Quelques mots sur Esaïe 8

 ME 1902 page 101

 

Dans le chapitre précédent, l'Eternel avertit le roi Achaz par la bouche du prophète Esaïe, qu'il n'avait pas à craindre les rois de Syrie et d'Israël qui s'étaient alliés pour faire la guerre à Jérusalem, dans l'intention de mettre à la place du roi, descendant de David, un faux roi: le fils de Tabeël. L'Eternel qui, selon sa parole à Jéroboam, voulait laisser une lampe à la maison de David, de laquelle devait naître le Messie, le vrai Libérateur d'Israël, ne permet pas que ces rois viennent à bout de leurs desseins contre le roi de Juda. Mais l'impie Achaz, qui avait dépassé toutes les abominations commises dans le pays de Juda jusqu'à ce jour, sans foi, sans confiance en Dieu, ne veut pas demander le signe de la vraie délivrance. Le Seigneur le donne, verset 14: «Voici, la vierge concevra et elle enfantera un fils, et appellera son nom Emmanuel». (Dieu avec nous). Mais en même temps est annoncé le jugement, que Juda attire sur lui par son iniquité; il aura lieu par le moyen du roi d'Assyrie, qui réduira le pays en désolation.

Cela donne lieu, au chapitre 8, à la prophétie qui prédit les jugements des derniers jours: l'envahissement du pays d'Israël apostat par l'Assyrien de la fin, le roi du Nord; événements qui ont eu dans le passé leur accomplissement partiel comme types.

Dans ces jours à venir, une association de peuples, plus grande et plus redoutable que celle de Retsin et du fils de Rémalia, menacera Israël et le frappera à cause de son apostasie. Ils ont rejeté les eaux de Siloé qui vont doucement; quand le signe que l'incrédulité du roi Achaz ne voulait pas demander est apparu, ils l'ont rejeté: «Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous», dirent-ils. La pierre de l'angle a été rejetée par ceux qui bâtissaient; aussi, Dieu les a rejetés et chassés parmi les nations pendant l'économie actuelle, à la fin de laquelle ils rentreront dans leur pays, toujours incrédules, pour y subir le jugement final. C'est alors que: «le Seigneur fait monter sur eux les eaux du fleuve, fortes et grosses, le roi d'Assyrie et toute sa gloire; et il montera sur tout son lit et s'en ira par-dessus tous ses bords; et il traversera Juda, il débordera et passera outre, il atteindra jusqu'au cou; et le déploiement de ses ailes remplira la largeur de ton pays, ô Emmanuel» (versets 7, 8).

Au milieu d'Israël apostat, réintroduit dans son pays, se trouvera un faible résidu fidèle qui s'attendra à l'Eternel. C'est lui que l'Esprit de Dieu encourage (versets 9-17), en annonçant aux peuples l'inutilité de leurs associations et leur ruine; ils peuvent prendre des mesures en apparence fort sages et puissantes, réaliser l'union qui fait la force du monde; tout sera sans effet. La partie incrédule d'Israël agira aussi d'après ces principes-là; craignant le fléau dévastateur, il fera aussi une alliance, mais quelle alliance? «Une alliance avec la mort», «un pacte avec le shéol» (Esaïe 28: 14-22).

Tout, dans ce moment terrible, sera propre à effrayer les quelques fidèles qui s'attendent à l'Eternel et dont la foi sera mise à l'épreuve d'une manière extraordinaire. Mais le pays menacé et envahi est le pays d'Emmanuel. Emmanuel, Dieu avec nous, est là. Le peuple l'a rejeté, il met sa confiance ailleurs, il marche dans le chemin de l'iniquité, il craint tout, sauf l'Eternel. Le résidu est averti de ne pas marcher dans le chemin de ce peuple; de rester en dehors de tout ce qui caractérise un état de choses mûr pour le jugement; de ne pas craindre leurs craintes; de n'être pas effrayés. «L'Eternel des armées, lui, sanctifiez-le, et que lui soit votre crainte, et lui, votre frayeur; et il sera pour sanctuaire»; mais: «Il sera pour pierre d'achoppement et rocher de trébuchement aux deux maisons d'Israël, pour piège et pour lacet aux habitants de Jérusalem». La pierre qu'ils ont rejetée tombera sur eux et les écrasera (Matthieu 21: 41). Au contraire, il est le refuge des disciples qui forment le témoignage, ayant Christ avec eux, exprimant leur dépendance absolue de l'Eternel, pendant qu'il cache sa face aux deux maisons d'Israël. Ils sont pour signes et pour prodiges en Israël, ne pouvant pas plus être atteints par le fléau que Christ lui-même, qui prend place au milieu d'eux. La parole de Dieu seule fait autorité au milieu d'eux. De quelque parole que le monde s'enquière, elle n'a pas de valeur pour eux; ils ne s'enquièrent que de leur Dieu (versets 16-20). Finalement la délivrance entière arrive. La lumière a resplendi sur eux; le bâton de l'oppresseur est brisé; tout le train de guerre devient la pâture du feu. Le vrai Fils de David est monté sur son trône pour toujours (chapitre 9: 1-7).

Que d'enseignements précieux nous pouvons retirer de cette portion des Ecritures! Car il y a une analogie frappante entre les saints de ce temps-là et ceux d'aujourd'hui, quant à leur position et leurs privilèges; quoique notre situation dans ce monde soit moins terrible, et nos privilèges bien plus grands. Comme le résidu d'Israël, nous nous trouvons au milieu d'un état de choses que le Seigneur va juger: la chrétienté sans vie, marchant à grands pas vers l'apostasie, et toujours plus caractérisée par l'indépendance de Dieu et le rejet de sa parole; c'est le monde. Comme le résidu, nous avons Christ pour notre part; il nous a unis à Lui d'une manière absolue. L'Esprit de Dieu, dans le chapitre 2 des Hébreux, prend les paroles qui expriment la relation de Christ avec le résidu, les appliquant aux croyants en vertu de la mort de Christ et de sa résurrection. Après avoir dit, verset 11: «Car et celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés sont tous d'un; c'est pourquoi il n'a pas honte de les appeler frères, disant: J'annoncerai ton nom à mes frères, au milieu de l'assemblée je chanterai tes louanges»; il cite Esaïe 8: 17: «Moi, je me confierai en lui», et encore le verset 18: «Me voici, moi et les enfants que Dieu m'a donnés». Ainsi, avec Christ, nous sommes dans la relation de fils avec son Dieu et Père; il prend place avec les sanctifiés qu'il n'a pas honte d'appeler frères, en attendant qu'il les introduise dans la gloire, afin que nous réalisions cette confiance qui l'a caractérisé lorsqu'il était ici-bas et qu'il exprime ainsi: «Garde-moi, ô Dieu! car je me confie en toi» (Psaumes 16: 1). «J'ai attendu patiemment l'Eternel» (Psaumes 40); et afin que nous soyons en témoignage devant le monde qui l'a rejeté.

Notre position, devant Dieu et devant le monde, étant celle de Christ, notre marche est la sienne; ses ressources sont les nôtres. En saisissant par la foi ces privilèges si élevés, notre chemin est clairement tracé au milieu de l'état de choses actuel.

Si nous ne sommes pas serrés de près par des événements terribles, semblables à ceux qui entoureront le résidu d'Israël aux derniers jours, les circonstances au milieu desquelles nous nous trouvons, ne tendent pas moins à nous faire abandonner la dépendance de Dieu, le caractère de Christ, et à nous induire à participer aux moyens que le monde emploie pour faire face aux difficultés de la vie présente.

L'indépendance à l'égard de Dieu dans ce monde se montre relativement aux circonstances de cette vie, dans le développement du système d'associations qui a pris des proportions considérables depuis le jugement de ce principe à la tour de Babel. Ce développement fait partie des progrès tant vantés de nos jours. A mesure que l'on approche de la fin, les conséquences du péché se font sentir plus durement; les difficultés augmentent à tous égards. Il faut lutter contre la mauvaise foi et l'égoïsme de l'homme pour gagner son pain de chaque jour; la force vitale de l'humanité diminuant, les santés s'affaiblissent, les maladies augmentent; les productions du sol sont frappées chaque année de nouveaux fléaux, etc., etc. Mais l'homme a pourvu à tout au moyen de sociétés, de syndicats, de caisses d'assurance, d'associations de tous genres, sans lesquels, dit-il, on ne peut plus cheminer.

Les croyants ne sont pas à l'abri de ces maux, car nous participons par notre présence dans ce corps, aux souffrances de la création déchue: «Non seulement elle», soupire, «mais nous-mêmes aussi qui avons les prémices de l'Esprit, nous soupirons» (Romains 8: 23). Mais, pour traverser cette scène de maux et de douleurs, nous avons des ressources que le monde ne connaît pas. Qu'il est précieux d'entendre la Parole dire à nous aussi: «Ne dites pas conjuration, de tout ce dont ce peuple dira conjuration, et ne craignez pas leur crainte, et ne soyez pas effrayés; l'Eternel des armées, lui, sanctifiez-le, et que lui soit votre crainte, et lui, votre frayeur». Nous le connaissons, cet Eternel des armées; il s'est révélé à nous comme Père, par le Fils unique qui est dans le sein du Père. Que craindre, sachant qu'il est pour nous dès avant la fondation du monde. «Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous? Celui même qui n'a pas épargné son propre Fils, mais qui l'a livré pour nous tous, ne nous fera-t-il pas don aussi, librement, de toutes choses avec lui?» (Romains 8: 31, 32). Dieu devant qui toutes «les nations sont réputées comme rien, comme une goutte d'eau d'un seau et comme la poussière d'une balance» (Esaïe 40: 15), Dieu dont «la bonté est de tout temps et à toujours sur ceux qui le craignent, et sa justice pour les fils de leurs fils» (Psaumes 103: 17). Si sa grande puissance toujours prête à s'exercer en faveur de ceux qui s'attendent à Lui, a été démontrée dans tout le cours de l'histoire de son peuple, la grandeur de son amour a été manifestée à la croix: «En ceci a été manifesté l'amour que Dieu a pour nous, c'est que Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions par lui; en ceci est l'amour, non en ce que nous, nous ayons aimé Dieu, mais en ce que lui nous aima et qu'il envoya son Fils pour être la propitiation pour nos péchés» (1 Jean 4: 9, 10).

En venant dans le monde, notre précieux Sauveur a été l'expression parfaite de l'amour de Dieu le Père, montrant aux siens combien il s'occupe des plus petits détails de leur vie. «Les cheveux même de votre tête sont tous comptés» (Luc 12: 7). Connaissant ce grand amour qui s'occupe de tout ce qui nous concerne, depuis un cheveu de notre tête jusqu'à l'accomplissement de notre grand salut, pourrions-nous dire comme Israël: «Ma voie est cachée à l'Eternel, et ma cause a passé inaperçue de mon Dieu»? (voir Esaïe 40: 27 et suivants). Si nous croyons la Parole, ne nous enquérant que de Dieu, pourrons-nous accepter de participer aux moyens que le monde emploie, pour se mettre à l'abri de ce qu'il craint, que ce soit maladie, mort, grêle, pertes de tous genres, concurrence déloyale dans le commerce et l'industrie, etc., etc.? «Votre Père sait que vous avez besoin de ces choses», suffit à la foi. Le monde qui est étranger à la relation et aux privilèges des enfants de Dieu, qui a même perdu la conscience de la relation de l'homme comme créature vis-à-vis de son Créateur, cherche en lui-même ses ressources. Le croyant a ses ressources en Dieu, son Père, qui l'a averti «de ne pas marcher dans le chemin de ce peuple»; «de rechercher premièrement son royaume et sa justice», et qui promet que «toutes les autres choses nous seront données pardessus». Dès que l'enfant de Dieu discerne que l'avantage qui lui est offert est tiré des ressources du monde, cela doit lui suffire pour le rejeter, car le monde est en opposition au Père; ce qui vient du monde n'est pas du Père. Le Père ne peut pas plus se servir des principes du monde pour secourir ses enfants, que l'Eternel n'avait besoin des ressources de l'Egypte pour son peuple racheté passant à travers le désert. Le monde a crucifié Christ, il est toujours chargé de ce crime. En rejetant le Fils, il a rejeté le Père; comment pourrait-il compter sur le Père pour ses besoins, et comment est-ce que le Père pourrait accepter ce qui vient du monde pour prendre soin de ses enfants? Ou bien, est-ce que Christ qui dit: «Je me confierai en lui», et: «Me voici et les enfants que Dieu m'a donnés», a besoin du monde pour conduire ses rachetés à la gloire?

Puissions-nous toujours mieux comprendre notre union avec Christ pour le temps et l'éternité, comprendre que nous sommes liés à Lui comme objets de l'amour du Père, afin de pouvoir cheminer avec Lui et comme Lui, dans une entière confiance en Dieu le Père, au milieu de tous ces faisceaux d'ivraie qui se lient déjà pour le jugement, en attendant que le froment soit recueilli dans le grenier.

Il faut aussi penser que si Dieu permet que nous passions par les épreuves diverses de ces derniers jours, il veut aussi par cela nous fournir l'occasion de Lui rendre le témoignage qui est en rapport avec les temps actuels. Il y eut un temps où le témoignage était rendu dans les prisons, sous les instruments de tortures ou sur les bûchers. Aujourd'hui que, par la bonté de Dieu, ces persécutions cruelles ont cessé, le témoignage consiste-t-il seulement à se réunir en paix, à ne pas participer aux joies mondaines, n'ayant plus à craindre la fureur des émissaires de Satan? N'ayant pu détruire le témoignage par la persécution, le diable cherche à le détruire par la corruption, en engageant les saints à s'unir au monde ou à l'imiter dans sa manière d'agir, et à éviter ainsi l'opprobre. Car il y aura moins d'opprobre à se réunir en dehors des systèmes humains aujourd'hui où, en matière religieuse, tout le monde est libre, qu'à refuser de faire partie de telle ou telle association qui aura pour but de faciliter les affaires, de diminuer les dépenses, ou de travailler au relèvement moral d'un monde que Dieu va détruire.

En restant en dehors de tout ces prétendus avantages que le monde peut nous offrir, nous marcherons à la gloire de Dieu, montrant aux hommes que notre foi en Lui n'est pas un vain mot; que si nous avons mis notre confiance en Dieu pour notre salut, nous nous confions en Lui pour toutes choses; que notre christianisme ne consiste pas en formes et en paroles, mais en une vie qui vient du ciel et qui ne saurait dépendre que de Dieu seul, pour reproduire les caractères de Christ en obéissance, en amour, en lumière, en justice et sainteté de la vérité, en attendant patiemment le jour du Seigneur dans lequel les nations marcheront à cette lumière et où la justice régnera. Pour le moment: «Que votre lumière luise devant les hommes, afin qu'ils voient vos bonnes oeuvres». Oeuvres qui exciteront la critique et la haine; mais: «Que l'Eternel soit votre crainte, et lui, votre frayeur».