Les bonnes œuvres (Prod'hom F.)

 ME 1905 page 92

 

Il est important de considérer ce que la parole de Dieu nous dit des bonnes oeuvres, et comment elle parle de faire le bien. En la lisant, on est tout d'abord frappé de ce qu'elle parle peu des bonnes oeuvres comme d'actes ostensibles devant les hommes.

Lisons d'abord les chapitres 5 à 7 de Matthieu. Nous y trouvons les instructions du Seigneur à ses disciples, instructions auxquelles on a donné le nom de «Sermon sur la montagne». Le royaume allait prendre le caractère de royaume des cieux. Christ, le roi, étant rejeté, allait être caché dans les cieux, et l'établissement du royaume en gloire renvoyé à plus tard; les disciples du royaume devaient donc suivre le roi rejeté ici-bas, au lieu de régner avec lui. Dès lors le Seigneur leur indique quel devra être leur caractère dans ce chemin. Il leur dit entre autres: «Vous êtes la lumière du monde: une ville située sur une montagne ne peut être cachée. Aussi n'allume-t-on pas une lampe pour la mettre ensuite sous le boisseau, mais sur le pied de lampe, et elle luit pour tous ceux qui sont dans la maison. Que votre lumière luise ainsi devant les hommes, en sorte qu'ils voient vos bonnes oeuvres, et glorifient votre Père qui est dans les cieux» (Matthieu 5: 14-16).

Le Seigneur ne dit pas: «Que vos bonnes oeuvres luisent ainsi devant les hommes», mais: «Que votre lumière», car l'enseignement du chapitre suivant montre que certaines bonnes oeuvres qui luisent devant les hommes, pâlissent devant Dieu. Ainsi le Seigneur dit: «Prenez garde de ne pas faire votre aumône devant les hommes, pour être vus par eux; autrement vous n'avez pas de récompense auprès de votre Père qui est dans les cieux. Quand donc tu fais l'aumône, ne fais pas sonner la trompette devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues et dans les rues, pour être glorifiés par les hommes. En vérité, je vous dis: ils ont leur récompense».

Lorsque, par exemple, les journaux publient combien telle personne charitable a donné pour telle ou telle oeuvre philanthropique: Honneur à elle, disent les hommes. Voilà la récompense. Tout ce qu'ils ont à attendre, ils l'ont déjà. Dieu n'a pas à s'en mêler.

Le Seigneur ajoute pour ses disciples: «Mais toi, quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite, en sorte que ton aumône soit faite dans le secret; et ton Père, qui voit dans le secret, te récompensera» (Matthieu 6: 1-4). On comprend que la louange de la part des hommes se trouvant exclue, Dieu aura à s'en occuper.

Les versets qui suivent contiennent les mêmes principes relativement à la prière et au jeûne. Dans le monde religieux, la prière et le jeûne peuvent être faits pour être vus des hommes. Nous avons donc raison de dire que lorsque les oeuvres luisent devant les hommes, elles pâlissent devant Dieu, tandis que les bonnes oeuvres des disciples du Seigneur étant le fruit de la lumière, les hommes, contraints de reconnaître que ceux qui les font sont réellement en rapport avec Dieu, sont forcés de donner gloire à Dieu, et non pas aux faiseurs de bonnes oeuvres. Comme il est dit: «Que votre lumière luise ainsi devant les hommes, en sorte qu'ils voient vos bonnes oeuvres, et qu'ils glorifient (non pas vous, mais) votre Père qui est dans les cieux».

Les exhortations de l'apôtre Pierre aux chrétiens qui séjournaient parmi les nations offrent quelque chose d'analogue. Il leur dit: «Ayant une conduite honnête parmi les nations, afin que, quant aux choses dans lesquelles ils médisent de vous comme de gens qui font le mal, ils glorifient Dieu au jour de la visitation, à cause de vos bonnes oeuvres qu'ils observent» (1 Pierre 2: 12). Les hommes observent la marche des enfants de Dieu. Ils peuvent leur imputer de mauvais motifs et des actes mauvais. Mais lorsque eux-mêmes seront visités, ils seront obligés de rendre témoignage que les chrétiens avaient raison de marcher ainsi. Seulement la gloire en est attribuée à Dieu, et non aux chrétiens. «Ils glorifient Dieu, à cause de vos bonnes oeuvres qu'ils observent».

Au nombre des bonnes oeuvres qui caractérisent les disciples du Seigneur, est compté sans doute l'intérêt qu'ils portent aux personnes qui sont dans le besoin, d'abord parmi les chrétiens, ensuite pour ceux du dehors. Au 9e chapitre des Actes, versets 36-43, Dorcas était pleine de bonnes oeuvres et d'aumônes. Ces bonnes oeuvres consistaient surtout à confectionner des vêtements pour les veuves. C'était très bien, et l'apôtre Pierre ressuscita Dorcas, pour la rendre aux veuves qui la pleuraient.

L'apôtre Paul écrivant à Tite, dit que les chrétiens de Crête devaient être prêts à toute bonne oeuvre (Tite 3: 1). Puis au verset 8: «Afin que ceux qui ont cru Dieu s'appliquent à être les premiers dans les bonnes oeuvres; ces choses sont bonnes et utiles aux hommes».

Mais de quelle source proviennent les bonnes oeuvres et l'accomplissement du bien chez les rachetés? En Ephésiens 2: 10, nous lisons: «Car nous sommes son ouvrage, ayant été créés dans le Christ Jésus pour les bonnes oeuvres que Dieu a préparées à l'avance, afin que nous marchions en elles». «Créés en Jésus Christ», est un état complètement nouveau. Ce n'est point une amélioration de notre ancien état en Adam, mais quelque chose d'absolument nouveau. C'est une nouvelle vie, car auparavant ils étaient morts dans leurs fautes et dans leurs péchés. Or la nouvelle vie venant de Dieu ne saurait s'exprimer autrement que par des bonnes oeuvres. Ces dernières, Dieu les a préparées d'avance, ainsi que la vie dont elles sont l'expression. Celui qui est créé en Jésus Christ ne les prépare pas. Elles sont parsemées sur le chemin chrétien, qui les y trouve, pour ainsi dire, l'une après l'autre. La première de ces bonnes oeuvres est de croire Dieu. Les Juifs demandaient au Seigneur: «Que ferons-nous pour faire les oeuvres de Dieu?» Il leur répond: «L'oeuvre de Dieu, c'est que vous croyiez en Celui qu'il a envoyé» (Jean 6: 29). Ensuite vient l'activité de l'amour pour Dieu et pour ses enfants. L'apôtre louait les chrétiens de Thessalonique pour l'oeuvre de leur foi, le travail de leur amour, et la patience de leur espérance. On racontait d'eux comment ils s'étaient tournés des idoles vers Dieu, pour servir le Dieu vivant et vrai, et pour attendre des cieux son Fils (1 Thessaloniciens 1). Certes ce sont là de bonnes oeuvres. Les prières des enfants de Dieu sont aussi du nombre. Parmi les bonnes oeuvres préparées d'avance, il faut en ajouter encore un grand nombre que nous appellerions des oeuvres d'abstention. Le chrétien rend témoignage en s'abstenant de participer à tout ce qui n'est pas conforme à la parole de Dieu. Ces bonnes oeuvres-là ne seront approuvées ni du monde, ni des chrétiens qui ne marchent pas dans la vérité, mais appréciées par Dieu; elles ont valu la prison et même l'échafaud, à beaucoup de chrétiens fidèles. Les païens n'admettaient pas que l'on n'adorât plus leurs idoles; plus tard, l'Eglise romaine ne voulait pas qu'on dérogeât à ses institutions.

Accomplir le bien est donc le fruit de la nouvelle vie, et selon les voies de Dieu, il aboutit à la vie éternelle. C'est ce que nous trouvons en Romains 2: 1-10, où il est dit que le juste jugement de Dieu rendra à chacun selon ses oeuvres: «à ceux qui, en persévérant dans les bonnes oeuvres, cherchent l'honneur, la gloire, et l'incorruptibilité — la vie éternelle». «Gloire, et honneur, et paix à tout homme qui fait le bien». Ces passages n'expliquent pas proprement d'où proviennent ces bonnes oeuvres, cependant ceux dont il est question sont désignés comme y persévérant et cherchant la gloire, l'honneur, et l'incorruptibilité en haut, non pas sur la terre. L'incorruptibilité est relative au corps. Il est dit en 2 Timothée 1: 10, que «notre Sauveur Jésus Christ a annulé la mort, et a fait luire la vie et l'incorruptibilité par l'évangile». Les rachetés ont la vie; comme conséquence, ils auront l'incorruptibilité. En 1 Corinthiens 15: 53, l'apôtre dit: «Car il faut que ce corruptible revête l'incorruptibilité», un état que la corruption ne peut attaquer. D'après ce passage, les personnes dont il est question en Romains 2: 5-10, sont celles qui possèdent une nouvelle vie, vie s'exprimant par l'accomplissement du bien. Selon les voies de Dieu, accomplir le bien aboutit nécessairement à la vie éternelle. Romains 6: 22, nous le dit encore: «Mais maintenant, ayant été affranchis du péché et asservis à Dieu, vous avez votre fruit dans la sainteté, et pour fin la vie éternelle». La vie éternelle est d'un côté le don de grâce de Dieu, mais de l'autre une marche dans la pratique du bien y aboutit.

La déclaration du Seigneur en Jean 5: 28, 29, nous offre la même pensée: «Ne vous étonnez pas de cela; car l'heure vient en laquelle tous ceux qui sont dans les sépulcres entendront sa voix (la voix du Fils de l'homme); et ils sortiront, ceux qui auront pratiqué le bien, en résurrection de vie; et ceux qui auront fait le mal, en résurrection de jugement». Ici encore, le passage n'indique pas d'où provient la pratique du bien chez ceux qui auront part à la résurrection de vie, mais la Parole rend témoignage ailleurs, qu'il s'agit des rachetés (voyez Luc 14: 14; Actes des Apôtres 4: 2; 1 Corinthiens 15: 23, 52, 53; 1 Thessaloniciens 4: 16; Hébreux 11: 35; Apocalypse 20: 5). Si en Romains 2 et 4, la pratique du bien aboutit à la vie éternelle, en Jean 5: 29, elle aboutit à la résurrection de vie. Mais ce bien est toujours le produit et l'expression de la vie nouvelle.

Ainsi, la pratique du bien, chez les rachetés, aboutit à la vie éternelle; la pratique du mal, chez les incrédules, au jugement éternel.

Sans doute, selon le gouvernement de Dieu, tout homme qui fait le bien et évite le mal, en a du profit sur la terre; c'est ce qu'enseigne le livre des Proverbes. Mais s'agit-il du bien que Dieu récompensera dans le ciel, il est toujours l'expression de la nouvelle vie. Un grand nombre de rachetés n'ont pas eu le temps de pratiquer beaucoup le bien, et cependant ils l'auront fait. Croire au Sauveur et confesser son Nom à la onzième heure, ces oeuvres là ont du prix devant Dieu. Le brigand sur la croix n'avait pas eu le temps de faire beaucoup de bien, mais confesser la perfection de son Sauveur, sans l'avoir connu auparavant, croire en Lui, et se recommander à Lui pour le jour où il reviendrait en gloire, tout cela était d'un grand prix devant Dieu.

Une autre remarque, c'est que les bonnes oeuvres ne sont pas toujours indiquées dans la Parole comme formant contraste avec les mauvaises. Citons-en deux exemples. 1° En Jean 3: 19-21, le Seigneur dit: «Or c'est ici le jugement, que la lumière est venue dans le monde, et que les hommes ont mieux aimé les ténèbres que la lumière, car leurs oeuvres étaient mauvaises; car quiconque fait des choses mauvaises hait la lumière, et ne vient pas à la lumière, de peur que ses oeuvres ne soient reprises; mais celui qui pratique la vérité vient à la lumière, afin que ses oeuvres soient manifestées, qu'elles sont faites en Dieu». — Ayant dit: Celui qui fait des choses mauvaises hait la lumière, le Seigneur n'ajoute pas comme contraste: Celui qui fait des choses bonnes vient à la lumière. Il dit: «Mais celui qui pratique la vérité vient à la lumière, afin que ses oeuvres soient manifestées, qu'elles sont faites en Dieu». Il s'agit donc ici de bonnes oeuvres qui sont la pratique de la vérité, la lumière les manifestant comme telles. Combien de bonnes oeuvres, réputées telles par les hommes, ne sont pas la pratique de la vérité!

2° En Galates 5: 19-22, nous trouvons un autre contraste. Aux versets 19-21, l'apôtre énumère les mauvaises oeuvres de la vieille nature, les oeuvres de la chair. — Dans tout le passage (versets 16-25), la chair est mise en contraste avec l'Esprit. Au verset 22, l'apôtre ne dit pas, en contraste avec les oeuvres de la chair: «Les oeuvres de l'Esprit», mais: «Le fruit de l'Esprit». Le fruit est un produit. Ce fruit se manifeste par de bonnes oeuvres, car, après avoir nommé comme fruit de l'Esprit: l'amour, la joie, la paix, l'apôtre ajoute: la longanimité, la bienveillance, la bonté, la fidélité, la douceur, la tempérance; de bonnes oeuvres, sans doute, mais un produit de l'Esprit, qui ne se manifeste pas toujours par des choses bien apparentes devant les hommes.

Cela nous amène à remarquer combien souvent la Parole nous parle de fruit. Le fruit est un produit, quelque chose qui vient à maturité et que Dieu peut cueillir. Les hommes parlent beaucoup de la nécessité de faire des bonnes oeuvres, la Parole parle de porter du fruit. Les bonnes oeuvres des hommes ne sont pas souvent un fruit que Dieu puisse cueillir.

L'enseignement du Seigneur à ses disciples (Jean 15), est bien remarquable à cet égard. Le Seigneur dit: «Moi, je suis le vrai cep, et mon Père est le cultivateur, Tout sarment en moi qui ne porte pas de fruit, il l'ôte». Celui qui professe se rattacher à Christ, qui n'a pas la vie, et ne porte pas de fruit, sera ôté. Mais il ajoute: «Et tout sarment qui porte du fruit, il (mon Père) le nettoie, afin qu'il porte plus de fruit». Au verset 5: «Celui qui demeure en moi, et moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruit». Au verset 8: «En ceci mon Père est glorifié, que vous portiez beaucoup de fruit, et vous serez mes disciples». Enfin, au verset 16: «Ce n'est pas vous qui m'avez choisi; mais c'est moi qui vous ai choisis et qui vous ai établis, afin que vous alliez, et que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure».

En Romains 6: 22, déjà cité, l'apôtre dit: «Mais maintenant, ayant été affranchis du péché et asservis à Dieu, vous avez votre fruit dans la sainteté, et pour fin la vie éternelle». Puis, au chapitre 7: 4: «, C'est pourquoi, mes frères, vous aussi, vous avez été mis à mort à la loi par le corps du Christ, pour être à un autre, à celui qui est ressuscité d'entre les morts, afin que nous portions du fruit pour Dieu».

Il y aurait encore d'autres passages analogues, mais ceux-ci suffisent pour montrer que les vraies bonnes oeuvres sont un produit divin, un fruit que Dieu peut cueillir et qui le glorifie.

N'oublions pas en terminant de rappeler une bonne oeuvre très appréciée par le coeur du Seigneur. Marie de Béthanie voulut, au moment opportun, témoigner son affection pour son Seigneur, en honorant sa personne. Elle avait un parfum de grand prix (il coûtait environ trois cents francs) et le répandit sur Lui. Le Seigneur montre combien il apprécie cette bonne oeuvre faite envers Lui, et lui donne une signification magnifique: «Elle a anticipé le moment d'oindre mon corps pour ma sépulture» (embaumement).

Remarquons que le Seigneur était seul à apprécier cette bonne oeuvre. Les disciples même en étaient indignés, et reprenaient vivement Marie. Cet argent, selon eux, était perdu, et aurait pu être mieux employé en le distribuant aux pauvres. En Jean 12, Judas est le porteur de cette désapprobation (Matthieu 26: 6-13; Marc 14: 3-9; Jean 12: 1-8).

Mais Marie emporte dans son coeur la douceur d'être approuvée du Seigneur, et peut apprendre que Jésus apprécie sa bonne oeuvre, bien au delà de sa propre intelligence spirituelle. Le coeur du Seigneur est satisfait, celui de Marie l'est aussi. Puissions-nous imiter cette femme.