La reine de Sheba et l'eunuque

1 Rois 10; Actes des Apôtres 8

ME 1902 page 454

 

Ces deux récits rapportés dans des portions si différentes de la Parole, mettent néanmoins en relief de la même manière des vérités aussi importantes et aussi précieuses au jour d'aujourd'hui, qu'elles l'étaient du temps des rois et des apôtres.

Chez la reine de Sheba comme chez l'eunuque, se retrouve la même condition morale de coeurs que les meilleures choses ne satisfont point, mais préparés ainsi à recevoir le repos et la plénitude qui sont en Christ, révélé à l'âme soit en grâce, soit en gloire.

La reine de Sheba avait en partage tous les honneurs royaux et en était entourée. A son commandement, toutes les délices des fils des hommes s'offraient à elle, et il ne lui manquait ni santé ni capacité pour en jouir. Le monde était à sa disposition, mais le monde l'avait laissée avec un coeur souffrant et rempli de besoins, et ses pompes royales ne lui donnaient aucune satisfaction. Dans son malaise, elle entreprend un long voyage, un voyage périlleux, des bouts de la terre à Jérusalem, parce qu'elle a entendu parler de la sagesse de son roi «en relation avec le nom de l'Eternel». Arrivée dans la ville royale, elle y trouve bien au delà de ce qu'elle avait cru et attendu. «Il n'y a plus d'esprit en elle»; ses yeux rencontrent partout des choses qui s'emparent d'elle et la remplissent d'une joie ineffable et glorieuse, car Christ est là. En ces jours lointains, Salomon préfigure Christ et reflète sa splendeur, et la reine entre en communion avec Christ dans sa gloire dans la cité même du grand roi, laquelle était justement nommée: «le ciel au-dessus des cieux». Le monde avait laissé un vide douloureux dans son coeur, maintenant Christ le remplit jusqu'à le faire déborder. Elle lui trouve une valeur bien au-dessus de l'or et de l'argent, bien supérieure à celle des richesses; trouvant la réponse à toutes ses questions, l'âme satisfaite, les yeux remplis de visions glorieuses — d'une gloire selon Dieu — elle offre, comme l'offrande de sa reconnaissance, l'or, les aromates et les pierres précieuses, toutes les richesses de son royaume.

Actes 8 - L'eunuque était un homme puissant à la cour de Candace, reine des Ethiopiens, mais depuis longtemps, j'ose le dire, il avait éprouvé que les vanités des Ethiopiens ne pouvaient lui convenir. Il nous apparaît comme quelqu'un qui avait déjà jeté «aux rats et aux chauves-souris» les idoles de ce pays-là, pour confesser le nom du Dieu d'Israël. Pour obéir à cette foi, il était monté à Jérusalem, la cité des assemblées solennelles où le Dieu d'Israël avait son culte; il y était monté comme adorateur, mais n'y avait pas trouvé de satisfaction. Il retournait au pays du Midi avec un coeur souffrant et rempli de besoins. Il était encore à la recherche de choses meilleures, comme jadis la reine de Sheba lorsqu'elle quitta son pays natal pour cette même Jérusalem. Mais ici, le contraste est frappant. Tandis que la reine y avait trouvé la satisfaction que son âme désirait, l'eunuque en repartait avec un coeur aride et altéré. Pourquoi? Quelle pouvait être la cause de résultats si différents? — Christ n'y était pas aux jours de l'eunuque comme il y était aux jours de la reine. Jérusalem n'était plus le lieu où l'on voyait le Roi de gloire dans sa beauté, où tout parlait de Lui, en portant quelque trace de sa présence et de sa magnificence. Ce n'était point pour l'eunuque comme pour la reine de Sheba une sorte de montagne de la transfiguration. La religiosité s'y trouvait, mais non pas Christ. Les formes et les cérémonies d'un culte charnel, les pratiques d'un sanctuaire terrestre, mais non pas la présence du Christ de Dieu. Cette immense différence nous explique pourquoi l'eunuque quittait triste et déçu cette même cité où la reine de Sheba avait été remplie d'une joie débordante.

Il faut cependant que le coeur de l'eunuque soit désaltéré à la même source et rempli de Christ, seulement Christ le remplira par Esaïe le prophète et non par Salomon.

Philippe, serviteur et témoin de Jésus, est conduit par l'Esprit à aller le rencontrer sur le chemin désert par lequel il rentrait dans son pays. Possédé comme il l'est par une seule préoccupation, le vide au coeur et le besoin de le remplir, même la circonstance étrange de cette rencontre en un lieu désert, n'a pas le don de l'émouvoir. Cette scène porte un caractère spécial. Nous voyons une âme absorbée par la présence d'un seul objet; une nouvelle affection s'est emparée d'elle et chasse toute autre chose. Cet homme lisait Esaïe avec émotion; l'Esprit de Dieu éveillait cette âme pour la convaincre. Christ allait se manifester à elle, le désert allait se réjouir, des sources d'eaux étaient près de sourdre d'une terre altérée. «Philippe, ouvrant sa bouche, et commençant par cette écriture, lui annonça Jésus». Puis, «tout joyeux», l'eunuque continua son chemin. Même joie pour lui maintenant, que jadis pour la reine de Sheba. L'or et les pierres précieuses avaient perdu leur éclat devant la sagesse de Salomon qu'elle eût volontiers échangée contre les trésors de son royaume. Par le même sentiment, l'eunuque peut se séparer de Philippe, son âme étant remplie de la joie du Seigneur, et il possède maintenant le Christ de Dieu qu'elle avait autrefois possédé en type.

Cette belle illustration de vérités importantes et semblables, nous offre aussi certaines différences. Le monde, dans toute sa royale splendeur et disposant de tant de ressources, avait laissé vide le coeur de la souveraine. La religiosité dans la cité des assemblées solennelles, ne peut satisfaire le coeur de l'homme puissant d'Ethiopie. Que ce soit une chose ou l'autre, les pompes du monde ou la religion du monde, le coeur sans Jésus est vide et misérable.

Autre différence: la reine de Sheba apprend à connaître Christ dans sa gloire, tandis que l'eunuque apprend à le connaître en grâce et dans son humiliation. Salomon représente le Roi dans sa beauté — Esaïe montre l'Agneau dont le sang est répandu, et chacune de ces manifestations répond pleinement aux aspirations d'un coeur réveillé. Dans ce jour de grâce et de salut, Christ s'adresse au pauvre pécheur et lui donne l'assurance et le repos; plus tard, il satisfera au désir des nations et de toute la création de Dieu par l'introduction du royaume et le déploiement de sa gloire. Mais c'est toujours Christ, soit comme l'Agneau de Dieu immolé sur l'autel, soit comme le Roi de gloire sur son trône. Son peuple n'a plus rien à désirer, il a trouvé la réponse à toutes ses questions, le pécheur peut rentrer chez lui ayant trouvé avec l'Agneau la satisfaction et le repos; la création se réjouira en Celui duquel il est écrit: «La majesté et la magnificence sont devant lui, la force et la joie sont dans le lieu où il habite»; toute entière elle participera à la gloire de ce jour. La fille de Sion, aussi bien que les nations et leurs rois, les bêtes de la forêt et les troupeaux sur les montagnes, les eaux et les bois, les collines et les vallées, l'univers entier prendra part à cette joie universelle, à cette satisfaction profonde du repos de la création de Dieu.

Notons une dernière différence. Au jour de sa gloire, il faudra qu'on recherche le Roi — la reine du Midi monte à Sion pour Lui rendre hommage. Au jour de la grâce, c'est le Sauveur qui cherche. Philippe, son serviteur et son témoin, cherche l'Ethiopien et le trouve. Quelle harmonie, quelle exactitude, quelle beauté dans la variété de ces détails! Comme ils se justifient à nos âmes, nous révélant quelque chose des perfections qui resplendissent dans les voies de Celui auquel nous avons affaire!