comprenait les choses du royaume de Dieu.

Le royaume de Dieu est une expression qui se rencontre plus d'une fois dans les discours et dans les écrits de Paul. Il prêchait en annonçant le royaume de Dieu; il rendait témoignage du royaume de Dieu; il avertissait les croyants que l'entrée dans le royaume de Dieu est accompagnée de beaucoup d'afflictions. Le royaume de Dieu n'est pas l'Eglise, bien qu'elle y soit comprise; c'est la sphère où l'autorité morale de Dieu est établie et reconnue, où les principes de Dieu dominent et règlent tout, et c'est une sphère de bénédictions que nul ne peut voir, c'est-à-dire comprendre, et où nul ne peut entrer, c'est-à-dire en jouir, sans avoir la vie de Dieu, sans être né de nouveau, selon la parole de Jésus. Le royaume de Dieu existe déjà sur la terre pour la foi, il y sera un jour établi en puissance, quand Christ régnera. C'est le royaume du Fils de l'homme. Mais nous voyons qu'il y a aussi pour nous «le royaume du Fils de son amour», dans lequel le Père nous introduit après nous avoir délivrés du pouvoir des ténèbres. C'est évidemment le côté céleste du royaume. Et enfin, nous avons le royaume de Dieu dont la chair et le sang ne peuvent hériter, ce royaume céleste pour lequel Paul dit qu'il sera conservé (1 Corinthiens 15: 50; 2 Timothée 4: 18).

Ce qu'est le royaume de Dieu moralement maintenant, Paul nous le dit. Ce n'est pas Christ Roi dans ce monde, ni Christ Roi sur les coeurs, etc., jamais Christ n'est présenté, comme Roi dans la dispensation présente. Mais «le royaume de Dieu», dit l'apôtre, «n'est pas manger et boire, mais justice, et paix, et joie dans l'Esprit Saint» (Romains 14). Le royaume de Dieu ne consiste donc pas en cérémonies, rites et ordonnances, en oeuvres extérieures satisfaisant la chair et établissant pour l'homme une propre justice; mais en une justice, une paix, et une joie produites dans l'âme et manifestées dans la vie par la puissance de l'Esprit Saint. Ce sont là les choses dont Paul persuadait les Juifs et qui reposaient sur Christ, le Roi rejeté et monté en haut, et sur l'oeuvre accomplie par Lui sur la croix, ainsi que sur sa résurrection et sa séance à la droite de Dieu

Combien différentes étaient les pensées des Juifs à l'égard du royaume de Dieu, et comme il était à propos que Paul les persuadât selon la vérité des choses qui s'y rapportent! Ils attendaient un royaume selon leurs vues charnelles, se rattachant à un Messie terrestre. Combien n'avaient-ils pas besoin de cette prédication qui les persuadât de choses et d'espérances meilleures que celles de la terre, des choses d'un royaume qui ne peut être ébranlé (Hébreux 12: 28). Mais à l'égard de ce royaume, ceux qui portent le nom de chrétiens n'ont-ils pas aussi besoin qu'on les persuade des «choses du royaume de Dieu»? Combien il y en a qui, mettant leur confiance dans les oeuvres, et s'imaginant pouvoir en accomplir, par leur propre force, agréées de Dieu, oublient que le royaume de Dieu est «justice, paix et joie dans l'Esprit Saint»; la justice pratique envers Dieu et les hommes, la sainteté dans la marche résultant d'une vie nouvelle produite par l'Esprit Saint; la paix avec Dieu, fruit de la foi justifiante en Christ, qui ôte toute crainte de l'âme, l'amour de Dieu étant versé dans le coeur par l'Esprit Saint, et la joie dans la communion du Père et du Fils par l'Esprit. Ce sont là les choses du royaume de Dieu, les bénédictions qui se trouvent dans cette sphère bénie, mais que l'Esprit dispense à ceux-là seuls qui sont nés de nouveau, car l'on n'en jouit qu'en possédant la vie de Dieu.

Durant trois mois le fidèle serviteur de Dieu, plein d'amour pour ceux de sa nation, les presse d'accepter Christ comme Seigneur et Sauveur. Mais la vérité annoncée réveille toujours l'opposition, et, à Ephèse comme ailleurs, Paul rencontre l'hostilité des docteurs juifs et de leurs adhérents. Si un certain nombre de ses auditeurs reçoivent l'Evangile, les autres s'endurcissent et sont rebelles à la voix de l'Esprit Saint parlant par la bouche de l'apôtre. «Gens de col roide et incirconcis de coeur et d'oreilles», disait Etienne au sanhédrin, «vous résistez toujours à l'Esprit Saint». Pour ces Juifs, le royaume de Dieu, c'était leur affranchissement du joug détesté des nations, et leur prééminence sur les autres peuples sous leur chef national, le Messie; c'était la gloire, l'honneur et les richesses terrestres; c'était leur descendance d'Abraham et leur propre justice donnant droit à ces bénédictions temporelles, sans l'humiliation qu'ils auraient dû ressentir à la vue de leur état misérable et au souvenir des péchés de leurs pères et des leurs, cause de cet état. Et que leur proposait Paul? C'était le royaume du crucifié où l'on entre, non par ses propres oeuvres ou en vertu de privilèges extérieurs, mais par la nouvelle naissance, la repentance envers Dieu et la foi en Jésus. Il proclamait l'égalité devant Dieu des Juifs et des gentils, tous pécheurs et ainsi sur le même pied, car «il n'y a pas de différence: tous ont péché, et tout le monde est coupable devant Dieu», mais aussi l'égalité devant la grâce, «le même Seigneur de tous étant riche envers tous ceux qui l'invoquent». Paul annonçait que la propre justice n'a aucune valeur devant Dieu, car, disait-il, «vous êtes sauvés par la grâce, par la foi, et cela ne vient pas de vous, c'est le don de Dieu, non pas sur le principe des oeuvres, afin que personne ne se glorifie». Et il disait aux Juifs: En cherchant à établir votre propre justice, «vous ignorez la justice de Dieu», cette justice «qui est par la foi de Jésus Christ envers tous, et sur tous ceux qui croient». Tout cela mettait à néant les prétentions des Juifs et humiliait leur orgueil. Il aurait fallu qu'ils reconnussent, comme l'avaient fait ceux qui furent convertis le jour de la Pentecôte, le crime qu'ils avaient commis en crucifiant Jésus, qu'ils se prosternassent devant Lui en confessant qu'il était le Fils de Dieu. Cela, ils ne le voulaient pas. En eux aussi s'accomplissait la parole de Jésus: «Vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie». Refusant d'écouter et de recevoir la parole de la vérité, leur conscience s'endurcissait, ils se rebellaient contre Dieu et son Christ, et décriaient les chrétiens devant la multitude, semant contre eux des choses fausses.

C'est ce qui a été constamment la tactique des ennemis de la vérité depuis le commencement du christianisme jusqu'à nos jours. Les récits des Actes nous le montrent (Actes des Apôtres 16: 20, 21; 17: 6, 7, etc.). On accusait les chrétiens d'être rebelles aux lois. Jésus lui-même ne fut-il pas accusé d'être un séditieux? Mais des calomnies d'un autre genre étaient répandues contre les disciples de Christ. La doctrine de la grâce servait de prétexte, comme encore aujourd'hui, à accuser leur moralité. «Nous sommes calomnieusement accusés», dit Paul, «et quelques-uns prétendent que nous disons: Faisons du mal, afin qu'il en arrive du bien». Combien le contraire est vrai! «Demeurerions-nous dans le péché, afin que la grâce abonde?» dit encore l'apôtre. «Qu'ainsi n'advienne!» répond-il. «Nous qui sommes morts au péché, comment vivrons-nous encore dans le péché?» Bien loin de pousser au relâchement, la doctrine de la grâce reçue dans le coeur est le fondement de la vraie moralité, de la sainteté pratique. En effet, «la grâce de Dieu qui apporte le salut est apparue à tous les hommes, nous enseignant que, reniant l'impiété et les convoitises mondaines, nous vivions dans le présent siècle sobrement, et justement, et pieusement» (Tite 2). Et l'apôtre, revenant encore sur ce sujet dans l'épître aux Romains, dit: «Ne livrez pas vos membres au péché comme instruments d'iniquité, mais livrez-vous vous-mêmes à Dieu, comme d'entre les morts étant faits vivants, et vos membres à Dieu comme instruments de justice. Car le péché ne dominera pas sur vous, parce que vous n'êtes pas sous la loi, mais sous la grâce». Heureuse liberté du chrétien qui échappe par la grâce à l'esclavage de la loi et à la domination du péché, afin d'être libre de se livrer tout entier à Dieu, et d'employer tout son être à le servir. «Quoi donc! pécherions-nous, parce que nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce? Qu'ainsi n'advienne». Il semble à l'homme naturel que le seul frein pour empêcher de pécher, soit la loi. Et c'est tout le contraire. La loi excite la convoitise, le désir de l'enfreindre; la grâce affranchit de la puissance du péché et nous asservit à la justice, nous fait marcher dans la sainteté, non par contrainte, car alors elle serait la loi, mais en produisant une vie nouvelle dans laquelle agit l'amour, et alors les commandements du Seigneur ne sont pas pénibles, mais agréables (Romains 12). L'apôtre Pierre aussi, en exhortant les chrétiens à avoir une conduite honnête parmi les nations, fait allusion «aux choses dans lesquelles ils médisent de vous, comme de gens qui font le mal», et il leur dit que, «comme forains et étrangers», ils aient à «s'abstenir des convoitises charnelles, qui font la guerre à l'âme»; et en parlant de Christ qu'il propose comme modèle, il ajoute: «Qui lui-même a porté nos péchés en son corps sur le bois, afin qu'étant morts aux péchés, nous vivions à la justice» (1 Pierre 2). Ainsi tombe, devant les déclarations divines, l'accusation de faire servir la grâce à la tolérance du péché. Prenons seulement garde de ne pas donner prise dans notre conduite à des accusations de la part du monde, et de ne pas rejeter avec légèreté nos fautes et nos manquements sur le fait que la chair est en nous, car sous la grâce le péché n'a pas de domination sur nous; Christ notre modèle est aussi notre force, et l'Esprit Saint, la puissance de notre vie. Heureux sommes-nous si le monde ne médit de nous qu'à cause de notre christianisme (1 Pierre 4: 14-16).

Les Juifs à Ephèse disaient du mal de «la voie», mot par lequel était désigné le chemin, la ligne de conduite que suivaient les chrétiens, différente totalement du paganisme qu'elle condamnait, et du judaïsme qu'elle mettait de côté. Il ne semble pas d'ailleurs que ce fût un terme de mépris de la part des adversaires pour désigner les chrétiens (*). La «voie», c'était le chemin que suivaient les disciples de Christ en dehors du monde, à la suite de leur Sauveur, et où l'Esprit Saint les guidait, et cette voie était la bonne, la voie étroite du ciel.

(*) Dans aucun des cinq ou six passages où se trouve le mot voie, il n'a le sens d'un mot appliqué par dérision aux chrétiens. L'écrivain sacré semble l'employer uniquement pour distinguer leur marche de celle des autres hommes, Juifs ou païens.

Paul pouvait-il rester au milieu de ceux qui, en disant du mal de «la voie», blasphémaient le nom du Seigneur, attaquaient les saintes doctrines de la foi, et déversaient le mépris sur ceux qui les professaient? Paul pouvait-il laisser ceux qui avaient cru mêlés avec ces blasphémateurs et ces rebelles? C'était impossible. Remarquons, en passant, qu'il n'y a de pire opposition que celle qui vient des gens prétendus religieux. Les adversaires de la vérité sont, ou les incrédules, ou les hommes attachés à une religion qui gratifie la chair; ces derniers sont les ennemis les plus acharnés d'une doctrine qui met l'homme à néant pour glorifier Dieu seul, et qui, par conséquent, blesse leur orgueil et renverse leurs prétentions. Paul connaissait bien ces gens-là. Que lui restait-il à faire après leur avoir présenté la vérité d'après les Ecritures, et voyant que délibérément ils la repoussaient? Dieu, dans sa Parole, nous trace le chemin dans des occasions semblables, c'est la séparation. Paul se retire d'avec les Juifs incrédules, tout moyen de les persuader ayant échoué, et il sépare en même temps les disciples.

Le grand principe de la séparation se retrouve partout dans les voies et dans la parole de Dieu. Dès les premières lignes de la Bible, il est comme annoncé par ce que Dieu fait dans l'ordre matériel des choses. «Dieu», est-il dit, «sépara la lumière des ténèbres». Dieu avait vu que la lumière était bonne; les ténèbres ne l'étaient donc pas; elles ne pouvaient coexister ensemble. Et il en est de même dans l'ordre moral. La lumière, c'est le bien, c'est la pureté, la sainteté, c'est Dieu même: «Dieu est lumière et il n'y a en lui aucunes ténèbres». Les ténèbres, c'est le mal, le domaine du mal. Et pour être du côté de Dieu, avec Dieu, il faut se séparer du mal, quel qu'il soit. Le chrétien est délivré du pouvoir des ténèbres sous lequel il était tenu; il était autrefois ténèbres, il est maintenant lumière dans le Seigneur; il a à marcher comme enfant de lumière dans la bonté, la justice et la vérité, en se séparant des oeuvres infructueuses des ténèbres, avec lesquelles il ne doit avoir rien de commun (Ephésiens 5). Nous voyons aussi le principe de séparation dans l'Ancien Testament. Abraham est appelé à se séparer de son pays, de sa parenté, de sa famille. Il doit quitter les ténèbres du paganisme pour marcher avec Dieu dans la lumière de sa présence. Israël est séparé des nations et doit en rester séparé, un peuple mis à part pour Dieu. Moïse se sépare du camp souillé par l'idolâtrie. Le juste se met à part des méchants (Psaumes 1; 16). Et lorsque les Juifs ont rejeté Christ, Pierre dit à ceux qui avaient cru: «Sauvez-vous de cette génération perverse». Il fallait, en croyant en Christ, se séparer du paganisme, si on y avait marché, et c'était ce qui attirait sur les croyants la haine et la persécution.

Aujourd'hui, combien n'est-il pas nécessaire de considérer et suivre les exhortations de la Parole à se séparer du mal? Qu'elles sont puissantes les paroles de l'apôtre en 2 Corinthiens 6: 14-18! «Ne vous mettez pas sous un joug mal assorti avec les incrédules; car quelle participation y a-t-il entre la justice et l'iniquité? ou quelle communion entre la lumière et les ténèbres? et quel accord de Christ avec Béliar? ou quelle part a le croyant avec l'incrédule? et quelle convenance y a-t-il entre le temple de Dieu et les idoles? Car vous (chrétiens) êtes le temple du Dieu vivant». Dans ces versets, il s'agit de l'incompatibilité des principes du monde avec ceux de Dieu, de là résulte pour le chrétien la nécessité de rester séparé de ce qui est opposé à Dieu et à Christ. Aussi le passage se termine-t-il par ces paroles pressantes: «Sortez du milieu d'eux, et soyez séparés, dit le Seigneur, et ne touchez pas à ce qui est impur, et moi, je vous recevrai». Ce qui est impur est tout ce qui vient de la chair, qui lui plaît et la satisfait, tout ce qui est du monde, convoitise de la chair, convoitise des yeux, orgueil de la vie; il faut en être séparé. C'est d'une séparation morale et intérieure qu'il s'agit, mais séparation qui se manifeste dans la marche. Le chrétien est mis à part pour Dieu et pour Christ — élu en sainteté de l'Esprit — mais à quoi cela servirait-il s'il ne marchait pas selon cette séparation? Comment serait-il un témoin pour Christ ici-bas, pour Christ qui n'était pas du monde et qui a dit aux siens; «Vous n'êtes pas du monde»? Soyez séparés dans votre vie tout entière, n'ayez aucune part avec le monde, ses principes, ses associations, ses plaisirs; soyez résolument et en tout pour Christ seul. Si je ne vis plus, moi, mais Christ en moi, ai-je à montrer dans ma vie autre chose que Christ? Si Lui est mon trésor dans le ciel, chercherai-je quelque chose dans le monde? Ah! cher lecteur, autant pour la gloire de Christ que pour votre propre bonheur, «soyez séparé, ne touchez pas à ce qui est impur (ni en actes, ni en désirs, ni en pensées), et moi, dit le Seigneur, je vous recevrai; et je vous serai pour Père, et vous, vous me serez pour fils et pour filles, dit le Seigneur, le Tout-puissant». Quelle grâce et quelle jouissance! Aussi l'apôtre ajoute-t-il: «Ayant donc ces promesses, bien-aimés, purifions-nous nous-mêmes de toute souillure de chair et d'esprit, achevant la sainteté dans la crainte de Dieu».

Mais à côté de cette séparation morale du monde et de ses principes, il en est une autre qui rentre davantage dans celle que Paul opéra à l'égard de lui-même et des croyants d'Ephèse. En 2 Timothée 2: 19-22, ce qu'est devenue l'Eglise sur la terre est comparé à une grande maison où se trouvent non seulement des vases d'or et d'argent, mais aussi de bois et de terre; les uns à honneur, les autres à déshonneur. La chrétienté est le grand arbre de belle apparence, mais qui abrite dans son feuillage les oiseaux, figure de principes et de personnes qui ne sont pas de Dieu. Le croyant a à se purifier des vases à déshonneur, c'est-à-dire à s'en séparer. Selon la parole inspirée: «Qu'il se retire de l'iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur», celui qui veut être fidèle doit se retirer de l'iniquité, de tout ce qui, dans le vaste système religieux qui l'entoure, n'est pas soumis à l'autorité de la parole de Dieu et veut y mêler les pensées d'homme. L'exhortation de l'apôtre en Hébreux 13: «Sortons vers lui (Jésus) hors du camp, portant son opprobre», repose sur le même principe. De tout ce qui est établi sur un principe humain, et forme ainsi «un camp», le chrétien est appelé à sortir, à se séparer coûte que coûte, et à poursuivre la «justice, la foi, l'amour, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d'un coeur pur». C'est ce que Paul fit pour les disciples et avec eux à Ephèse. C'est le chemin de l'obéissance: «Soyez séparés».

Une fois cette séparation effectuée, l'apôtre continue l'exercice de son ministère sur un terrain libre. Nous ignorons ce qu'était Tyrannus, sauf qu'il tenait une école, et ainsi avait un local qu'il prêtait ou louait à Paul, fait qui indique au moins qu'il ne lui était pas opposé. Mais ce n'était pas seulement les disciples séparés que Paul enseignait. Il discourait tous les jours dans l'école de Tyrannus, et cette oeuvre de labeur incessant dura deux années. Quel dévouement chez le saint apôtre! Sa vie ne lui appartenait pas; elle était toute à son Maître dont il suivait les traces, à ce Jésus qui, infatigable dans son amour, allait de lieu en lieu faisant du bien. Quel amour pour les âmes animait aussi Paul! Et si nous pensons qu'à ce travail dans l'oeuvre du Seigneur, se joignait sa sollicitude incessante pour les assemblées, et qu'en même temps il travaillait de ses mains pour subvenir à ses besoins et à ceux de ses compagnons d'oeuvre, nous pouvons bien être humiliés; mais d'un autre côté admirer la puissance du Seigneur déployée dans le vase de terre. Qu'il nous soit donné d'avoir un peu de ce zèle et de ce dévouement pour Christ.

Le résultat des labeurs de Paul fut béni. Sa prédication puissante par l'Esprit, et les miracles extraordinaires opérés par son moyen agissaient sur les âmes et le bruit s'en répandait, de sorte que «tous ceux qui demeuraient en Asie ouïrent la parole du Seigneur, tant Juifs que Grecs». L'Asie dont il est parlé ici, comme en d'autres endroits du Nouveau Testament, n'est nullement le grand continent connu sous ce nom, mais seulement une faible portion de ce que l'on nomme l'Asie mineure. Elle renfermait les sept villes mentionnées dans l'Apocalypse et où se trouvaient les assemblées auxquelles le Seigneur adresse ses messages. Ephèse était l'une d'elles et la principale ville d'Asie. Les autres en étaient peu éloignées et entretenaient avec elle des relations fréquentes. On conçoit donc que leurs habitants venant à Ephèse et ayant entendu parler de Paul et de ce qu'il enseignait, fussent venus l'écouter. Ils furent sans doute aussi témoins des miracles opérés par lui. D'ailleurs, les compagnons, d'oeuvre de Paul, comme Timothée et Eraste, n'étaient sans doute pas restés oisifs et avaient pu aussi évangéliser dans les villes voisines. Mais il ne semble pas que Paul y ait été lui-même, car il dit dans l'épître aux Colossiens: «Je veux que vous sachiez quel combat j'ai pour vous et pour ceux qui sont à Laodicée, et tous ceux qui n'ont pas vu mon visage en la chair» (Colossiens 2: 1). Quoi qu'il en soit, «tous en Asie avaient entendu la parole du Seigneur», tous n'avaient pas été convertis, mais tous, Juifs et païens, étaient responsables devant Dieu, pour ce qu'ils avaient entendu. Les résultats à Ephèse et en Asie furent d'ailleurs remarquables. Le paganisme, dans cette ville païenne entre toutes, consacrée à la grande déesse Diane, le paganisme là et dans l'Asie, fut ébranlé dans ses fondements. «Ce Paul», disait Démétrius, «usant de persuasion, a détourné une grande foule, non seulement à Ephèse, mais presque par toute l'Asie, disant que ceux-là ne sont pas des dieux, qui sont faits de main». Et c'est ainsi que peu à peu, dans la suite, par tout le vaste empire romain, le paganisme dut céder devant le christianisme, bien que celui-ci n'eût pas conservé la pureté avec laquelle Paul le prêchait.

Toutes les fois que l'Esprit de Dieu agit par la Parole pour éclairer, convaincre et sauver des âmes, Satan et ses suppôts sont à l'oeuvre pour contrecarrer son action. Ce n'est pas d'abord par la violence, mais par la ruse, et la ruse la plus subtile est celle qui veut associer au nom de Jésus les oeuvres de l'ennemi. C'est ce qui eut lieu à Ephèse, comme précédemment à Philippes, mais d'une autre manière. Il y avait alors à Ephèse des Juifs exorcistes qui prétendaient pouvoir chasser les démons du corps des possédés, en se servant de formules magiques. C'était évidemment se mettre en rapport d'une manière plus ou moins directe avec Satan. Le Seigneur Jésus répondant à ceux qui l'accusaient de chasser les démons par Béelzébul, leur dit: «Et vos fils, par qui les chassent-ils?» Ces exorcistes avaient vu Paul faire sortir les malins esprits des possédés en invoquant le nom du Seigneur Jésus. Ils s'imaginèrent, sans avoir la foi au Seigneur que possédait Paul et qui lui donnait cette puissance, d'invoquer le même nom, le nom de Celui que leurs compatriotes avaient crucifié. Ils voulurent se servir de ce nom béni comme d'une formule magique plus puissante que celles qu'ils employaient. Eussent-ils réussi, le nom du Seigneur était déshonoré, l'oeuvre était ruinée, Paul n'était qu'une sorte de magicien plus habile que d'autres; ce n'était plus par la Puissance de l'Esprit de Dieu qu'il prêchait. Ils associaient Christ à leur art diabolique. Le Seigneur ne pouvait le permettre. Ils échouent misérablement. Loin d'avoir puissance sur l'esprit malin, ils deviennent ses victimes. La foi seule fait triompher du diable et du monde. Invoquer le nom de Jésus, sans une vraie foi, c'est le profaner. Ainsi les vaines redites de ce nom béni, les chapelets, les rosaires, les litanies, ne délivrent pas du péché et de sa puissance, ni de celle du diable.

Ce fait devient un nouveau témoignage rendu à la vérité et au Seigneur. Le bruit s'en répandit et vint à la connaissance de tous ceux qui demeuraient à Ephèse, Juifs et Grecs. Tous furent saisis de crainte et le nom du Seigneur fut magnifié: le démon même Le reconnaissait et reconnaissait Paul comme son serviteur. Il en était ainsi aux jours du Seigneur sur la terre. Mais la crainte ne convertit pas. Les hommes peuvent redouter la puissance de Dieu sans pour cela se soumettre à Lui. La conscience doit être exercée devant Lui. La crainte, si elle ne conduit pas l'homme à se demander pourquoi il redoute la puissance divine, le fera plutôt s'éloigner et se cacher de Dieu comme fit Adam (voyez Apocalypse 6: 12-17). Chez ceux qui avaient cru, l'effet fut différent. Eux aussi, dans le temps de leur ignorance, s'étaient adonnés à des pratiques curieuses, c'est-à-dire aux arts magiques, prétendant, par des formules tirées de certains livres, et des cérémonies prescrites par ces livres, connaître l'avenir, révéler les choses cachées, agir sur les esprits et les corps de leurs semblables; choses, hélas! que dans la chrétienté actuelle, des magiciens exercent encore sous des formes et par des moyens différents. Tout cela, diseurs de bonne aventure, tireurs de cartes, spiritisme, est oeuvre du diable qui séduit ainsi les esprits des hommes et se joue d'eux. Les chrétiens d'Ephèse, éclairés par ce qui venait de se passer, repris dans leur conscience, comprennent que ce à quoi ils s'étaient adonnés, venait du diable. Ils avaient conservé jusqu'alors ces livres «éphésiens», comme on les appelait; mais ils ne veulent plus avoir affaire avec l'ennemi, lui être associés en quoi que ce soit de ces oeuvres de ténèbres, et résolument, confessant et déclarant ce qu'ils avaient fait, les péchés et peut-être les crimes dans lesquels ils avaient été conduits par ces livres, reconnaissant publiquement le mal commis, ils s'en séparent; ils anéantissent, pour autant qu'il était en eux, ce qui les avait tenus liés à Satan. Le sacrifice, humainement parlant, était grand, la perte était forte. Ces livres, outre qu'étant des manuscrits, ils avaient du prix, étaient estimés encore davantage à cause de leur contenu. Mais la parole du Seigneur montrait sa puissance dans leur coeur, et la Personne de Christ et ses trésors leur faisaient maintenant considérer ces choses comme du fumier et un néant. Remarquons que les croyants Ephésiens brûlent leurs livres. Ils ne les vendent pas, ce qui pourtant aurait été pour eux un riche profit, Mais ainsi ils auraient répandu le poison; ils seraient restés associés au mal. Ils le jugent complètement et le coupent dans sa racine. Ils montrent publiquement ce que valaient ces livres, et ce qu'il en fallait faire. Ils manifestent devant tous leur séparation du mal et leur dévouement à Christ. Puissions-nous vivre et agir dans le même esprit.

Le coeur naturel est toujours et partout le même; il veut, sans Dieu, mais certes avec le secours du diable qui l'illusionne, pénétrer les choses cachées, et sous d'autres formes aujourd'hui découvrir ce que les livres éphésiens prétendaient révéler. Nous ne supposons pas, chers lecteurs chrétiens, que vous ayez affaire au spiritisme, ni aux prétendus devins de nos jours. Le vrai chrétien sait à quoi s'en tenir à cet égard; il se rappelle les déclarations de la parole de Dieu, et le jugement qu'elle porte sur de telles gens et de telles pratiques. Il se tient loin de ces choses. Mais n'y a-t-il pas, dans notre temps, des livres qui, sans être dans la ligne de pensées de ceux brûlés à Ephèse, sont tout autant et peut-être plus dangereux pour l'âme? Des livres agissant sur l'imagination des pensées du coeur — mauvaise en tout temps, dit l'Eternel — remplissent l'esprit de vanités, le transportent dans un monde imaginaire, détournent ainsi les pensées de Christ et des choses d'en haut, et très souvent les transportent dans un monde où l'esprit et le coeur sont souillés, où les convoitises de la chair, qui font la guerre à l'âme, sont excitées? De qui procède toute cette littérature malsaine mise à la portée de tous et qui étale ses productions dans des livres, des revues, des journaux; ces écrits dont le style parfois charme et entraîne, mais où la description des passions est d'autant plus dangereuse, où le coeur s'attendrit sur des fictions, mais devient d'autant plus insensible aux réalités divines, reste froid devant l'amour de Christ, et rempli de ces pensées vaines et frivoles qui obscurcissent la pure atmosphère des pensées de l'Esprit — oui, de qui procèdent tous ces livres nés de la chair et qui satisfont la chair? Leur origine n'est-elle pas la même que celle d'où venaient les livres éphésiens, de Satan le grand corrupteur, l'ami du mensonge et l'ennemi des âmes, le séducteur? Avec quel soin les chrétiens ne doivent-ils pas les écarter de leurs maisons, pour eux-mêmes s'en abstenir, pour leurs enfants, les en garder. Comme ils doivent se souvenir qu'à cet égard aussi ils ne sont pas du monde, et que ce qui convient au monde, le distrait, le charme, occupe ses pensées étrangères à Dieu, ne saurait s'accorder avec la vie de Dieu, qui a pour objet Christ et les choses du ciel! N'est-ce pas relativement à ces lectures aussi et bien spécialement que s'appliquent les paroles de l'apôtre en 2 Corinthiens 6: «Ne touchez pas à ce qui est impur», et «purifions-nous de toute souillure de chair et d'esprit»? Comment mêler les pensées profanes suggérées par telles ou telles lectures avec les prières et les actions de grâces? Comment veiller, être en garde contre les ruses de l'ennemi, quand nous lui livrons nos pensées et lui ouvrons les portes de notre âme? Comment ne pas attrister l'Esprit avec ces vanités dans notre esprit? Que le Seigneur nous donne de marcher dans cette sainte séparation de pensées, de coeur et de vie, cherchant, comme ressuscités avec Christ, les choses qui sont en haut, où le Christ est assis à la droite de Dieu, et nous affectionnant à ces choses qui, goûtées par l'Esprit, nous désaffectionneront des choses de la terre. Oui, qu'il nous soit donné «d'être fortifiés en puissance par l'Esprit, quant à l'homme intérieur, de sorte que le Christ habite, par la foi, dans nos coeurs, et que nous soyons fondés et enracinés dans l'amour», cet amour de Christ qui surpasse toute connaissance et dont nous sommes les objets! Alors nous ne regarderons pas «aux vanités mensongères»; dans le refuge de l'amour de Christ, Satan ne pénètre pas.

C'est ainsi, dit notre récit à la fin, «que la parole du Seigneur croissait et montrait sa force». Elle la montrait, dans ces temps du premier amour d'Ephèse et de l'Eglise, en convertissant les âmes, en déjouant les efforts de Satan, en se manifestant dans la vie de séparation des saints qui étaient en témoignage à Christ dans le monde. Elle n'a pas perdu sa force, elle est toujours puissante comme un marteau qui brise le roc, comme un feu qui consume, mais c'est nous qui manquons à la manier. Puisse-t-elle d'abord croître dans nos coeurs pour de là se répandre en témoignage autour de nous! Mais pour cela, il faut la lire, en faire notre nourriture. Cela ne vaut-il pas mieux infiniment que tant de lectures vaines? Le temps est court, nous n'avons que peu de jours pour glorifier Dieu ici-bas. Que cette Parole demeure en nous dans toute sa puissance, que notre vie intérieure en soit imprégnée, et qu'ainsi elle montre sa force dans notre conduite au milieu du monde, et, que le Seigneur soit glorifié comme il le fut à Ephèse.

Ephèse — L'avertissement

ME 1904 page 109 - Ladrierre A.

Actes des Apôtres 20: 17-36

Le chapitre 19 des Actes nous a montré le commencement de l'oeuvre du Seigneur à Ephèse par le ministère de Paul. Nous voyons ici l'assemblée formée de ceux qui avaient cru, constituée et régulièrement ordonnée. Elle a à sa tête des anciens établis et reconnus. L'apôtre les envoie chercher, et ils reconnaissent son autorité. Il parle de son ministère comme d'une chose terminée. Une phase de l'Assemblée est passée: celle des travaux apostoliques; une autre s'ouvre: celle de la responsabilité, du service des anciens, celle des dangers et des difficultés quand la vigilance et l'énergie spirituelles de l'apôtre ne sont plus là pour y parer.

Paul se rendait à Jérusalem où il allait rencontrer la prison et d'où, en ayant appelé à César, il devait être envoyé à Rome. C'était le terme de son activité itinérante; il ne devait pas revoir ses amis d'Ephèse, mais il tenait, en leur faisant ses adieux, à leur donner un dernier avertissement, en leur rappelant en même temps quel il avait été dans son ministère au milieu d'eux. Or, comme nous l'avons déjà fait remarquer, ses paroles n'étaient pas pour l'assemblée d'Ephèse seule, représentée par ses anciens, mais pour l'Assemblée universelle dans tous les temps, car il parle de «l'Assemblée de Dieu qu'il a acquise par le sang de son propre Fils». Cela pouvait-il être uniquement l'assemblée d'Ephèse? Evidemment non. Etudions donc ces adieux du saint apôtre à l'Assemblée. Nous y verrons ce qu'il était: un vrai et dévoué serviteur de Christ pour l'Evangile, et pour l'Assemblée qui est son corps (Colossiens 1: 23-25), et nous apprendrons par son exemple quels sont les caractères qui doivent distinguer les ouvriers du Seigneur. En même temps, l'avertissement qu'il adresse aux anciens d'Ephèse portera notre attention sur les dangers qui menacent les assemblées tout spécialement dans «les temps fâcheux» où nous sommes arrivés, et nous verrons quelles ressources nous sont laissées pour y parer.

Considérons en premier lieu le ministère de Paul, de qui il le tenait, en quoi il consistait, et comment il l'exerçait. Sur ce dernier point, il pouvait eu appeler au témoignage de ceux qui l'avaient vu à l'oeuvre. «Vous savez», leur dit-il, «de quelle manière je me suis conduit envers vous tout le temps, depuis le premier jour». Heureux service que celui qui est accompli avec suite et persévérance, sans inconséquences dans les paroles et dans la vie, où la conduite répond aux choses prêchées! Il ne peut qu'être béni de Dieu et porter des fruits. Heureux le serviteur qui peut dire avec Paul: «Notre gloire est celle-ci, savoir le témoignage de notre conscience que avec simplicité et sincérité de Dieu, non pas avec une sagesse charnelle, mais par la grâce de Dieu, nous nous sommes conduits dans le monde et plus encore envers vous» (2 Corinthiens 1: 12). Et encore: «Ne donnant aucun scandale en rien, afin que le service ne soit pas blâmé, mais en toutes choses nous recommandant comme serviteurs de Dieu» (2 Corinthiens 6: 3, 4).

Paul tenait son ministère du Seigneur: «Le service que j'ai reçu du Seigneur Jésus», dit-il ici, et à Timothée, il écrit: «Je rends grâces au Christ Jésus, notre Seigneur, qui m'a fortifié, de ce qu'il m'a estimé fidèle, m'ayant établi dans le service» (1 Timothée 1: 12). Remarquons dans ces dernières paroles, d'abord que l'apôtre a été estimé fidèle, puis qu'il a été établi dans le service. Il avait été converti, et ensuite avait été appelé à l'apostolat. Renversé sur le chemin de Damas par l'apparition de la gloire de Jésus de Nazareth, dont il persécutait les membres sur la terre, il ne fut pas «désobéissant à la vision céleste», il ne regimba point contre les aiguillons. Lui, l'orgueilleux pharisien, le propre juste, l'ardent zélateur des traditions de ses pères, le blasphémateur de Christ et le persécuteur des saints, fut brisé par la révélation de la gloire de Jésus le Nazaréen, contre lequel il estimait qu'il fallait faire beaucoup. Il reconnut que le crucifié méprisé était le Fils de Dieu, et il fut convaincu du péché terrible qu'il avait commis: il se vit comme le premier des pécheurs, et durant trois jours dans l'humiliation et l'angoisse profonde où il était, il ne mangea ni ne but. Il priait; et le doux rayon de la grâce vint enfin, apporté par le message d'Ananias, briller dans son coeur. Il crut en Jésus mort et ressuscité et fut sauvé. Avec quelle puissance et quels accents de reconnaissance n'exprime-t-il pas son bonheur! «Moi, qui auparavant étais un blasphémateur, et un persécuteur, et un outrageux, miséricorde m'a été faite… la grâce de notre Seigneur a surabondé avec la foi et l'amour qui est dans le Christ Jésus». Il proclame avec une conviction profonde le grand salut apporté dans le monde par Jésus Christ: «Cette parole est certaine et digne de toute acceptation, que le Christ Jésus est venu dans le monde pour sauver les pécheurs, dont moi je suis le premier». Et il se présente comme un exemple de cette grâce qui surabonde envers le plus grand des pécheurs, un exemple de la patience et de la miséricorde du Christ (1 Timothée 1: 13-16). Il est sauvé par la grâce, par la foi et, comme Ananias le lui dit par l'ordre du Seigneur, en lui imposant les mains, il est rempli du Saint Esprit (Actes des Apôtres 9: 17). Il a reçu une vie nouvelle, la vie de Christ; il est en Christ, et c'est une nouvelle création; il ne connaît plus personne selon la chair. Telle est la nouvelle existence dans laquelle Paul est entré. L'amour de Christ a saisi son coeur et l'étreint, ayant jugé ceci, «que si un est mort pour tous, tous donc sont morts, et qu'il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité» (2 Corinthiens 5: 14-17). Aussi s'écrie-t-il avec une sainte joie: «Moi, par la loi» — cette loi dont il avait porté le joug — «je suis mort à la loi, afin que je vive à Dieu». Dans quelle heureuse liberté il se trouve! Et il continue: «Je suis crucifié avec Christ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi; — et ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui m'a aimé et qui s'est livré lui-même pour moi» (Galates 2: 19, 20). Il connaît l'amour du Christ qui surpasse toute connaissance, et il en jouit. Il est fondé et enraciné dans cet amour qui remplit son coeur et qui est devenu le mobile de toute sa vie. Pour Paul, la personne adorable de Christ est tout. Pour le Christ, pour l'excellence de sa connaissance, il a fait la perte de toutes les choses dont, selon la chair, il aurait pu se glorifier; il les estime comme des ordures, il ne désire, il ne veut que Christ, être avec Lui dans la gloire est le but unique qu'il poursuit, dût-il passer par les souffrances et la mort (Philippiens 3: 7, 8, 14). Et cet amour du Christ qui l'a cherché, qui l'a sauvé, qui l'a saisi, il sait que rien ne peut l'en séparer, et il s'écrie en triomphe: «Qui est-ce qui nous séparera de l'amour, du Christ?» Et parcourant toutes les choses par lesquelles la fidélité à Christ peut faire passer le croyant, il répond: «Au contraire, dans toutes ces choses, nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés» (Romains 8: 35-37). Or ces choses étaient pour Paul, non des théories, mais des réalités. Il les expérimentait, il les goûtait, il les vivait, elles étaient sa vie — pour lui vivre, c'était Christ, et rien d'autre. Telle fût, réelle, complète, constante dans ses effets, la conversion de Paul qui à la fin de sa carrière disait: «Je sais qui j'ai cru, et je suis persuadé qu'il a la puissance de garder mon dépôt jusqu'à ce jour-là». La personne de Christ lui devient, dès le commencement de sa carrière chrétienne, si précieuse, qu'à peine converti, avant son appel direct au ministère, il prêche dans les synagogues que «lui, Jésus, est le Fils de Dieu». C'est alors qu'il est établi dans le service.

Avons-nous besoin de dire que pour un serviteur de Dieu une vraie conversion est la première chose, une chose essentielle? Comment appellera-t-il à la repentance et sera-t-il propre à porter dans les coeurs des pécheurs la conviction de leur état de péché, de leur culpabilité et du juste jugement, de Dieu, si lui-même n'a pas été saisi dans sa conscience, s'il n'a pas vu l'horreur du péché devant Dieu, s'il n'a pas été rempli d'épouvante à la vue du sort réservé aux pécheurs? «Connaissant donc combien le Seigneur doit être craint», dit l'apôtre, «nous persuadons les hommes» (2 Corinthiens 5: 11). Comment dirigera-t-il les regards d'une âme angoissée sous le sentiment de ses péchés, vers Jésus le Sauveur, vers Celui qui a porté nos péchés, qui en a subi le jugement, dont le sang purifie de tout péché, si lui-même, n'a pas goûté la douceur du pardon, s'il ne peut dire avec Paul, «ayant donc été justifiés sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu»? (Romains 5: 1). Comment parlera-t-il de l'amour de Christ, de son intercession victorieuse et de ses tendres sympathies pour les saints, si pour lui ce ne sont que des vérités saisies par l'intelligence, et non réalisées dans le coeur? Paul triomphait, lui qui contemplait à face découverte la gloire de Jésus et tout ce que nous avons en Lui, et s'écriait: «Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous?… C'est Christ qui est mort, mais plutôt qui est aussi ressuscité, qui est aussi à la droite de Dieu, qui aussi intercède pour nous! Qui est-ce qui nous séparera de l'amour du Christ?» (Romains 8: 31-35). Comment enfin celui qui voudrait être ministre de l'Evangile, sans avoir reçu l'Evangile dans son coeur, pourrait-il inviter sérieusement les âmes à renoncer au monde pour s'attacher uniquement à Christ, lui qui n'a pas Christ pour unique objet? Il faut pour être un serviteur de Dieu et de Christ et un vrai et fidèle administrateur des mystères de Dieu (1 Corinthiens 4: 1), avoir la conscience du salut pour soi-même, en posséder la joie et la paix, être entré en relation personnelle avec Christ.

Que dirons-nous donc de ce que nous voyons se passer dans la chrétienté? Des jeunes gens se préparent à entrer dans le ministère, comme l'on dit, de même qu'on entre dans toute autre carrière, par un choix personnel ou selon le voeu de leurs parents, sans qu'il y ait à la base une vraie conversion, ni cet appel de Dieu, dont nous parlerons. Les études théologiques que l'on impose de faire pour devenir ministre, produiront-elles ce changement nécessaire, la conversion, dont nous venons de parler? Produiront-elles dans le coeur l'amour de Christ et des âmes que possédait Paul et qui a pour résultat un dévouement entier? Hélas! on sait ce qui en est. Combien de ceux que l'on a pu croire convertis, font naufrage quant à la foi sous l'enseignement fatal des écoles! Combien qui y sont entrés rationalistes, en ressortent plus rationalistes encore!

Paul a été fidèle, et le Seigneur l'a établi dans le service. Il l'a été par le Maître qu'il connaissait, et auquel il s'est dévoué avec joie. Déjà quand le Seigneur lui envoya Ananias, il révéla à celui-ci ce que devait être cet homme, quel service il aurait à accomplir. «Va», dit Jésus à son disciple, «car cet homme m'est un vase d'élection pour porter mon nom devant les nations et les rois, et les fils d'Israël» (Actes des Apôtres 9: 15). D'après le récit de Paul, en Actes 22: 14 et 15, Ananias lui communique, le message de Jésus en ces termes: «Le Dieu de nos pères t'a choisi d'avance pour connaître sa volonté, et pour voir le Juste, et pour entendre une voix de sa bouche; car tu lui seras témoin auprès de tous les hommes, des choses que tu as vues et entendues», savoir Jésus de Nazareth dans la gloire, Jésus, Fils de Dieu, et les chrétiens unis à Lui comme membres de son corps — substance de l'Evangile de Paul, choses auxquelles il rend témoignage. Dans le récit aussi que fait Paul de sa conversion devant le roi Agrippa, il rapporte comment le Seigneur lui fait connaître la mission à laquelle il l'appelle. «Je te suis apparu afin de te désigner pour serviteur et témoin et des choses que tu as vues, et de celles pour la révélation desquelles je t'apparaîtrai, en te retirant du milieu du peuple et des nations vers lesquelles je t'envoie pour ouvrir leurs yeux, pour qu'ils se tournent des ténèbres à la lumière, et du pouvoir de Satan à Dieu; pour qu'ils reçoivent la rémission de leurs péchés et une part avec ceux qui sont sanctifiés, par la foi en moi» (Actes des Apôtres 26: 16-18). Paul pouvait donc bien dire qu'il avait reçu son ministère directement du Seigneur Jésus, que le Seigneur l'y avait établi, ministère qu'il devait accomplir avec tant de zèle, d'amour et de joie, à travers toutes les tribulations possibles et jusqu'à la mort même, sachant de qui, dans ce service, il était le témoin.

Il rappelle cela aux Galates en danger d'être entraînés par des docteurs judaïsants qui, de même qu'à Corinthe, mettaient en doute son apostolat. Aux Corinthiens, il disait: «Ne suis-je pas apôtre? N'ai-je pas vu Jésus, notre Seigneur? N'êtes-vous pas, vous, mon ouvrage dans le Seigneur?» (1 Corinthiens 9: 1). Et aux Galates, il écrit: «Paul, apôtre, non de la part des hommes, ni par l'homme, mais par Jésus Christ, et Dieu le Père qui l'a ressuscité d'entre les morts»; et plus loin: «Quand il plut à Dieu, qui m'a mis à part dès le ventre de ma mère, et qui m'a appelé par sa grâce, de révéler son Fils en moi, afin que je l'annonçasse parmi les nations» (Galates 1: 1, 15, 16). Ainsi les hommes ne l'avaient pas envoyé, l'homme ne l'avait pas enseigné et consacré pour ce service, il tenait tout de Jésus Christ et de Dieu le Père. Il n'avait pas été d'abord à Jérusalem auprès des douze, pour obtenir confirmation de sa mission. Il avait immédiatement prêché Jésus, Fils de Dieu, à Damas; et quand ensuite il vient à Jérusalem, les apôtres constatent avec joie sa conversion, mais ils ne lui communiquent rien, comme il le déclare aux Galates, en parlant d'une visite qu'il fait plus tard dans la même ville au sujet de faux frères qui troublaient l'assemblée d'Antioche.

Paul était un de ces dons du Seigneur monté en haut, dont il parle aux Ephésiens dans son épître: «Etant monté en haut, Christ a emmené captive la captivité, et a donné des dons aux hommes… Et lui, a donné les uns comme apôtres, les autres comme prophètes, les autres comme évangélistes, les autres comme pasteurs et docteurs» (Ephésiens 4: 8-11). Il était «apôtre appelé», c'est-à-dire tel par l'appel de Dieu; «mis à part pour l'évangile de Dieu» (Romains 1: 1). Il était donc évangéliste. Il avait été «établi prédicateur et apôtre et docteur des nations dans la foi et la vérité» (1 Timothée 2: 7; 2 Timothée 1: 11). Il était prophète pour recevoir et révéler les pensées de Dieu (1 Corinthiens 2: 12, 13), et quant à être pasteur, si le nom ne lui est pas donné, nous voyons par ses épîtres qu'il en accomplissait le service (voyez 1 Thessaloniciens 2: 7-12). Et ce service de Paul, comme don du Seigneur, il l'accomplit dans la puissance et sous la direction de l'Esprit Saint: Ananias lui avait dit: «Jésus m'a envoyé afin que tu recouvres la vue, et que tu sois rempli de l'Esprit Saint» (Actes des Apôtres 9: 17). Son ministère était celui de l'Esprit, de l'Esprit qui distribue comme il lui plaît les divers dons de grâce, de même que le Seigneur assigne les divers services (2 Corinthiens 3: 8; 1 Corinthiens 12: 4-6).

Tel était donc Paul comme serviteur, ministre de l'Evangile. Il avait été converti, dans toute l'étendue de ce mot, puis, ainsi qu'il le dit: «Je suis devenu serviteur (de l'Evangile) selon le don de la grâce de Dieu qui m'a été donné selon l'opération de sa puissance»; et encore: «De laquelle (l'assemblée) je suis devenu serviteur selon l'administration de Dieu qui m'a été donnée» (Ephésiens 3: 7; Colossiens 1: 25). Il est ainsi un exemple de ce qu'est et doit être dans tous les temps un vrai serviteur, lors même qu'il ne serait pas excellemment doué comme Paul, et que sa mission serait renfermée dans un cercle restreint.

Le vrai serviteur du Seigneur, le vrai ministre de l'Evangile, qui, ainsi que nous l'avons vu, doit avant tout être réellement converti, est un don du Seigneur, et l'Esprit le qualifie selon le ministère qu'il a à exercer, soit d'évangéliste ou de pasteur et docteur, seuls dons subsistant actuellement, car le fondement étant posé, il n'y a plus, dans le sens absolu, d'apôtres et prophètes (Ephésiens 2: 20). De plus, le vrai serviteur est appelé au service par Dieu et le Seigneur lui-même, et «non par l'homme», et il va, envoyé par l'Esprit Saint, et «non de la part des hommes». Quelqu'un eût-il fait les études théologiques et autres les plus étendues, fût-il doué de la plus grande clarté d'exposition et de l'éloquence la plus entraînante, et même eût-il cru devoir embrasser la carrière du ministère par dévouement comme la plus belle et la plus désirable, dans un but philanthropique et même religieux, pour faire du bien, pour être moralement utile à ses semblables, s'il n'est pas un don de Christ, s'il n'est pas doué par l'Esprit Saint pour le service, si son appel n'est pas de Dieu, mais de son choix propre, eût-il été consacré par les hommes et envoyé et placé par eux, il n'est pas un serviteur du Seigneur comme Paul, et comme seulement on peut l'être.

Nous ne voulons pas dire que, parmi ceux qui, dans la chrétienté, portent le titre de ministres de l'Evangile, et qui ont cru, par ignorance des vrais principes de l'Ecriture, devoir passer par une filière organisée par l'homme et être placés ici ou là, il n'y ait de vrais évangélistes, comme aussi de vrais pasteurs et docteurs. Dieu est souverain dans sa grâce et l'Esprit distribue comme il lui plaît, au milieu de la ruine de l'Eglise et de la confusion qui y règne. Mais nous avons à retenir les vrais principes de la parole de Dieu, et n'y point mêler les pensées, les arrangements et les raisonnements des hommes.

Paul avait reçu sa mission d'apôtre directement de Jésus qui, ressuscité d'entre les morts, lui était apparu; il l'avait reçue de Dieu le Père qui l'avait choisi dès le sein de sa mère, et qui l'avait appelé par sa grâce pour annoncer son Fils parmi les nations. Lorsque le moment est venu d'entrer dans cette mission qui lui est spécialement confiée, celle de docteur et prédicateur des nations, Barnabas, voyant l'oeuvre de Dieu s'étendre à Antioche, va le chercher à Tarse pour aider dans le travail, et c'est là que le Saint Esprit le fait mettre à part avec Barnabas. Ce n'est pas l'assemblée d'Antioche, ni les prophètes et docteurs du nombre desquels il était, qui, voyant son beau don, décident de l'envoyer en mission, mais c'est Dieu le Père lui-même qui, par le Saint Esprit, s'adresse à eux pour qu'ils le mettent à part. Lui et Barnabas ne sont pas envoyés par l'Assemblée, mais par l'Esprit Saint qui ensuite les dirige, les conduit et donne puissance à leur parole. Et tel est aussi actuellement le caractère d'un vrai ministère. Le serviteur va où Dieu l'appelle et le conduit. Ce qui le détermine n'est pas l'appel d'une église à venir pour être son pasteur, ni la direction d'un comité, c'est l'appel de Dieu par l'Esprit Saint. Sans doute qu'il faut que l'oreille spirituelle du serviteur soit exercée pour entendre la voix de l'Esprit; une humble dépendance de Dieu est nécessaire pour cela, ainsi que la communion avec Lui; et il ne manque point à ceux qui s'attendent à Lui pour être guidés soit dans leurs mouvements, soit dans leurs paroles. Dieu reste le même, opérant tout en tous. Quand Paul et Barnabas quittent Antioche pour aller où le Saint Esprit les envoie, l'assemblée leur impose les mains en signe d'identification avec eux dans leur oeuvre, et elle les recommande à la grâce de Dieu. Ce n'est pas une consécration; ils étaient déjà prophètes et docteurs donnés de Christ et consacrés par l'Esprit Saint: l'assemblée s'est associée à eux. Heureuses les assemblées qui, dans notre temps de faiblesse, s'associent par la prière aux serviteurs du Seigneur dans leur travail; elles ont une part précieuse de bénédictions; heureux les serviteurs qui s'en vont soutenus et encouragés par les prières et la communion des saints. Paul réclame plus d'une fois dans ses épîtres, ces prières des saints, et nous voyons quelles actions de grâces il rend à Dieu pour le bien qui se trouve dans les assemblées et quelles requêtes il adresse au Seigneur pour elles (lisez Actes des Apôtres 13: 1-4; 14: 26, 27; Romains 15: 30-32; Ephésiens 6: 19; Philippiens 1: 3-5, Colossiens 4: 3; 1 Thessaloniciens 5: 25, etc.).


Examinons maintenant quels étaient les sujets que Paul traitait dans son ministère auprès des âmes. D'abord remarquons la manière dont Paul s'en acquittait. C'étaient les choses profitables qu'il présentait. Il n'en cachait aucune. Il ne diminuait, n'atténuait, ni n'altérait rien de la vérité quant à Dieu, son caractère, les exigences de sa justice et de sa sainteté; ni quant à l'étendue de son amour et de sa grâce. Paul prêchait tout ce qui se rapporte à Christ, sa divinité, sa filiation éternelle dans le sein du Père, son humanité sainte, sa vie comme Modèle parfait, son sacrifice expiatoire sur la croix, sa sacrificature céleste, son retour et son règne. Il ne venait pas avec les discours fleuris de l'éloquence humaine; il n'accommodait pas ses paroles au goût des auditeurs, mais à leurs besoins; il ne frelatait pas la parole de Dieu; il ne ménageait pas les amours-propres. S'il ne cachait pas aux âmes leur état de péché — chose profitable à savoir — il leur révélait aussi pleinement la grâce qui est en Christ — autre chose profitable. Il voulait atteindre le coeur et la conscience, et les choses profitables dussent-elles blesser, il les disait, mais il présentait aussi ce qui relève l'âme abattue. Il maniait ainsi l'épée de l'Esprit, la parole de Dieu. Il savait reprendre, il savait consoler. Il disait: «O Galates insensés! qui vous a ensorcelés?… Vous êtes déchus de la grâce». Puis il les exhorte à se tenir fermes dans la liberté où Christ nous place. Aux Corinthiens, il reproche leur orgueil, leur vanterie, tandis qu'ils gardaient le péché au milieu d'eux: «Otez le méchant,» dit-il. «Réveillez-vous pour vivre justement, et ne péchez pas; car quelques-uns sont dans l'ignorance de Dieu»; mais ensuite il les exhorte à être fermes, abondants dans l'oeuvre du Seigneur qui n'oublie pas le travail fait en son nom. Et ainsi Paul, embrassant dans son esprit toutes les choses profitables, savait les adapter à chacun selon l'état de son âme, et aux assemblées selon les besoins qui s'y manifestaient; car, disait-il, «il y a ce qui me tient assiégé tous les jours, la sollicitude pour toutes les assemblées». «Qui est faible», ajoute-t-il, «que je ne sois faible aussi? Qui est scandalisé, que moi, aussi je ne brûle?» Puissent les serviteurs de Dieu aujourd'hui, marchant sur les traces de Paul, ne rien cacher des choses profitables, et puissent-ils savoir les appliquer avec discernement!

Paul était évangéliste. L'oeuvre de l'évangéliste est de réveiller les âmes et de les conduire à Christ pour le salut. Comme tel, Paul insistait auprès des Juifs et auprès des Grecs, sur «la repentance envers Dieu et la foi en notre Seigneur Jésus Christ».

N.B. Ce qui suit n'était qu'à l'état d'ébauche dans les papiers laissés par le cher frère qui a écrit ces lignes, mais quelles que soient les modifications qu'il eût cru devoir apporter à ces pages, elles forment un tout dont les lecteurs pourront tirer profit et édification.

Voyons maintenant quel était le but du ministère de Paul et ce qu'il annonçait. Son but était de rendre témoignage à l'Evangile de la grâce de Dieu (verset 24). Certes il était bien qualifié pour cela, lui, l'objet d'une si grande grâce de la part de Dieu.

L'Evangile est déterminé, dans ses épîtres, de différentes manières. Quant à sa source, c'est l'Evangile de Dieu (Romains 1: 1); quant à son grand objet, c'est Christ, le Fils de Dieu, Christ dans la gloire. S'agit-il de ceux auxquels il est adressé, c'est «l'Evangile de votre salut» (Ephésiens 1: 13). Ici, c'est l'Evangile de la grâce, auquel il rendait témoignage. Il témoignait que la grâce de Dieu, l'activité de son amour envers les hommes, était apparu à tous dans la personne de Christ, apportant le salut aux pécheurs ruinés et perdus. Il annonçait tout le conseil de Dieu (verset 27). Tout ce qui était dans Sa pensée éternelle touchant son Fils, le second homme, touchant son oeuvre, touchant le salut des pécheurs, touchant l'Eglise et touchant l'avenir éternel, Paul l'annonçait. Il ne cachait, ni n'atténuait aucune partie de la vérité, telle qu'il l'avait reçue; il n'y mêlait point ses propres pensées. L'Esprit de Dieu l'avait enseigné, et ce qu'il disait l'était en paroles enseignées de l'Esprit. Il prêchait aux Juifs et aux gentils, et son thème se composait de deux parties: la repentance et la foi (verset 21). La repentance envers Dieu était prêchée, sur l'ordre de Christ, d'abord aux Juifs, son peuple. Pour les Juifs, c'était se détourner de leurs observances et des oeuvres mortes, faire fléchir leur orgueil, pour se tourner vers un Dieu qu'ils avaient offensé, tout autant que les païens, qu'il exhortait à se tourner des idoles vers le Dieu vivant et vrai. La repentance, c'était se juger devant Dieu. A cela s'ajoutait la foi en notre Seigneur Jésus Christ. Un jugement porté sur soi, un regret, une horreur de soi, un changement de pensées, un amendement dans la vie, tout cela convient à la repentance, est légitime de la part d'un pécheur devant Dieu, mais cela ne sauve pas. C'est pourquoi, à ceux qui, comme le geôlier de Philippes, se repentaient, Paul insistait sur la foi en Jésus Christ: «Crois au Seigneur Jésus Christ et tu seras sauvé». Et en cela ne nous présente-t-il pas un modèle pour la prédication? Ce n'étaient pas des dissertations morales, bien que la morale y eût sa place. Amener les âmes devant le Dieu juste et saint, leur montrer l'horreur du péché, leur état de ruine, sans réserve, sans atténuation du mal, afin que ces âmes voient leur vrai état, le juste jugement qu'elles méritent et les amener à la repentance; puis, aux âmes chargées faire entendre le son de «la flûte», le son «doux et subtil» de la grâce, n'est-ce pas là l'oeuvre de l'évangéliste, Or Paul était un évangéliste. Il annonçait l'Evangile de la grâce qui reste toujours le même. Il pressait les âmes de se repentir, car la bonté de Dieu les conviait à la repentance, mais il les pressait de croire en Christ, en son sacrifice pour le pardon, la vie et la paix.

Mais Paul annonçait tout le conseil de Dieu. Il était aussi le docteur. En rendant témoignage à l'Evangile de la grâce de Dieu, en insistant sur la repentance et la foi, il prêchait le royaume de Dieu (verset 25) qui, moralement, selon ce qu'il dit, est «justice, paix et joie dans l'Esprit Saint». C'est ce royaume auquel Dieu nous appelle. Il est à venir, car on en hérite; c'est le royaume céleste. Rappelons qu'on n'y entre que par la nouvelle naissance, et qu'actuellement s'y trouvent toutes les bénédictions de l'Evangile. C'est «le royaume du Fils de son amour» (Colossiens 1: 13). Prêcher le royaume, c'est annoncer toutes les bénédictions actuelles de l'Evangile, avec la responsabilité de se soumettre à l'autorité de Celui à qui est ce royaume — Dieu — Christ qui est Dieu.

Mais, dans ce qu'enseignait Paul, se trouvait une partie importante du conseil de Dieu. C'était l'Assemblée, composée de Juifs et de gentils amenés par la foi et sur un même pied à l'unité selon les conseils éternels de Dieu. L'Assemblée est l'Assemblée de Christ, mais aussi l'Assemblée de Dieu; elle est d'une part la maison de Dieu, de l'autre le corps de Christ; l'Assemblée que Christ bâtit, Lui qui en est la pierre angulaire, mais acquise par Dieu qui en a payé le prix — le sang de son propre Fils; l'Assemblée qui, dans sa manifestation sur la terre, devait être un témoignage pour Dieu, comme Israël autrefois au milieu des nations; l'Assemblée, dont la construction et la garde, confiées à la responsabilité de l'homme, pouvaient faillir. L'épître adressée plus tard aux Ephésiens, déroule ses merveilleux privilèges; d'autres portions de la Parole disent sa responsabilité.

Tels étaient les enseignements de Paul. Un ministre de l'Evangile aujourd'hui, aura-t-il d'autres enseignements à porter à ses auditeurs? Sera-ce la philosophie, la science faussement ainsi nommée?

Mais une autre chose nous est présentée; c'est la manière dont Paul exerçait son ministère. S'il y a un ministère public, il y a aussi un ministère qui s'exerce auprès des âmes individuellement, dans les maisons (verset 20). Il n'est pas moins efficace que le premier. Là, on se trouve plus directement en contact avec les âmes, on peut mieux juger de leur état et de ce qu'il faut leur expliquer de la Parole; connaître leurs besoins, leurs difficultés, et y appliquer les enseignements, les consolations et les exhortations des Ecritures. Tout ce qui était profitable aux âmes, Paul le présentait. Fallait-il enseigner, il le faisait; reprendre, il reprenait, comme nous le voyons dans les épîtres aux Corinthiens; consoler, soit au sujet d'affliction, ou de repentance, ou de pertes d'amis, etc., il le faisait, en servant le Seigneur (verset 19), qui avait autorité sur lui, et auquel il appartenait. Et ce service, il l'accomplissait avec un entier dévouement. C'était en toute humilité, s'effaçant pour ne laisser paraître que Christ; s'il devait parler de lui-même, c'était en insensé, et il ne le faisait, pour ainsi dire, qu'à son corps défendant. Il se disait moins que le moindre de tous les saints; il rappelait sa vie passée pour faire ressortir la grâce de Dieu envers lui; il ne se présentait pas avec ostentation; il se glorifiait dans son infirmité. «Et avec des larmes», ces larmes qu'il versait en voyant l'incrédulité des Juifs et la superstition des païens qui affligeaient son coeur. Les serviteurs de Dieu connaissent ces larmes (verset 31; Psaumes 119: 136; Jérémie 9: 1; 2 Corinthiens 2: 4; Philippiens 3: 18). Les «épreuves» ne lui manquaient pas. Les Juifs restaient ses ennemis acharnés; Alexandre à Ephèse l'avait montré; Démétrius soulevait les masses contre lui. Il avait combattu contre les bêtes à Ephèse — les hommes méchants, les pires bêtes féroces. Il y avait eu là une porte ouverte, mais beaucoup d'adversaires; la fidélité en suscite toujours. Quel exemple Paul nous donne! Il savait, comme son divin Maître, ce qui l'attendait, mais il avait donné sa vie à Celui qui était mort pour lui. Que lui importait de vivre dans ce monde? Mourir pour lui était un gain. Mais s'il pouvait servir, achever son service (2 Timothée 4) pour Christ, il était satisfait, heureux, joyeux (verset 24). Il portait toujours, partout, dans le corps, la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus fut manifestée dans son corps.

Et enfin son service, «le service que j'ai reçu du Seigneur Jésus» (verset 24). Ce service, malgré les accusations de ses ennemis, avait été toujours complètement désintéressé. Il n'avait rien convoité; il avait tenu à honneur et pour la gloire du Seigneur et le bien des autres, de travailler pour sa subsistance et celle de ses compagnons, afin de n'être à charge à personne (2 Thessaloniciens 3: 7-9; 1 Corinthiens 4: 12; 1 Thessaloniciens 2: 9); caractère bien différent de celui de maintenant.

Ayant ainsi retracé le caractère, le service et l'activité de Paul, revenons au grand but pour lequel il avait convoqué auprès de lui les anciens d'Ephèse. Ce but était de les avertir. Remarquons que dans un sens le service de Paul, son ministère itinérant, était terminé. Il allait à Jérusalem, de là en captivité, et bien que le saint apôtre ne restât pas inactif, ce n'était plus le service actif parmi les nations. Peut-être avant sa mort eut-il encore quelque temps de liberté; là-dessus la Parole se tait. Ce discours est un discours d'adieu. Il ne doit plus les revoir; il disparaît de la scène, bien que, par son épître, il les enseigne encore. La phase apostolique est terminée, l'Assemblée a pris une forme déterminée, elle est constituée régulièrement. Des anciens sont établis et reconnus. L'apôtre les envoie chercher, et ils reconnaissent son autorité. Maintenant, lui étant loin, la responsabilité incombe aux anciens; ils ont leur service et auront à faire avec des difficultés et des dangers.

L'apôtre les adjure solennellement — il leur a annoncé sans réserve tout le conseil de Dieu. Ils sont pleinement instruits dans la vérité; il a aussi fidèlement prêché l'Evangile en toute occasion; il est donc net du sang de tous (verset 26). Aux simples individus il a annoncé le salut, c'est leur responsabilité de l'avoir reçu ou non; aux anciens incombe aussi la responsabilité, maintenant que Paul les quitte. «Prenez donc garde», leur dit-il. A quoi?A vous-mêmes, quant à la vérité pour la retenir et l'enseigner, et quant à votre conduite. Celui qui a une charge dans l'assemblée, doit être fondé dans la doctrine, et il faut que sa conduite ne donne lieu à aucun reproche; 2° et à tout le troupeau sans exception. Ils étaient établis surveillants. Comme des bergers vigilants et fidèles, ils avaient à s'occuper des brebis pour les maintenir dans le droit chemin, les exhorter, les consoler (prendre garde à eux-mêmes était donc nécessaire). Comme tels, ils avaient à paître le troupeau, à le nourrir et l'abreuver avec des herbes saines et des eaux pures. La charge de surveillant (évêque) se confond dans la Parole avec celle d'ancien. Nous voyons qu'outre les dons: évangélistes, pasteurs et docteurs, il y avait dans les assemblées des charges. Les deux seules charges nommées dans la Parole sont celles d'anciens ou surveillants et de serviteurs ou diacres. Parmi les anciens, il pouvait y en avoir qui fussent capables d'enseigner.

Revenons aux anciens d'Ephèse. Le Saint Esprit les avait établis surveillants, place de haute responsabilité, dont ils avaient à s'acquitter sous le regard de Dieu pour surveiller le troupeau, avoir l'oeil, sur chacune des brebis qui le composaient, pour soigner, consoler, avertir, reprendre. Quel exercice de foi, d'amour, de prudence, de tact, pour prémunir contre les dangers, pour entrer dans les besoins; dans les combats d'âme, dans les difficultés, pour enseigner aussi, pour se mettre à la brèche lors des attaques de l'ennemi. Si les anciens qui présidaient dûment pouvaient s'attendre à un double honneur à être soutenus — non qu'ils eussent à réclamer, car c'était la responsabilité des assemblées — ils avaient aussi, comme Paul, à travailler de leurs mains. Pierre leur trace leur devoir à cet égard, en disant: «Non par contrainte ou pour un gain honteux».

«Pour paître l'assemblée de Dieu» (verset 28). Pensons à ce qu'est l'Assemblée de Dieu. Autrefois Dieu avait une assemblée au désert (Actes des Apôtres 7: 38), mais c'était un peuple terrestre. Après la mort, la résurrection et l'ascension de Christ, Dieu se forma sur la terre, par la descente de l'Esprit Saint sur les croyants, une Assemblée dont le caractère comme l'origine sont divins et célestes. Elle lui appartient, elle est ici-bas sa maison, l'Assemblée du Dieu vivant, la colonne et le soutien de la vérité. De même qu'autrefois l'assemblée au désert avait ses anciens, l'Assemblée de Dieu les a aussi maintenant. La maison de Dieu est un lieu où, sur la terre, le Dieu vivant fait sa demeure. Il l'avait eue dans un tabernacle, puis dans une maison de pierre, mais maintenant cette demeure est l'Assemblée, l'ensemble de ceux qui ont cru et sont établis sur le fondement inébranlable du Fils du Dieu vivant, qui sont eux-mêmes des pierres vivantes, ayant reçu la vie par l'Esprit. Cette demeure est sur la terre ici-bas et, sous cet aspect, les délogés n'en sont pas; Dieu a une maison ici-bas. Elle peut être en ruine, elle n'en est pas moins la maison. Etant l'Assemblée du Dieu vivant, elle est à part du monde, et elle est la colonne et l'appui de la vérité. Christ et sa Parole sont la vérité; l'Eglise maintient cette vérité et en est le seul témoin, la présentant aux hommes. A la fin de la demeure de l'Eglise sur la terre, ce que Dieu reconnaît comme témoin, c'est le faible troupeau de Philadelphie, puis ce qui est dans la position de responsabilité d'être témoin, Laodicée, est vomi de la bouche de Christ qui prend le caractère de l'Amen, du témoin fidèle et véritable. L'Eglise n'enseigne pas, elle n'a pas d'autorité, elle présente et maintient la vérité, et ce qui ne le fait pas, n'est pas l'Eglise.

Une assemblée locale est appelée assemblée de Dieu, comme représentant dans cette localité l'Assemblée universelle, ainsi: «L'assemblée de Dieu qui est à Corinthe» (1 Corinthiens 1: 2).

Les anciens avaient donc été établis pour prendre soin de l'Eglise de Dieu dans chaque localité. Quelle responsabilité, et combien ils avaient besoin de prendre garde! C'était la chose la plus précieuse aux yeux de Dieu sur la terre. Son prix nous est indiqué par ces paroles: «Laquelle il a acquise par le sang de son propre Fils». Tel est le prix auquel Dieu a pu avoir cette Assemblée. Combien ne lui est-elle pas chère! Autrefois l'assemblée d'Israël avait été rachetée d'Egypte; Dieu avait déployé sa puissance en leur faveur, mais qu'avait-il donné? C'est que tout est fondé sur Christ. Si Dieu a pu pardonner autrefois, c'est que Christ devait porter une fois les péchés. Le rachat d'Israël, c'était la délivrance par la puissance de Dieu. Pour l'Eglise, c'est aussi la délivrance, mais c'est la puissance de Dieu en amour, manifesté parle don de Jésus qui a offert une pleine satisfaction. Nous trouvons, dans un autre passage, Christ qui a aimé l'Eglise et qui s'est livré lui-même pour elle (Ephésiens 5: 25); mais ici, c'est Dieu qui l'a acquise en donnant, son propre Fils et en la purifiant par son sang. L'Eglise est chère à Christ qui s'est donné pour elle, mais précieuse à Dieu. Il l'a acquise pour Lui-même.

Quel motif à présenter aux anciens, pour qu'ils prissent garde à eux-mêmes et au troupeau; ce troupeau c'est l'Eglise. Leur charge vient de l'Esprit. Quel autre pourrait établir sur l'Eglise de Dieu sur cet héritage de Dieu? Sont-ce des hommes par leur choix ou par leurs votes? Rien de semblable dans l'Ecriture. Les anciens ont pu être établis par les apôtres (Actes des Apôtres 14: 23) oui par un de leurs délégués (Tite 1: 5), sous leur autorité apostolique qui était de Dieu et par l'Esprit Saint qui les dirigeait, mais où sont actuellement les apôtres? Il n'y a donc plus d'anciens? N'y a-t-il plus personne pour paître l'Eglise de Dieu? N'en avait-elle plus besoin, dans ces temps périlleux de la fin? Béni soit Dieu; il pourvoit aux besoins de son Eglise. Il n'a pas besoin d'apôtres; l'Esprit Saint établit des anciens. Il donne dans les assemblées de vrais surveillants, des saints qui ont à coeur le bien de l'Assemblée, le soin des âmes. Ils ne s'arrogent point le titre, l'autorité, mais, établis et conduits par l'Esprit, ils veillent sur les âmes comme devant rendre compte. Mais n'y a-t-il pas danger à ce qu'ils s'arrogent une place d'autorité, ou que quelqu'un ne se croie le droit de prendre cette place, semblable à Diotrèphe qui «aimait à être le premier parmi eux»? (3 Jean 9). Les directions de la Parole, qui nous indiquent les qualités nécessaires pour exercer les charges, sont là, et les assemblées au milieu desquelles Christ se trouve, reconnaîtront bientôt si celui qui aspire à la surveillance y est propre, de même qu'elles reconnaissent si tel homme est un don du Seigneur. Le tout est de demeurer dans la dépendance de Dieu. Il en est de même des serviteurs.

Voici maintenant ce qui montrait la nécessité de la vigilance chez les anciens. Deux dangers menaçaient l'Assemblée. L'expérience de Paul les discernait — il savait — mais il était prophète, et par l'Esprit il voyait distinctement ce danger; seulement sa présence et son autorité apostolique contenaient ces ennemis. Mais il ne devait pas être toujours là. «Je sais ceci qu'après mon départ», dit-il. Le premier danger venait du dehors; il était grand. C'étaient «des loups redoutables», des hommes pénétrant au milieu des chrétiens et les pervertissant par des enseignements subversifs. C'était la philosophie dont parle l'apôtre, les gnostiques à l'imagination déréglée qui entraîneraient les âmes dans des sentiers de perdition. Le second danger venait du dedans. D'entre les anciens même, d'entre ceux qui devaient veiller et paître le troupeau, se lèveraient des hommes qui pervertiraient la pure doctrine chrétienne, et par sa séduction la rendraient propre à attirer des disciples. Ces gens y trouveraient leur profit, et leur orgueil sa satisfaction. D'une manière ou d'une autre, c'était la corruption du christianisme. Et que voyons-nous de nos jours? Les conducteurs n'ont pas veillé. D'entre eux-mêmes ont surgi des hérésies qui attaquent la personne de Christ, son oeuvre et ses résultats. — L'apôtre Pierre signale de même les faux docteurs qui devaient introduire des sectes de perdition et qui seraient suivis par plusieurs; il signale les moqueurs qui attaqueraient la parole de Dieu. Jude aussi parle d'hommes pervers et impies qui changent la grâce de Dieu en dissolution; les uns et les autres renient le seul Maître et Seigneur Jésus Christ. Jean exhorte les saints à éprouver les esprits, car beaucoup de faux prophètes sont sortis dans le monde. C'étaient des enseignements qui attaquaient la personne de Christ, qui parlaient selon les principes du monde et que le monde écoutait. C'étaient des antichrist qui, en niant le Fils, n'avaient pas non plus le Père. Ils voulaient «mener en avant», au lieu de demeurer dans ce qui est dès le commencement (2 Jean 9), parlant de développement, de progrès. Le Seigneur, dans l'Apocalypse, signale aussi ces faux docteurs, semblables à Balaam, à Jézabel, la femme qui enseigne, et ces prétentions laodicéennes. En louant Philadelphie, il indique clairement qu'il y en avait qui reniaient son nom, qui ne gardaient pas sa Parole.

Paul donc recommande les anciens «à Dieu et à la parole de sa grâce». Dieu «a la puissance d'édifier» et de donner l'héritage qui appartient à tous les sanctifiés — aux mis à part pour Dieu (verset 32). Comme autrefois les lévites avaient pour héritage l'Eternel, actuellement Dieu est puissant pour les édifier, les fonder, les rendre capables d'accomplir leur service, et ce service, c'est par la Parole qui annonce la grâce, qu'ils pourront l'accomplir. «Fortifie-toi dans la grâce qui est dans le Christ Jésus», dit l'apôtre à Timothée (2 Timothée 2: 1). Dieu et sa parole, voilà la ressource suprême. Elle suffit et suffira toujours. D'autorité dans l'Eglise, il n'en est pas question; d'autorité de l'Eglise non plus. Ce qui fait autorité, c'est Dieu et sa parole, et c'est ce qui demeure, ce qui est de tout temps, par conséquent pour nous aussi. Remarquons que Pierre et Jean renvoient aussi à l'autorité de la Parole.

Les sanctifiés sont les chrétiens, mis à part dans le Christ Jésus, selon ce que dit Paul (1 Corinthiens 1: 2). A eux et aux anciens appartient l'héritage.

L'apôtre termine (versets 33-35) en se plaçant comme modèle devant les anciens. (conf. Philippiens 3: 17). Il leur a été et leur est en exemple. «Surveillant», dit aussi Pierre aux anciens, «non pour un gain honteux, mais de bon gré, ni comme dominant sur des héritages, mais en étant les modèles du troupeau» (1 Pierre 5: 2, 3). Ce qui doit les caractériser, c'est le dévouement pour les autres, c'est de les secourir en se donnant. Ils doivent user de miséricorde envers le faible et se donner comme Jésus.

Au moment de quitter la scène de son activité, l'apôtre laissait à l'Eglise, en lui le caractère d'un vrai serviteur, les choses qu'un vrai serviteur enseigne, son service dans l'Eglise, l'avertissement contre les dangers du dedans et du dehors, les ressources immuables de la grâce. Or cela demeure. Que les anciens aient été fidèles ou non, il n'importe. L'Eglise était constituée, elle avait sa responsabilité, les anciens la représentaient. Conduite par les anciens elle a manqué, mais comme chose établie de Dieu elle ne peut périr, et le ministère, les enseignements, les ressources sont toujours là et demeureront jusqu'à la fin.