La justification par la foi

 ME 1903 page 421

 

Je désire exposer selon les Ecritures, ce qu'il faut entendre par la justification par la foi. Dieu, dans sa souveraine grâce, se servit autrefois de Luther pour remettre en lumière cette doctrine perdue dans la corruption du papisme. Telle qu'il la présenta, elle fut bénie de Dieu pour des milliers d'âmes, et, d'une manière générale, elle caractérise encore nominalement les «églises» orthodoxes issues de la Réformation. Je dis nominalement, parce que le rationalisme et la superstition ont presque recouvré leur suprématie même dans ce que l'on peut appeler les boulevards du protestantisme.

J'examinerai en premier lieu la manière dont les protestants orthodoxes présentent en général cette doctrine.

La clef de voûte de leur enseignement est la pensée que Christ dans sa vie terrestre a observé la loi à notre place. On dit que lorsque nous croyons, le sang de Christ nous dégage de la culpabilité, et que l'obéissance de Christ (son obéissance à la loi pour nous) nous est imputée pour justice, et que c'est ainsi que nous sommes justifiés devant Dieu par la foi. Les théologiens disent qu'il y a deux obéissances en Christ, l'une active, l'autre passive; la première est son obéissance à la loi, la seconde, ses souffrances sur la croix; ils disent que l'obéissance passive a accompli l'expiation, et que l'obéissance active sert pour l'imputation de la justice, de sorte qu'aussitôt que l'on croit en Lui, on se trouve devant Dieu dans la valeur des deux, savoir dans la valeur de ses souffrances pour la rémission des péchés, et dans la valeur de son obéissance à la loi (obéissance accomplie pour moi) pour ma justice, et qu'ainsi tout ce que Dieu exige étant satisfait de cette manière, je suis déclaré justifié.

Nous devons donc rechercher si la doctrine ainsi présentée est conforme à la parole de Dieu, ou bien si elle est basée sur des enseignements humains.

1° En premier lieu, remarquons qu'il est dit d'Abraham qu'il fut justifié par la foi quatre cent trente ans avant que la loi fût donnée, et qu'ainsi la loi n'a rien eu à faire avec sa justification, dont le seul fondement était sa foi en Dieu. «Abraham crut à l'Eternel qui lui imputa cela à justice» (Genèse 15: 6; Galates 3: 6-29; Romains 4). Cela est d'une portée d'autant plus grande que la justification d'Abraham par la foi est présentée comme le modèle de la nôtre, ou plutôt que le principe en est le même (lisez Romains 4: 23-25; Galates 3: 8, 9). Or si Abraham a été justifié à cause de sa foi en Dieu, sans l'imputation d'aucune obéissance à la loi, et que nous soyons justifiés par la foi par le moyen de l'imputation d'une telle obéissance, ce sont deux principes de justification différents, et l'argument de l'apôtre tombe à faux.

2° En second lieu, il est clairement établi que les gentils, et nous par conséquent, nous ne fûmes jamais sous la loi. L'apôtre dit: «Quand les nations qui n'ont point de loi» (Romains 2: 14); plus loin, il met en contraste ceux qui sont sous la loi et ceux qui n'y sont pas, en disant: «La loi produit la colère, mais là où il n'y a pas de loi, il n'y a pas de transgression:» (4: 15). Et dans un autre endroit il dit, en établissant le même contraste entre les Juifs et les gentils: «Pour les Juifs, je suis devenu comme Juif, afin de gagner les Juifs; pour ceux qui étaient sous la loi, comme si j'étais sous la loi, n'étant pas moi-même sous la loi, afin de gagner ceux qui étaient sous la loi; pour ceux qui étaient sans loi, comme si j'étais sans loi» (1 Corinthiens 9: 20, 21). Partout en traitant ce sujet, Paul fait cette distinction, et c'est pour cela qu'il montre la justification d'Abraham avant la loi, comme le modèle de la justification et des Juifs sous la toi, et des gentils sans la loi. Mais le point à remarquer maintenant est que si les gentils n'ont jamais été sous la loi (comme l'apôtre l'affirme constamment), l'imputation à un gentil croyant de l'obéissance à la loi ne peut être le fondement de sa justification devant Dieu.

3° Il doit être frappant pour un esprit qui s'attache à la parole de Dieu, de remarquer que l'expression «la justice de Christ» non seulement n'est jamais employée en rapport avec la doctrine de la justification, mais ne se trouve en réalité nulle part dans le Nouveau Testament. Toutes les fois, au contraire, qu'il est question de cette doctrine, le terme dont se sert l'Esprit Saint est «la justice de Dieu» (voyez Romains 1: 17; 3: 21, 22, 25, 26; 10: 3; 2 Corinthiens 5: 21; Philippiens 3: 9, etc). Ce serait un fait bien particulier, si c'était l'obéissance de Christ qui, nous étant imputée sur le principe de la foi, devenait notre justice devant Dieu. Ne serait-ce pas une chose étrange que le Saint Esprit employât invariablement l'expression «la justice de Dieu», s'il avait eu l'intention de diriger nos pensées vers la justice de Christ?

«Mais», dira-t-on, «l'obéissance de Christ est mentionnée, et c'est elle précisément qui constitue notre justice». Examinons donc les passages où il est question de l'obéissance de Christ.

Le plus important à cet égard est sans contredit en Romains 5: 18, 19. «Comme par une seule faute, les conséquences de cette faute furent envers tous les hommes en condamnation, ainsi aussi par une seule justice, les conséquences de cette justice furent envers tous les hommes en justification de vie. Car comme par la désobéissance d'un seul homme, plusieurs ont été constitués pécheurs, ainsi aussi, par l'obéissance d'un seul, plusieurs seront constitués justes (*)». Les choses comparées ici ou plutôt mises en contraste, sont l'unique acte de transgression du premier Adam, et l'unique acte de justice du second. D'après cela, et le verset 19 n'étant que le développement du verset 18, la signification des termes «désobéissance» et «obéissance» est évidente. C'est l'acte de désobéissance de la part d'Adam qui a introduit le péché; et ce fut l'acte d'obéissance (obéissance jusqu'à la mort) de la part de Christ qui a introduit la justice. C'est-à-dire que ce sont de simples actes qui sont mis en contraste.

(*) Tous ceux qui connaissent le texte, savent qu'il faut lire «une seule faute», «une seule justice», et non la faute ou la justice d'un seul.

C'est ce que rend plus évident encore un autre passage. Le Seigneur lui-même, parlant de sa mort, dit: «A cause de ceci le Père m'aime, c'est que moi, je laisse ma vie, afin que je la reprenne. Personne ne me l'ôte, mais moi, je la laisse de moi-même; j'ai le pouvoir de la laisser, et j'ai le pouvoir de la reprendre: j'ai reçu ce commandement de mon Père» (Jean 10: 17, 18). Il est clair que dans ce passage le Seigneur parle de sa mort comme d'un acte d'obéissance. Cette conclusion est confirmée d'une manière indubitable par le chapitre 2 de l'épître aux Philippiens. Dans cette merveilleuse description de l'humiliation du Seigneur Jésus Christ, qui forme un contraste avec Adam qui fut désobéissant jusqu'à la mort, nous lisons «qu'il s'est abaissé Lui-même, étant devenu obéissant jusqu'à la mort, et à la mort de la croix». Ces deux passages nous montrent comment il faut interpréter Romains 5: 19; ils nous enseignent que l'apôtre a en vue l'obéissance du Seigneur jusqu'à la mort, et que c'est là ce qui constitue le fondement de notre justification devant Dieu. Pour confirmer ce que nous venons de dire, remarquons que, dans tout ce passage, il n'est pas dit un mot d'obéissance à la loi, mais qu'il s'agit d'un simple contraste entre Adam qui a déshonoré Dieu par sa désobéissance, et Christ, qui a glorifié Dieu par son obéissance jusqu'à la mort.

Un autre passage encore se présentera peut-être à l'esprit de plusieurs. Je veux parler de ce qui est dit au chapitre 10 des Hébreux, où l'apôtre introduit Christ disant: «Voici, je viens, ô Dieu, pour faire ta volonté» (versets 7-10). Mais le verset 10 l'explique en parfaite harmonie avec ce que nous avons déjà avancé. «C'est par cette volonté que nous avons été sanctifiés, par l'offrande du corps de Jésus Christ faite une fois pour toutes». La volonté de Dieu était donc accomplie dans le sacrifice de Christ.

Après avoir passé en revue les différents passages dans lesquels il est parlé de l'obéissance de Christ, j'ajouterai que cette obéissance, dans le sens d'obéissance à la loi, n'est jamais mentionnée en rapport avec la justification du croyant. Que l'on me comprenne bien. Le Seigneur Jésus a toujours été obéissant à son Père; il a été le seul parfaitement obéissant que le monde ait jamais vu, et il a aussi obéi à la loi dans toute sa longueur, sa largeur, sa profondeur et sa hauteur. En fait, il n'a jamais fait sa propre volonté, car sa viande était de faire la volonté de son Père et d'accomplir son oeuvre. Mais jamais l'Ecriture ne parle de l'obéissance vivante de Christ, de son obéissance à la loi, comme du fondement de la justification.

4° L'apôtre affirme à maintes reprises que la justice n'est pas et ne peut pas être par la loi. Comme exemple, dans l'épître aux Romains, après avoir montré que «nulle chair ne sera justifiée devant Dieu par des oeuvres de loi», il continue: «Mais maintenant sans loi (cwr°v nomon, c'est-à-dire à part la loi), la justice de Dieu est manifestée»; et aux Galates, il dit: «Si la justice est par la loi, Christ est donc mort pour rien» (2: 21); plus loin encore: «S'il avait été donné une loi qui eût le pouvoir de faire vivre, la justice serait en réalité sur le principe de la loi» (3: 21).

Eh bien, maintenant je demande: Si Christ avait obéi à la loi à notre place, et si cette obéissance était imputée au croyant pour la justice, la justice ne serait-elle point par la loi? Par conséquent, si tel avait été l'enseignement de l'Ecriture, il aurait été tout simplement impossible que l'apôtre employât ces expressions. Mais l'on dira: Il veut dire que la justice ne peut être obtenue par l'homme, au moyen de l'obéissance à la loi. Je réponds: Si cela eût été la pensée de l'apôtre, il l'aurait dit clairement. Il aurait montré que la justice est bien par la loi, quoique, par l'obéissance de Christ, substituée à la nôtre. Mais il établit de la manière la plus générale l'impossibilité de la justice par le moyen de la loi; il ne fait pas même allusion à l'obéissance de Christ à la loi, et enfin nous dit très distinctement que la justice de Dieu a été manifestée tout à fait à part de la loi.

5° Ces différentes considérations pourraient suffire à convaincre que l'enseignement théologique sur ce sujet n'a pas de fondement dans l'Ecriture, mais il y en a d'autres. Ainsi demandons-nous: Quel est le but et l'intention de la loi? On trouvera la réponse dans les passages suivants: Romains 3: 20; 5: 20; 7: 7-12; Galates 3: 19-25, etc., qui nous apprennent deux choses: d'abord, que la loi était la mesure de ce que Dieu exigeait de l'homme, en d'autres termes, la mesure de la justice humaine, de sorte que si un homme eût été capable de garder la loi tout entière, il aurait été seulement un homme juste sur la terre, ayant ainsi droit naturellement à toutes les promesses qui se rattachaient à l'observation de la loi, mais après tout, n'ayant rien d'autre qu'une justice humaine. En second lieu, qu'il était impossible pour l'homme de garder la loi, parce qu'il a une nature pécheresse, il est chair, et la pensée de la chair «ne se soumet pas à la loi de Dieu, car aussi elle ne le peut pas» (Romains 8: 7). Aussi Dieu n'avait-il jamais attendu qu'Israël gardât la loi dont le but était de donner la connaissance du péché. Elle était «intervenue afin que la faute abondât» (Romains 5: 20). «Elle a été ajoutée à cause des transgressions, jusqu'à ce que vînt la semence à laquelle la promesse est faite» (Galates 3: 19). Il n'a donc jamais été dans la pensée de Dieu que la justice vînt par la loi, car l'apôtre dit: «Si l'héritage est sur le principe de loi, il n'est plus sur le principe de promesse, mais Dieu a fait le don à Abraham par promesse» (Galates 3: 18). Si l'on prétend que l'héritage nous vient par l'obéissance de Christ à la loi à notre place, alors l'héritage vient par la loi, et c'est là précisément ce que l'apôtre combat.

La notion théologique de la justification ne s'accorde donc point du tout avec l'Ecriture, et cela provient sans nul doute d'une connaissance imparfaite de la vraie position du croyant en Christ; en fait d'une fausse conception du christianisme. On trouvera en effet que ceux qui soutiennent cette doctrine savent en général peu de chose touchant les deux natures, ni de notre position comme assis dans les lieux célestes en Christ (Ephésiens 1 et 2), ni de la pleine et complète délivrance du chrétien par la mort et la résurrection de Christ. — Mais ce n'est pas tout; cette manière d'envisager la justification est souvent associée avec une erreur positive et dangereuse. Ainsi, il en est qui maintiennent que Jésus fut sous la colère du Père durant sa vie sur la terre. Et en effet si l'on dit qu'il a été notre substitut pendant toute la durée de sa vie, je ne vois pas comment l'on peut éviter cette conclusion. On voit par là comment la plus légère déviation de la vérité peut conduire à une erreur mortelle.

Examinons maintenant quel est l'enseignement de l'Ecriture touchant la justification. J'espère que nous verrons, quand cette doctrine est débarrassée de tout raisonnement humain, combien elle est belle et simple; en mettant en avant la croix de Christ, en déployant pleinement la valeur infinie des souffrances et de la mort de Christ, et, par conséquent, le parfait caractère de ce salut que le croyant possède dans et par la mort et la résurrection de son grand Substitut.

1° En premier lieu, LE SANG DE CHRIST est, d'après les Ecritures, le fondement de notre justification, la cause qui la procure. C'est-à-dire que la base sur laquelle Dieu peut avec justice, justifier ceux qui croient, est le précieux sang, la mort de Christ. Ainsi nous lisons: «Justifiés par son sang» (Romains 5: 9); mais le mot «par» n'exprime pas toute la force du mot original qui signifie plutôt «en son sang», c'est-à-dire «dans la puissance», ou «dans la vertu de son sang». La même vérité est enseignée dans un chapitre précédent. «Etant justifiés gratuitement par sa grâce, par la rédemption qui est dans le Christ Jésus, lequel Dieu a présenté pour propitiatoire, par la foi en son sang» (Romains 3: 24, 25; comparez avec 4: 24, 25; Ephésiens 1: 7; Galates 2: 16, 21; 1 Pierre 3: 18).

Comment donc le sang de Christ devient-il le fondement de notre justification? Le sang versé signifie que la vie est donnée, car la vie est dans le sang, et c'est le sang qui fait propitiation pour l'âme (Lévitique 17: 11); et par conséquent le sang parle de mort; notre question devient donc: Comment la mort de Christ est-elle le fondement de la justification? La réponse est simple. C'est à cause de ce que la mort accomplit. Le Seigneur Jésus «a porté nos péchés en son corps sur le bois» (1 Pierre 2: 24); il «a souffert une fois pour les péchés, le juste pour les injustes, afin qu'il nous amenât à Dieu» (1 Pierre 3: 18); «il a été fait péché pour nous» (2 Corinthiens 5: 21); il était «l'Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde» (Jean 1: 29); c'est Lui que «Dieu a présenté pour propitiatoire par la foi en son sang» (Romains 3: 25). En réunissant ces passages et d'autres semblables qui se trouvent dans les épîtres, nous voyons immédiatement le caractère de la mort du Sauveur. Nous y apprenons que non seulement il a porté nos péchés sur la croix comme notre substitut, mais aussi que, dans cette heure solennelle et terrible, il portait devant Dieu tout le poids de la condition de péché et de la responsabilité de l'homme; qu'il était venu sur la scène où le premier Adam avait failli, et qu'il avait pris sur Lui toutes les conséquences de cette faute, et qu'il avait réglé pleinement et pour toujours, dans sa mort sur la croix, toute la question de nos péchés et du péché; c'est-à-dire de la condition de péché de l'homme. C'est pourquoi nous lisons que «ayant fait par lui-même la purification des péchés, il s'est assis à la droite de la majesté dans les hauts lieux» (Hébreux 1: 3); et aussi que «maintenant, en la consommation des siècles, il a été manifesté une fois pour l'abolition du péché par le sacrifice de Lui-même», et qu'il a été «offert une fois pour porter les péchés de plusieurs» (Hébreux 9: 26, 28).

Nous voyons ainsi que le Seigneur Jésus, dans sa mort, a répondu à toutes les exigences de la sainteté de Dieu, d'une manière si parfaite que Dieu est complètement satisfait; bien plus, non seulement il a pleinement porté et expié les conséquences du péché et de la chute de l'homme, mais il a vengé l'honneur de Dieu, et l'a entièrement glorifié touchant ce qui avait apporté sur la terre la ruine et la désolation. Car Jésus n'a pas seulement fait l'expiation; il a aussi, par sa mort, glorifié Dieu dans tous les attributs de son caractère, C'est pourquoi, parlant de sa mort, il dit lui-même: «Maintenant le fils de l'homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera en lui-même, et incontinent il le glorifiera» (Jean 13: 31, 32). Et encore: «Je t'ai glorifié sur la terre, j'ai achevé l'oeuvre que tu m'as donnée à faire» (Jean 17: 4). Christ subit sur la croix la colère de Dieu, parce que là il était le substitut pour les pêcheurs; là il portait nos péchés, et fut «fait péché» (2 Corinthiens 5: 21). C'est pourquoi toutes les vagues et les flots de Dieu passèrent sur sa tête dans cette heure terrible; oui, les eaux entrèrent dans son âme, et c'est sous le poids de la colère qu'il subissait, quand il a plu à l'Eternel de le froisser, de le mettre en langueur, quand il mettait son âme en oblation pour le péché (Esaïe 53: 10), c'est alors qu'il s'écria: «Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné?» (Matthieu 27: 46). Mais, béni soit son nom, il a vidé cette terrible coupe jusqu'à la lie, il a épuisé tout le jugement de Dieu contre le péché, et par là, il a fait une expiation pleine, suffisante et éternelle; en même temps, il a revendiqué en y répondant et en les maintenant, tous les droits de la sainteté de Dieu, et ainsi il a glorifié Dieu complètement et pour toujours.

2° Tel a été le caractère de la mort de Christ, et c'est pourquoi son précieux sang est devant Dieu d'une si grande et si infinie valeur que, sur cette base Dieu peut rencontrer et justifier l'impie; oui, il peut être «juste et justifiant celui qui est de la foi de Jésus». En conséquence, «la justice de Dieu» est «sur tous ceux qui croient» (Romains 3: 22, 26). Cela veut dire que Dieu est juste et justifie en vertu de Christ. Il est juste, parce que dans la croix il a été satisfait à ce que le péché encourait; le péché a été jugé de Dieu; Christ a souffert pour le péché et l'a expié. Plus que cela: le Seigneur Jésus a parfaitement magnifié Dieu et glorifié son caractère, et, au lieu que l'obligation soit maintenant tout à fait du côté de l'homme, qui avait accumulé une dette qu'il n'aurait jamais pu payer, Dieu est intervenu, et ayant été ainsi glorifié dans la mort de l'homme Christ Jésus, il est positivement juste quand il justifie l'âme qui croit en Jésus. En conséquence, c'est la justice de Dieu; car Dieu se montre juste quant aux droits de Christ. En effet, Christ est mort pour les pécheurs, et ceux qui croient sont placés devant Dieu dans toute la valeur infinie de ce précieux sang qu'il a versé pour eux, comme leur substitut C'est donc avec justice que Dieu pardonne, accepte, justifie chaque croyant; cette justice qui s'est exercée à l'égard de Christ, qui l'a ressuscité d'entre les morts et l'a glorifié à la droite de Dieu, s'exerce aussi envers chacun de ceux qui croient en Jésus, le saisit et l'amène où se trouve Christ en la présence de Dieu. Il ne peut en être autrement, car puisque le sang a répondu à tout ce que Dieu exigeait et même l'a glorifié, tout pécheur, du moment qu'il croit, se trouve revêtu de la valeur infinie de ce sang. C'est donc en réponse à la valeur du sang que la justice de Dieu (car cela est dû à Christ) se répand d'une manière bien propre à réjouir, et revêt le pécheur de sa propre perfection, de sorte qu'en Christ, il est justifié pour toujours devant Dieu. Il est accepté dans le Bien-Aimé.

Ce que nous venons de dire sera confirmé si nous regardons pour un moment au déploiement de la justice de Dieu envers Christ lui-même. Comme il était sur le point de quitter ce monde, il disait par anticipation: «Je t'ai glorifié sur la terre, j'ai achevé l'oeuvre que tu m'as donnée à faire» et s'appuyant sur son oeuvre ainsi achevée, il continue: «Et maintenant glorifie-moi, toi Père, auprès de toi-même, de la gloire que j'avais auprès de toi avant que le monde fût» (Jean 17: 4, 5). C'est-à-dire que Christ regardait au Père, afin d'être glorifié à cause de ce qu'il avait fait sur la terre, et Dieu a répondu à cette demande quand il l'a ressuscité d'entre les morts et l'a glorifié à sa droite. Ou, en d'autres mots, Christ ayant porté le jugement pour le péché et les péchés, de manière à satisfaire toutes les exigences de Dieu, et à glorifier Dieu en tout ce que Dieu est, la justice de Dieu s'est déployée en ressuscitant Christ d'entre les morts et en le glorifiant à Sa droite. En un mot, il appartenait à Christ d'être ainsi glorifié à cause de tout ce qu'il avait fait comme notre substitut. Et Dieu l'a fait, car «si Dieu est glorifié en lui (Christ), Dieu le glorifiera aussi en lui-même» (Jean 13: 32), et la justice de Dieu a été montrée en glorifiant le Seigneur Jésus. C'est pourquoi le Seigneur dit que le Consolateur convaincrait le monde de péché, de justice et de jugement, «de justice, parce que je m'en vais à mon Père, et que vous ne me voyez plus» (Jean 16: 10). Sous ce rapport donc, la justice de Dieu c'est Christ reçu dans la gloire, à la droite de Dieu.

Nous sommes maintenant en état de comprendre un autre aspect de la vérité. Dans la seconde épître aux Corinthiens, il est dit des croyants qu'ils sont «justice de Dieu en Christ» (5: 21). Ici, nous avons en plus la vérité de notre union avec Christ comme étant devant Dieu. C'est-à-dire que Dieu nous reçoit avec justice dans sa gloire, comme il a reçu Christ; car il l'a reçu en vertu de l'oeuvre accomplie pour nous, et nous par conséquent en Lui. Nous sommes «justice de Dieu en lui», car en nous bénissant de cette manière céleste et glorieuse, en nous justifiant, il ne fait que répondre aux justes droits de Christ sur Lui. Envers nous c'est pure grâce, mais ce n'en est pas moins la justice de Dieu. Il a été fait péché pour nous, Lui qui n'a pas connu le péché, «afin que nous devinssions justice de Dieu en lui».

Telle est la vraie doctrine de la justification. La base sur laquelle Dieu agit n'est pas l'obéissance de Christ à la loi, et le sang, mais c'est le précieux sang de Christ seul. La justice de Dieu n'est pas l'obéissance de Christ durant sa vie, mais c'est la réponse de Dieu à la valeur de ce sang précieux, si précieux en effet aux yeux de Dieu, qu'il constitue, dans sa grâce, un droit sur Lui pour chacun de ceux qui croient en Jésus. Cette justice fut d'abord déployée dans la résurrection de Christ (car il a été livré pour nos offenses et a été ressuscité pour notre justification), et en le plaçant dans la gloire à sa droite; elle est de nouveau déployée dans la justification de tout pauvre pécheur qui vient à Christ, et sera plus tard déployée en glorifiant tout croyant avec Christ. C'est pourquoi aussi nous pouvons dire que Christ nous a été fait justice de la part de Dieu (1 Corinthiens 1: 30); et qu'il est la fin de la loi pour justice à tout croyant (Romains 10: 4); car tout ce que nous avons de la part de Dieu, notre justification, notre glorification, est en Christ, et en Christ seul.

3° Il est à peine besoin de rappeler que le principe de la justification est la foi, — la foi en contraste et en opposition avec les oeuvres. Sur ce point, tous les chrétiens évangéliques sont d'accord. Mais nous pouvons remarquer encore le fait que la justification d'Abraham est donnée comme exemple de ce principe (Romains 4; Galates 3). A la vérité, il y a une différence bénie en notre faveur. Pour Abraham, l'objet de la foi était le Dieu de la promesse; pour nous, c'est le Dieu qui l'a accomplie. «Or ce n'est pas pour lui seul qu'il a été écrit que cela lui a été compté, mais aussi pour nous, à qui il sera compté, à nous qui croyons en celui qui a ressuscité d'entre les morts Jésus, notre Seigneur, lequel a été livré pour nos fautes et a été ressuscité pour notre justification. Ayant donc été justifiés sur le principe de la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus Christ» (Romains 4: 23-25; 5: 1).