Notes sur l'évangile de Luc

ME 1907 page 3

 

Notes sur l'évangile de Luc. 1

Chapitres 1 et 2. 2

Chapitres 3 et 4. 5

Chapitre 5. 8

Chapitres 6 et 7. 11

Chapitre 7. 14

Chapitre 8. 17

Chapitre 9. 20

Chapitre 10. 24

Chapitre 11. 27

Chapitre 12. 30

Chapitre 13. 33

Chapitres 14 et 15. 36

Chapitres 16 et 17. 39

Chapitre 17. 42

Chapitre 18. 44

Chapitres 19 et 20. 47

Chapitres 20 et 21. 50

Chapitre 22: 1-38. 53

Chapitre 22: 39-71. 56

Chapitre 23. 59

Chapitre 24: 1-32. 61

Chapitre 24: 33-53. 65

 

Chapitres 1 et 2

Impossible de lire les deux premiers chapitres de cet évangile sans contempler les cieux ouverts, largement ouverts, aux regards de la terre. Est-ce de la joie que vous éprouvez en sentant la proximité du ciel? Dieu est un intrus pour le coeur qui cherche ailleurs son bonheur. Nous avons à nous appliquer personnellement toutes les Ecritures. Le ciel s'était ouvert magnifiquement lors du songe de Jacob. Il s'ouvre pour Etienne, quand il voit la gloire de Dieu et Jésus assis à sa droite. Ici, les cieux s'ouvrent pour communiquer avec la terre, et à cette vue la réponse de nos coeurs devrait être:

Plus près de toi, mon Dieu, plus près de toi!

Rien de marquant ne s'était produit depuis le temps des prophètes. Mais voici que le ciel alors s'ouvre avec un témoignage. Cela se renouvellera plus tard après la parenthèse actuelle. Servant comme d'autres dans le temple, Zacharie reçoit de l'ange une visite qui le surprend. Il n'y était point préparé et telle est son émotion qu'il doit être soutenu par une parole d'encouragement: «Ne crains pas». La présence de Dieu vous effraie-t-elle? D'un côté, cela est juste. Seule la grâce de Dieu peut calmer les alarmes de créatures en état de révolte. L'ange exprime la pensée de Dieu: «Ne crains pas». Votre coeur peut-il s'appliquer un semblable encouragement? Avez-vous éprouvé les angoisses d'un pécheur qui arrive ainsi à la délivrance? Une application personnelle de ces choses est nécessaire. Zacharie n'est pas préparé à cette rencontre; il le confesse et l'ange le reprend. Arrêtons-nous un peu pour saisir l'enseignement qui en découle. Ne ressentez-vous pas comme une sorte d'insulte, tout manque de confiance à votre égard? Dieu daigne remarquer cette lacune dans nos rapports avec Lui, et l'ange exprime un reproche: «Moi je suis Gabriel qui me tiens devant Dieu». Et pourquoi, bien-aimés, pourquoi votre foi est-elle aussi prise à partie? Avez-vous lu l'épître aux Romains attentivement? Pourquoi Dieu vous demande-t-il compte de votre foi? Préféreriez-vous qu'il ne fît aucun cas de vos confidences? Entre amis, il ne saurait en être ainsi. Nous n'apportons point à la lecture des Ecritures un coeur assez ouvert à l'intimité des relations qu'elles révèlent. En connaître la lettre est peu de chose: leur enseignement se mesure par la proximité où elles placent le coeur et la conscience vis-à-vis de Dieu.

Au sixième mois, l'ange est envoyé dans un lointain village de Galilée, porteur d'un message pour Marie, Dieu continuant à faire des communications à la terre. La foi de Marie est plus simple que celle de Zacharie. Combien souvent il arrive que des âmes sans prétentions, ni grande culture, possèdent la vérité de Dieu plus pleinement que d'autres aux connaissances bibliques étendues. De nouveau l'ange répète: «Ne crains pas». Ne passons point à la légère sur semblable encouragement, émanant d'un messager céleste. Ensuite, il s'étend sur ce que Dieu se propose de faire. Et Marie lui répond: «Voici l'esclave du Seigneur; qu'il me soit fait selon ta parole». Nos coeurs sont-ils l'écho de cette voix? Comment répondre à la grâce? Par la foi. Le seul moyen de reconnaître une faveur offerte, c'est de l'accepter. La grâce de Dieu apporte le salut que le devoir du pécheur est d'accepter. C'est ainsi que l'eunuque peut aller son chemin tout joyeux. La joie de la foi répond à la communication de la grâce. La joie est l'élément qui répond à l'Evangile. Une bonne nouvelle qui ne rend pas heureux n'a point été comprise. Quand j'ai prêté l'oreille à l'Evangile comme à un message de bonheur, ma réponse est la joie. C'était le cas de Marie. Réunies, Elisabeth et Marie nous offrent un bel exemple — unique peut-être dans les Ecritures — de communion par le Saint Esprit; la femme du souverain sacrificateur et la fiancée du charpentier, éloignées l'une de l'autre sur le terrain humain, mais intimement rapprochées sur celui de Dieu. Elisabeth s'incline devant Marie, comme celle des deux qui reçoit la plus grande mesure d'honneur. «Et d'où me vient ceci que la mère de mon Seigneur vienne vers moi?» La communion naît des rapports spirituels, après que les choses terrestres ont été mises de côté. Aucun sentiment d'envie chez Elisabeth, point d'orgueil dans le coeur de Marie. La première n'est que douceur, la seconde tout humilité. Nombreuses sont les relations entre enfants de Dieu aujourd'hui, mais combien peu la communion les distingue. La communion est dans la mesure de la vie avec Christ.

La parole rendue à Zacharie est une chose belle à considérer. L'incrédulité avait fermé sa bouche; la foi la rouvre. Dieu afflige dans un but; pas volontiers, et toujours avec un résultat en vue. Il était bon pour Zacharie d'être temporairement réduit au silence, mais aussitôt que faire se peut, sa langue est déliée et sa bouche s'ouvre en paroles qu'il ne prévoyait même pas.

Le ciel ne s'ouvre ici que sur un tout petit point de la terre. Au chapitre 2, nous voyons le vaste monde d'alors entre les mains du César. Mais quittons-le pour gagner les champs de Bethléhem. Le tableau qui s'y déroule surpasse encore en beauté celui du chapitre 1. Les cieux ouverts ne livrent plus seulement passage à un ange seulement, mais à toute la multitude de l'armée céleste déclarant la gloire de Dieu. Rien que de naturel dans l'émotion des humbles bergers qui, eux aussi, reçoivent, des voûtes éthérées, l'encouragement toujours le même: «N'ayez point de peur». Comme un écho, le ciel répercute ces mêmes paroles adressées a de pauvres êtres qui tremblent dans leurs péchés. Prêtons l'oreille, elles n'ont rien de banal; elles sont pour nous au même titre que pour eux, pauvres bergers pécheurs comme nous. La loi leur confère le droit de se les approprier: «Aujourd'hui vous est né un Sauveur», proclame le céleste messager. Non point un juge, ni un législateur. «La grâce de Dieu apporte le salut», dit l'apôtre. Les anges s'entretiennent du salut, fil d'or qui traverse le livre de Dieu depuis «la semence de la femme» jusqu'à ces mots: «Que celui qui veut, prenne…» C'est pourquoi: «Et ceci en est le signe pour vous, c'est que vous trouverez un petit enfant emmailloté et couché dans une crèche». Pour nous, c'est bien simple, mais à Christ cela a tout coûté. Coûté de quitter la gloire éternelle pour être fait chair et venir souffrir ici-bas, déjà comme un faible enfant dans une crèche. Au premier contact de la nature qu'il vient revêtir, sa carrière de douleur se révèle tout entière.

Si même à distance je vous désigne quelqu'un qui a été bon pour vous, votre intérêt pour sa personne ne s'éveillera-t-il pas immédiatement? Quel ne doit-il donc pas être à l'égard du Seigneur Jésus, quand vous pensez à Lui durant les trois heures sombres de la croix? Il nous faut une foi simple qui mette notre âme en contact avec la personne de Jésus.

Aussitôt la bonne nouvelle proclamée, l'armée céleste entonne l'hymne de l'allégresse, accomplissement de cette parole de l'apôtre: «Dieu manifesté en chair — vu des anges». Les anges témoignent d'un vif intérêt à l'égard de ce qui se passe ici-bas. Dans l'Ancien Testament, les figures de chérubins au-dessus de l'arche montrent par leur attitude leur désir de connaître les choses qui concernent Christ. Les vérités du Nouveau Testament prennent cette forme dans l'Ancien. A l'instant même où il est manifesté, les anges sont à leur poste, afin de contempler la voie du Fils de l'homme. Leur intérêt est évident, sans qu'ils aient toutes les raisons qui excitent le vôtre.

Nous rencontrons ensuite Siméon dans le temple. A l'instar des anges, d'Elisabeth et de Marie, il entonne un chant de joie. Averti par le Saint Esprit, il reconnaît le petit enfant, et immédiatement le prend dans ses bras comme Sauveur. En avez-vous fait autant, vous appropriant ainsi le salut? Nous ne devons rien à Marie, ni à l'Eglise, ni aux frères; la foi refuse tout tribut à la créature. Un frère nous viendra peut-être en aide, un ami peut réjouir notre coeur, mais dès qu'il s'agit de l'âme, de l'éternité, nous ne connaissons plus que Jésus. Quel misérable sophisme que le culte de Marie. Comme moyen de salut, ni Marie, ni aucun des saints du calendrier ne peut rien. Siméon est prêt maintenant à s'en aller: «ceux qu'il a justifiés, il les a aussi glorifiés». Au moment où l'âme est mise en contact avec le sang, elle est prête pour la gloire. Croître dans la connaissance est chose bénie certainement, mais aussitôt entré par la foi dans le royaume du Fils bien-aimé de Dieu, me voilà rendu capable de participer au lot des saints dans la lumière. Aurai-je à me perfectionner pour avoir droit à cet héritage? Le développement spirituel est désirable, mais le sang versé est mon seul titre auprès de Dieu. La vigilance chrétienne permet-elle une pensée charnelle? Non. Néanmoins, elle ne peut constituer pour moi un état de service. Le brigand sur la croix boit à la source de la vie et son second pas c'est le paradis. Il en est de même de Siméon: le salut est dans ses bras, la couronne sur sa tête.

Ensuite vient Anne, la veuve. Les jours de son deuil sont finis. Une joie intense leur succède et chacun l'entend de sa bouche. Plus nous entrerons dans l'esprit de ces chapitres et plus notre vie sera céleste. Le ciel descend ici dans nos âmes. Voyez-vous la plus légère ombre à ce tableau? l'affliction, la souillure? Non, nous voyons seulement des anges aux vêtements étincelants, et débordant de bonheur. En Sa présence, tout est force et joie. Sous la loi, le souverain sacrificateur affligé en était exclu tout comme le sacrificateur souillé. Comme le ciel est le lieu de la sainteté parfaite, il est aussi celui de la joie sans bornes

A la fin du chapitre, nous avons quelque peu honte de Marie. Seule elle laisse une ombre sur ces pages. Zacharie en fait autant pour commencer, mais sa foi restaurée rachète ensuite sa lenteur. Et c'est Marie que les hommes portent aux nues! Ah! la subtilité des ruses de Satan! Tout lui est occasion pour placer quelque chose entre le coeur et Christ. Comment cela se fait-il? demande l'homme parfait, Jésus. Ah! il ne me faut nul autre que Jésus! Ne confiez vos âmes qu'à Christ seul. J'ai même à juger d'un don en exercice, mais quant à votre âme, mon mandat est de vous «remettre à Dieu et à la parole de sa grâce». Un des dogmes de la chrétienté est bien qu'il faut remettre l'âme à l'Eglise. Irais-je le faire? Avec l'aide de Dieu, jamais! et qu'il veuille nous pénétrer de la toute suffisance de Jésus pour notre conscience, autant que pour la satisfaction de notre coeur. Amen.

Chapitres 3 et 4

Un laps de temps s'est écoulé entre les chapitres précédents et celui-ci. Le petit enfant, l'adolescent est arrivé à l'âge de trente ans. Comment devons-nous nous représenter le Seigneur durant cette période de dix-huit années? Quelles conceptions m'est-il permis d'entretenir à cet égard? Les derniers versets du chapitre 2 répondent à cette question d'une façon pleine d'enseignement. Il est pendant toute cette période sous la loi, il croît et se développe comme une gerbe sans tare, la seule qui pût être trouvée parmi les hommes: «Il avançait en faveur auprès de Dieu et des hommes». Fruit naturel de l'accomplissement de la loi. Plus tard, il provoquera l'inimitié et la haine, mais, supposant que moi j'accomplisse la loi, aimant mon prochain comme moi-même, ne jouirais-je pas de la faveur de tous les hommes? Il en est ainsi du Seigneur. Je vous invite à considérer avec attention un sujet aussi intéressant.

De la crèche à la croix, il se révèle par une seule et même pensée d'amour et d'abnégation, diversifiée dans son expression, mais jamais amoindrie dans sa mesure, parfaite devant Dieu en tout et partout. Pas le plus petit défaut n'est trouvé en Lui d'un bout à l'autre de sa carrière. Qu'il est bon de se dire qu'un tel homme a traversé la terre sous le regard de Dieu. Il était aussi parfait quand il grandissait dans l'obéissance à ses parents, que lorsque le voile fut déchiré.

Dix-huit ans se sont écoulés et son ministère commence. Après avoir glorifié Dieu sous la loi, il vient marcher parmi les hommes comme témoin de la grâce — déployer les effets de cette grâce envers un monde ruiné par le péché, et les déployer sous différentes faces glorieuses. Ici, c'est celle de l'homme parfait sous l'Evangile. Il est introduit par Jean. Jean avait prêché le baptême de repentance: «Produisez donc des fruits qui conviennent à la repentance». Moïse avait donné une loi qui ne fut point gardée, Jean ordonne la repentance et n'est pas écouté, et c'est là-dessus que le Seigneur vient apporter la grâce. Si je vous avais offensé, seriez-vous disposé à me fournir l'occasion de me repentir? Le ministère de Jean n'est pas autre chose. Sur un chemin aussi simple que le chemin de Dieu, quel voyageur peut se fourvoyer? Avant d'abandonner l'homme qui a violé la loi, Dieu lui fournit toute facilité de se repentir. Mais ici encore il a failli, ne se souciant pas davantage de repentance que d'obéissance à la loi. Tous nous avons à passer jugement sur nous-mêmes en reconnaissant la ruine absolue du moi. Je me suis détruit moi-même, mais en Dieu est mon secours.

Le Seigneur vient à Jean, mais n'est pas un seul instant soumis à son ministère. Avant même qu'il sorte de l'eau, le Saint Esprit, descendant comme une colombe, le consacre pour son ministère propre. Pourquoi? Pour une raison aussi simple que merveilleuse. Les fruits de la repentance ne peuvent être demandés de qui n'a jamais violé la loi. Vous ne vous attendez pas à ce qu'une personne se repente qui ne s'est en aucune occasion trompée. Il venait accomplir toute justice. Le baptême de Jean était l'ordonnance divine à laquelle il se soumettait, bien qu'il ne pût s'y arrêter un seul instant. Quel tableau de parfaite beauté morale! Le Seigneur accomplissant la loi de Moïse trente années durant et passant au baptême de Jean sans y être retenu une minute. Maintenant il s'avance pour entreprendre son oeuvre à Lui, un ministère qui ne demande rien, ni de vous ni de moi, mais nous apporte tout aux uns et aux autres. Moïse et Jean vinrent dans le chemin de la justice, mais maintenant nous trouvons cette différence: la loi nous manifeste dans toute notre ruine, tandis que l'Evangile révèle Dieu dans la plénitude des richesses de sa grâce en salut.

Le chapitre 4 renferme autant de beautés que les précédents. Le ministère du Seigneur maintenant établi, que va-t-il faire en premier lieu? Qu'est-ce qu'un chacun doit faire avant de s'adresser aux autres? Se parler à lui-même. N'allez pas à la légère entreprendre l'éducation d'autrui. «Toi qui prêches qu'on ne doit pas dérober, dérobes-tu?» Avant d'attaquer le pouvoir de Satan, le Seigneur doit lui résister pour démontrer à l'adversaire qu'il n'a rien en Lui.

Je ne puis réprimer le mal auquel j'ai part. Ici donc, il manifeste clairement aux yeux de l'adversaire l'absence totale en Lui de tout principe et de la moindre participation à la puissance des ténèbres. Le Saint Esprit le conduit comme champion de la sainteté, comme champion de la lumière — luttant avec les ténèbres et remportant la victoire sur toute la ligne. Satan peut se présenter sous bien des formes différentes. Il essaie de faire pénétrer dans le Seigneur ce qu'il fît entrer en Adam, mais sa défaite, ici, est aussi complète que sa victoire le fut alors. Le 3e chapitre de la Genèse nous donne la défaite de l'homme, celui-ci la victoire de l'homme. Avez-vous jamais étudié avec intérêt ce sujet de la tentation du Seigneur? Notre stupidité seule nous empêche d'être captivés par chaque scène, chaque acte, et le plus petit détail de sa marche ici-bas. Il nous fait bien comprendre ces mots: «Le prince de ce monde vient, mais il n'a rien en moi».

Dans la puissance de l'Esprit, le Seigneur regagne maintenant la Galilée, entre dans la synagogue pour enseigner et prend le livre du prophète Esaïe. Il ne le trouve pas ouvert, mais cherche lui-même le chapitre 61. Pourquoi? Parce que ce chapitre est l'expression, intime et précieuse, du ministère qu'il venait entreprendre, le ministère de la grâce infinie qui y est dépeinte dans les termes mêmes dont toute sa vie sera la manifestation. Avons-nous, vous et moi, le droit d'écouter cette voix? Elle ne demande rien de ce que réclamaient Moïse et Jean-Baptiste. Je suis appelé à écouter Celui qui fait tout pour moi. Votre coeur, en présence de Dieu, se sent-il comme devant un juge ou devant un Sauveur? Par nature, vous êtes devant le juge, mais l'Evangile le présente comme un Sauveur. Tant que vous vous représentez Dieu comme exigeant de vous quelque chose, vous êtes sous la loi, mais si votre oreille est ouverte aux échos de la grâce, vous êtes sur le terrain de l'Evangile.

Heureuse l'âme qui écoute la voix de Jésus, puissance bien plus capable de purifier le coeur que celle de Moïse et Jean-Baptiste. «La joie de l'Eternel est votre force». Désaltéré à cette source, mon coeur en sera trop réjoui pour se soucier encore de servir l'orgueil et la vanité.

Puis il ferme le livre, comme pour dire: «Tout est là». En l'écoutant, ai-je bien saisi que là est mon repos à toujours? Heureux le pauvre pécheur assez conscient du trésor déposé dans son coeur pour l'y enfermer à la place même où Jésus ferma le livre. Ceux qui l'entendent s'étonnent des paroles de grâce tombant de sa bouche. «Celui-ci n'est-il pas le fils de Joseph?» demandent-ils. Quel mobile dicte ici la question? L'orgueil qui refuse l'enseignement donné par un fils de charpentier. L'élève d'un collège, ayant reçu l'enseignement des hommes serait, à leurs yeux, un prédicateur bien préférable. Le Seigneur discerne les deux courants qui se partagent leurs coeurs. Un simple sentiment éveillé dans l'esprit contiendra-t-il une puissance morale? Il existait ici mais il est dominé par l'orgueil. Seule la foi a de la valeur, ce principe qui saisit Jésus. C'en est fait de leur admiration, ils se sentent déroutés. Dominés par l'entraînement de l'orgueil, ils mettent le sentiment de côté, et volontiers maintenant ils le jetteraient du haut de la colline en bas. Qui se fie à son propre coeur est insensé. L'émotion religieuse si répandue aujourd'hui, a ma sympathie, mais point du tout ma confiance. Il faut saisir Christ pour être sur de la victoire. Les convoitises du coeur sont trop puissantes pour céder à de simples émotions.

Le Seigneur enseigne maintenant dans la synagogue de Capernaüm où tous s'étonnent de sa doctrine, et au coucher du soleil, il guérit tous les malades.

Voyons maintenant, au chapitre 5, comment et où se forme le lien entre lui et vous. La seule admiration, ainsi que nous l'avons vu, ne le crée pas, non plus que la guérison du corps; d'entre les dix lépreux, un seul revint Lui rendre hommage. Rien autre qu'une oeuvre dans la conscience ne peut y conduire. Vous avez à reconnaître vos besoins, à apprendre qu'un pauvre pécheur ne saurait se passer de Lui. Alors se forme ce lien pour l'éternité. Pierre en est un exemple. Quelle bénédiction de comprendre la simplicité de ce fait. Le monde se targue de sa religiosité, de sa sagesse, de ses ressources, mais l'Evangile a vite fait de réduire tout ceci à néant. L'Evangile me fait sentir le besoin d'un Sauveur, pour me révéler ensuite que j'ai un Sauveur. Si quelqu'un se déclare encore incapable de dire: «je le possède», je lui demande alors: «le désirez-vous vraiment?» Dans ce cas, vous êtes le bienvenu auprès de Lui.

«Il se tenait sur le bord du lac de Génézareth», et monte dans une nacelle, la nacelle de Pierre. Pierre, qui a bon coeur, la Lui prête volontiers. Comme tout ceci nous est simplement rapporté! Jésus enseigne les foules et ensuite: «Mène en pleine eau, et lâchez vos filets pour la pêche», dit-il. «Nous avons travaillé toute la nuit, et nous n'avons rien pris; mais sur ta parole je lâcherai le filet». Réponse d'un homme bien disposé à prêter sa barque à un étranger et à rendre à cet étranger un petit service qu'il lui demande. Mais à la vue de la multitude des poissons, un lien se forme que rien ne détruira plus, et il s'écrie: «Seigneur, retire-toi de moi; car je suis un homme pécheur». Comment l'avait-il appris? La pêche miraculeuse devenait pour sa conscience une expression de la gloire divine. Le voile tombait de la face du Nazaréen et laissait voir la gloire de Dieu. Quel autre que Dieu pouvait faire arriver dans le filet de Pierre toutes les richesses de la mer? Sa conscience, mise en contact avec la gloire, lui révèle qu'il est un pécheur. Comment savez-vous que vous êtes pécheur? Par cette conviction intime que si Dieu venait à descendre des hauteurs de l'azur pour visiter la terre, pas davantage qu'Adam, vous ne pourriez vous tenir devant Lui. Bien plutôt demanderiez-vous aux rochers de tomber sur vous. Entre Dieu et l'homme, les plus douces relations existent à cette belle aurore du 2e chapitre de la Genèse. Au 3e chapitre, Adam s'enfuit de devant l'Eternel pour se cacher derrière les arbres du jardin, marquant ainsi la différence entre l'innocence et le péché. «Retire-toi de moi», s'écrie Pierre. Et que répond le Seigneur? «Pauvre pécheur, qui comprend maintenant quel besoin tu as de moi, me voici, ne crains pas». Pareille rencontre s'est-elle jamais produite entre votre âme et Christ? Vous êtes-vous reconnu un pauvre pécheur sans ressource aucune et pour lequel Christ est tout? Votre admiration, vos études, vos sentiments peuvent avoir la Bible pour objet, mais cela ne signifie rien. Ce qu'il vous faut, c'est une conscience qui ait à faire à Lui. Comme c'est simple! Que cette simplicité est digne de Dieu! «Dieu qui a dit que du sein des ténèbres la lumière resplendît, a relui dans nos coeurs pour faire luire la connaissance de la gloire de Dieu dans la face de Christ». Celui qui a dit: «Que la lumière soit», dit aussi: «Crois et sois sauvé».

Chapitre 5

Nous avons poursuivi notre méditation jusqu'au milieu du chapitre 5, et nous avons vu le Seigneur établi dans son ministère. Si nous examinons attentivement les traits caractéristiques de ce ministère, nous découvrons la pensée de Dieu. Ce qu'a été le Seigneur, Dieu l'est. Il nous enseigne, non point par de longs discours faits par d'autres, mais en agissant et en parlant lui-même. Ne préférerions-nous pas apprendre à le connaître par ses propres actions, plutôt que de le devoir à d'autres? Nous ne passons pas notre temps à parler de nous-mêmes aux autres, nous laissons nos actes le faire pour nous.

Une note de louange doit s'élever ici de nos coeurs pour le Seigneur. Le Fils est descendu au milieu de nous, non seulement personnellement, par l'incarnation, mais encore en entrant pleinement dans les détails journaliers de l'existence, et il nous dit: «Celui qui m'a vu a vu le Père». Ne nous arrêterons-nous pas ici pour prendre garde à la nature de son ministère? C'est une route royale qui nous conduit jusque dans le sein du Père. Nous voyons Dieu lui-même dans ce que le Seigneur dit et fait. Les cieux racontent la gloire de Dieu, et l'étendue annonce l'ouvrage de ses mains, mais l'étendue n'a pas été glorifiée, à cause de la gloire qui l'emporte de beaucoup. Celui qui a vu Dieu dans la face de Jésus, ira-t-il le chercher dans les cieux? Le coeur en serait-il satisfait? Après avoir contemplé Dieu dans la face de Jésus Christ, ce ne sont plus les gloires de sa création, des cieux en haut et de la terre en bas, qui peuvent me satisfaire; autant renvoyer à l'alphabet l'homme qui a fait ses délices de la littérature. Christ est à la fois l'instructeur et l'étude. Comme maître seulement, qu'est-ce qu'il m'enseignerait? Mais quand il se place devant moi comme une leçon à apprendre, je n'ai qu'à la lire. La gloire morale qui le caractérise ressort de son ministère, et celui qui l'a vu a vu le Père.

Nous avons vu naître, au commencement du chapitre, le lien formé entre Christ et Pierre. Au chapitre précédent, l'admiration seule n'a pu l'établir. Un premier assaut de l'orgueil de la vie l'a mis en pièces. Même la guérison du corps ne le forme pas d'une manière permanente. Ceux qui l'avaient reçue continuent à aller et venir, mais du moment que la conscience forge le premier anneau de la chaîne, il ne suffit pas d'aller et de venir, mais il faut venir et demeurer. Et jusqu'à maintenant, c'est bien la même chose. Le lien ne saurait être stable si nous n'avons pas le sentiment qu'il y a une relation entre la conscience et Christ. L'admiration est juste assurément, mais si nous nous contentons d'admirer, le lien peut se briser au premier choc de l'orgueil; nous devons nous écrier «Je te veux, toi, de toi je ne saurais me passer». Voilà notre place, comme ce fut celle de Pierre; et Pierre et Christ furent unis pour l'éternité. Rien de plus simple. Je ne voudrais pas qu'autre chose que mes seuls besoins m'attachât à Christ; quand ce lien est formé, il devient une telle bénédiction que je ne l'échangerais contre rien au monde. Adam est, dans un sens, plus heureux après avoir quitté le jardin; il a fait plus ample connaissance avec Dieu. Créer les cieux n'est point, de la part de Dieu, un acte de condescendance, tandis que pour vêtir un pauvre pécheur nu, il a dû se dépouiller lui-même. Genèse 3 ouvre la porte à Jean 13. Je ne suis point surpris en voyant le Seigneur laver les pieds de ses disciples. Dieu trouve sa joie dans l'oeuvre de la grâce. Adam eût pu marcher au milieu des fleurs d'Eden pendant l'éternité qu'il n'y aurait jamais trouvé Dieu sous ce caractère. Pensez-vous que, volontiers par la suite, il eût échangé le pardon reçu contre l'innocence perdue? quitté son vêtement pour se retrouver nu? Dieu s'était révélé à lui d'une façon plus bénie qu'il n'eût jamais pu le faire sans son état d'homme souillé. C'est ainsi que, dans les Ephésiens, chapitre 3, nous voyons qu'il faut que les anges descendent apprendre par l'Assemblée à connaître la sagesse si diverse de Dieu, — toute sa bonté par le moyen de pécheurs pardonnés.

Considérons maintenant quelques-uns des traits caractéristiques du ministère du Seigneur. Voici un pauvre lépreux. Que dit-il? «Seigneur, si tu veux, tu peux me rendre net». Croyez-vous à la réalité des gloires variées de Christ, telles que son ministère les manifeste? Dans ce cas, faites-en vos délices. La première chose est-elle de l'imiter? Mon âme me dit que le devoir attaché au premier regard jeté sur Christ est délice — de rester «abîmé dans l'étonnement, l'amour et la louange». Alors, si un tel objet se présente à moi, je veux me l'approprier. Je dis, il est pour moi. Voilà le devoir de la foi — son attitude obéissante. Me confier absolument en Lui est l'obéissance bénie par excellence.

Le lépreux s'approche avec hésitation. «Seigneur, si tu veux…» Quelle pensée mesquine! Nous aurions honte de venir à quelqu'un et de lui dire: «Montre ton coeur par ta main». Mesquine pensée, je le répète, mais le Seigneur use de support. «Pauvre malheureux!» répond-il, «je le veux, sois net». Pouvez-vous vous fier au coeur de Christ? Quelqu'un dit se fier au coeur de Christ plus qu'à tout autre. Qu'il prenne courage, quoiqu'il puisse avoir conscience de ne s'être approché de Christ que bien faiblement.

Ici je trouve la douce assurance que malgré toute ma faiblesse, son accueil à mon approche est la bénédiction même. Telle est notre rédemption. L'Ecriture nous montre deux faces de la rédemption: rédemption judiciaire mettant, à l'abri du jugement, rédemption morale par le contact avec Jésus.

Vient ensuite le pauvre paralytique descendu par le toit et placé devant Lui. Comment le Seigneur le reçoit-il? En lui accordant avec son premier regard cet encouragement: «Homme, tes péchés te sont pardonnés». Que c'est beau! La même condescendance qui accueille une faible foi, se réjouit en en voyant une manifestation plus hardie. Quand Jacob dit à l'Eternel, en Genèse: «Je ne te laisserai pas que tu ne m'aies béni», comment le Seigneur répond-il à ce sentiment? Absolument comme il le fait ici. Il se laisse gagner. S'il daigne condescendre à la plus faible expression de foi, il se laisse gagner par celle qui s'enhardit davantage.

Qu'arriva-t-il à l'aveugle mendiant lorsqu'il le rencontra? Son assurance de foi domina Christ, pour ainsi dire. «Que veux-tu que je te fasse?» Toutes les ressources divines sont mises en jeu. Présenté ainsi, Jésus n'est-il pas Celui qu'il vous faut? Cela est digne de Lui, mais cela répond à vos besoins. Vous réjouirez son coeur en vous approchant de Lui avec une foi hardie et sereine. Remarquez bien ceci: «Lequel est le plus facile de dire: Tes péchés te sont pardonnés, ou de dire: Lève-toi et marche?» Il veut faire comprendre par là que, comme le pauvre paralytique s'est levé et a glorifié Dieu, vous, venant à Lui comme pécheur, devez en faire exactement de même en glorifiant Dieu. Celui qui peut dire: «Lève-toi et marche», peut dire aussi: «Tes péchés te sont pardonnés». Le Seigneur est son propre commentateur et vous fait comprendre que, quand bien même vous ne pourriez Lui apporter vos membres malades à guérir, vous pouvez toujours apporter vos péchés. A la fois la Parole et son interprète, il enseigne la leçon et l'explique jusqu'à ce qu'elle soit comprise. Le fait s'est passé il y a dix-neuf cents ans, mais aujourd'hui encore le Seigneur le reprend à nouveau, afin de m'assurer du pardon de mes péchés.

Nous continuons à faire plus ample connaissance avec la personne de Christ. Au verset 27, nous l'entendons dire à Lévi: «Suis-moi», simple appel dont Matthieu éprouve la puissance. Il établit le pouvoir caché du Saint Esprit. Comment le coeur de Lydie a-t-il été ouvert? Qui en a suivi le travail? «Le vent souffle où il veut». Le Seigneur ouvrait le coeur, tandis que la parole de Paul frappait l'oreille. De même ici, le Seigneur s'adressait à Lévi, pendant que l'Esprit ouvrait son coeur. Si vous êtes heureux en Christ, l'attribuerez-vous à la nature? Non, et apprenez en toute simplicité à faire remonter votre bonheur jusqu'à Lui. Quelle vertu y avait-il dans ces deux mots «suis-moi»? Aucune. Néanmoins, en dépit de lui-même, Lévi se lève et suit Jésus, le vent soufflant où il veut. Qu'est-ce qui conduit Zachée au travers de la foule et jusque sur le sycomore? La main du Père, par la puissance cachée du Saint Esprit, l'enlaçait ainsi des liens qui devaient l'amener à Jésus. Par quel invisible pouvoir Lévi est-il maintenant détaché de tout ce qu'il possède en ce monde? Il avait ouï la voix du Seigneur, cette voix qui brise les cèdres. Connaissez-vous un pareil moment? Jamais nous ne nous fussions trouvés aux pieds de Jésus si lui-même ne nous y eût tirés. A son appel, Lévi se lève et Lui prépare ensuite un festin; et qui y amène-t-il avec une heureuse et remarquable perspicacité? Ceux-là même que le Seigneur était venu chercher et sauver. C'était la puissance s'enveloppant de lumière, la force s'accompagnant d'intelligence. A l'instant où il vient en contact avec le Seigneur, il reconnaît l'atmosphère qui l'environne. Qu'est-ce qui prépare un festin pour Christ? La connaissance de ce qu'il est. C'est justement ce qui prépare ce festin ici. Le pauvre publicain se hâte de Lui faire fête et, à sa table, le Seigneur trouve ses délices. Bientôt il quitte son caractère d'invité pour devenir Celui qui reçoit, comme plus tard à l'égard des disciples sur le chemin d'Emmaüs. Du festin offert par Lévi, il devient lui-même le dispensateur. Au pharisien il répond: «Ne te plains pas; je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs». Je suis venu; Moi, et non Lévi, j'ai préparé le festin. La part de Lévi se bornait à être entré dans l'intimité des sympathies de son Maître.

Avez-vous jamais eu dans votre demeure une table dont le Seigneur pût dire que c'est Lui qui l'a couverte et non vous, une table qu'il puisse s'approprier? — Quelle bénédiction d'entrer dans une intimité aussi personnelle avec Lui! Qu'en eût-il été de nous, si Christ n'était venu dresser une table pour de pauvres pécheurs? C'est la joie en Christ qu'il nous faut. Si nous la possédions en plus abondante mesure, nous emporterions une plus grande victoire sur le monde.

Le Seigneur offre alors à leurs pensées un tableau des plus intéressants: l'animation de la chambre nuptiale où nous entrons maintenant. Nous sommes en route pour la cérémonie du mariage. Joyeuse animation préfigurant une journée de bonheur. Est-ce l'atmosphère que vous respirez? Connaissez-vous l'heureuse activité qui convient aux fils de la chambre nuptiale? Oh! si nous connaissions l'atmosphère qui convient à la place préparée pour les joies de Christ, le vieux vin n'aurait guère d'effet sur nous!

Chapitres 6 et 7

Notre but en étudiant cet évangile est d'y découvrir les gloires ministérielles de Christ. Chaque iota, un rien, comme nous l'avons déjà dit, doit avoir de l'intérêt pour nous, parce que si nous y découvrons le ministère de Christ, nous le découvrons lui-même. Son être entier s'y révèle. Combien différents nous sommes de Lui! Nous sommes tous plus ou moins trompeurs dans nos voies.

Ensuite, nous arrivons à Dieu lui-même. La sagesse de l'homme n'y parvient pas, mais, dans la face de Jésus Christ nous le connaissons, et plus nous découvrons ses traits, mieux nous connaissons le Père. Nous devrions nous familiariser avec Lui, comme réfléchi par Christ dans toutes ses voies. Par lui seul, le chemin est frayé pour retourner en la présence du Père. Sa mort précieuse me donne le droit de mettre le pied dans son sentier, et tout ce qu'il est et a été y devient ma lumière.

«Le sabbat second-premier» vient, comme on le suppose généralement, entre la Pâque et la Pentecôte. Passant par les blés en ce jour-là, ses disciples arrachent des épis et les mangent. L'indignation des pharisiens fournit l'occasion d'un beau commentaire sur le temple (chapitre 6: 3, 4). Que fit l'Eternel une fois l'oeuvre de la création achevée? Il se reposa. Et n'a-t-il pas fait cesser le repos de la création? Sans doute, comme le montre bien Jean 5: 17, quand les pharisiens se plaignent qu'il viole le sabbat. A l'instant même où son repos est troublé, Dieu se remet à l'oeuvre et prépare un vêtement pour Adam. Quand Dieu eut été chassé du repos de la création par le péché, il entreprit l'oeuvre de la rédemption. Au commencement de la Genèse, Dieu se présente comme Créateur et se repose le septième jour. L'homme est introduit et trouble le repos de Dieu; alors le Créateur se met à travailler de nouveau. N'étant point surmonté par le mal, il surmonte le mal par le bien. Il se met à l'oeuvre, pour la créature même qui a gâté son repos. L'un après l'autre, il vivifie de pauvres pécheurs, jusqu'à ce que vienne le sabbat de la rédemption — ce repos qui est la gloire. Le repos de la création dépendait de la fidélité d'Adam, c'est pourquoi il n'a pu durer. Le repos de la rédemption est fondé sur le sang de Christ et ne peut se perdre. Si leur boeuf ou leur âne, leur dit-il, venait à tomber dans une fosse, ils violeraient le sabbat. De cette même manière Dieu l'a violé. Le repos du Rédempteur est introduit après celui de la création. Nous Lui devons notre existence éternelle. Jésus cite Osée, en Matthieu 12: 7: «Je veux miséricorde et non pas sacrifice». Il n'attend rien de vous; c'est Lui qui apporte. Si nous étions vraiment heureux en Lui, combien mieux nous travaillerions pour Lui. C'est la joie de Christ qui donne la victoire sur le monde. Pourquoi sommes-nous sous l'empire du monde? Simplement, parce que nous ne goûtons pas toute la joie que nous devrions trouver en Christ. Si j'use convenablement de la grâce de Dieu, elle me purifiera. «La grâce de Dieu qui apporte le salut est apparue à tous les hommes, nous enseignant que, reniant l'impiété et les convoitises mondaines, nous vivions dans le présent siècle sobrement, et justement, et pieusement» (Tite 2). Dieu lie mon rachat à ma purification.

Maintenant vient le choix des douze. Douze seulement en Matthieu, mais en Luc, soixante-dix autres sont encore désignés; le Seigneur se montre ici sous un caractère plus élevé. il est, plutôt le Fils de David, ici il est le Fils de l'homme, et les soixante-dix sont envoyés pour montrer combien était illimitée cette grâce de Dieu qui s'occupait de toute la famille humaine, offrant au monde entier le salut. Les douze restaient dans les limites des brebis perdues de la maison d'Israël. Remarquez le contraste avec Paul dans les Actes, et aussi ce que dit l'apôtre: «Ce qui a été glorifié n'a pas été glorifié sous ce rapport à cause de la gloire qui l'emporte de beaucoup». L'apôtre des gentils était le représentant du ministère actuel de Dieu, et son ministère s'étend jusqu'aux bouts de la terre.

Ayant fait choix des douze, le Seigneur redescend de la montagne et trouve, venant à sa rencontre, une grande multitude dont il guérit toutes les maladies. Il est le divin visiteur de ce monde, — l'étranger céleste au milieu des hommes — un visiteur des hommes. Il n'avait pas même un lieu où reposer sa tête quand il les visitait pour répondre à leurs besoins, par toutes les richesses de Dieu. Parfait idéal d'un saint de Dieu, détaché de tout ce que le monde peut offrir, mais y répandant d'un coeur large et d'une main généreuse tous les bienfaits et toutes les bénédictions de Dieu, s'il n'était qu'un simple étranger céleste, il pourrait être un ascète.

La fin de ce chapitre est particulièrement solennelle: c'est un abrégé du sermon sur la montagne. Commençant par les pauvres, ceux qui ont faim, ceux qui mènent deuil, il les appelle «bienheureux». Est-ce ainsi que Dieu eût parlé après avoir achevé l'oeuvre de la création? Adam est placé au milieu des fruits et des fleurs d'Eden, comme créature obéissante (Genèse 2). La jouissance était le devoir alors, aujourd'hui c'est la patience. Dieu ne m'a pas placé ici-bas pour m'y réjouir, comme il le fit pour Adam. Le péché a chassé le Seigneur de gloire, le Prince de vie, d'un monde où ma part est maintenant la patience. Les «bienheureux» ne sont plus ceux qui se promènent parmi les fleurs et les fruits, mais ceux qui souffrent, qui mènent deuil, qui sont persécutés. Nous avons vu le Seigneur enfant, et ensuite guérissant les malades. Maintenant, voici le Maître qui enseigne, et la substance de son enseignement, c'est: Je ne vous appelle pas à la jouissance, mais à la patience. Adam était-il appelé à être pauvre en Eden? Au contraire, ses richesses étaient illimitées. Mais un tout autre genre de richesse est introduit maintenant, parce que le monde a fait Jésus pauvre. Dieu est maintenant un étranger sur la terre souillée, et pourrions-nous, vous et moi, avoir notre bourgeoisie dans le monde où Christ a été crucifié? Sans entrer dans les détails de ces versets, telle en est simplement la substance. Possédez, vos âmes par la patience et n'attendez pas des jouissances terrestres.

Au chapitre 7, nous trouvons Jésus en compagnie du centurion. Deux gentils traversent le sentier du Seigneur: la femme Syrophénicienne et le centurion. Ce dernier garde immédiatement sa place et établit ses rapports avec les Juifs. Bel exemple de l'intelligence de la foi. Il garde sa place de gentil, il n'a aucunement le droit de s'approcher immédiatement du Seigneur, mais il vient à Lui sous l'enseigne de sa nation. L'entendement illuminé par la pensée de Christ est quelque chose de beau à considérer. Le centurion s'approche par le vrai chemin — par les anciens des Juifs — et il arrive au Seigneur qui répond: «J'irai». Puis, au moment voulu, il prend l'initiative, quand déjà Jésus est en chemin. Il ne commence pas par aller à Lui, mais aussitôt qu'il le sait en route vers sa demeure, c'est pour le centurion le moment de se mettre en mouvement. Nous avons besoin de ces touchantes manifestations de l'esprit de Christ, car nous sommes non seulement froids et bornés, mais embarrassés, maladroits. Le Saint Esprit conduit l'âme à connaître la beauté de ces manifestations. Maintenant, le centurion s'écrie: «Seigneur, je ne suis pas digne… mais dis seulement une parole et cela suffit». Tu as dit: «Que la lumière soit, et ta main n'est pas raccourcie et ton oeil n'est point obscurci; parle seulement. Comme je dispose de mes serviteurs, toi tu commandes à la maladie, ainsi que jadis aux ténèbres».

Je plains l'âme que laisserait indifférente un pareil exposé du travail de l'Esprit. La vraie communion, c'est de goûter ensemble, les uns chez les autres, l'oeuvre de l'Esprit. «Ayant entendu ces choses, Jésus l'admira», — l'admira dans un sentiment de profonde jouissance. Rien ne peut réjouir Christ en ce monde sinon le fruit de son propre travail. La joie de la Samaritaine au puits de Sichar n'égale point celle de son Sauveur. Il est rafraîchi par les manifestations de son propre Esprit. Parlant à la manière des hommes, ce qu'il rencontre ici le prend par surprise comme s'il n'y était pas préparé. Ainsi en fut-il de la reine de Séba à la vue des gloires de Salomon; il n'y eut plus d'esprit en elle. Il n'y a pas une seule source à laquelle Christ puisse boire en ce monde, mais là où le Saint Esprit brise un pauvre coeur de pierre, là Jésus trouve ce qui le désaltère.

En peu de mots l'Esprit nous présente ensuite la condition désolée de la veuve de Naïn. «On portait dehors un mort, fils unique de sa mère, et elle était veuve». Le coeur de Jésus en est saisi, il arrête les porteurs de la bière. Toujours ses compassions devancent les effets de sa miséricorde. On a coutume de dire que le coeur est le ressort de la main. N'appréciez-vous pas un bienfait qui vous vient de cette manière?

Le salut jaillit du coeur même de Christ. C'est médire du coeur de Dieu que de présenter la croix comme la source de nos bénédictions. Dieu a aimé le monde et a envoyé son Fils; le coeur de Dieu a devancé sa main. Christ bénit avec tout son coeur et toute son âme. «S'approchant, il toucha la bière». Il était incapable de contracter la souillure, autrement il aurait dû aller ensuite se purifier auprès du sacrificateur, après avoir touché le mort. Christ a-t-il jamais dû recourir au lavage dans le sanctuaire? Il pouvait ressusciter un mort sans le toucher, mais vis-à-vis du péché, il occupe la même place que Dieu. Il ne s'est pas seulement tenu loin du péché, mais de la possibilité de pécher. «Et il le donna à sa mère». Ce n'est point pour trouver des serviteurs que le Seigneur vous sauve; je le dis hardiment. Pareille doctrine porterait atteinte à la beauté de la grâce. Nulle part il ne dit: «Je vous donne la vie, afin que vous l'employiez pour moi». Que son amour vous contraigne à vous dépenser entièrement pour Lui, c'est autre chose, mais jamais, il ne vient devant votre coeur avec cette condition: «Je te pardonne si tu veux me servir». N'avait-il pas racheté le jeune homme? oui, mais il le rend à sa mère! Ne nous arrive-t-il pas une fois rachetés, à vous et à moi, de regarder en arrière vers le monde pour y chercher le bonheur ou de l'importance? Ah! que tous les liens de l'amour enlacent notre coeur et le tiennent attaché à Jésus! Amen.

Chapitre 7

L'ambassade bien connue de Jean le baptiseur auprès du Seigneur va maintenant nous occuper. Nous avons déjà vu le ministère du Seigneur comme révélation de lui-même, parce que tout en Lui était la vérité infinie. Aussi c'est la route royale par laquelle nous arrivons au Dieu béni éternellement. A celui qui cherche à l'atteindre par sa propre sagesse, il répond: «J'habite dans l'obscurité profonde», mais en le suivant par Jésus, nous le trouvons dans toute sa gloire.

Jean envoie des messagers pour demander: «Es-tu celui qui vient, ou devons-nous en attendre un autre?» La foi et la patience de la foi ne sont pas une même chose. Abraham est un exemple des deux. Sous un ciel étoilé, il reçoit une promesse et l'accepte; il croit Dieu. Voilà la foi. Par la suite, la même voix lui redemande ce qui lui avait été promis — c'est la patience de la foi. Sur ce point, Jean a faibli. Il crut l'Agneau de Dieu et le désigna à d'autres, mais la prison était trop pour lui. Il était un serviteur de marque, mais il manque en ceci, il ne voulait pas être mis de côté quand on prenait garde à tous les autres. Offensé, il envoie ce message d'incrédulité presque un peu insultant. Le Seigneur le supporte, quoiqu'il fût bien fautif. Lui, le champion des droits de Dieu sur la terre, passe sur tous les outrages dont on l'accable. C'est l'un des traits de sa perfection morale. Sans aucun ressentiment, il envoie à Jean un message allant droit au but, et que nul autre ne pouvait comprendre: «Bienheureux est quiconque n'aura pas été scandalisé en moi». Conçue en ces termes, la réprimande n'en est une que pour la conscience de Jean. Quand je trouve mon prochain en faute, un sentiment naturel me porte volontiers à glisser la chose dans l'oreille du voisin, mais le précieux Sauveur fait exactement le contraire. Il voit que Jean n'est pas entièrement préparé pour ce que le service de Christ demande de lui. Si un autre pèche contre toi, reprends-le, mais prends garde que cela demeure «entre lui et toi seul». Le Seigneur agit comme s'il eût écrit à Jean une admonition dans une langue qu'il était seul à comprendre. Se tournant ensuite vers la foule, ses paroles sont également remarquables. Jean est placé en relief sur un fond à grandes ombres. Un roseau qui est en contraste avec lui, le palais des rois, ceux qui sont nés de femme. Il présente ces trois choses, afin de faire briller le caractère du précurseur. Quelle perfection dans tout ce qu'il fait! Après la secrète réprimande adressée à la conscience de Jean, il le fait paraître sous les plus beaux aspects possibles. Que signifie cette parole: «Le moindre dans le royaume de Dieu est plus grand que lui»? Avez-vous jamais estimé Jean plus grand que Moïse ou David? Non. L'individu n'est pas en cause ici, mais bien ce secret — que les voies de Dieu évoluent toujours en avant, de la prophétie à l'Evangile. Sous ce rapport, Jean est le plus grand de ceux qui sont nés de femme. Personnellement, il n'était pas au-dessus de Moïse, mais il appartient à une ère plus avancée des dispensations divines. Et c'est ainsi qu'aujourd'hui chacun des saints, qu'il soit faible ou fort, se trouve dans une sphère plus élevée que Jean, Moïse ou David. Le développement des voies de Dieu brille d'une lumière de plus en plus intense, révélant notre caractère d'hommes ressuscités, comme aussi les gloires de Christ — et n'est-ce pas une portion supérieure à celle de Moïse?

Au verset 31, il considère ceux qui l'entourent et demande: «A qui ressemblez-vous?» Avec quel amour il continue à s'occuper de son serviteur Jean! Il l'a bien devant Lui et se l'associe pleinement. «Nous sommes venus à vous, enfants assis au marché, nous vous avons joué de la flûte, et chanté des complaintes; mais vous n'avez ni dansé, ni pleuré». La main de Dieu est très habile à toucher l'instrument, mais aucune note, non, pas une seule ne Lui répond, ni de votre part, ni de la mienne. Le Seigneur dépeint notre nature et dit que le doigt de Dieu a touché de toutes les manières l'instrument, mais n'en a jamais pu faire vibrer un son: «En moi, c'est-à-dire en ma chair, il n'habite point de bien».

Arrêtons-nous un moment sur le verset 36. Avez-vous remarqué les diverses occasions dans lesquelles le Seigneur vient s'asseoir à différentes tables? Nous le voyons à la table du pharisien, à celle de Lévi et à celle de Zachée, puis avec les disciples allant à Emmaüs, et à Béthanie. Quel intéressant sujet de méditation que la vue du Seigneur s'asseyant pour faire partie d'une scène de famille dans notre monde social! Dans les chapitres 7 et 14, il conserve chez chacun des deux pharisiens le caractère qu'il a pris devant la foule. Il n'est point allé sanctionner une réjouissance, mais seulement répondre à une invitation. L'un des pharisiens peut se faire de Lui une idée plus juste que l'autre, mais il entre avec l'autorité de l'homme qu'il était en dehors de la maison. Il demeure le Maître qui enseigne. C'est son droit d'enseigner ou de reprendre, parce qu'il a été invité à ce titre-là. Dans la maison de Lévi, la scène change. Lévi, appelé, quitte tout pour suivre Jésus, et il est si pénétré de la pensée de Celui qu'il a invité, qu'il mit publicains et pécheurs à table avec Lui. Nous ne trouvons plus ici le Maître, mais le Sauveur. Quelle beauté dans cette transformation morale! Et quand les pharisiens se plaignent, il se range du côté de Lévi et des pauvres publicains: «Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs à la repentance».

Chez Zachée, que voyons-nous? Mû par le désir de voir Jésus, Zachée s'entend appeler spontanément par son nom: «Zachée, descends vite». Il entre comme Celui qu'on désire et qui veut satisfaire ce désir. «Tu as voulu me voir passer, et maintenant je viens chez toi pour toute la journée». Avez-vous coutume de chercher dans les évangiles ces brillants rayons de sa gloire morale? Sous tous ces différents caractères, il demeure le même. Il s'approche de Zachée comme de quelqu'un qui chérit et nourrit un désir naissant, jusqu'à ce qu'il éclate: «Voici, Seigneur, je donne la moitié de mes biens aux pauvres». La plante avait été assez richement arrosée pour lui faire porter ce beau fruit.

Chez les disciples allant à Emmaüs, nous trouvons, non deux renégats, mais deux âmes effleurées par le doute: «O gens sans intelligence et lents de coeur à croire», leur dit le Seigneur, mais il ne s'éloigne pas sans avoir enflammé leurs coeurs. La prière: «Demeure avec nous», ne monte-t-elle pas d'un coeur qui brûle? Il y acquiesce en restant auprès d'eux jusqu'à l'heure tardive de leur retour à Jérusalem, où ils vont annoncer qu'ils ont vu le Seigneur.

A Béthanie, il n'est plus Celui qui enseigne, ni même le Sauveur, il est l'ami de la famille, sanctionnant entièrement la douceur du foyer chrétien, qu'il eût laissé comme il l'avait trouvé, si Marthe n'était sortie de sa place. Elle n'avait qu'à rester aux soins du ménage, mais elle se met à enseigner, c'est pourquoi il la réprimande.

Dans la maison du pharisien, deux personnes nous sont présentées, et nous y trouvons une expression plus complète que partout ailleurs dans les évangiles, du sentiment de l'acceptation chez un pécheur. Une femme vient, sachant que l'amour est là pour pardonner ses péchés et apportant avec elle tout ce qu'elle a, son coeur, sa personne, ses biens. Bel exemple de l'effet que devrait avoir sur nous la simple connaissance du salut. Le Seigneur entre dans les raisonnements de Simon, mais pour la femme ils sont perdus. On aime l'âme qui s'en tient tranquillement à cette conclusion: «Je suis à mon bien-aimé, et mon bien-aimé est à moi». Heureux êtes-vous si les raisonnements d'un esprit sceptique vous demeurent incompréhensibles. Pour leur plus grand bonheur, des milliers d'âmes sont arrivées à déclarer hors de leur portée les raisonnements humains. Ce qui occupe ici cette femme, c'est Lui-même. Parlant d'elle à Simon, le Seigneur répète ce qu'elle a fait; mais à son oreille il dit: «Ta foi t'a sauvée». Elle est sauvée, non par son amour, mais par sa foi. Etait-ce une parole froide? Avez-vous jamais soupçonné le Seigneur de vous traiter avec froideur? Peut-être eût-elle pu le penser, mais écoutez ce que dit le Seigneur derrière elle: «Simon, vois-tu cette femme?» Etait-ce d'un coeur froid cela? Si donc dans ses voies à votre égard, il semble parfois comme insouciant, voyez plutôt ce qui se passe, on dirait à votre insu. Ne le jugez point par les choses extérieures, mais par cet amour qui jamais, non jamais, ne vous abandonne et qui consigne dans son livre chaque verre d'eau donné en son nom. Demandons qu'il nous garde près de Lui. Nous avons besoin d'être aussi près que possible de Christ quant à l'homme intérieur, et extérieurement de marcher en son nom de victoire en victoire.

Chapitre 8

Le sujet avec lequel s'ouvre ce chapitre comprend encore les deux suivants, 9 et 10. Le ministère du Seigneur lui-même, 8; celui des douze, 9; et celui des soixante-dix, 10. Ce dernier est particulier à l'évangile de Luc. Il est naturel que nous ne le trouvions pas en Matthieu, où le Seigneur et le ministère sont en rapport avec les Juifs. Ici, le Seigneur se trouve davantage sur le terrain moral et sur le terrain humain; aussi envoie-t-il un ministère chargé de répandre largement l'Evangile dans toute la famille humaine. Avez-vous jamais pensé que ce soit un fait étrange que le royaume de Dieu dût être prêché dans le monde? Pareille proclamation de la part d'un souverain impliquerait la rébellion dans ses états. C'est un témoignage contre le monde que Dieu ait à y faire publier ses droits. Le Seigneur devait non seulement annoncer ce qui répond aux besoins des pécheurs, mais revendiquer encore les droits de Dieu sur le monde. Partout nous retrouvons ceci: que Dieu établit son droit sur moi autant qu'il pourvoit à ce qu'il faut pour moi. Je ne puis accepter le salut sans m'incliner devant ses droits sur ma personne. Le Créateur obligé de faire publier ses droits sur ce qu'il a créé! Quelle pensée! La terre en rébellion ouverte contre son Créateur! Ces deux pensées se trouvent dans la prédication de l'Evangile, et dans la prédication du royaume de Dieu: Dieu y signifie ses droits sur l'homme et y révèle les ressources de sa grâce pour l'homme.

Par qui le Seigneur est-il servi en poursuivant son chemin? Par les douze; par des hommes attirés à Lui, par des femmes dont il avait chassé des démons. Cortège qui Lui convenait, et bien différent du cortège de Celui qui vient monté sur le cheval blanc, en vue du jugement, mais ce cortège Lui convient aussi. «Les armées qui sont dans le ciel le suivent sur des chevaux blancs»; mais cette procession-ci se compose de gens sans aveu, dont la dégradation même magnifie la grâce de Celui qui la conduit. Tout sera bien changé, quand il viendra en jugement.

Ce chapitre commence par la parabole du semeur. En avez-vous trouvé le secret? Ce secret consiste à montrer à l'homme ce qu'il est. La semence est partout la même, mais la manière dont elle tombe en terre révèle la nature du terrain. La semence manifeste la qualité du sol. Pas un seul coeur qui ne soit représenté ici par l'un des caractères du terrain. Le premier est le grand chemin sur lequel le diable domine. Le second, le roc, où prévaut la nature. Le troisième, les épines, le monde proprement dit. Enfin, le quatrième, le bon terrain sur lequel le Saint Esprit domine. Un examen journalier de votre coeur vous montrera que vous trouvez votre plaisir dans l'un de ces caractères. Le but de la parabole est de nous exposer à nos propres yeux, et de mettre au jour les quatre formes des influences secrètes sous la puissance desquelles nous déployons tous, moralement, notre activité à toute heure. Prenez la joie de celui que le terrain rocailleux représente. Il est bon de se réjouir; mais, si ma conscience n'est pas atteinte par ce que Dieu demande de moi, c'est un symptôme fâcheux; c'est la légèreté et la sensibilité de la nature. Combien misérablement nous nous comportons envers Dieu, quand nous n'agissons pas envers Lui en bonne conscience! Si j'ai renoncé à Lui, puis-je retourner à Lui sans conviction dans ma conscience? Ce serait une insulte envers Lui. Supposons que je vous eusse offensé; serait-ce bien de ma part de venir vous parler de choses indifférentes? Ce Dieu que tous nous avons offensé, nous approcherons-nous de Lui maintenant avec gaieté de coeur?

Le terrain épineux ce sont des gens sérieux qui écoutent, pesant anxieusement toutes choses. Ils portent une balance avec eux, pour éprouver l'importance de tout; seulement le malheur est que le monde y pèse autant que Christ. N'avons-nous pas souvent conscience d'un pareil calcul?

En contraste avec les autres terrains, nous avons la bonne terre. Il ne nous est pas dit comment elle est rendue telle; mais, ayant déjà reconnu l'oeuvre du diable, de la nature et du monde, quelle autre oeuvre reste-t-il encore? Seulement celle du Saint Esprit. De nos jours, il est très nécessaire d'insister sur le fait que le labourage doit précéder l'ensemencement. Qu'est-ce qui rend le coeur honnête et bon? Celui qui est venu passer la charrue sur le sol en friche, et y a répandu la semence. S'il ne le travaillait lui-même, Dieu n'obtiendrait pas même un brin d'herbe de nos coeurs. Le coeur ne peut jamais rien produire pour Dieu, s'il ne passe par le travail de la charrue. Que ce soit en l'effleurant, comme dans le cas de l'eunuque, ou en descendant plus profond, comme chez le geôlier, toujours est-il que la charrue doit passer au travers du terrain en friche. Ceux qui sont tombés parmi les épines ne peuvent parler que de leur ferme, de leurs affaires, de leur commerce. Ceux qui sont le long du chemin, disent: «Oh! nous y songerons demain». Vient ensuite la sensibilité, qui jouit d'un beau sermon. Il est heureux pour moi que ma conscience ait affaire avec Dieu, parce qu'alors tout le reste a affaire avec Lui. Nous devrions nous efforcer de faire entrer nos coeurs dans les gloires ministérielles de Christ. Alors nous le possédons lui même, parce que — ainsi que nous l'avons déjà dit — tout ce qui émane de Lui porte l'empreinte de l'absolue vérité. Pénétrant jusqu'à Lui, nous arrivons à Dieu; et de cette manière nous sommes introduits en la présence de Dieu dans ce monde.

Le monde est plein de ses spéculations sur Dieu, lesquelles ne donnent, comme résultat, que d'épaisses ténèbres que la sagesse de l'homme déclare impénétrables; mais en Christ, nous trouvons la plénitude de la gloire de Dieu, et rien de moins. Qu'il me soit donné d'avoir pour heureuse part d'étudier Jésus. Par ce chemin heureux et béni, je puis connaître le Père.

Ici se place un des incidents de sa vie: «Et il arriva l'un de ces jours, qu'il monta dans une nacelle… et il s'endormit». «Ainsi il donne le sommeil à son bien-aimé». Si les disciples avaient été sages, qu'eussent-ils fait? De quel regard d'attachement et d'adoration n'auraient-ils pas dû contempler leur Maître endormi! Que les vents et les vagues se lèvent… Il a dit: «Passons à l'autre rive»; c'est le gage de notre sécurité. Voilà ce qu'ils pouvaient se dire, avec assez de confiance pour s'endormir eux-mêmes à ses côtés; mais ils ne pensent qu'à la tempête, et s'écrient: «Maître, nous périssons!»

Les voies de la Providence vous placent-elles souvent en compagnie d'un Jésus endormi? Il ne manifeste pas toujours sa présence; néanmoins, il a dit: «Passons à l'autre rive». Son oeil voit l'issue du voyage; le vôtre, le mien s'arrêtent aux détails du chemin. Il ne se serait jamais endormi, s'il ne leur avait pas garanti la fin du voyage. Lorsqu'ensuite ils ont la preuve que le Seigneur accomplit ses promesses, ils manifestent l'étonnement à la place de l'adoration. N'avez-vous pas fait souvent cette expérience? Que de fois il descend à votre niveau, quand vous ne pouvez atteindre à son élévation? L'expérience est pauvre, au lieu d'être brillante et bienfaisante. Si l'aile de notre foi n'atteint pas la région qu'il habite, il descend et nous sauve jusqu'à la fin; mais en nous faisant sentir ce que nous avons perdu.

Voici maintenant une triple manifestation de puissance: Jésus, vis-à-vis des Gadaréniens, au milieu de la foule, et près d'un lit de mort; toute une série de victoires. La puissance de Satan le rencontre à Gadara, et ici il n'attend pas que la foi soit à l'oeuvre. Venu pour détruire les oeuvres du diable, il les détruira. De la pauvre femme perdue dans la foule, il demande la foi, et y répond. Nous avons souvent remarqué les traces de sa grâce et le sentier de sa gloire. Aucune ressource ne reste à cette pauvre captive de Satan. La puissance de l'homme la laisse où elle la trouve; mais le Seigneur la délivre, et sa délivrance est aussi complète que l'était sa captivité sous la main de l'ennemi. Elle va même au delà. C'est plus qu'une restauration. La restauration ne montre pas les voies de Dieu. Il prend des ruines pour en faire sortir de nouvelles gloires. Non seulement Légion est chassé dehors, mais l'homme est pénétré de ce principe, qu'il sera avec Jésus pour l'éternité; et volontiers, à sa parole, il irait maintenant pour Lui jusqu'aux bouts de la terre. Est-ce là simplement une restauration? Que ne donnerait-on pas pour un tel état d'âme? Avoir trouvé une demeure en sa présence, et néanmoins être prêt, s'il le demande, à aller jusqu'au bout de la terre en accomplissant un pénible service!

Au milieu de la foule, une pauvre femme l'a touché. Sans doute, des milliers en avaient déjà fait autant, mais la puissance qui est en Lui attend le contact de la foi. Au commandement de la foi, la puissance obéit aussitôt. Trouvez-vous en Christ plus encore que la guérison? Ce fut le cas de cette pauvre femme. Quand elle vint à Lui, elle ne savait pas qu'elle avait un droit sur Lui. Aussi se retire-t-elle modestement, comme une débitrice. L'humilité convient effectivement au débiteur; mais, oh! combien nous trouvons en Christ plus que la guérison! Celui qui l'opère se met en relation avec les objets de sa faveur. La pauvre femme est toute tremblante en l'entendant s'enquérir d'elle. Sa foi allait bien jusqu'à le toucher, mais n'était pas de force à le regarder en face avant qu'il lui eût dit: «Aie bon courage, ma fille». Il ne peut y avoir d'esprit de liberté dans nos âmes, si nous ne jouissons pas de la relation. La nature ne peut se confier en Dieu, mais ses voies bénies me font connaître ce que je possède en lui-même, aussi bien que dans la puissance de salut qui est en Lui. Etablie maintenant, cette relation entre Lui et nous n'est pas remise à l'avenir glorieux. Je suis en esprit dans les demeures du Père, aussi réellement aujourd'hui, que bientôt je m'y trouverai personnellement en gloire. La femme quitte Jésus, non seulement guérie dans son corps, mais ayant l'âme paisible et satisfaite. Quelle autre étude vaut pour nous celle de la personne de Jésus!

Dans la maison de Jaïrus, il rencontre la puissance de la mort faisant une nouvelle victime; mais il est le vainqueur du hadès et de la mort. Il délivre la jeune fille de la puissance de la mort, tout comme il venait d'arracher le pauvre homme des mains de Satan et la femme des liens de la corruption. Efforçons-nous de Le mieux connaître, et répétons: «Christ est tout pour moi».

Chapitre 9

Le commencement de ce chapitre établit un point important. Dans les chapitres 8, 9 et 10, le ministère de Jésus se révèle sous trois caractères différents, et l'étendue du ministère exercé annonce le caractère de l'évangile de Luc. Le Seigneur, il est vrai, n'outrepasse point les limites juives; mais il considère l'homme dans le Juif, et non, comme en Matthieu, seulement le Juif. Remarquez qu'en envoyant les douze, il leur commande de guérir les malades et de prêcher le royaume de Dieu. Ils avaient à guérir des maladies et à réclamer, à la face du monde, les droits de Dieu. Croyez-vous peut-être qu'en venant ici-bas apporter le salut, Dieu subordonne ses droits à vos besoins? Il ne le pourrait pas; et vous-mêmes, dans un esprit droit, vous ne le désireriez pas. La gloire de l'Evangile est qu'il soit glorifié, parce que vous êtes sauvés. Jouiriez-vous d'un larcin? Obtenir une bénédiction qui ôterait à Dieu quelque chose de sa gloire ne serait rien moins qu'un larcin. A qui sait le voir, la croix le démontre. La gloire de l'Evangile, c'est que Dieu demeure juste, en justifiant celui qui croit en Jésus. Nous en avons un exemple ici. Il leur enjoint donc de ne prendre avec eux «ni bâton, ni sac, ni pain, ni argent», restriction équivalant à dire: «Mes messagers doivent compter sur moi; nul ne va à la guerre à ses propres dépens; je prendrai soin de vos besoins, et quant à vous, que votre modération soit connue de tous les hommes». En conséquence: «Tous ceux qui ne vous recevront pas… en sortant de cette ville-là, secouez même la poussière de vos pieds en témoignage contre eux». La débonnaireté du ministère chrétien n'est pas exempte de solennité. Le Seigneur veut y apposer le sceau de ce caractère. Nous le trouvons en Paul, à Antioche, quand il secoue la poussière de ses pieds et s'en va à Iconium; de même Néhémie, lorsqu'il secoue le pan de sa robe, en s'écriant: «Que Dieu secoue ainsi de sa maison… quiconque n'accomplira pas cette parole». Les gloires variées du Seigneur brillent non seulement dans son ministère, mais aussi dans la manière dont il l'exerce.

Considérons maintenant ce qui est dit d'Hérode. Croyez-vous en avoir fini avec le péché après qu'il a été commis? Quoiqu'il en soit, une chose est certaine; c'est qu'il n'en a pas fini avec vous. Sitôt consommé, son charme s'évanouit. C'est votre manière de disposer du péché; mais la conscience, «qui fait de nous tous des poltrons», a soin de vous rappeler qu'il n'en a pas fini avec vous. Un long temps s'était écoulé depuis qu'Hérode avait fait exécuter Jean, mais la rumeur qu'il est ressuscité jette néanmoins le roi dans une grande perplexité. Nous trouvons ici l'oeuvre du ver qui ne meurt point. Je ne parle pas de son oeuvre pendant l'éternité; mais, en de telles circonstances, et pour nous faire voir le travail du ver et du feu, le Seigneur soulève un coin du voile qui nous dérobe l'enfer. Point de repos pour Hérode; comment pourrait-il y en avoir pour le meurtrier du plus grand témoin, de Dieu dans le monde, à ce moment-là? Si le pécheur ne se précipite pas à la source ouverte pour le péché, jamais il ne s'en débarrassera.

Les apôtres reviennent maintenant, et rendent compte de leur mission; puis nous avons le miracle des pains, qui nous donne la mesure du coeur de Christ en contraste avec celui de l'homme. Où trouver un coeur humain aimant plus facilement que celui de Pierre? C'était un coeur ouvert, un homme bon, que vous auriez aimé tout de suite; mais voyez-le à côté du coeur de Christ. «Renvoie la foule», lui disent les disciples. «Non», répond-il. «Vous, donnez-leur à manger». «Quoi?… aller acheter pour eux!» Cela était dit sur un ton de mécontentement, mais le Seigneur ne se retire pas de ses disciples, même mal disposés. Il a rencontré la vanité, l'ignorance, la dureté de coeur, l'humeur méchante, qui mettaient à l'épreuve l'Esprit parfait qui était en Lui. Il est beau et intéressant de voir comme en toute occasion il surmonte le mal par le bien. Si ma mauvaise humeur vous met de mauvaise humeur, vous avez été surmonté par le mal. Le bien ne cède jamais au mal. Il le censure et en triomphe. Quel bel exemple nous en avons ici. «Renvoie-les», disent les disciples. «Faites-les asseoir», répond Jésus, qui se fait ainsi dispensateur du festin et se charge de ses apprêts. Remarquez la beauté morale du festin de Jésus. Il y présidé dans toute la gloire de Dieu, aussi bien que comme homme parfait. Comme Dieu, et sans que ce soit un objet à ravir, il exerce le pouvoir créateur. Non seulement il était Dieu, mais encore il n'y avait aucune forme de la gloire de Dieu qu'il n'assumât, aucun acte de puissance divine qu'il ne déployât. Mais il prend aussi sa place comme l'homme parfait. Il se montre entièrement l'opposé d'Adam. En quoi consiste le péché d'Adam? En ce que, manquant de reconnaissance envers Dieu, il prétendit avoir droit à tout. C'était l'homme refusant d'être reconnaissant. Le Seigneur, Lui, rend grâce. Je le vois ici, vrai Dieu et vrai homme, présidant la table servie au désert. Le culte rendu à Dieu, dans la personne de Jésus, est pour Lui un encens infiniment plus précieux que n'eût été l'existence éternelle d'Adam comme homme reconnaissant. Il est venu faire sortir des ruines, pour l'ériger à la gloire de Dieu, un temple que la création même, dans son intégrité, n'eût jamais élevé.

Dieu veut que nous sachions qu'à sa table il y a toujours plus qu'il ne faut. L'idée d'un repas abondant apporte un sentiment de bien-être. A la vue du vrai Dieu préparant le festin, et du vrai Homme rendant grâce et laissant des corbeilles de restes, quel sentiment puis-je éprouver sinon la reconnaissance? Nous pouvons tous et chacun être pleinement rassasiés, et nous en aller, rendant grâce de ce qu'il reste beaucoup pour autrui.

Voici une partie très importante du récit évangélique. Le Seigneur priait, et quand il se lève, il demande à ses disciples: «Qui disent les foules que je suis?» Le style adopté ici par les Ecritures renferme un grand enseignement. L'événement reçoit son caractère des termes mêmes qui le font connaître. Jésus, par cette simple question, donne la preuve de sa réjection de la part du monde. Il est venu chez soi, et les siens ne l'ont point reçu. Nous sommes en route ici pour la montagne de la transfiguration. Il n'eût jamais obtenu sa gloire dans le ciel, si ici-bas son trône ne Lui eût été refusé. C'est comme Fils de l'homme rejeté sur la terre qu'il est remonté au ciel. Dieu ne savait-il pas, dès le commencement, ce qui arriverait? demanderez-vous. Sûrement, il le savait; mais toutes ces choses paraissent dans une grande gloire morale. L'homme refuse à Jésus une place ici-bas. Eh bien! Dieu le prend en haut, dans le ciel. «Qui disent les foules que je suis?» «Et répondant, ils dirent: Jean le baptiseur; et d'autres: Elie; et d'autres: que l'un des anciens prophètes est ressuscité». «Quoi! est-ce donc tout ce qu'Israël pense de moi? Mais vous, qui dites-vous que je suis?» Le monde fut fait par Lui, et le monde ne l'a pas connu. Cherchons à pénétrer l'esprit des Ecritures; ne nous contentons pas simplement d'en comprendre les termes, Pierre entre en scène comme représentant les élus de Dieu, et aussitôt que le Seigneur reconnaît les objets de son élection, il leur dit: «Ne faites pas trop de cas de votre vie; vous que j'ai élus, prenez plutôt part à ma réjection». Telle est, j'ose le dire, la seule position de l'Eglise jusqu'à ce jour. Mon coeur met son sceau sur cette vérité, que, dans la dispensation présente, l'Eglise est la compagne d'un Seigneur rejeté. «Maintenant», ajoute-t-il, «regardons vers le ciel, et je vous montrerai votre bel héritage en des lieux meilleurs». Avant même l'appel d'Abraham à la position d'étranger et voyageur, «le Dieu de gloire» lui apparut. L'Eglise également voit toute sa gloire céleste avant même d'occuper sa place en réjection.

Cela vous suffit-il? Pour autant que l'Esprit de Christ agit en vous et en moi, nous nous écrierons: «Ainsi soit-il, Seigneur. Je poursuivrai la route ici-bas, dans l'espérance de ce qui m'attend». C'est pourquoi le Seigneur dit à ses disciples: «N'aimez pas votre vie. Venez avec moi sur ces hauteurs, d'où je vous montrerai la gloire». Dites-moi ce qui convient vraiment à l'homme en route pour la gloire céleste? Peut-il rechercher la fortune, le pouvoir et autres choses semblables? Jugez-en vous-mêmes: est-il raisonnable de se charger d'argile en poursuivant sa route vers l'endroit entre tous où l'argile ne doit pas se trouver? Le Seigneur vous montre le chemin et l'issue du chemin. La leçon n'est difficile qu'en raison de notre attachement aux choses terrestres. De même que mon âme l'accepte, plût à Dieu que tout mon coeur en fût également pénétré. Ensuite, descendant de la montagne, le Seigneur vient à l'aide des disciples dans leur impuissance à chasser un démon. En aucune autre occasion, nous ne le voyons manifester autant de lassitude: «O génération incrédule et perverse!» Tout est parfaitement naturel dans le caractère humain de Christ. Je vous le demanderai maintenant: après avoir, sur la montagne, goûté particulièrement le bonheur avec Christ, n'êtes-vous pas beaucoup plus accablé par la pauvreté et la misère de l'Eglise, et par la souillure terrestre, en proportion même de la joie et de la liberté que vous avez éprouvées? Le Seigneur a goûté les délices de sa propre sphère, et il est descendu ici-bas pour y rencontrer l'incrédulité et la corruption. Il ne vient pas y chercher la gloire, mais bien le travail et l'énergie de la foi, et ne trouvant aucune aide chez ses disciples, il s'écrie: «O génération incrédule et perverse, jusqu'à quand serai-je avec vous et vous supporterai-je?»

Quand ils furent descendus de la montagne, ils furent émerveillés de sa gloire, et comme ils s'étonnaient, il leur dit: «Vous, gardez bien ces paroles que vous avez entendues». Au verset 51, il envoie ses disciples dans un village Lui préparer le chemin, mais les habitants ne voulurent pas le recevoir. Les disciples auraient volontiers fait descendre le feu du ciel pour les consumer. Mais le Seigneur les reprend. Pourquoi présentons-nous les deux choses ensemble? Parce que nous voyons dans le développement et l'expression de la beauté humaine du Seigneur, un homme qui sait être abaissé et être dans l'abondance. Belle qualité dans la nature humaine! Paul peut l'avoir apprise par une sévère discipline morale, mais Jésus l'a apprise par la perfection de sa nature humaine Combien notre nature misérable et corrompue est disposée et prête à tirer avantage d'une circonstance flatteuse! Devenu ici un sujet d'étonnement et d'admiration, Jésus s'efface aussitôt derrière le voile d'une profonde humiliation. Tandis que les rayons de la gloire brillent encore autour de sa personne, il leur dit: «C'est ainsi que vous devez me comprendre». Et plus tard, quand les disciples auraient voulu faire descendre le feu sur les Samaritains, il dit: «Non» Il sait être abaissé. De cette manière ses beautés morales resplendissent.

Un homme vient alors à Lui, disant: «Je te suivrai». Mais il lui répond: «Ne vois-tu pas comme les Samaritains m'ont traité? Si tu veux me suivre, il faut prendre ta part avec Celui qui n'a pas où reposer sa tête». Remarquez une autre chose. Un second s'approche et dit: «Permets-moi d'aller premièrement ensevelir mon père». Il avait parfaitement le sentiment de la dignité et de la gloire de son ministère; il répond: «Tout homme peut remplir auprès des mourants l'office des mourants, mais toi, va remplir dans le monde celui d'un Sauveur vivant». Paul était également conscient de cette dignité devant Agrippa et sur le vaisseau allant à Rome. Prisonnier, dans les chaînes et dans l'ignominie, il peut dire: «Plût à Dieu que vous devinssiez tel que je suis!» Quel profond sentiment de secrète dignité au milieu de la dégradation publique! «Laisse les morts ensevelir leurs morts; va, et emploie-toi à mon oeuvre — œuvre de vie et non de mort — dans un monde souillé par le péché». Or, dites-le moi, qu'admirez-vous sur cette terre? Parlez-vous avantageusement de ceux qui font bien leurs affaires? Ou bien avez-vous en horreur cette coutume de juger des hommes d'après la place qu'ils occupent dans la société? Accoutumez-vous à voir la vraie gloire. Elle a brillé dans le fils du charpentier, dans le captif à Rome, et elle brille également dans les pauvres de ce monde riches en foi. Que le Seigneur ouvre nos yeux pour voir les objets de Dieu dans la lumière de Dieu! Amen!

Chapitre 10

 «L'entrée de tes paroles illumine, donnant la sagesse». Nous avons déjà remarqué, au cours de ce récit, que le chapitre 8 présente le ministère du Seigneur lui-même; le chapitre 9, celui des douze; et, maintenant, dans le chapitre 10, le ministère des soixante-dix. Remarquez qu'il est ajouté ici ces mots: «Il les envoya dans tous les lieux où il devait aller». Ce qui frappe particulièrement ici, c'est l'importance que le Seigneur trouve à ce fait jusqu'à la fin de son ministère. Il envoie devant Lui des messagers qu'il suivra, afin que les villes et les bourgades soient sans excuse. Il était à la fois le laboureur du champ et le seigneur de la moisson. C'est ce qu'il donne à entendre en se faisant précéder de hérauts à la manière des souverains. Il gardait le sentiment de la dignité de seigneur de la moisson, tout en étant un ouvrier zélé.

Considérons maintenant la mission des soixante-dix. Ils sont clairement avertis de ce qui les attend. Rien ne provoque l'animosité du monde comme un témoignage pour Dieu. La bonté ne souffrira pas. «Qui est-ce qui vous fera du mal, si vous êtes devenus les imitateurs de celui qui est bon?» Mais si, sur le terrain de la justice, vous tenez ferme contre la marée montante du mal; ou mieux encore, si vous êtes les témoins de Christ, alors attendez-vous au martyre. Si nous avons si peu à souffrir, c'est parce que nous rendons bien faiblement notre témoignage. «Or ne pensez pas à la courtoisie», leur dit-il; «vous êtes engagés dans une mission de vie et de mort». Ils n'avaient pas simplement à montrer une politesse courtoise, d'homme à homme, mais à rendre témoignage aux sérieuses questions qui existent entre Dieu et les pécheurs. Alors, bien qu'ils soient au milieu des loups, que leur mission soit une mission de paix. Ensuite, au verset 7: «Demeurez dans la même maison». Recommandation déjà faite aux douze. «Ne cherchez rien de mieux que ce que vous avez». Qu'il est humiliant de rencontrer des serviteurs de Christ cherchant leurs aises ici-bas! Qu'un principe de fidélité et de douceur caractérise votre marche. Le verset 9 présente de nouveau Christ sous les deux faces dont nous parlions tout à l'heure. Il insiste sur les droits de Dieu avec autant de puissance qu'il met de grâce à s'occuper des besoins des pécheurs. Ils avaient à proclamer ceci: «Le royaume de Dieu c'est approché de vous», en même temps qu'à guérir les malades. Quelle terrible condamnation contre ce monde, dans ce seul fait que Dieu doit y faire proclamer son royaume! Une famille bien ordonnée serait offensée si l'on disait aux enfants d'être soumis à leurs parents, mais qu'il faille rappeler au monde l'obéissance qu'il doit à Dieu, voilà qui montre son véritable état. «Sortez dans les rues», c'est autre chose que la courtoisie. «La poussière même qui s'est attachée à nos pieds, nous la secouons», ceci constituerait une insulte. Mais voici la solennité du message! S'ils le refusent, qu'ils apprennent de votre bouche, dans les termes les plus énergiques, à quel danger ils se sont exposés. Au verset 17, ils reviennent satisfaits, disant que les démons mêmes leur sont assujettis. Sur quoi le Seigneur prend immédiatement sa place du chapitre 20 de l'Apocalypse, où non seulement il délivre les corps de la puissance du diable, mais pénètre sur le terrain duquel, dans la majesté de son autorité, Satan sera chassé. «Toutes les voies de Dieu Lui sont connues dès le commencement», et le Seigneur ici se montre Dieu.

Une question en passant: Vous rendez-vous bien compte que Satan est dans les lieux célestes? Nous le voyons dans le livre de Job, dans les Rois, dans cet évangile, et dans l'épître aux Ephésiens. L'Apocalypse nous le montre ensuite jeté dans l'abîme. La terre lui appartient, et il cherche à posséder ce qui la gouverne. Les disciples se présentent avec un certain degré de puissance qui est pleinement représenté dans l'Apocalypse.

Qu'est-ce qui vous tient le plus à coeur actuellement vos relations ou vos circonstances? Le Seigneur place cette question dans la balance, en disant aux disciples: «La puissance peut vous être accordée sur la terre, mais ne doit pas vous être aussi précieuse que votre place marquée dans la famille au ciel». Pour avoir été fait seigneur de la création, Adam y trouve-t-il matière à discours? Non. Le sentiment de la possession, pas plus que celui de la puissance, ne met une parole sur ses lèvres; il ne parle que quand il entre dans une relation, quand il possède Eve. Les biens doivent n'être rien en comparaison des affections. Avec quelle beauté le Seigneur dépeint ce qui doit être le coeur! Quand il est couronné roi de la création, Adam peut se réjouir, mais au jour de ses épousailles, sa bouche s'ouvre. Son coeur possédait son bien, il était satisfait. «Réjouissez-vous de ce que vos noms sont écrits dans les cieux». Voyez comme le Seigneur s'associe à leur joie du moment. C'est ainsi que nous devrions entrer dans le courant spirituel les uns des autres. Puis, il lève les yeux au ciel, et trouve sa joie en haut. Vous verrez un magnifique contraste en comparant ces paroles avec Matthieu 17. Là, c'est le langage d'un coeur délivré de son fardeau; ici, celui d'un coeur heureux de ce qu'il a devant lui. Rempli de joie, le Seigneur se tourne vers ses disciples, et les appelle «bienheureux». Je ne sache pas que le Seigneur ait été jamais plus heureux qu'ici, excepté — oui, remarquons-le bien pour notre bonheur — quand un pauvre coeur croyant Lui apporte à manger une viande que d'autres ne connaissent pas. Les anges peuvent se réjouir à la vue d'un pécheur venant à repentance, mais ils n'y sont pour rien; ils n'en sont que spectateurs. Il est beau de voir Dieu diriger la joie de sa création. Il dirige la joie; les anges en répercutent l'écho.

Le Seigneur s'est donné lui-même aux disciples, Ils reviennent avec joie, et Lui s'associe à leur joie et l'augmente encore. Elle est troublée au verset 25, et tandis qu'il produit un courant de grâce, le Seigneur sait aussi faire face au courant contraire. Vous n'aimez pas la contradiction, mais le Seigneur la supporte. L'intrusion du docteur de la loi s'aggrave de tout ce qu'elle vient gâter. Le Seigneur se réjouissait de la grâce, et l'homme survient pour en abuser en toute manière. Le Seigneur répond immédiatement à cette usurpation. Etablissons un contraste. Dans le chapitre 4 de Jean, les disciples comprennent admirablement la pensée de leur Maître et demeurent à l'écart, en silence. C'est la communion. La communion la plus intime et la plus profonde se produit souvent dans le silence. Personne ne Lui demande: «Pourquoi parles-tu avec elle?» Tandis qu'ici ce scribe insolent ne connaît rien de l'Esprit du Maître. Quelle bénédiction d'être disciple de l'Esprit de Christ, de connaître quelque chose de ses pensées! Cet homme s'approche, et le Seigneur se tourne vers lui avec toute la douceur divine possible, et lui répond: «Fais cela, et tu vivras». Si l'on consulte la loi sur la manière d'acquérir la vie, le Seigneur montre ce qu'elle dira. Mais le docteur de la loi veut se justifier, parce que aussitôt que nous sommes dans une atmosphère légale, il faut un effort pour diminuer les exigences de la loi. Même quand il s'agit de législation, nous connaissons peu la pensée de Dieu; aussi faisons-nous tous nos efforts pour ramener la loi à notre propre capacité. Aussi le docteur pose une nouvelle question, pensant peu à la réponse qu'il recevrait. Le Seigneur propose une parabole, et sous quelle forme? Qu'est-ce qu'elle vient esquisser? L'historique de sa vie et de sa mort, parce qu'elles étaient la seule vraie image qu'il pût trouver de l'amour du prochain. Je le dis à sa gloire. Il ne pouvait présenter un autre exemple que lui-même. Nous n'arrivons jamais à toucher les bords de l'amour du prochain, si ce n'est dans la vie parfaite de Jésus. «Un homme descendit de Jérusalem à Jéricho, et tomba entre les mains des voleurs, qui aussi l'ayant dépouillé et l'ayant couvert de blessures, s'en allèrent, le laissant à demi-mort». Etre laissés à demi-morts, voilà notre condition. Il était perdu, mais la vie était encore en lui. Qu'il était heureux pour nous que notre vie fût encore en nous, quand nous avons rencontré Jésus! Par aventure, un sacrificateur et un lévite passent sur ce chemin. Un double enseignement s'en dégage. C'est une preuve frappante de l'impuissance de la loi à relever notre condition; et le Seigneur montre aussi que les représentants de la loi ne font pas ce qu'ils enseignent. A l'éternelle confusion de tous les docteurs de la loi, sacrificateurs et lévites, j'apprends ici que jamais ils ne joignirent la pratique à la parole. Etaient-ils autorisés à passer de l'autre côté? La loi ne peut rien pour moi, pécheur; elle ne peut non plus faire de ses fauteurs et de ses défenseurs ce qu'elle aurait voulu qu'ils fussent. Pourquoi le Sauveur de gloire est-il appelé un Samaritain? Parce qu'il était un étranger. Un étranger céleste est descendu pour montrer ici-bas l'amour du prochain. Il est venu faire voir à la terre ce qu'elle n'eût jamais pu se montrer à elle-même. Comment l'a-t-il fait? En premier lieu, «Il vint à lui». Qui pouvait s'acquitter de ce devoir? Le Seigneur n'a-t-il pas agi de même à votre égard? «Et le voyant, il fut ému de compassion». D'où découle le salut qu'il apporte? Y a-t-il eu en vous quelque chose qui l'ait produit ou qui l'ait provoqué? Non. C'est Lui qui y a pensé. Le pauvre malheureux est silencieux du commencement à la fin. Le pauvre fils prodigue était muet, quand on lui mettait la plus belle robe; et Joshua l'était, quand on le revêtait «d'habits de fête», en Zacharie? La grâce de Dieu ne peut recevoir de réponse plus bénie que le silence de la foi. N'ouvre point ta bouche, Joshua, tandis qu'on t'habille de la tête aux pieds et qu'on pose sur ton front une tiare pure; et toi, pauvre blessé, laisse-le te faire ce qu'il veut. Le Seigneur agit de lui-même, selon ce que Lui suggèrent ses compassions. Il verse l'huile et le vin. Il portait avec Lui les biens qui convenaient pour l'homme laissé sur le chemin. Le Seigneur Jésus est venu abondamment chargé de ce que réclamait votre condition. «Et l'ayant mis sur sa propre monture:» Il fait échange de place avec nous. Il était riche, nous étions pauvres; il s'est fait pauvre, afin que nous fussions enrichis. De plus, il se charge lui-même du blessé pour en prendre soin. C'est l'Évangile et tel est l'amour du prochain. Notre précieux Seigneur, je le répète, est obligé de se présenter lui-même quand on Lui demande: «Qui est mon prochain?» Et comment serons-nous nous-mêmes de bons Samaritains? En commençant par nous reconnaître débiteurs de Jésus, avant de pouvoir le suivre dans l'exercice de l'amour du prochain — par être le blessé du chemin, avant de devenir le bon Samaritain. Avec quelle simplicité il montre ses richesses mises en regard de nos nécessités.

Maintenant nous arrivons à la demeure de Marthe et de Marie. Le Seigneur s'y trouve en société, et, comme nous l'avons déjà remarqué, à la table la plus richement servie où nous le voyions jamais. C'est la plus brillante manifestation de Christ au milieu des hommes que l'évangéliste nous présente. Il est ici non comme Celui qui censure, ou comme un Sauveur, ainsi qu'il se montre ailleurs; mais comme l'ami intime de la famille, sanctifiant ainsi le foyer chrétien. Dans la personne des siens, aujourd'hui encore, il accepte la même hospitalité. Pour nous le faire admirer, il soulève le voile d'un tableau que nous aurons bientôt sous les yeux, car le ciel même n'est qu'un vaste cercle d'affections de famille. Que le Seigneur mette en nous tous le vif désir d'y habiter déjà. Amen.

Chapitre 11

En poursuivant notre étude, nous découvrons certains traits caractéristiques du ministère de Jésus. Nous trouvons ici les pensées des disciples à un moment qui nous parait très intéressant. Ils apprennent à connaître la nécessité de prendre place dans la nouvelle création que la loi ne leur avait jamais enseignée. La prière est l'expression de la dépendance, tandis que la loi leur enseignait l'indépendance. Insensiblement l'âme apprenait à connaître ses besoins, imparfaitement encore et sans intelligence de la dispensation présente; ce qui, du reste, ne pouvait se produire qu'après la mort de Christ. Jean va plus loin que Moïse; ses disciples avaient besoin d'apprendre à prier. De même ici les disciples de Jésus. Et Lui, le souverain pasteur de leurs âmes, se met à les enseigner, et leur donne une forme de prière. Il adapte ses paroles à leur condition d'alors. La prière est l'expression de l'état actuel du coeur.

Il leur parle ensuite d'un homme allant à un ami, sur le minuit, lui demander trois pains. «Et celui qui est dedans;…» expression bien significative. Etes-vous «dedans»? C'est une position dangereuse dans ce monde, et dans laquelle nous perdons la sympathie pour les joies et les peines qui nous entourent. Le Seigneur fait ressortir la grâce de Dieu sur le fond si sombre de l'égoïsme de cet homme. Vous n'avez pas à demander, à chercher et heurter; c'est être importun. «Demandez, et il vous sera donné; cherchez, et vous trouverez; heurtez, et il vous sera ouvert». Remarquez cette promptitude divine à répondre aux besoins de l'homme. Ne dites pas qu'il est nécessaire d'être importun pour toucher Dieu. Lisez Daniel 10. «Durant trois semaines entières», Daniel affligeait son âme devant Dieu, sans recevoir de réponse. Elle vient après ce laps de temps, et comment? L'ange lui apprend que dès qu'il avait commencé à prier, il avait été entendu, mais qu'un certain événement se produisant dans le ciel avait retardé la réponse. Durant trois semaines, il persiste dans son importunité, mais aussitôt qu'il avait prié, il avait été entendu. Vous avez pu prier longtemps aussi, sans recevoir de réponse; mais soyez assuré que cet intervalle a été bien rempli, sinon au ciel, du moins pour la discipline de votre âme. Belle image de ce que nous avons ici. Dieu n'agit jamais à contre coeur; il n'est pas retenti par cet égoïsme qu'il faut vaincre, et qui se trouvait dans l'homme importuné sur le minuit; mais il a ses raisons pour différer une réponse, et quand une fois elle arrive, c'est souvent de la façon la plus inattendue. Paul a supplié trois fois, sans que l'écharde fût retirée, mais la réponse vint enfin, et d'une manière qu'il n'avait pas attendue. L'écharde lui fut laissée jusqu'à sa mort, mais il lui fut accordé la grâce d'en triompher.

Après avoir terminé ses enseignements sur la prière, le Seigneur paraît, au verset 14, sur une scène solennelle. Deux pensées contraires se montrent à Christ. Le Seigneur a constamment enduré la contradiction de la part des pécheurs contre lui-même. D'une part, certains parmi le peuple l'accusent de chasser les démons par Béelzébul; de l'autre, quelques-uns, pour l'éprouver, demandent un signe du ciel. Ceux-ci représentent l'incrédulité; ceux-là, une religion pervertie. Nous nous y arrêterons un moment. La même chose se retrouve aujourd'hui. Le Seigneur répond premièrement à ceux qui prétendent qu'il chasse les démons par le prince des démons. Remarquez son exquise beauté: «Si Satan est divisé contre lui-même, comment son royaume subsistera-t-il?» Il commence par l'argument le plus doux. Puissions-nous, vous et moi, le reproduire dans la beauté de son style et dans la vérité de sa substance! Son style était aussi inimitable que sa substance était parfaite. En répondant à la contradiction, il commence par leur démontrer la folie de leurs pensées. «Satan serait-il aussi insensé? Pourquoi êtes-vous si insensés? Vous voudriez me faire diviser ma propre maison!» Maintenant son argument s'adresse directement à eux: «Revenons à votre David préféré, quand il accordait sa harpe et délivrait Saül du mauvais esprit». La pensée de la chair n'est pas inimitié contre David, mais contre Dieu. Comme il travaille à atteindre leur conscience! «Par qui vos fils les chassent-ils?» Voici maintenant le côté sérieux de la question. «Sans doute le royaume de Dieu est venu jusqu'à vous. Prenez garde à ce que vous faites». Les termes mêmes de son raisonnement sont beaux et se développent avec ordre. Il commence par l'argument le plus doux, et continue jusqu'au plus fort. Alors il dit: «Prenez garde, vous êtes sur un terrain dangereux». Puis il propose la parabole de l'homme fort pour démontrer qu'il chassait les démons par le doigt de Dieu. L'homme fort ne voit sa maison pillée que par un plus fort que lui-même. Dieu seul est plus fort que Satan. Nous avons été vaincus par le diable, et nous sommes devenus ses esclaves, de sorte que si nous le voyons lié dans ce monde, c'est Dieu seul qui l'a fait, car aucun fils d'homme ne le pourrait. Si je vois quelqu'un de plus fort que Satan dans ce monde, j'ai la preuve que Dieu est là. Il montre que ce que Satan fait, il le fait contre Dieu, et que celui qui l'écrase a paru. C'est ce qu'il a appris à Satan au désert. Le diable n'a pas peur de nous, mais dans le Fils de Dieu il a trouvé son puissant vainqueur. Il est hardi comme un lion quand il vient contre vous et moi, mais il tremble en présence de Christ.

Au verset 23, le Seigneur tire une conclusion bien solennelle. La guerre est déclarée, sans possibilité de neutralité. Dieu a fait de ce monde la scène du combat dans lequel doit se décider la question entre Lui et Satan, et dont le résultat occupera l'éternité. Une voix proclame: «Celui qui n'est pas avec moi est contre moi». Après avoir fait ainsi retentir solennellement, à travers le champ de bataille, le son de la trompette d'argent proclamant la guerre, le Seigneur esquisse, au verset 24, un tableau imposant sur lequel nous pouvons nous arrêter un moment. C'est un tableau riche en instructions et terrible. Nous l'avons déjà vu représenté par Israël, et il le sera, je pense, par la chrétienté. La maison d'Israël a pu être nettoyée par le balai de Babylone, elle a gardé jusqu'à ce jour l'horreur des idoles, mais Satan s'arrange d'une demeure balayée autant que d'une autre. Il en est de même de la chrétienté. La Réformation ne suffit pas. J'aime à penser que pas une seule âme ne se repose sur la Réformation. Nous sommes tous pleins de reconnaissance pour ce qui nous a procuré le privilège de nous réunir en paix; mais le protestantisme comme tel est sans valeur aucune. Le Seigneur nous enseigne qu'une maison balayée et ornée peut devenir pire qu'auparavant. Qu'est-ce qui a pris la place des idoles dans la chrétienté réformée? Est-ce la connaissance de Jésus? Oui, chez ses élus, mais les vanités humaines ont conduit l'homme de la chrétienté sur le même chemin que les Juifs, et il marche rapidement vers l'iniquité de l'apostasie.

Se tournant alors vers ceux qui demandent un signe: «Il ne vous sera point donné de signe», dit-il. Or, pourquoi disait-on toujours à Christ: «Donne-nous un signe du ciel»? A cause de la mondanité. Ils voulaient un Christ qui étonnât le monde. Le Seigneur ne voulait, ni ne pouvait répondre à cette demande. Si nous n'acceptons pas notre Jésus dans son rejet, nous ne l'accepterons jamais dans la gloire. Puis-je penser à voir mon Seigneur glorifié dans un monde souillé, au milieu d'éléments moraux pareils à ceux qui le composent? Il ne donnera aucun signe. S'il est accepté, ce ne peut être que sous le signe de Jonas, non comme tête couronnée, mais comme celui qui a été frappé et contre qui l'on a craché. Au lieu de faire descendre un signe du ciel, il le fait monter des profondeurs de la terre, dans la mort et dans l'humiliation. Il donne ensuite le magnifique exemple de la reine de Sheba. Sa conscience et ses affections sont éveillées quand elle apprend que Salomon a la connaissance de Dieu. «Elle entendit parler de la renommée de Salomon, en relation avec le nom de l'Eternel» (1 Rois 10: 1), et elle entreprend le long voyage du Midi jusqu'à Jérusalem, dans le seul but de trouver Dieu. Et par quoi la conscience des hommes de Ninive fut-elle touchée? Par cette parole de Jonas: «Encore quarante jours, et Ninive sera détruite». Alors le roi se couvrit d'un sac. L'idée de couvrir de sacs chevaux et brebis, semble presque grotesque; mais qui peut mesurer les angoisses et les remords d'une conscience réveillée? Vous pouvez analyser ou critiquer, mais cela ne vous servira à rien. Il est précieux de voir qu'une conscience convaincue de culpabilité ne peut s'appuyer sur des moyens termes, pas plus aujourd'hui qu'alors. «Donne-nous un signe», demande le peuple. «Non», répond le Seigneur, «il vous faut croire en moi par votre conscience».

Pendant que le Seigneur s'apprête à répondre à la seconde question, il se trouve dans la foule une femme dont les affections sont émues. Ne voyons-nous pas souvent des affections humaines émues sous la croix? Les filles de Jérusalem se placent à l'écart des persécuteurs. Si d'un côté ces aspirations de la nature ne peuvent inspirer de confiance, d'un autre elles ne doivent point être méconnues. Il peut y avoir eu du fruit pour Jésus, un germe de bénédiction. L'activité morale revêt aujourd'hui des formes variées. «Il y a chez toi erreur de jugement», dit le Seigneur à cette pauvre femme; «plutôt bienheureux sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la gardent». Notre relation avec Christ doit être spirituelle, et non charnelle; divine, et non humaine. N'est-ce pas le bonheur de savoir qu'il faut absolument tous nos besoins comme pécheurs pour former le lien entre nous et Jésus? Tout autre se romprait immédiatement, comme les cordelettes de Samson.

Chapitre 12

A la fin du chapitre précédent, nous retrouvons le Seigneur dans la maison d'un pharisien. A Béthanie, il ne revêt pas le même caractère qu'ici. Telles sont les formes variées de la beauté du Seigneur. Luc nous le montre entrant chez trois pharisiens différents, chapitres 7, 11 et 14. Et ici, se voit une des beautés de l'esprit de Christ. Il savait toujours distinguer les choses qui différent les unes des autres. De cette manière, il faisait ressortir un des attributs divins, selon le cantique d'Anne: «L'Eternel est un Dieu de connaissance, et par lui toutes les actions sont pesées». Le Seigneur était un Dieu de connaissance, pesant toujours les actions, ne le faisant jamais pour une action qui fût en rapport avec lui-même, mais qui le fût avec Dieu et avec la personne agissante. Il ne prête aucune attention à une insulte personnelle (celle des Samaritains, par exemple); mais il tient jusqu'à la mort devant une insulte qui s'adresse à Dieu, comme lorsqu'il prit un fouet de petites cordes et chassa de la maison de Dieu les changeurs de monnaie. Nous sommes tous enclins à juger des actions par leurs rapports avec nous-mêmes. Christ ne fait pas ainsi, mais la nature ruinée. Le Seigneur pourrait recevoir de la flatterie, il n'en serait pas perverti; tandis qu'il est aussi facile à la nature humaine d'être pervertie par la flatterie qu'irritée par un affront. A peine rencontre-t-on une personne qui ne soit pas tentée d'estimer ou de déprécier les actions, selon la manière dont elle en est affectée. Vous et moi sommes aisément enlacés par un peu de flatterie. Si Pierre vous eût dit, avec une humaine bonté: «Cela ne t'arrivera pas», lui auriez-vous répondu: «Arrière de moi, Satan»? Je réponds: certes non. Mais la flatterie de Pierre ne provoquait pas de la douceur en Christ.

En examinant soigneusement la condition morale de ces trois pharisiens, nous verrons que le Seigneur pesait le cas de chacun d'eux à sa balance. Tous les pharisiens n'étaient pas les mêmes; aimables les uns, insensés les autres; meneurs ou menés parmi lesquels Christ distingue sans se tromper. Dans ce chapitre-ci, le pharisien est courtois comme les autres, et le Seigneur accepte cette courtoisie, car il est le Fils de l'homme sociable; il venait mangeant et buvant, mais il jugeait ce qui l'entourait. Le pharisien s'étonnait qu'il ne se fût pas «premièrement lavé avant le dîner», et le Seigneur lui répond et poursuit par une véhémente réprimande jusqu'à la fin du chapitre, verset après verset. J'aurais lieu d'être étonné de telles réprimandes pour une remarque si simple, mais attendez un instant. Il n'est jamais aucune de ses paroles ou de ses voies qui vous paraissent dures, qu'il ne puisse justifier. Les derniers versets sont sa justification. Il discerne ce qui se trouve sous la flatterie — une inimitié hypocrite contre Christ; ici elle se dévoile à la fin. «Ils le provoquaient à parler de plusieurs choses, lui dressant des pièges, pour surprendre quelque chose de sa bouche». Bien différente est sa manière de parler à Simon, au chapitre 7. Il savait qu'il y avait en lui un autre sentiment; aussi, au lieu de la réprimande péremptoire et sévère, c'est cette invitation: «Viens, raisonnons ensemble, Simon, j'ai quelque chose à te dire». Ne vous aventurez pas maladroitement au milieu des hommes. Emportez avec vous la balance de Dieu. Ainsi faisait le Seigneur.

Le chapitre 12 est un appendice à la scène qui s'est déroulée dans la maison du pharisien. S'adressant à la multitude, le Seigneur les met en garde contre l'hypocrisie. Il venait d'en être victime, et il tire toujours son enseignement de la nature. Ainsi, en Jean 4, l'eau lui sert de texte; et ici, c'est naturellement la scène qui se passe chez le pharisien. Aux versets 2 et 3, il en montre la folie. Si vous et moi marchions à la lumière de l'éternité, tout ce qui n'est pas réalité nous apparaîtrait une insigne folie. Quelles belles expressions le Seigneur sait employer quand il veut! Le jour vient où ce faible murmure de calomnie glissé dans une oreille, l'ange de l'Eternel le proclamera sur les toits; c'est la réponse aux insinuations qui ont cours dans la bonne société.

Ensuite, il traite de la crainte — la crainte de l'homme; et voyez comme le Seigneur la discute admirablement. Les paroles de Jésus vous communiqueront un esprit de sagesse, mais auparavant il faut que votre esprit reconnaisse sa relation avec Dieu, comme la question capitale.

Or, il vous dit, si la crainte trouve place en votre esprit, de ne pas craindre l'homme, mais Dieu. Et il montre que si l'on craint Dieu, ce ne doit pas être en esclave, mais comme fils, non point servilement, mais avec révérence et foi. Prenez-le avec ce sentiment béni; pas un cheveu de votre tête qu'il n'ait compté. Auriez-vous jamais peur d'un ami dont les soins fussent allés jusqu'à compter chaque cheveu de votre tête, afin que pas un ne se perde? Voilà le moyen de chasser la crainte. Puis il continue, aux versets 8 et 9, en disant: «Maintenant, vous qui me confessez, n'ayez point de crainte des pharisiens. Confessez-moi, car le jour vient où moi, je vous confesserai». Quelle forme de raisonnement serait plus apte à bannir toute crainte de nos coeurs? Si vous me confessez devant de pauvres mortels, moi je vous confesserai devant l'indestructible gloire de Dieu. Puis il ajoute: «A celui qui aura proféré des paroles injurieuses contre le Saint Esprit, il ne sera pas pardonné». Vous et moi sommes des vases du Saint Esprit. Une parole injurieuse contre le Fils de l'homme peut être pardonnée, mais le mépris de ce que possède l'Eglise est un péché sans rémission.

Ayant réglé la question de la crainte, il aborde maintenant celle de la mondanité. «Quelqu'un lui dit, du milieu de la foule: Maître, dis à mon frère de partager l'héritage avec moi». A quoi le Seigneur répond: Ne me comprenez-vous donc pas? Est-ce mon affaire d'enrichir pour ce monde? Le Seigneur a promis une profonde paix à son peuple, mais jamais honneurs ou richesses. Cet homme se méprenait sur la mission de Jésus, aussi reçoit-il sur l'avarice une leçon illustrée par la remarquable parabole qui suit. Or, est-ce un mal que la terre porte du fruit en abondance? Non. Il n'y a rien de mauvais dans une riche moisson. L'abondance est une grâce; et je vais vous dire ce qui s'y trouve du mal? Non, mais un danger; chose prouvée par l'attitude de l'homme, dans la parabole, car il la fait tourner au profit de ses pensées terrestres, et non à celui du Seigneur, Maître souverain de la terre; si l'on est dans la prospérité, il est bien d'employer ses mains et son habileté, et c'est une grâce qu'une récolte abondante, mais il y a un danger.

Ensuite, à partir du verset 22, il prononce ce discours exquis, dont la seule lecture est édifiante, même si l'on n'y ajoutait aucun commentaire. Une chose est certaine, c'est que seule la vie de foi et d'espérance délivre de la mondanité. Ce qu'il nous montre en ce discours est dans la pensée pénétrante, judicieuse, vive de Christ. Un homme peut être irréprochable et inoffensif, et, toutefois, n'être qu'un mondain, s'il n'entretient pas la vie de foi et d'espérance. Apprenez la leçon enseignée par les corbeaux et les lis: «Faites-vous des bourses qui ne vieillissent pas, un trésor qui ne défaille pas, dans les cieux». Recevez-vous volontiers pareil enseignement? Aimez-vous à voir, exposées à vos yeux, les subtilités de l'esprit du monde? L'amour des choses présentes repose très agréablement au fond du coeur de l'homme. Si je n'ai pas en Dieu ma confiance et pour but la gloire, le Seigneur me découvre ici comme ayant un esprit mondain. S'il y a dans ce livre un chapitre important de puissance morale, c'est bien celui-ci. Ayez vos reins ceints, et tenez à la main le flambeau de l'espérance, et vous serez délivrés de la mondanité; n'attendez pas des greniers plus vastes, mais le Seigneur. La beauté de ces paroles ne nous est-elle pas déjà une délivrance? Ah! si elles étaient maintenant fraîches dans nos affections tout le jour, j'en réponds, nos misérables coeurs ne seraient point mondains.

Ensuite, il montre que, s'il est attendu ainsi, quand il viendra, les positions seront changées. Vous le servez aujourd'hui; alors ce sera Lui qui vous servira. Ne vous étonnez plus du bon Samaritain. Il cède sa place sur sa monture, et ici le Seigneur se ceint et sert. L'amour ne peut aller plus loin. C'est vraiment l'amour du prochain. Il l'exercera dans la gloire, comme il l'a fait dans l'humiliation. Ces paroles sont faciles à lire, mais, je vous le demande, pourraient-elles être surpassées? Est-ce chose pénible pour vous de ceindre vos reins dans l'attente d'un tel Maître? Lui ne trouvera pas pénible de ceindre ses reins pour accomplir votre joie. Pierre l'interrompt ici. Dans l'évangile de Luc, le Seigneur est constamment interrompu, parce qu'ici, il met à nu la pensée de l'homme, afin de mieux répondre aux passions du coeur. Il laisse l'homme se montrer tel qu'il est. Aussi, Pierre demande-t-il: «Dis-tu cette parabole pour nous?» Et le Seigneur répond: «Qui donc est l'économe fidèle et prudent que le maître établira sur les domestiques de sa maison?» De nouveau, il fait échange de places. Si, dans mon coeur, je n'attends que Lui, il se ceindra; mais, si je le sers de tout mon pouvoir, il m'établira sur sa maison. Ne le nommez-vous pas «Seigneur», aussi bien que «Sauveur»? Alors il vous placera dans une position élevée. Il fait ensuite la distinction entre beaucoup et peu de coups. Il se servait ici de la balance morale, et non pas judiciaire. Il n'est pas venu pour juger, mais le jour vient où il prendra en main la balance de la justice, et sera alors aussi équitable qu'il l'a été ici-bas. S'il n'a pas rendu confus le pharisien, il ne le fera pas pour ses serviteurs. C'est un grand soulagement pour le coeur de savoir qu'il viendra un jour de justice distributive. Il n'est pas une seule action morale que vous ne deviez juger, mais l'heure du jugement rétributif sonnera plus tard.

Au verset 54, il revient pour la censurer, à la demande: «Montre-nous un signe». «Hypocrites! vous me demandez un signe: ne savez-vous pas que le vent du midi est le précurseur de la chaleur?» Où devez-vous chercher vos signes précurseurs? Dans l'Ecriture certainement, car eux aussi eussent dû y trouver les leurs, comme le vent et les nuées, pour leur annoncer ce qui arriverait. «Voyez-moi», leur dit-il, «pauvre et pourtant abondant en biens, et reconnaissez que Dieu est venu au milieu de vous».

Dans les deux derniers versets, il revient encore à celui qui a demandé de partager l'héritage, et dit: «Tu as voulu tirer ton frère devant le magistrat, et un autre va t'y amener à son tour. Crois-moi, efforce-toi d'en être délivré — délivré de Moïse, de la loi de Dieu. Ne tarde pas, je te le dis, car une fois devant ce juge-là, tu n'en sortiras point que tu n'aies satisfait aux exigences du trône de Dieu». Quelqu'un ici pourrait-il y satisfaire? Si vous ne pouvez vous tenir devant le trône de Dieu, vous n'êtes pas sauvé.

Ce beau chapitre, qui moralement s'adresse aux saints, se termine ainsi par un avertissement à la conscience de l'homme.

Oh! jusqu'à quel point désire-t-on ardemment de resserrer sa ceinture et de marcher à la lumière de la lampe de l'attente, et «d'abonder en espérance par la puissance de l'Esprit Saint»?

Chapitre 13

Je crois que, dans ce chapitre, les pensées du Seigneur, du commencement à la fin, ne s'éloignent pas des Juifs et de Jérusalem. Son oeil voit beaucoup de choses; le monde, la terre d'Israël et sa ville. Sans doute il en sera de même dans le millénium, les nations avec Israël, et Jérusalem au milieu d'elles occupant la position de capitale du monde. Au centre de cette scène riche et variée, l'Eglise tient une place spéciale, dans une relation particulière avec Christ.

N'êtes-vous pas charmés quand les pensées coulent naturellement? Nous n'aimons pas les choses artificielles. Le Seigneur recevait ici comme un fragment des nouvelles du jour. Il lit le paragraphe, comme il fallait, et vous enseigne immédiatement à vous en servir. Le style est familier. Avec Christ, vous n'avez pas besoin d'être en pays étranger. Sur-le-champ il répond, en disant: «Croyez-vous que ces Galiléens fussent plus pécheurs que vous? Non, mais si vous ne vous repentez, vous périrez tous de la même manière». Or ceci n'est pas exactement le jugement des pécheurs. Il est vrai que si nous n'avons pas la foi, nous n'avons pas la vie; mais ici, le Seigneur pensait à la nation, et si elle ne se repentait pas elle périrait. Le sang de ces Galiléens versé par un soldat romain; représentait le jugement venant sur la nation en général. Mais il y a une immense beauté prophétique dans la tour de Siloé. Le jugement d'Israël est représenté par la pierre qui descend. Celui sur qui cette pierre tombera, elle le broiera. Il y a en cela une exquise beauté et une parfaite véracité prophétique. Les pécheurs périront, je vous l'accorde, mais la pensée du Seigneur est plus parfaite que la vôtre. Il considère la condition de Jérusalem et la trouve mûre pour le jugement de Dieu. Ayant montré cela, il propose la parabole du figuier. C'est un magnifique tableau allégorique de ce que le Seigneur avait fait pour Israël. Pendant trois années il avait, dans une longue souffrance, parcouru le pays. Avez-vous jamais remarqué dans Ezéchiel la gloire qui s'en va, comment elle s'attarde en passant d'un chérubin à l'autre, ayant de la répugnance à quitter son ancienne résidence. De même, il répugne à la faveur divine de quitter un objet dont elle s'est occupée. Est-il donc étrange que le Seigneur se retire à contre-coeur de la nation qu'il aime tant? Tout ce ministère de Jésus, c'est l'amour de Dieu s'attardant auprès d'Israël non repentant. S'il eût exécuté le jugement quand le Bethléhémite fut repoussé, la nation périssait, mais il attend encore trois ans. La justice émanant du trône dit: «Coupe-le». La grâce répond par le vigneron: «Laisse-le encore cette année». Les trois ans écoulés, il le coupe effectivement. La tour de Siloé tombe — l'épée des Romains exécute l'oeuvre du jugement.

Maintenant viennent la femme affligée d'un esprit d'infirmité et le chef de la synagogue; alors parait le secret du terrible jugement qu'avait prévu le Seigneur. Le jugement est son travail non accoutumé. Il est provoqué au jugement, la grâce découle de lui-même. La chute de la pierre a été amenée par la stérilité du figuier qu'il avait cultivé année après année. Le jugement s'impose, la grâce coule de source. Pourquoi le salut est-il venu à nous? Nos bonnes oeuvres l'avaient-elles mérité? De la nature même de Dieu vient le salut; le péché provoque le jugement. Il est beau de voir comment Dieu est toujours justifié devant toutes nos pensées. Le chef de la synagogue s'indigne de ce que Jésus ait opéré une guérison en un jour de sabbat. Ici, nous avons les besoins d'Israël représentés dans la pauvre femme, et la condition morale d'Israël dans le chef de synagogue qui parlait des six jours où l'on pouvait guérir. Comme le dit un auteur connu: «Si l'homme le plus patient de la terre en avait le gouvernement, il ne le supporterait pas une heure». «Que faites-vous de votre âne le jour du sabbat?» demande le Seigneur. Comme il se représente bien l'homme à Lui-même, un être qui estime son âne plus que son prochain! Alors, ayant considéré cette terrible apostasie, il continue à l'avoir en vue dans la parabole suivante. C'est l'historique du royaume de Dieu aussi bien que du royaume d'Israël. Compris nous-mêmes dans cet exposé, nous ne valons en rien mieux qu'Israël. C'est une chose où il y a du levain — une chose qui abrite les oiseaux impurs. Pouvez-vous vous reposer, dans la chrétienté? Les oiseaux de l'air y ont trouvé une retraite. Le pouvez-vous? Ou bien y passez-vous comme un étranger? Trop souvent le caractère d'étranger cède le pas au droit de cité; mais jamais l'Esprit de Christ ne pourra se reposer en un monde pareil. Les yeux du Seigneur s'y promènent, afin que vous et moi soyons repris, tout comme Israël.

Il continue sa route vers Jérusalem (verset 22). Avez-vous remarqué dans la structure de l'évangile de Luc, que ce que le Seigneur fait et enseigne, étant sur le chemin de Jérusalem, en forme comme la partie principale? Les chapitres 9, 13 et 18, nous le montrent poursuivant cette route, mais, contemplant la ville éloignée, en divers lieux et sous des aspects différents. Au chapitre 9, elle est comme le lieu qui devait être témoin de son ascension. Ici, il la voit comblant la mesure de ses iniquités en le crucifiant, tandis qu'au chapitre 18, elle est le terme de sa course comme Agneau de Dieu. La pensée de Christ est une chose magnifique procédant en toute circonstance d'une manière variée, mais avec exactitude. Ne désirez-vous pas avec ardeur posséder une pensée aussi féconde? Or, comme il poursuivait son chemin, quelqu'un Lui dit: «Seigneur, ceux qui doivent être sauvés sont-ils en petit nombre?» Sans doute, l'expression de son regard avait motivé la question; sans doute, ceux qui observaient son attitude y découvraient souvent quelque chose de significatif. Comme en Jean 4, où les disciples se retirent d'eux-mêmes, également ici, quand on lui demande: «Ceux qui doivent être sauvés sont-ils en petit nombre?» est-ce qu'il dit: «En petit nombre?» ou «en grand nombre?» Répond-il catégoriquement non? Il est parmi nous une manière de parler qui est fâcheuse. On entend des gens dire: «Tel ou tel est-il chrétien?» Nous ne devons pas confondre la lumière et les ténèbres, mais pas davantage faire abruptement des questions aussi sérieuses quant à leur portée. Jésus ne répond rien quant au nombre de ceux qui doivent être sauvés. Il dit seulement: «Luttez pour entrer». Il considère celui qui fait la question, non la question même. Est-ce que lutter et chercher, dans le verset 24, ne sont que des mesures différentes du même effort? Non, mais des actions différentes. L'homme qui cherche le fait après que le maître de la maison s'est levé et a fermé la porte, au dernier moment, mais vous, faites-le plus tôt. Que ce ne soit pas son lever qui vous le fasse chercher. Prenez maintenant place sur le terrain de Christ, et ne subisse pas la terreur de celui qui cherchera alors. Le ministère du Seigneur a affaire avec trois personnes — Dieu, Satan et l'homme. Occupons-nous un instant de quelques qualités de son ministère concernant l'homme. Il montre toujours ce qu'est l'homme, il le soulage et le met à l'épreuve. Il lui fait voir qu'il n'est qu'un pauvre être indigne, et puis il le délivre. N'est-il pas précieux de le voir exposer votre misère pour en faire sortir le remède? Nous avons affaire à un ami fidèle et non flatteur. Mais tout en dévoilant et en soulageant, il exerce aussi, il met en activité le coeur et la conscience. Celle de l'homme que voici n'est-elle pas immédiatement placée sur le terrain de l'activité morale? Dépouillé d'un seul de ses caractères, le ministère de Christ serait imparfait. Le Seigneur montre ensuite l'excuse que peut faire valoir celui qui cherche. «Retirez-vous de moi», répond-il: cela ne va pas. Cet homme plaide en faveur de ses privilèges et de son intimité. «Nous avons mangé et bu en ta présence et tu as enseigné dans nos rues». «Retirez-vous de moi». Décidément cela ne va pas. «Il y aura des pleurs et des grincements de dents». Quelle différence y a-t-il entre ces deux choses? Ne les confondez pas. Les pleurs sont l'expression du chagrin, les grincements de dents, de la perversité, comme le témoigne le cas d'Etienne quand «ils grinçaient des dents contre lui». L'iniquité, l'infamie du coeur humain, existe, et ils la connaîtront éternellement. Si l'âme condamnée porte sa peine, elle garde à jamais aussi la même inimitié contre Dieu. Pensée solennelle.

Le Seigneur, en se rapprochant de la ville, entre maintenant dans la juridiction d'Hérode, et on Lui dit: «Retire-toi et va-t'en d'ici; car Hérode veut te tuer». «Allez dire à ce renard», répond-il. Comme il regarde en face ce monstre, et lui fait savoir qu'il s'avance sans crainte. Il le montre comme un renard et se présente lui-même sous la similitude d'une poule avec sa couvée. C'est l'histoire d'Israël; il rejette la poule et laisse prospérer le renard; et, sur la montagne d'Israël qui demeure désolée, les renards romains, le Turc et l'Arabe, se promènent. Jésus les eût recueillis, mais ils n'en veulent rien; et les renards y gîteront, jusqu'à ce que Celui qui peut rassembler ses poussins comme fait la poule, soit reçu, et qu'ils disent: «Béni soit Celui qui vient au nom du Seigneur». Lorsqu'ils se tourneront vers le Seigneur et que le voile sera ôté, et que Lui, comme la poule qui rassemble, sera accepté, selon l'expression simple de cette belle image, Israël fleurira, s'épanouira et couvrira de fruits la face de la terre. Lisez Esaïe 54, et Luc 15, et vous vous retrouverez avec le même Dieu de grâce. En Esaïe, Jérusalem est considérée comme veuve. Le Seigneur avait demandé: «Où est la lettre de divorce de votre mère?» Est-ce moi qui n'ai plus voulu d'elle? Ici, il n'est pas question de divorce, mais de veuvage. Au 15e de Luc, quand le père reçoit l'enfant prodigue, est-ce en disant: «Voici mon fils pervers»? Non, mais «mon fils qui était mort, qui était perdu». Oh! quelle tendresse et quelle beauté dans tout cela! Il ne veut pas se souvenir de notre iniquité, mais de notre affliction; et il ne montrera pas Jérusalem comme un objet de honte, mais comme ayant été longtemps dans le chagrin et le veuvage. L'oeil divin n'a pas qualité pour voir ce qui est sans valeur, mais ce qui était mort et est revenu à la vie, ce qui était perdu et a été retrouvé. Pourquoi le Seigneur reçoit-il si peu de nos coeurs? Parce que nous le connaissons si peu. Puisse-t-il se révéler de plus en plus à chacun de nous et se découvrir lui-même aux pensées de notre âme. Amen.

Chapitres 14 et 15

Pris ensemble, voici deux merveilleux chapitres. Dans le premier, le Seigneur vient visiter notre monde, dans le second, c'est nous qui allons visiter le sien. Dans le 14e, il prend connaissance de nos voies; dans le 15e, nous sommes appelés à connaître les siennes. Telle est, entre ces deux chapitres, la grande distinction morale; rien ne peut les surpasser en intérêt. Dans le chapitre 14, nous trouvons que rien ne le satisfait. Acceptez-vous cette conclusion? Il n'y a là rien qui soit en complet accord avec sa pensée, mais au chapitre 15, tout est à son gré, et, si nous étions spirituellement intelligents et spirituellement sensibles, nous verrions que dans le domaine de l'homme, rien ne saurait nous convenir, mais que nous avons tout dans celui de Christ. Un magnifique caractère de l'Apocalypse c'est qu'il n'y a rien qui ne s'accorde à la pensée de l'Eglise glorifiée.

Le chapitre 14 s'ouvre par l'invitation faite au Seigneur d'aller manger du pain chez un pharisien. Aussitôt entré, toutes les sympathies de son âme se montrent. La maison est un type du monde tel que l'homme l'a fait. «Comme il entrait… ils l'observaient. Et voici, il y avait un homme hydropique devant lui… Et Jésus dit: Est-il permis de guérir, un jour de sabbat?» Pourquoi ses interlocuteurs se taisent-ils? C'était un silence hypocrite. Ils auraient dû répondre, mais ils voulaient le surprendre. Oh! de quelle méprisable et misérable ruse nos coeurs sont capables! Notre coeur est en proie au lion et au serpent, la violence et la ruse, Satan est représenté sous ces deux figures. Le Seigneur guérit le malade, et leur demande ensuite: «Quel sera celui de vous, qui, ayant un âne, ou un boeuf, lequel vienne à tomber dans un puits, ne l'en retire aussitôt le jour du sabbat?» Ne devriez-vous pas tirer de vos propres voies la réponse à cette question? Il nous prend sur notre propre témoignage, et nous met à nu par nos paroles et par nos actes. Pas n'est besoin d'un autre pour me dire ce que je suis; je le sais fort bien. Entré dans la maison (verset 7), il considère ce qui l'entoure. C'est justement en cela que nous manquons. Nous sommes si occupés de nous-mêmes que nous ne regardons pas autour de nous pour voir les choses avec les yeux du Seigneur. Il se présente avec le coeur et les ressources de Dieu pour répandre la bénédiction; mais aussi avec les yeux, les oreilles et sensibilité de Dieu, pour apprendre à connaître la scène d'ici-bas. Que voit-il? En premier lieu les invités, et ils ne Lui plaisent pas. Il voit qu'ils recherchent les premières places. Or, supposez que vous ayez l'oeil de Dieu et que vous regardiez la scène qui vous entoure, jour après jour, ne verriez-vous pas la même chose? Mais, la savourant trop nous-mêmes, nous ne pouvons pas témoigner contre elle. Christ était absolument pur, aussi pouvait-il découvrir la plus petite parcelle d'impureté, il voyait que c'était l'orgueil qui animait la scène qu'il avait sous les yeux; et nous aurions, vous et moi, une très fausse idée de ce qui est au dehors si nous ne voyions pas la même chose. La convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la vie, voilà l'esprit qui caractérise l'activité qui se déploie autour de nous.

De la part de celui qui le reçoit dans sa maison, rien non plus ne vient le réjouir; l'égoïsme sous une autre forme, voilà tout ce qu'il voit. Ce n'étaient point les pauvres, les estropiés, les boiteux, les aveugles, que le pharisien avait invités à son festin; mais ses riches voisins étaient assis à sa droite et à sa gauche. Ici, le coeur de Christ s'épanche en invitant ceux qui ne peuvent Lui rendre la pareille. Quel bonheur que notre monde ne puisse plaire à Christ. Que serait pour votre âme le Seigneur Jésus, s'il pouvait s'accommoder d'un tel monde? Si Christ avait pu trouver de la sympathie auprès du monde tel qu'il est représenté ici, ni vous ni moi n'aurions jamais été sauvés. Il introduit des principes diamétralement opposés, autrement nous n'aurions jamais pu parler de salut.

L'un des invités s'écrie: «Bienheureux celui qui mangera du pain dans le royaume de Dieu», mouvement provoqué par la grâce, je pense. Qu'elle ait, ou non, produit du bien dans cette âme, c'est ce que nous ne pouvons dire, mais il y a eu un certain moment où la grâce a passé sur elle. Le Seigneur n'y demeure point indifférent; il prête l'oreille à l'interruption. Précieuse et parfaite humanité de Jésus! Sa divinité était égale à celle du Père, son humanité à la vôtre, à la mienne, non dans sa corruption, mais dans tous les beaux traits qui pouvaient en orner la perfection. Il propose maintenant la parabole du grand souper. On avait dit: «Bienheureux celui qui mangera du pain dans le royaume de Dieu», et le Seigneur expose cette parabole pour faire voir ce que ce sera que de manger du pain dans le royaume de Dieu. Cela nous montre que le Seigneur veille sur les secrètes émotions de notre âme et y donne la réponse qui convient; et le mot de cet homme assis à table lui procure l'occasion de déployer à ses yeux un festin préparé au ciel — combien différent de celui d'ici-bas! Aucun des conviés n'accepte l'invitation. Non, et pas un seul depuis Adam, ne prendra place à cette table. Qu'est-ce que cela veut dire? Qu'il faut plus que l'invitation. Dieu doit faire occuper les sièges aussi bien que couvrir la table. Il doit forcer les conviés d'entrer, aussi bien que dresser la table. Il envoie son esclave en disant: «Contrains les gens d'entrer, afin que ma maison soit remplie». C'est une échappée dans le ciel. Avez-vous jamais vu quelque chose de pareil? Le plus somptueux des festins qui se soient jamais vus, et pas un invité auquel il n'ait fallu faire violence pour l'y amener! Et Dieu le supporte-t-il? S'il n'y avait eu que la mission du Fils, il n'y aurait jamais eu un seul invité; s'il n'y avait eu que celle du Saint Esprit, aucun festin n'eût été préparé. Quel merveilleux exposé de l'amour de Dieu! Si vous aviez témoigné de la bienveillance à quelqu'un, auriez-vous aimé trouver en lui un coeur qui s'y montrât contraire? Non, vous ne reviendriez pas à la charge, mais vous diriez: «Qu'il s'en aille et qu'il ait ce qu'il estime davantage». Mais voici la double mission du Fils et de l'Esprit. Le Fils prépare la fête, et le Saint Esprit, les conviés. De sorte qu'il n'y a là personne qui ait été invité, ce sont des convives forcés. Quelle révélation quant à la nature misérable de notre coeur! L'un a acheté un champ, un autre cinq paires de boeufs. Tout plutôt que l'invitation du Seigneur; contraste frappant entre le festin de Dieu et celui des hommes.

Après que le Seigneur eut proposé cette parabole, comme il sortait de la maison, de grandes foules le suivirent et Lui se retournant, leur dit: «Quiconque ne porte pas sa croix, et ne vient pas après moi, ne peut être mon disciple». Quelle est votre attitude à l'égard du Seigneur Jésus? Le prenez-vous pour modèle, pour exemple? «Je devrais le faire», direz-vous. D'accord, mais vous avez absolument tort, car si votre communion est avec Lui comme modèle, elle doit l'être avec un Sauveur. Les foules le suivent comme exemple à imiter, mais il leur dit: «Si vous voulez me ressembler, faites le sacrifice de toutes choses». Le chapitre suivant s'ouvre avec les publicains et les pécheurs, et il y a chez eux communion de l'âme avec Lui comme Sauveur. Du moment que le Seigneur a atteint ce but, il est satisfait. Il passe outre jusqu'à ce que «publicains et pécheurs» s'approchent pour l'entendre. Il était entré dans la maison du pharisien et en était sorti, et son esprit n'y avait pas été rafraîchi, mais à la première rencontre avec un pauvre pécheur regardant à lui, tout son coeur déborde et se découvre dans les trois magnifiques paraboles suivantes. Impossible de saisir la pensée de Christ dans ce chapitre, sans en être fortifié. Pourrais-je connaître Christ comme je voudrais le connaître, s'il pouvait se trouver à l'aise dans le monde où je suis? Non. Aussi me dit-il: «Si je ne puis avoir une demeure ici, toi, viens habiter chez moi. Tu n'as pas répondu à mon attente, mais jamais je ne te désappointerai, moi». Comme on l'a dit: En prêchant l'Evangile, le Seigneur dit: «Eh bien, si je ne puis me fier à vous, c'est vous qui devez vous fier à moi». C'est une autre version de la même pensée, et ces belles paraboles font ressortir cette importante et imposante vérité: que la demeure de Dieu est remplie de joie par des pécheurs qui y entrent. Croyez-vous que, comme pécheur, vous ayez de l'importance pour le ciel? Mais que vous le croyiez ou non, cela est vrai. Il ne s'agit pas ici de notre gain en matière de salut, mais de la joie de Dieu, et de cela seulement. Il prend ces images familières, afin que nos pensées ne soient pas bouleversées et que nous sachions que nous sommes perdus, mais que nous apprenions aussi à connaître la joie de Dieu en nous retrouvant. Il ne croit pas que l'âme humaine puisse concevoir une pensée plus riche. J'ai ma place au ciel, non seulement comme pécheur sauvé, mais encore comme quelqu'un dont le salut y a apporté la joie. Maintenant vous êtes à la table de Christ, dans le monde de Christ, et vous voyez quelle sorte de place c'est. Laissée à elle-même, la pauvre brebis perdue se serait égarée toujours plus, et quant à la pièce de monnaie, elle fût demeurée en place jusqu'à ce jour, si la femme ne l'eût diligemment cherchée, jusqu'à ce qu'elle l'eût trouvée.

Réunissons maintenant en un ces deux chapitres. Au 14e, il est dit: «Contrains-les d'entrer», et au 15e, le fils prodigue est contraint. Nous avons remarqué la mission du Fils et celle du Saint Esprit. Le Saint Esprit ne me confère jamais mon titre à la gloire, mais me rend capable de le connaître; autrement, il demeurerait inutile pour moi. En quoi, je le demande, consiste cette contrainte? Elle ne va point à l'encontre de votre volonté, mais elle vous rend bien disposé au jour de sa puissance. Voyez, par exemple, l'enfant prodigue: arrivé au bout de ses ressources, quand il commence à être dans le besoin, il revient à lui-même. C'était le début de la contrainte, quand le pauvre prodigue ouvrit les yeux sur son état. Et que fit le Seigneur dans le coeur de Lydie? Il ouvrit son coeur, et son coeur ouvert écouta ce que Paul disait. La grande puissance de cette contrainte se manifeste ici, lorsque le prodigue considère son état et dit: «Que ferai-je?» Le Saint Esprit vous communique la volonté, quand il vous fait voir vos besoins et devant vous la mort et le jugement. Il vous aiguillonne par cela, jusqu'à ce qu'il vous mette sur le chemin qui vous mène à Dieu. Une pauvre âme dit: Je ferais mieux de commencer à m'occuper de l'éternité; une autre est épouvantée à la pensée de la mort et du jugement. Il veut vous conduire en toutes vos voies. La chose essentielle est de tourner le dos au pays où jadis vous erriez. Le pauvre prodigue dit: «Je me lèverai; je suis arrivé à la fin de mes actions; je m'en irai à mon père», et il s'en revient et il est le bienvenu. L'histoire du prodigue est une belle image de ce que signifie la contrainte du chapitre précédent. Un matin, Zachée désire voir Jésus et aussitôt il monte sur un arbre; c'était la contrainte par le Saint Esprit.

Quels chapitres que ceux-ci! Christ, n'ayant rien trouvé dans votre monde, vous a rassasiés dans le sien.

Chapitres 16 et 17

Nous sommes arrivés au chapitre 16, et c'est un chapitre sérieux. Dans un sens, nous en avons rencontré de très heureux dans les deux précédents; nous avons vu comment le Seigneur a visité notre monde, et comment il nous faut visiter le sien, et que rien dans notre monde ne Lui a plu, tandis que dans le sien, tout est à son gré. Il en devrait être de même de nous. Si nous avons un coeur droit, nous ne pouvons pas trouver de demeure ici-bas. L'état d'apostasie de l'homme a bâti ce monde, et c'est une triste chose que de bâtir une maison et de ne pouvoir y vivre heureux; cependant, il en devrait être ainsi de nous. Vous avez bâti une maison ici-bas et Christ en a édifié une dans le ciel. Cultivez-vous le caractère d'un étranger de ce monde et celui de bourgeois des cieux?

Ayant traversé cette merveilleuse scène morale, nous arrivons au chapitre 16, qui en est la continuation, chapitre tout particulièrement sérieux. Le Seigneur commence par la parabole de l'économe infidèle, et avant d'aller plus loin, laissez-moi attirer votre attention sur le terme «dissipé», employé dans le cas du fils prodigue. Il exprime exactement ce qu'avait été sa conduite, et c'est le but de cette parabole de montrer que le frère aîné peut faire absolument ce qu'avait fait le plus jeune. Il peut être un dissipateur très respectable; il y en a des centaines de mille de semblables dans ce monde, où ils jouissent de beaucoup de crédit, mais, pesés à la balance de Dieu, ils sont tout aussi dissipateurs que le prodigue dissolu. Si nous ne nous conduisons pas comme intendants de Dieu, nous sommes des dissipateurs. Si j'use de moi-même et de ce que j'ai, comme m'appartenant je suis, selon l'appréciation divine, un dissipateur. Cette vérité est comme une cognée mise à la racine d'un arbre. Le fils aîné pensait qu'il n'était pas un dissipateur, mais, je vous le demande, si vous vivez pour ce monde, disposant de ce que vous avez, comme si c'était à vous, n'êtes-vous pas un économe infidèle, et, par conséquent, un dissipateur? Il ne nous est pas dit comment cet économe dépensait son argent, mais c'est assez de savoir qu'il n'était pas fidèle à son maître. Nous voyons ensuite comment le Seigneur continue à exposer les raisonnements d'un tel homme. Il vit pour ce monde, fait tous ses projets en vue de ce monde, et non de l'autre. L'enseignement s'adresse admirablement à vous et à moi. Cet homme faisait ses plans pour ce monde, faites-vous les vôtres pour le monde à venir de Christ? Vivre pour soi, n'est-ce pas renoncer à l'office d'économe du Seigneur? Les pharisiens qui entendent cela se raillent de Jésus. Ils doivent le faire assurément! C'était un principe divin, et eux étaient cupides. La cupidité, c'est de vivre pour ce monde, et nous sommes si cupides que nous formons nos plans en vue de lui. Quand vous rencontrez des corruptions dans vos coeurs, qu'en faites-vous? Ayez soin qu'au lieu de vous détourner de Christ, elles vous portent à revêtir votre armure. Que répond le Seigneur à la moquerie des pharisiens? «Vous êtes ceux qui se justifient eux-mêmes devant les hommes». Exactement ce que nous venons de dire: Le frère aîné peut être tenu en haute estime parmi les hommes, mais «ce qui est haut estimé parmi les hommes est une abomination devant Dieu».

Voici, maintenant, la parabole de l'homme riche. A-t-elle été pour vous, plutôt répulsive qu'attrayante. Il semble qu'il y ait en elle quelque chose de répulsif, mais examinons-la. Remarquez la différence entre l'homme riche et le fils prodigue. Celui-ci «revient à lui-même» avant qu'il soit trop tard, mais le riche ne le fait qu'après que la porte est fermée. Dissolu et abandonné, le prodigue, quand il revient à lui-même, pense à son péché. L'homme riche revient à lui-même dans le lieu du jugement, et ne songe point au péché, mais à ses souffrances. Le fils prodigue revient à lui-même dans sa misère ici-bas, l'homme riche, dans les tourments de l'autre côté.

Toute la différence est là. Le jeune homme se dit: «Je retournerai vers mon père, fils rebelle et dénaturé que je suis!» Aucun mouvement semblable dans l'esprit du riche, quand il levait la tête du milieu des flammes. Le prodigue n'a pas besoin d'achever sa première phrase le père lui répond sur-le-champ, lui met un anneau au doigt, le revêt de la plus belle robe, et tue le veau gras; le riche, au contraire, crie sans cesse. Il était trop tard. Telle est la fin d'un respectable dissipateur. Pourquoi dissipateur? Voudriez-vous me dire qu'il se considérait comme économe des biens de Dieu, en vivant splendidement chaque jour, tandis qu'un saint de Dieu restait couché à sa porte? Je ne crains pas d'affirmer que vous et moi en sommes au même point, quand nous vivons pour nous-mêmes. Il meurt comme un respectable dissipateur, comblé d'honneurs et de plaisirs. Aucune détresse ne l'a fait revenir à lui-même. Avez-vous jamais mis ces deux tableaux en regard l'un de l'autre? Cela change dans ce passage la répulsion en attrait.

Au commencement du chapitre 17, le Seigneur fait l'application de ce qui précède: «Il est impossible qu'il n'arrive pas des scandales; mais malheur à celui par qui ils arrivent! Mieux lui vaudrait qu'on lui mît au cou une meule d'âne, et qu'il fût jeté dans la mer, que de scandaliser un de ces petits». J'invite chacun à écouter ce qui est dit ici. Scandaliser un de ces petits, c'est se placer sur le chemin qui conduit au jugement. Au chapitre 17 de l'Apocalypse, Babylone est sous ce jugement; ici, dans l'offense faite à un de ces petits, le Seigneur trouve quelque chose de semblable. Que signifie donc ce mot scandaliser? Bien-aimés, l'Eglise de Dieu, ce sont ces petits qui lui appartiennent; elle est un zéro aux yeux du monde, mais tout aux yeux de Dieu, et notre devoir est de veiller à ce que rien dans notre conduite ne fasse broncher les petits. En tant que je vis dans ce monde, je les scandalise, si je retourne aux choses dont la grâce de Dieu m'a fait sortir. Traversons-nous tous les circonstances de chaque jour n'ayant qu'un sentiment qui nous porte à servir, tout autour de nous? C'est là l'esprit qui anime ces petits, la beauté morale de l'Eglise de Dieu et de chaque saint dans le monde. Du moment que vous vous conduisez comme si vous étiez libre de disposer des circonstances à votre gré, vous êtes en scandale. «Si ton frère pèche, reprends-le, et s'il se repent, pardonne-lui». C'est servir l'âme de son frère. Recherchons la grâce qui nous permette de traverser les circonstances au service de Christ et de nos semblables. Christ doit être notre Seigneur aussi bien que notre Sauveur. Il est Sauveur, vu qu'il sauve pour l'éternité; il est Seigneur, vu qu'il demande que nous Lui consacrions notre temps. Ces deux beaux caractères sont exactement ce qu'exprime Pierre, quand il dit: «Notre Seigneur et Sauveur Jésus Christ». Quelques-uns parlaient évidemment de Christ comme Sauveur, tout en reniant pratiquement sa seigneurie (2 Pierre 2: 1).

L'Esprit est riche en révélations de grâce et en admonitions de sainteté. «Augmente-nous la foi», s'écrient les disciples, «car pardonner ainsi est une chose impraticable pour nous», et le Seigneur répond: «Ah! la foi, c'est la chose même qui fera cela». La foi est ce qui introduit Dieu, et toutes choses sont alors possibles. En mortifiant la chair, vous pourriez arracher les racines naturelles et les aller planter au coeur des mers. On trouve ici deux admirables propriétés de la foi. En même temps qu'elle est un principe de puissance, elle est un principe de dépouillement de soi-même. «Quand vous aurez fait toutes les choses qui vous ont été commandées, dites: Nous sommes des esclaves inutiles».

Si j'ai le Seigneur Jésus avec moi quand une tentation se présente, j'ai Celui qui est le plus fort, je remporte la victoire, et je puis dire ensuite: «J'ai fait ce qu'il était de mon devoir de faire». Ce chapitre a une portée qui le rend infiniment précieux.

Chapitre 17

A partir du verset 11, le même sujet s'étend jusqu'au 8e du chapitre suivant. Nous suivons toujours le Seigneur sur le chemin de Jérusalem. La structure historique de l'évangile de Luc comprend toutes les phases de sa marche vers la cité. Passant par la Samarie et par la Galilée, il entre dans un village et rencontre dix lépreux, qui, selon les exigences de leur condition, se tenaient à distance. Le Lévitique nous donne les ordonnances divines relatives à la lèpre. Au milieu des fléaux qui visitent la nature humaine, elle est considérée à part pour représenter le péché, et pour montrer ce que Dieu veut en faire. Le lépreux était immédiatement mis hors du camp, l'endroit même où le péché nous place, vous et moi. Vous appartient-il, avez-vous le droit de faire tache sur cette belle création de Dieu? Non, et c'est ce que représente le bannissement du lépreux qui devait ainsi apprendre à connaître son état. Votre principale affaire comme pécheur est de savoir que cet exil loin de Dieu est votre part. Aussi le lépreux criait-il: «Impur, impur!» Dans le langage de l'Evangile, c'est ce qui se nomme conviction de péché. Il était mis en dehors de tout et qui avait-t-il avec lui? — Nul autre que Dieu seul dans toute la création; ses amis, ses voisins demeuraient à distance. Ainsi, nul que Christ ne peut répondre à nos besoins. Quand il était guéri, le lépreux rentrait dans le camp, où le sacrificateur l'admettait de nouveau. Tout cela représente le péché dans ses fruits, la pénalité qu'il fait encourir et la manière dont Dieu s'en occupe et agit envers lui.

«Maître, aie pitié de nous!» s'écrient-ils. Ce n'était pas le langage de la foi, mais de la misère, mais le Seigneur prête l'oreille au cri de la misère. Il entendit la voix d'Agar quand elle errait au désert, et maintenant, du sein de leur misère, ils crient: «Aie pitié de nous!» et il a pitié. «Allez, montrez-vous aux sacrificateurs», dit-il. Ils vont, et sont rendus nets, preuve évidente qu'ils ont été dans la présence de Dieu — et que ce Jésus qui a parlé n'est pas autre que Dieu lui-même, car, si nous nous reportons au Lévitique, nous verrons que nul autre que Dieu n'avait le droit de parler à un lépreux. Ceci nous enseigne que nous non plus ne pouvons, comme pécheurs, aller ailleurs qu'à Jésus; si je vais à un autre, c'est que je n'ai pas appris ce qu'est mon péché et qu'il m'exclut de tout, excepté de Lui. Telle est ma misère que, si je n'arrive pas à Christ, je ne puis atteindre la bénédiction. Neuf des lépreux ne le découvrent pas, un seul saisit la portée de la guérison. Aujourd'hui encore, les neuf-dixièmes de ceux qui entendent une prédication, l'oublient l'instant d'après. Un autre la méditera et viendra à la connaissance de Christ, c'est le dixième lépreux. Il fuit poussé à réfléchir sur ce qui s'était passé, et au lieu d'aller au sacrificateur, il retourne à Jésus et dépose son offrande aux pieds de Dieu son Sauveur. C'est la foi qui «glorifie Dieu à haute voix» — l'autre cri était celui de la misère. Ayant reconnu qui était cet étranger, il tombe sur sa face glorifiant Dieu. Celui «qui n'a pas regardé comme un objet à ravir d'être égal à Dieu», était intervenu et avait pris aussitôt la place de Dieu en rapport avec leurs besoins. Il y a une différence entre la détresse et la foi. «Ils n'ont pas crié à moi dans leur coeur, quand ils ont hurlé sur leurs lits», dit le prophète. «Non, ils ne l'ont pas fait». Pourtant plus d'un commence une éternité de joie par les hurlements de la détresse.

De nouveau (verset 20), le Seigneur est aux prises avec les pharisiens. Quel profond intérêt il y a à suivre les scènes morales qui composent le chemin de Christ! Les pharisiens demandent quand viendrait le royaume de Dieu. Question oiseuse, insolente même. Voici ce que j'entends; c'est comme s'ils avaient dit: «Nous sommes prêts pour le royaume, mais la question principale est quand le royaume sera-t-il prêt pour nous?» Aussitôt le Seigneur répond à l'état de leur âme: «Vous devez chercher le royaume de Dieu en vous avant de le trouver autour de vous». N'approuvez-vous pas ces paroles du Seigneur? Nul n'est mûr pour la gloire du royaume, s'il ne la possède dans son coeur. La question ainsi réglée, Jésus se tourne vers les disciples et leur parle du royaume. Le royaume de Dieu est évident en soi. En quelque lieu qu'il s'élève, il n'a besoin d'aucun témoignage. Le soleil et la lune, les tonnerres et les éclairs, ont-ils besoin d'être affirmés? Ils sont leurs propres témoins. Avez-vous conscience que Dieu a établi son royaume au dedans de vous? «Le royaume de Dieu… est justice, et paix, et joie dans l'Esprit Saint», dit l'apôtre Paul. Or ces choses peuvent-elles exister chez vous sans que vous vous en doutiez? Peut-être n'est-ce qu'en faiblesse. Il y a beaucoup d'âmes craintives, dont les craintes mêmes vont à prouver combien leur condition est meilleure qu'elles ne le supposent, mais partout où se trouve la puissance de Dieu, elle se fait sentir. «Le royaume de Dieu» signifie la puissance divine. L'ayant fait comprendre aux disciples, il ajoute: Les jours viendront où vous désirerez de voir le royaume en gloire et vous ne le verrez pas. Quel est le sentier de l'Eglise tout le long de ce siècle-ci? Celui du désir. Est-ce que votre pensée suit jour après jour, un sentier où elle éprouve le désir de rencontrer votre Sauveur qui n'est pas encore manifesté? «Auparavant, je dois être rejeté», leur dit-il, «et vous devez partager mon sort». Le fidèle désire un Seigneur absent, et jusqu'à ce qu'il vienne, il est le compagnon d'un Seigneur rejeté, mais il est rempli du désir de son retour, et pleinement consentant à être le compagnon de son rejet. C'est une réprimande, mais faisons-lui bon accueil; c'est une huile excellente qui sied à notre tête.

Ayant présenté ces qualités, il continue à montrer l'état des choses immédiatement avant la manifestation du Fils en gloire. Les jours de Lot, comme aussi ceux de Noé, donnent l'idée de ce que le monde sera alors. Les hommes se conduiront comme ceux qui ont trouvé leur objet dans le monde. Le Seigneur a donné une esquisse de ce que doivent être les saints pendant la période de son absence, — maintenant, il montre ce que sera le monde. Alors, dit-il, ce sera un jour où Dieu discernera, comme aux jours de Noé. Noé ne fut-il pas épargné quand le monde entier fut détruit? Son histoire se répétera à la dernière heure de cette terre. Deux seront sur un même lit, deux aux champs, peu importe, chacun Dieu les discernera l'un de l'autre. Comme autrefois la colonne de nuée, salut pour les Israélites, jugement sur les Egyptiens, le jour du Seigneur se lèvera semblable au soleil qui portera, dans ses rayons, la santé pour l'un des deux, tandis qu'il brûlera l'autre comme un four. Rien d'étonnant à ce qu'ils s'écrient: «Où Seigneur?» Il répond d'une manière frappante: «Là où est le corps, là s'assembleront les aigles». Il ne répond jamais à une question pour satisfaire la curiosité, mais dans un sens moral. C'est ce qui a lieu ici. Le jour du jugement ne commettra point d'erreur, il ne prendra point celui qu'il doit laisser, ni ne laissera celui qu'il doit prendre. «Suis-je prêt?» devons-nous nous demander. «Est-ce que je sais que si le Fils allait être manifesté dans sa gloire judiciaire, je ne ferais pas partie du corps mort?»

Alors, en rapport avec ce qui précède, il présente la parabole de la pauvre veuve, «Il leur dit une parabole pour montrer qu'ils devaient toujours prier». Eux, pas «les hommes» ici. Supposez que je sois d'une manière pratique le compagnon d'un seigneur rejeté, que ferais-je? Sûrement je prierai, pour avoir la force de conserver ma place jusqu'au retour du maître. Il leur montre le juge faisant la sourde oreille aux réclamations de la veuve. Mais le Seigneur ne semble-t-il pas agir de même? Seulement chez le juge, c'était sa méchanceté, tandis que chez le Seigneur, c'est sa gloire et sa longue patience. Pourquoi le juge ne répond-il rien? A cause de son égoïsme. Pourquoi le Seigneur ne revient-il pas en arrière? A cause de sa longanimité. Parfois, il semble ne pas faire attention à nos prières, comme le juge le fit par égoïsme à l'égard de la pauvre femme. Le Seigneur le fait, parce qu'il ne veut pas qu'aucun périsse; mais il se vengera, le livre de l'Apocalypse en fait foi. Le jour vient où il s'occupera de tous ces sujets de plaintes; mais regardez à vous-mêmes. Prenez garde de n'être pas trouvés en faute, tandis que vous vous plaignez d'autrui, chérissez et cultivez cette vie cachée de la foi à laquelle il vous a appelés et dans laquelle l'Esprit qu'il vous a donné vous conduira. Ceci complète le tableau. Oh! s'il y a quelque chose qui fasse les délices de nos coeurs, c'est de découvrir les gloires du Seigneur Jésus, gloires personnelles, morales et officielles, et de voir comment les Ecritures s'harmonisent pour donner à notre coeur et à notre esprit cette attachante leçon.

Chapitre 18

A partir du verset 9 de ce chapitre jusqu'au 10e du suivant, la pensée du Seigneur se porte sur une variété de sujets détachés. C'est une bénédiction de connaître la pensée de Christ sur toute question. Ses déclarations me permettent de dire que je sais ce que Dieu pense dans tel cas. Merveilleux privilège! Le caractère des évangiles diffère de celui des épîtres, ils mettent le coeur en rapport avec Christ pour trouver en Lui sa satisfaction, tandis que celles-ci placent la conscience devant Lui pour trouver la paix.

Nous trouvons ici d'abord la parabole du pharisien et du publicain. Le Seigneur dépeint leur état d'âme respectif. La pensée du pharisien n'est qu'orgueil religieux et confiance en soi-même. La pensée du publicain était celle d'un malheureux dont le coeur est brisé et qui n'ose pas même lever les yeux au ciel. Ayant devant lui ces deux objets, le Seigneur nous fait connaître ses pensées à leur égard, et quand il les énonce n'êtes-vous pas heureux de savoir qu'il approuve le publicain et non le pharisien? C'est un encouragement de savoir que sa pensée est en accord avec la nôtre. On ne peut dire que le publicain représente un homme absolument justifié. Il était justifié «plutôt) que l'autre. Autrement il ne se fût pas écrié: «O Dieu, sois apaisé envers moi, pécheur!» Est-ce là la condition naturelle du croyant. Non. «Ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu qui m'a aimé et qui s'est livré lui-même pour moi». Cela n'est pas la parole d'un pauvre publicain se lamentant sur sa misère. Il ne tient pas, je le répète, le langage d'un pécheur ayant conscience qu'il est justifié. Il était sur la bonne voie, sans doute, puisque «celui qui s'abaisse sera élevé». Il y a donc pour nous encouragement en ceci que nous apprenons de quelle valeur est pour le Seigneur, l'attitude humiliée du pauvre publicain. L'apôtre Paul peut avoir pénétré dans la partie la plus secrète du sanctuaire, tandis que le publicain n'est encore qu'à l'autel d'airain, mais toutes ces différences sont très précieuses pour nous qui avons conscience, de notre faiblesse.

Vient ensuite le cas de ceux qui amènent à Jésus les petits enfants pour qu'il les touche, mais «les disciples, le voyant, reprirent ceux qui les apportaient». Il faut distinguer ici entre les étrangers et les disciples. Or ne voyons-nous pas que souvent ceux qui sont plus familiers avec les choses de Christ ont moins d'intimité avec lui? En voici une preuve. Ces étrangers comprenaient, bien mieux que les disciples, la pensée du Seigneur. Eux disent: Eloignez-vous. «Non», reprend le Seigneur. Eussiez-vous aimé qu'il approuvât les disciples plutôt que les étrangers? Je réponds du contraire. N'ai-je pas raison de dire que Matthieu, Marc, Luc et Jean, ont fait pour nous un travail digne et merveilleux en amenant nos coeurs à Christ? Quand le coeur est satisfait et la conscience en paix, on est bien près du ciel. Vous êtes heureux du jugement que le Seigneur rend ici. Quelques-uns disent: «La bonté du Seigneur vaut mieux pour nous que nos craintes». Pensée bien pauvre! Sa bonté dépasse notre attente. Les étrangers avaient dit, : «Touche-les», mais Lui les prend entre ses bras et les serre sur son coeur (Marc 10: 16). Comme il dépasse toutes nos pensées!

Un jeune et riche chef du peuple l'aborde. Troublé dans sa conscience, il demande: «Que faut-il que j'aie fait pour hériter de la vie éternelle?» Il voyait que Jésus était un homme bon, comme nous disons, et, dans son embarras, il considère la vie du Seigneur et ne doute point qu'il possède le secret de la paix; aussi s'approche-t-il en posant cette question à laquelle le Seigneur répond admirablement par une autre question: «Pourquoi m'appelles-tu bon?» — Car il n'avait pas le droit d'appeler même Jésus «bon», s'il n'était pas «Dieu au-dessus de toutes choses». Le jeune homme ignorant sa gloire, le Seigneur ne peut accepter de lui ce titre. Il a réponse à tout. Il ne dit point qu'il n'est pas bon, mais: «Pourquoi m'appelles-tu bon?» Tu n'as aucune raison de le faire. «Tu sais les commandements». «J'ai gardé toutes ces choses», dit le jeune homme… «que me manque-t-il encore?» «Une chose te manque encore», répond le Seigneur, «vends tout ce que tu as… et viens, suis-moi». Qu'est-ce que cela signifie? «Que si je veux suivre Christ, je dois être semblable à lui. Le Seigneur avait tout sacrifié en descendant sur la terre, et s'était fait pauvre pour servir. «Si vous voulez être parfait, allez et faites de même». Quand il eut entendu cela, le jeune homme devint tout triste, car il ne pouvait s'y résoudre. Comment voudriez-vous que le royaume de Dieu fût caractérisé: par de l'égoïsme, ou par une bienveillance sans limite? Ah! direz-vous s'il s'agit du royaume, que l'égoïsme n'y pénètre pas! Le jeune homme ne peut renoncer à rien, et le Seigneur le déclare impropre pour le royaume. Vous pouvez chaque jour avoir honte de votre coeur misérable et égoïste, mais vous approuverez la réponse du Seigneur, j'en réponds. La mondanité et l'égoïsme ne peuvent respirer l'atmosphère du royaume de Dieu. Ces choses ne vous satisfont-elles pas? Vous avez à lutter aussi contre ce même esprit qui est en vous, comme il était dans le pharisien, dans les disciples et dans le jeune chef du peuple. La lutte est votre perfection ici-bas, comme l'impeccabilité sera votre perfection dans votre corps glorifié. Quel Christ différent vous auriez, s'il avait approuvé le pharisien plutôt que le publicain, tenu à distance les petits enfants, ou autorisé l'égoïsme du jeune homme! Je ne doute pas que celui-ci ne luttât pour le royaume, ou qu'il y soit entré à son heure; je crois qu'il y avait là, un travail d'âme opéré par Dieu.

Au verset 31, le Seigneur commence à parler des souffrances qui l'attendent en montant à Jérusalem, mais «ils ne comprirent rien à ces choses». Leur ignorance était extrême. Remarquez que jamais le Seigneur ne parle de sa mort sans parler aussi de sa résurrection, comme les prophètes de l'Ancien Testament n'annonçaient jamais les jugements qui devaient fondre sur leur nation, sans parler des gloires qui devaient suivre. Il en doit être ainsi pour nous. Nous pouvons parfois parler de la mort, mais la résurrection et la gloire devraient se présenter immédiatement à notre pensée.

Tandis qu'il poursuit sa route, je vous engage de nouveau à étudier la pensée de Christ. Il vient mettre ordre à une dispute entre un aveugle mendiant et la foule. Approuvez-vous l'issue qu'il lui a donnée? Sans aucun doute. Ce serait un Christ bien différent du vôtre, s'il se fût joint à la foule en faisant taire le mendiant. Chaque trait de plume de l'évangéliste est plein de la beauté et de la perfection de Jésus. L'aveugle en entendant la foule, demande qui est celui qui passe, et on lui répond: «Jésus de Nazareth». Est-ce tout ce que vous connaissez de Lui? «Jésus, fils de David, aie pitié de moi». Quelle relation, je vous le demande, cet homme avait-il avec Christ? Il le connaissait (et vous et moi devons le connaître ainsi) dans sa gloire personnelle et l'immensité de sa grâce. Il le nomme «fils de David», et quand la foule veut lui fermer la bouche «il crie d'autant plus fort». S'il n'est pas la personne qu'il est, tout ce qu'il a fait n'a aucune valeur. S'il n'est pas à la fois un homme, et Dieu qui seul peut par lui-même ôter le péché, tout est inutile. Si nous ne reconnaissons pas la gloire de sa personne, la grâce de son oeuvre n'a point de valeur. Nous devons lier ensemble sa grâce et sa gloire . La confession de l'aveugle mendiant montre l'intelligence de ces deux choses. Il ne s'en tient pas au dire de la foule, mais l'appelle Fils de David; et repris par elle, «il crie d'autant plus fort». Comment le Seigneur tranche-t-il le différend? «Que veux-tu que je te fasse?» Combien est belle sa dignité, quand il s'arrête sur le chemin à l'appel d'un pauvre aveugle mendiant! Josué immobilisa une fois le soleil dans le ciel, mais ici le Seigneur du soleil, de la lune et des cieux, s'arrête au cri d'un aveugle mendiant! Tout l'Evangile est là, le Seigneur de grâce et de gloire vous dispensant la grâce, d'une éternelle guérison pour faire face à votre dégradation. Nous admirons souvent Jacob ne laissant point aller le divin Etranger, mais considérez Bartimée! Il ne veut pas se taire et crie toujours plus fort, jusqu'à ce que Jésus se soit arrêté en demandant: «Que veux-tu que je te fasse?» «Seigneur, que je recouvre la vue». «Recouvre-la», répond alors Jésus.

Maintenant considérez Zachée. Voyant Jésus passer, il perce la foule et monte sur un sycomore. Dans le récit des quatre évangiles, il y a deux cas qui les distinguent les uns des autres, l'un représenté par Bartimée, est un exercice de foi, l'autre, une vivification d'esprit, c'était celui de Zachée. Ce dernier cas se rencontre surtout dans l'évangile de Jean, ainsi qu'en témoignent André, Nathanaël, Philippe, la femme de Samarie qui sont autant de preuves de vivification. Les deux cas qui nous occupent ici servent d'exemples à ce que je veux dire. Bartimée est l'exercice de la foi, Zachée la vivification de l'Esprit. C'est tout simple. Il désirait voir Christ. Qui produisait le désir? L'Esprit vivifiant de Christ. Qu'il est beau de voir la vie éternelle germer de cette semence! La puissance revêtant le désir est clairement manifestée. Ce n'était pas l'habitude de cet homme riche, de fendre la foule et de grimper sur un arbre. Il s'associe à la populace et, pour satisfaire cet ardent désir, monte sur un arbre. Le Seigneur l'en fait descendre. Non seulement il sait qu'un homme est sur le sycomore, mais même il connaît son nom. «Zachée, descends vite». Y a-t-il en tout cela de l'intimité? Vous plaît-elle? J'en réponds. C'est ainsi que le Seigneur juge chaque cas en particulier, et qu'un tel jugement contribue à nous rendre heureux.

L'empressement de Zachée à descendre est facile à concevoir. Ils passent ensemble le reste de la journée, et quel est le fruit de leur communion? «Seigneur, je donne la moitié de mes biens aux pauvres; et si j'ai fait tort à quelqu'un par une fausse accusation, je lui rends le quadruple». Instinctivement son coeur s'épanche d'une manière bien différente de la vanterie d'un coeur qui se croit juste. La simple force de communion avec son Seigneur rend Zachée capable de parler ainsi. Il y avait de la puissance quand il traversait la foule; il y avait de la puissance à la fin de cette journée passée dans la communion de Jésus.

Chapitres 19 et 20

Lisons maintenant du verset 11 du chapitre 19, au verset 18 du chapitre 20. Nous réunissons ces parties, qui semblent appartenir l'une à l'autre, quoique le chapitre semble les séparer. Encore un exemple de la manière dont le Seigneur applique sa pensée à corriger la scène morale qui l'entoure. L'esprit humain s'attache à l'histoire, la pensée divine au sens moral. Ici, ils étaient près de la ville, ainsi le pensaient-ils; encore un peu de temps et le royaume devait apparaître. C'était prendre simplement le côté historique, et nous ne sommes jamais dans le vrai, qu'en prenant le côté moral de toutes choses. L'esprit de Christ était moral. Le Seigneur s'adresse ici à la pensée des foules en présentant la parabole de l'homme noble. Le Seigneur a ses titres à un royaume scellés dans le ciel; mais, où doit être le siège de son administration? Pas dans le ciel; il doit d'abord revenir sur la terre. C'est une vérité de dispensation. Il a, il est vrai, un royaume actuellement: «Le royaume de Dieu… est justice et paix et joie par le Saint Esprit», mais je parle ici de sa gloire royale, qui doit se déployer sur la terre plus tard. Dans cette parabole remarquablement belle, il nous présente un grand seigneur qui, partant pour un pays éloigné, assemble ses esclaves et leur remet dix mines; mais ses concitoyens le haïssent et envoient après lui une ambassade disant: «Nous ne voulons pas que celui-ci règne sur nous». Trois interlocuteurs sont ici en présence: l'homme noble, caché pour un temps, dans un pays éloigné; les esclaves, ayant ordre de trafiquer jusqu'à son retour, et enfin, les citoyens du pays. Parfaite image des temps où nous vivons. Le Seigneur est monté dans les hauts cieux pour s'y occuper de différentes choses et en particulier afin de recevoir pour lui-même un royaume. Au chapitre 7 de Daniel, vous voyez l'homme noble dans le pays éloigné, tandis que notre parabole parle seulement de son départ. Il est beau de voir l'apôtre et le prophète associer ainsi leurs lumières. Les concitoyens représentaient alors le peuple juif; mais l'inimitié des Juifs est maintenant l'inimitié du monde entier, qui a fait savoir au Seigneur qu'il ne le voulait pas comme roi. Telle est la relation qu'il a avec Christ. Les serviteurs sont ceux qui professent le servir en son absence. Il y a un secret moral renfermé dans cette partie de la parabole. Je ne suis pas réellement dans l'esprit du service si je ne me souviens pas que le Seigneur est un Seigneur absent et rejeté. Si je le sers comme Roi, je ne le fais pas, pour dire le moins dans, la connaissance de la dispensation dans laquelle je me trouve. Je ne suis pas maintenant le sujet d'un roi, mais un serviteur, ayant à reconnaître le fait douloureux que son Maître a été insulté et rejeté du monde. N'est-ce pas une douce pensée, que les douleurs et les injures mêmes dont il a été l'objet, sont autant de titres nouveaux à nos affections? Pour que le service ait son vrai caractère, il faut se souvenir qu'il est rendu à Celui qui a été repoussé et rejeté. Vous ne pouvez faire que peu de chose, mais ce peu sera d'une haute valeur, s'il est fait avec affection par un coeur qui reconnaît les injures que son Seigneur a reçues.

A son retour, il décerne des récompenses. Les récompenses sont un secret. Quand le royaume sera partagé, je n'ai pas le moindre doute qu'il y aura des récompenses. Voici un serviteur qui a caché sa mine; or remarquez la réponse que lui donne le Seigneur pour notre propre encouragement: «Pourquoi n'as-tu pas mis mon argent à la banque?» Il ne dit pas: «Pourquoi n'as-tu pas trafiqué avec?» Je puis ne pas avoir l'énergie ni l'activité de mon frère, mais alors le Seigneur me dit: «Sois sans crainte, si tu n'as pas d'énergie pour aller me servir, reconnais du moins mes droits, et place mon argent à la banque». Mais cet homme n'avait point l'esprit du serviteur, il ne connaissait pas la grâce; il avait peur. Tant que nous avons un esprit légal, nous nous servons nous-mêmes. Tel est cet homme. La meilleure pensée qu'il eût, était de se servir lui-même de recevoir sa quittance au jour du règlement des comptes. Aussi est-il retranché, comme quelqu'un qui n'a point de lien avec Christ. J'aime cette «banque». Si moi, je manque de cette énergie qui distingue mon frère dans le service, je puis du moins reconnaître que je ne m'appartiens pas, mais que j'ai été acheté à prix. Cultivons dans nos âmes l'esprit caché qui dit: Quoique je sois faible, je ferai cependant une chose, je m'attacherai à Christ; je suis à Lui, et non point à moi-même.

Maintenant, il lie admirablement la scène qui suit avec la précédente. Les disciples ont deux missions à remplir pour lui: se procurer l'ânon et trouver le logis pour y manger la Pâque. L'ânon doit venir avant le logis. Saisissez-vous la beauté de la chose? Il faut distinguer ses actes dispensationnels, son rejet avant son retour. Il donnait l'ordre de se procurer l'ânon, afin de se présenter en gloire à la Fille de Sion. On lui a demandé de descendre de l'ânon, aussi, restant un étranger dans ce monde, continue-t-il sa route vers la croix. Ici, nous trouvons le Seigneur revêtu de gloire royale, assis sur un ânon, et descendant de la montagne des Oliviers pour entrer dans la ville. La multitude le suit, portant des palmes et exultant de joie; le Roi est présenté dans sa parfaite beauté. C'est Dieu qui prend la chose en main. «La terre est au Seigneur avec tout ce qui lui appartient». Jésus prend ici la place de Jéhovah, Créateur du monde (Psaumes 24). Il avait plus de droit sur l'ânon que le propriétaire lui-même. Les bêtes, sur mille montagnes, sont à lui. Le propriétaire s'incline devant sa demande, et le Seigneur s'avance au milieu des acclamations de son peuple. Mais alors, les pharisiens lui disent: «Maître, reprends tes disciples». Le coeur de la nation manifestait ses sentiments dans les représentants du peuple. L'esprit de la nation se montrait dans ces paroles: «Nous ne voulons pas que, celui-ci règne sur nous». Le voilà rejeté. Le Seigneur pleure alors sur la ville. Au lieu d'être la «ville de paix», Jérusalem trouvera tout autre chose. Jérusalem est un exemple du monde en général, et en suite de la réjection de Christ, le monde devra traverser un état de choses bien différent de celui qui avait été préparé pour le Seigneur. Le monde, par la croix, l'a renvoyé au ciel, et ne peut maintenant parvenir au royaume qu'à travers le jugement. Le roi venait déployer toute sa beauté aux yeux de la Fille de Sion, mais elle ne s'était pas préparée pour lui, aussi pleure-t-il sur elle en annonçant le jugement qu'elle s'est attiré. Le monde n'est pas non plus prêt à le recevoir, et la terre devra arriver au repos en passant par les jugements qui la purifieront de sa souillure.

Maintenant (chapitre 20), voici une subtilité de leur part, car rien d'approchant ne se trouve dans l'esprit du Seigneur, quand il leur répond. Il ne leur tend pas de piège, quoique sa réponse devienne un piège pour eux. Son but est divin. Jean ayant été rejeté, il s'en suit que Christ lui-même sera aussi rejeté. C'est comme s'il disait: «Je laisse à Dieu le soin de vous répondre. Vous avez en Jean la réponse de Dieu à votre question». Dieu voulait amener le Messie par le moyen de Jean, et lui étant rejeté, Christ lui-même devait l'être.

Considérons maintenant un peu la parabole suivante. Elle nous parle d'un autre pays «éloigné». «Un homme planta une vigne, et la loua à des cultivateurs, et s'en alla hors du pays pour longtemps», Quand cela eût-il lieu? Aux jours de Josué, le Seigneur planta une vigne parfaitement bonne, remettant à Israël le soin de la cultiver. Inutile de rappeler ici la quantité de juges et de prophètes suscités en vain. «Que ferai-je?» se demande alors le seigneur de la vigne. «J'enverrai mon fils bien-aimé; peut-être que, quand ils verront celui-ci, ils le respecteront. Mais quand les cultivateurs le virent, ils raisonnèrent entre eux». Ah! gardez-vous bien de raisonner. «Et l'ayant jeté hors de la vigne, ils le tuèrent. Que leur fera donc le maître de la vigne?» Ceci nous amène au même point que la parabole de l'homme noble, — au jugement. «Il viendra et fera périr ces cultivateurs». Réunies ensemble, ces deux paraboles offrent un beau tableau des voies de Dieu, depuis les jours de Josué jusqu'au retour du Seigneur en gloire. Les cultivateurs de la vigne nous représentent les relations de Dieu avec Israël, jusqu'au rejet de Christ, héritier de la vigne. Par la parabole des «dix mines», nous sommes conduits à travers le temps présent jusqu'à la seconde venue de Christ, ou à son royaume. Il est allé maintenant dans le pays éloigné, non pour envoyer des serviteurs chercher du fruit, mais pour recevoir un royaume pour lui-même, et revenir exécuter le jugement. Je demanderai une chose: Est-ce que le Seigneur est assis dans le ciel, jusqu'à ce que ses ennemis soient mis comme marchepied de ses pieds? Vous dites oui. Eh bien! cette partie du Psaume 110, se lie avec nos deux paraboles. Là il attend jusqu'à ce que ses ennemis soient faits son marchepied, ici la chose est faite, Ce sont là de beaux et lumineux fragments que l'Ecriture répand çà et là et qu'elle vous dit d'aller ramasser, et, quand vous en avez rempli vos paniers, de les apporter chez vous et de vous en nourrir.

Chapitres 20 et 21

Dans notre dernière méditation, nous sommes arrivés au verset 19 du chapitre 20. Nous arrivons maintenant, d'après Luc, à la scène du dernier conflit entre le Seigneur et ses ennemis. Dans ce monde, non seulement nos péchés, mais aussi nos inimitiés lui ont donné du travail. Cela se retrouve continuellement. Ses douleurs sur la croix pour nos péchés, ses souffrances à travers la vie, chargé de nos inimitiés.

Une question subtile lui est posée au verset 20. Hérodiens, pharisiens, sadducéens, représentant trois grandes catégories du peuple, sont ici en présence. L'hérodien était un politique religieux, le sadducéen un libre-penseur religieux et le pharisien un religieux légal; mais tous n'étaient que des formes d'inimitié contre Dieu. Jamais la chair ne pourra s'allier au Christ de Dieu. Pour cela, il faut être né de nouveau. «Nous est-il permis de payer le tribut à César, ou non?» lui: demandent-ils. Ils croyaient le tenir, et c'était une question pénétrante et subtile. Découvrant immédiatement le motif caché, il l'aborde de front: «Vous venez me tendre un piège et non chercher la solution d'une difficulté. Pourquoi me tentez-vous? Montrez-moi un denier». Le Seigneur n'avait pas de bourse. Quand il voulait prêcher sur un denier, il devait demander qu'on lui en montrât un. Le Seigneur avait la plus riche bourse que jamais homme eût dans ce monde; mais il n'en dépensa jamais un denier pour lui-même. Or, leur dit-il, «de qui a-t-il l'image et l'inscription?» Et répondant, ils disent: «De César». Très bien, le Seigneur n'allait pas traiter comme un usurpateur ce César, verge de la colère de Dieu sur la terre d'Israël. Chaldéens, Perses, Grecs ou Romains n'étaient point des usurpateurs. Aussi, quand le Seigneur voit la monnaie de César circuler dans le pays, il y voit la honte d'Israël et non l'usurpation de César. Comme il échappe admirablement au filet de l'oiseleur! «Rendez donc les choses de César à César, et les choses de Dieu à Dieu». C'était une règle d'or, même depuis la captivité — la règle des captifs ramenés — c'est notre règle aussi. Considérez-vous comme une usurpation les pouvoirs ordonnés de Dieu? Non, mais ne confondez pas les droits de César et les droits de Dieu. Si quelque conflit venait à surgir entre les deux, dites comme Pierre: «Jugez s'il est juste devant Dieu de vous écouter plutôt que Dieu». C'était, pour l'état d'Israël à ce moment, une sentence courte, polie, pleine de sagesse divine.

Les hérodiens maintenant congédiés, voici venir les sadducéens. L'inimitié de Satan ne se lasse jamais. S'il échoue avec les hérodiens, il s'essayera avec les sadducéens. «Maître! voici une chose étrange». Le Seigneur a sa réponse prête. Il sait répondre à chacun. «Vous confondez les choses terrestres avec les célestes. Vous ne comprenez absolument rien, mais ce que vous pourriez savoir, c'est que les morts ressuscitent. «Moïse même appelle le Seigneur — le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob; or, il n'est pas le Dieu des morts, mais des vivants». Voyez-vous maintenant la différence entre la résurrection du corps et une vie distincte de l'esprit? Si la vie de l'esprit eût seule été introduite, ne comprenez-vous pas que Dieu n'aurait pas été pleinement glorifié? C'est pourquoi Paul enseigne aux Corinthiens (1 Corinthiens 15): que s'ils ne croient pas à la résurrection, ils ne connaissent pas la gloire de Dieu. L'ennemi a introduit la mort de l'âme comme la mort du corps, et Dieu doit le rencontrer sur le terrain de sa puissance. Si, après que Satan eut détruit le corps, Dieu avait dit: Maintenant je ferai une autre créature — sa gloire n'aurait pas été pleinement manifestée. S'il vous faisait sortir du corps pour habiter avec Christ en esprit, vous seriez pleinement satisfait, mais non pas sa propre gloire. De là la nécessité de la résurrection.

Il réduit au silence et confond ses interlocuteurs. Il pose ensuite une question qui déjoue leur ruse: «David donc, l'appelle Seigneur; et comment est-il son fils?» Ils sont confondus, et aucun ne peut répondre à cette question qui, demeure sans réponse pour quiconque ne voit pas la personne du Christ, précieux mystère de l'Homme-Dieu.

N'est-ce pas une chose triste et terrible que vous ayez renvoyé le Seigneur à la droite de son Père, pour y attendre que ses ennemis soient faits son marchepied? Il y est allé, direz-vous peut-être, afin de me secourir, moi pauvre pécheur. Oui, mais vous l'y avez renvoyé aussi. Vous n'avez qu'une vue très imparfaite des choses, si, en le voyant prendre soin des besoins de pauvres pécheurs, vous ne le voyez en même temps attendre jusqu'à ce qu'il vienne juger ses ennemis à la consommation du siècle. Sa grâce l'a placé où il est, Souverain Sacrificateur de notre profession — notre inimitié l'y a mis pour attendre le moment où il jugera.

Le chapitre 21 découle de ce fait, et ici j'ajouterai qu'il y a quelque chose d'extrêmement beau se rattachant à la fin du ministère du Seigneur. Au début de son ministère, il trouvait des consolations pour lui-même, comme au puits de Sichar, et de la part de l'aveugle-né. C'étaient les fruits de son labeur, mais depuis son départ de Jéricho et sa rencontre avec Zachée, jusqu'au brigand sur la croix, c'étaient des cas où il n'avait pas un moment de peine, c'étaient des consolations procurées par Dieu. Il allait entrer dans les scènes les plus sombres de sa douleur, et Dieu lui envoie, par ci, par là, une coupe d'eau froide pour le rafraîchir sur sa route. Son pénible labeur est terminé. Il se prépare pour Gethsémané et Gethsémané le préparait pour le Calvaire, comme si Dieu lui disait: «Maintenant, tu ne te fatigueras plus. Moi, j'apporterai du rafraîchissement à un Jésus qui ne se fatigue plus». Ni Zachée, ni le brigand sur la croix, ne lui ont coûté un effort. Ils lui sont amenés.

Le Seigneur expose maintenant le récit des temps des nations. Il est là-haut, attendant que ses ennemis soient mis comme marchepied de ses pieds, et il fait une esquisse des temps des nations, période de l'abaissement d'Israël. L'expression «temps des nations» signifie leur suprématie et l'abaissement d'Israël. Il anticipe sur toute la période. Au verset 24, il la nomme «les temps des nations», pendant lesquels les nations ont l'autorité suprême, quand Israël n'a ni pays, ni héritage sur la terre. «Quand donc ces choses auront-elles lieu?» lui demande-t-on (verset 7). «Prenez garde, répond-il, on vous promettra le repos avant qu'il vienne». Vous souvenez-vous de l'erreur du peuple, au chapitre 19, quand il pensait que le royaume allait paraître sur l'heure? Le Seigneur prévoit la même chose ici. Il leur dit: «Ne vous trompez pas, le moment ne peut arriver sans un jugement préalable». Et c'est ce que j'ose dire au monde aujourd'hui. Vous n'allez pas avoir un royaume; le temps de la gloire n'est pas proche; et il ne le sera pas avant que le jugement ait purifié la terre. Bien différente est l'attente de l'Eglise. Le jugement est de l'autre côté de ma gloire. J'aurai été glorifié avant de paraître devant le tribunal, mais la terre peut-elle entrer dans sa gloire avant d'être purifiée de son iniquité? Il ne peut être Seigneur des seigneurs avant d'avoir ceint son épée sur sa cuisse. Le monde se promet des choses glorieuses. N'en croyez rien. Le Seigneur leur dit alors: «Possédez vos âmes par votre patience», et non par une fausse espérance. «Quand vous verrez Jérusalem environnée d'armées, sachez alors que sa désolation est proche». Ce jour-là est arrivé, et Israël a été emmené captif au milieu des nations. Au verset 25, le Seigneur prévoit les derniers jours des temps des nations. «Et il y aura des signes dans le soleil et la lune et les étoiles, et sur la terre une angoisse des nations en perplexité devant le grand bruit de la mer et des flots, les hommes rendant l'âme de peur… Et alors on verra le Fils de l'homme venant sur les nuées avec puissance et une grande gloire». Alors — quand seront visibles ces terribles signes — alors, vous du résidu juif, levez vos têtes, parce que votre jubilé approche. Ce terme est identique à celui de rédemption. Le Lévitique nous apprend que chaque cinquantième année, Dieu revendiquait à nouveau ses principes établis. Pendant quarante-neuf ans, le peuple pouvait enfreindre l'ordre de Dieu, mais au cinquantième, ils étaient renvoyés chacun dans ses propres biens, l'ordre et l'état de la famille se trouvaient reconstitués. Du moment que Dieu reprend les choses en mains, nous avons un jubilé. Dieu savait qu'il avait le droit d'appeler un jubilé sa terre, quand ses principes la gouvernent. Etes-vous las du monde tel que l'homme l'a fait? Le monde de Dieu sera un jubilé. Pour l'homme, le meilleur monde, c'est d'avoir sa vanité satisfaite. Avons-nous honte d'avoir un coeur pour une semblable jouissance? Aussi, lorsque cette épuration et cette purification commenceront, alors, «regardez en haut». L'épée de David est à l'oeuvre, et le trône de Salomon sera édifié. «Cette génération ne passera point que tout ne soit arrivé». Rien ne la fera s'amender. C'est la même race d'hommes aujourd'hui qu'aux jours de Christ. Le monde peut être avancé quant aux grands progrès de la civilisation, mais l'ont-ils amélioré? Dieu seul peut y porter remède, et il le fera en le supprimant. S'il mettait du vin nouveau dans de vieilles outres, elles se rompraient. Nous trouvons ensuite ce magnifique avertissement à l'adresse de tous: «Ne vivez pas comme si ce monde était votre part». La vie que vous nourrissez en ce monde est chose bien différente de celle que vous chérirez dans le monde à venir. Elle sera si différente qu'elle viendra sur vous comme un voleur. En sorte que si vous et moi, nous disons à nos coeurs, de manger, de boire, de faire bonne chère, la venue du Fils de l'homme sera aussi différente moralement que la venue d'un voleur dans la nuit le serait occasionnellement, pour une famille qui est allée se coucher dans le repos et la tranquillité.

Chapitre 22: 1-38

Ce chapitre réclame pour chacun de ses versets une attention spéciale, tant en est sérieux le caractère. Nous sommes à un moment solennel, et l'impression produite sur l'esprit est que tous ceux qui nous sont présentés, ont leurs pensées dirigées vers la mort. Nous voyons immédiatement celles du Seigneur, mais sous un caractère très différent. Lui l'envisage comme posant les fondements du royaume éternel. Eux pensent qu'en arrivant à le tuer, tout serait à jamais terminé entre lui et eux. L'arrêt prononcé sur les choses anciennes et le fondement des choses nouvelles et éternelles, reposent sur la mort. Le Fils béni de Dieu est entré dans la mort et a posé le fondement de la nouvelle création, exactement au point et à la place où l'ancienne a pris fin. Quelle perfection dans le développement de ses voies!

Tous les représentants de la religion font partie de cette ligue. Vous pouvez tenir, comme une chose sûre et certaine, que la religion de la chair et du sang est toujours inimitié contre Dieu.

Nous avons déjà remarqué qu'au terme du ministère du Seigneur, il est fait mention de deux missions; l'une consistait à procurer l'ânon pour l'entrée du Seigneur en gloire royale à Jérusalem; l'autre consiste à trouver un logis afin d'y manger la Pâque. L'insuccès de la première prépare la voie à la seconde. Accepté sur la terre, le Seigneur eût eu le droit d'occuper le trône de David, mais les habitants de Jérusalem ne veulent pas de lui; aussi, rejeté comme Roi, il doit devenir un étranger. Il s'est offert lui-même pour couronner d'une beauté royale tout le système de la terre, mais la terre n'a pas voulu de cette parure; que fait-il? S'il a été rejeté comme pierre de faîte, il faut qu'il soit la maîtresse pierre du coin. C'est là l'union des deux missions. La première devait lui procurer un ânon, et, comme Seigneur de toute la terre, il le réclame de son propriétaire: «Tu es le possesseur, mais Moi, je suis le Seigneur». L'homme s'incline devant son droit, et il en sera bientôt ainsi dans le millénium — la suprême seigneurie de Jésus sera reconnue, et son sceptre sera baisé jusqu'aux bouts de la terre.

Il envoie maintenant une mission, comme un voyageur entrant dans une salle à manger. Comme le Seigneur savait s'adapter aux circonstances! Il savait être dans l'abondance, ou dans les privations et l'abaissement, entrer en Roi dans Jérusalem, et aller souper avec quelques pauvres disciples dans une chambre haute. Jusqu'au jour d'aujourd'hui, le Seigneur est un simple hôte en visite chez son peuple. Aussi bien que le possesseur de l'ânon, le maître du logis est tout prêt à reconnaître ses droits, et le voilà assis avec les siens, célébrant la Pâque; ce n'est point encore la table du Seigneur; c'est la Pâque juive. «J'ai fort désiré de manger cette pâque avec vous avant que je souffre», leur dit-il, «car je n'en mangerai plus jusqu'à ce qu'elle soit accomplie dans le royaume de Dieu». Cet acte l'a désormais abolie. Or, pourquoi, reçoit-il non pas la coupe, mais une coupe? Elle n'entre pas dans les ordonnances de la Pâque juive. «Maintenant», dit le Seigneur, «je ne veux pas goûter de la joie». Comme Juif obéissant, il célèbre la Pâque, mais la joie lui est réservée dans le royaume. Jusque-là, il ne peut point la goûter sur la terre.

Ensuite, il institue la cène. Il n'en mange pas. Il la leur donne simplement. Il ne pouvait pas en prendre, n'ayant pas besoin de rédemption obtenue par le sang. «Faites ceci en mémoire de moi». Il y a dans ces mots un secret profond et béni. Ce qui autrefois était anticipation, est maintenant souvenir. La cène du Seigneur est un mémorial. Comment la transformation s'est-elle opérée? «Ceci est mon corps». Le Fils qui est dans le sein du Père a pris un corps. «Tu m'as formé un corps». Or, il ne s'agit pas du principe que le péché doit être remis en mémoire, mais qu'il a été pardonné, ôté; il n'y en a plus. La Pâque anticipait la venue du Seigneur pour mourir. Maintenant, il a dressé la table à laquelle je me souviens qu'une fois j'étais dans mes péchés, mais que le péché a été ôté. Le corps formé de Dieu a été mis sur le bois maudit, et maintenant le péché est ôté pour toujours; tout le caractère de la fête a pour objet la victime. Le passage des Hébreux: «Combien plus le sang de Christ… purifiera-t-il votre conscience des oeuvres mortes, pour que vous serviez le Dieu vivant», est comme le pivot de cette épître. Si votre conscience est purifiée, que faites-vous de vos péchés? Souvenez-vous qu'une fois vous étiez dans vos péchés, mais que vous n'y êtes plus, qu'à présent vous êtes morts et ressuscités avec Christ.

Remarquons de nouveau combien la mort occupe les pensées de tous. Ce sont aussi celles du Seigneur, mais avec une différence: eux pensaient a lui comme martyr, Lui pensait à un sacrifice — le caractère de victime qu'il allait revêtir. Sa mort a deux caractères distincts: celui de martyr sous la main de l'homme, et de victime sous celle de Dieu.

Maintenant, Judas ne se montre pas simplement comme un homme faisant partie de la foule. Il revêt un caractère plus terrible. Il est le représentant de la perversité apostate. La sienne n'était pas la forme ordinaire de l'inimitié de l'homme contre Dieu. Judas représente l'apostasie. Elle a toujours existé; et à cette heure même, si elle ne se déchaîne pas complètement, la chrétienté s'avance rapidement vers elle. Celle de Judas forme le chaînon entre Christ et ses ennemis.

Maintenant, nous trouvons les disciples, et (chose terrible) pensaient-ils à la mort? Ils songeaient à leur orgueil. «Peu s'en est fallu que je n'aie été dans toute sorte de mal au milieu de la congrégation et de l'assemblée» (Proverbes 5: 14). N'avez-vous pas eu, aux heures les plus solennelles, le sentiment de votre vanité et de vos convoitises? Au milieu de toutes ces scènes profondément sérieuses, les pensées des disciples étaient occupées de leur vanité. Je me demande si un regard jeté sur le Seigneur, n'eût pas fait cesser et réduit au silence les réflexions de leur esprit charnel. Or, voyez l'humilité du Seigneur. «Le monde flatte les superbes. Il aime ce qui est haut élevé et grand». Il y a un jugement prononcé sur le monde! «Mais il n'en sera pas ainsi de vous». N'est-ce pas un soulagement pour vous, d'arriver à la pensée, de Christ? «Il n'en sera pas ainsi de vous». Il le répète. «Prenez la dernière place». O! beauté de sa pensée, perfection de sa grâce, éclat de sa gloire! «Vous êtes de ceux qui avez persévéré avec moi, dans mes tentations». La réprimande ne nous sépare jamais de lui. Supposez que vous ayez le sentiment que le Seigneur vous reprend; il vous faut avoir la conscience qu'il ne vous met pas à la moindre distance de lui-même. Pierre, Jacques et Jean réprimandés, montent sur la sainte montagne. Les disciples avaient tous été censurés, lorsqu'au 17e chapitre de Jean, Jésus dit au Père: «Ils ont gardé ta parole». Ici, ils sont repris, et pourtant peu après il les amène comme l'ayant accompagné dans ses tentations, plus près de lui que ne le sont les anges. La réprimande les a-t-elle placés même à une petite distance de lui? Dans le royaume de Dieu, il y aura une table et un trône. La table est le symbole de l'intimité familiale; le trône, celui du déploiement public de la gloire. Un petit mot comme celui du verset 30, est un volume que le Seigneur ouvre à nos coeurs! Nous y trouvons le sanctuaire de la famille et les places extérieures où les dignités, du trône seront déployées et partagées.

Maintenant il s'adresse à eux, comme ils le méritent. S'il ne retire jamais sa tendresse, il ne retire jamais sa discipline. L'emploi de la verge n'arrête pas un moment les pulsations de son coeur. «Simon, «Simon», dit le Seigneur, «voici, Satan a demandé à vous avoir pour vous cribler comme le blé; mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas». Il avait criblé Christ comme le blé. Pourquoi Satan était-il entré en Judas, sinon pour cela? et maintenant, il désirait cribler les disciples. Vous voyez que ceci introduit Pierre d'une façon toute spéciale. Dès le commencement, le Seigneur l'avait établi chef des apôtres, et apôtre de la circoncision. Il était primat du collège apostolique. Quand les autres disciples s'enfuient, Pierre tarde à les suivre. Il fait une chute terrible. Son courage faiblit, tout s'effondre en lui, sauf sa foi en Christ, grâce à cette intercession. La première fois qu'il revoit le Seigneur, il se jette à l'eau afin d'arriver à lui. Et, quand il est converti, il tient tête au sanhédrin qui ne peut l'effrayer. Revenu, il fortifie vraiment ses frères, comme en témoignent les premiers chapitres des Actes. Il fut criblé, tout en lui tomba, excepté la foi; il est fortifié et il fortifie ses frères.

Et il leur dit: «Quand je vous ai envoyés sans bourse, sans sac, et sans sandales, avez-vous manqué de quelque chose?» La signification de cette parole est bien simple. Quand il était avec eux, il les mettait à couvert; c'est ce que le vêtement symbolise. Maintenant qu'il va les quitter, eux doivent prendre sa place, et devenir un peuple militant. Ils ont à prendre sa place en face de l'inimitié du monde. Ces trente-huit premiers versets sont importants, ils jettent les fondements sur lesquels la création sera établie pour l'éternité. Christ est mort sous l'état de choses ancien destiné au jugement, afin d'introduire des choses nouvelles et éternelles. Là, rien n'est ancien. Quand la joie aura duré dix mille ans, elle sera aussi fraîche qu'au commencement. La nouvelle création demeure toujours nouvelle et toujours jeune.

Chapitre 22: 39-71

Nous voici arrivés au verset 39 du chapitre 22, et, comme nous l'avons fait remarquer, il est bon de s'arrêter sur chaque verset, car chacun est fécond en enseignement. C'est une vraie bénédiction de voir dans ce chapitre comment le Seigneur passe à travers des relations diverses — avec ses disciples, avec son Père, et avec ses ennemis. Il sort maintenant, il quitte la table et se rend à la montagne des Oliviers. C'est un lieu mystique. Pourquoi mystique? Il y a là des leçons variées à apprendre. Un mystère est ce qui renferme un secret. Par exemple, Abraham emmenant son fils sur la montagne de Morija, est la personnification d'un secret. Dans ces chapitres, le Seigneur se montre en trois positions différentes: descendant de la montagne, la gravissant, et se trouvant sur la montagne. Comme sa descente royale a été repoussée, nous le voyons faire une ascension fatigante; et si nous lisons le prophète Zacharie, nous le retrouvons sur la montagne, mais elle se fendra sous ses pieds, par l'effet du jugement.

Il prend congé de ses disciples pour retourner auprès du Père. Il les quitte avec ces bienfaisantes paroles: «Priez que vous n'entriez pas en tentation». Maintenant, il a affaire avec le Père. Et que dit-il? «Si tu voulais faire passer cette coupe loin de moi!» Sûrement, ceci faisait partie de sa perfection morale. Il fallait qu'il en fût ainsi. Son amour fait de lui une victime volontaire. Mais c'eût été une tache sur la beauté morale de son oeuvre, s'il n'avait pas demandé qu'une position telle que celle où il allait se trouver vis-à-vis de Dieu, sur la croix, lui fût épargnée. Mais comme il ne pouvait se faire qu'il ne bût la coupe, il dit: «Toutefois, que ce ne soit pas ma volonté, mais la tienne qui soit faite». «Et un ange du ciel lui apparut, le fortifiant». Comment comprenez-vous ce terme «fortifiant»? Il ne signifie pas la même chose que «fortifie tes frères». Il ne s'étend pas au delà du corps du Seigneur. C'est l'office des anges. Ils sont des messagers providentiels. Le Saint Esprit a affaire avec votre esprit. Il faut donc penser que l'ange vient communiquer des forces à son corps, preuve qu'il n'était pas encore abandonné. Nous ne retrouvons rien de pareil, durant les trois heures de ténèbres. Il est laissé dans un isolement impénétrable. Pas un rayon de lumière de la face de Dieu ne le réjouit là. Mais jusque-là, il n'avait pas encore été fait sacrifice pour le péché, et les anges peuvent venir le fortifier. Il est fortifié en vue d'une nouvelle agonie. S'étant relevé, il vient à ses disciples, et les trouve dormant. Eux, étaient les objets de ses pensées. Lui, ne l'était pas des leurs! Lui, objet de leurs pensées! Ils ne peuvent veiller une heure avec lui. La même chose se renouvelle encore aujourd'hui. Il est toujours vivant pour intercéder pour nous. Vivons-nous jamais pour l'aimer? pour le servir? Il est toujours vivant pour vous. Vivez-vous jamais pour lui?

Maintenant, introduit dans ses dernières relations, il est plongé au milieu de la tourbe de ses ennemis. «Comme il parlait encore, voici une foule, et celui qui avait nom Judas, l'un des douze, les précédait; et il s'approcha de Jésus pour le baiser». Un disciple fait alors une erreur. C'est une terrible chose que de se tromper. Il y a une classe d'erreurs qui peuvent naître non seulement d'un jugement imparfait, mais d'un mauvais état du coeur. C'était le cas des disciples ici. Ils n'avaient pas été dans la compagnie de Christ, comme ils auraient dû. Pouvez-vous concevoir quelque chose de plus éloigné du coeur du Seigneur que de tirer l'épée pour en frapper l'esclave du souverain sacrificateur? Lui qui marchait à la mort, le juste pour les injustes, voir toucher à l'un des cheveux de la tête d'un pauvre pécheur! Je puis me tromper sur l'appel de l'Eglise ou sur les gloires futures, mais il est un autre genre d'erreurs dont vous et moi avons à nous juger résolument. Le Seigneur, naturellement, guérit le blessé.

Remarquez le verset 53. Il caractérise la scène du moment. Que signifie cette «heure»? Quelle a été sa durée? En quoi se distingue-t-elle de tout ce qui l'a précédée et de tout ce qui l'a suivie? Quant à ce qui précède, on ne pouvait mettre la main sur lui avant que cette heure fût venue. Il doit être un captif volontaire, comme il avait été une victime volontaire. Le soir est arrivé, et il devient leur captif. Aussitôt cette heure écoulée — qui se termine aux trois heures de ténèbres — une ère complètement nouvelle commence; non plus l'heure de la puissance des ténèbres, mais celle qui voit briser la semence de la femme. Maintenant, il se remet lui-même entre leurs mains. Il est un prisonnier volontaire, comme il fut une victime volontaire sur la croix. Les hommes s'emparent de lui. Avez-vous jamais, à la lumière des Ecritures, considéré ce qu'est le coeur de l'homme? Il est pervers, dites-vous. Oui, cela est vrai; mais il n'est pas seulement capable de méchanceté, il est désespérément incurable. Concevez-vous un homme qui s'armerait de pierres pour frapper un visage resplendissant comme celui d'un ange? Pouvez-vous le concevoir? Voyez les sacrificateurs dans le temple, en face du voile déchiré. Ils trament un mensonge. Voyez les soldats auprès du sépulcre vide. Ils consentent à mentir. Les eaux divisées de la mer Rouge ne touchent pas le coeur du Pharaon. Le visage illuminé du martyr Etienne ne touche pas le coeur de la multitude. Un voile déchiré est sans effet sur les sacrificateurs, et un tombeau vide ne dit rien à la populace. Même après avoir vu la guérison de l'esclave du souverain sacrificateur (car notre adorable Seigneur est un divin médecin), ils se saisissent néanmoins de lui. Reconnaissez-vous ici le portrait du coeur qui bat dans votre poitrine? Vous pouvez avoir des habitudes différentes, mais la chair est la même en tous, elle n'est pas seulement mauvaise, mais incurable. Les murailles d'eau de la mer Rouge ne l'ont pas guérie, et ici, dans le jardin même, ils ont vu Jésus accomplir un merveilleux et divin miracle de guérison, et cependant ils le saisissent avec une intention meurtrière. Que peut-on faire, dites-le-moi, d'un coeur mis à l'épreuve de ces choses? L'enfer a-t-il eu le pouvoir de corriger le diable? Vaincu dans le cas de Légion, il se hâte d'entrer dans le troupeau de pourceaux.

Nous avons maintenant le petit épisode de Pierre se chauffant. Représentez-vous l'apôtre retombant au niveau de l'humanité. Il devient, non le compagnon du Jésus de Gethsémané, mais celui de misérables assemblés dans la cour extérieure du palais. Nous trouvons ici deux choses: le chant du coq et le regard jeté sur Pierre. Comment les entendez-vous? Symboles d'ordre bien différent, mais représentant ce avec quoi nous devons tous faire connaissance: la conscience et Christ. Le chant du coq éveille la conscience de Pierre, le regard le place devant Jésus. Il faut que j'aie la conscience réveillée et le regard de la foi fixé sur Jésus. Alors, que Jésus achève l'histoire de mon âme. Si nous n'avons pas tous entendu le chant du coq, ni éprouvé la puissance d'un regard, nous ne sommes pas encore à l'école de Dieu. Mon activité intellectuelle à l'égard des choses de Dieu, ne suffit pas. La conscience doit être à l'oeuvre comme la foi. «Et Pierre étant sorti dehors, pleura amèrement». Mais sa foi n'a pas chancelé. Il peut être obligé de traverser la douleur et les larmes, sa foi ne succombe pas.

«Et les hommes qui tenaient Jésus se moquaient de lui et le frappaient… Et quand le jour fut venu, le corps des anciens du peuple, principaux sacrificateurs et scribes, s'assembla; et ils l'amenèrent dans leur sanhédrin, disant: Si toi, tu es le Christ, dis-le-nous». Quelle réponse à ceux qui l'interrogent!

Estimez-vous que nous soyons toujours fidèles les uns à l'égard des autres? Non, nous tenons trop à laisser les autres avoir une bonne opinion d'eux-mêmes, et nous nommons cela l'amour; mais c'est une chose insipide. Jamais vous ne trouvez en Christ l'amabilité toute humaine qui flatte. Il y avait l'amour sous toutes les formes de la fidélité, mais point d'amabilité humaine. En réponse à leur question, le Seigneur s'adresse à leur condition morale: «Vous ne voulez pas être justes à mon égard, vous voulez le mal et vous ferez le mal. Vous avez soif de mon sang et vous verserez mon sang». Leur ayant ainsi fermé la bouche, il se lève en disant: «Désormais, le fils de l'homme sera assis à la droite de la puissance de Dieu». C'est la manifestation de Christ dans sa puissance judiciaire.

Nous suivons, de différentes manières, la trace de Christ au ciel. Nous croyons avoir tout dit à propos de l'ascension, quand nous disons qu'il est ressuscité et qu'il est monté en haut, mais il faut le suivre jusqu'au plus haut des cieux, sous des caractères distincts: comme personne auprès du Père, comme sacrificateur intercèdant dans le sanctuaire, comme Celui que la terre a renvoyé là, et toutes les fois que nous découvrons ce caractère, nous le voyons s'élevant dans sa gloire judiciaire. C'est ce qui est présenté ici. Il n'est pas monté au ciel en tant que sanctuaire, mais comme étant le lieu de la puissance, y attendant que ses ennemis soient faits le marchepied de ses pieds. C'est bien ce caractère qu'il revêt ici.

Maintenant, nous voyons la manière dont les gentils et les membres du pouvoir civil et du pouvoir ecclésiastique l'ont envisagé, afin que les diverses classes de la société soient convaincues de péché devant Dieu. Pilate et Caïphe peuvent être des hommes aimables, mais, quant à Dieu, les uns et les autres ne sont que des coupables dans une même nature révoltée. Réalisons-nous vraiment que pour nous ce Seigneur a consenti à suivre un pareil chemin? Nous pouvons bien dire qu'un tel amour «surpasse toute intelligence». Que le Seigneur nous accorde de le recevoir par la foi et de nous en nourrir dans sa communion. Amen.


Hébreux 5: 7. «Ayant été exaucé à cause de sa piété». Il possédait, pour être entendu, un titre moral qui nous manque. Pas n'était besoin pour lui d'intercéder comme pour nous. Mais ce droit même, il l'a abandonné, et a appris l'obéissance qui l'a conduit à la croix.

Matthieu 26: 38, etc. En vain le Seigneur avait cherché leur sympathie. «Demeurez ici, et veillez avec moi». Alors, il leur accorde la sienne. «Veillez et priez, afin que vous n'entriez pas en tentation». Leur oubli de lui, ne le fait pas les oublier un instant.

Chapitre 23

Méditons maintenant ce chapitre.

«Et se levant tous ensemble, ils le menèrent à Pilate». Avec quelle habileté ils s'adaptent aux circonstances du moment! Auprès des Juifs, ils accusent Jésus de vouloir se faire Fils de Dieu. Devant le gouverneur romain, ils mettent à sa charge l'usurpation du titre de roi. Il avait droit à tous ces titres qui sont tous produits et récusés devant une cour de justice humaine; mais si tout a été contesté, tout sera maintenu. Nous le voyons ici en butte à la contradiction de la part des hommes, mais justifié ensuite devant Dieu.

Quand Pilate répète la question: «Es-tu le roi des Juifs?» il répond: «Tu le dis». C'est une belle chose de porter au dedans de soi, sous une forme cachée, la conscience de la gloire. Il reconnaît être roi quand la question lui est posée. C'était une gloire qu'il portait constamment, mais qu'il cachait de même. Nous devons avoir conscience de dignités qui éclipseront la gloire du monde; mais ce monde est dans un état moral tel que nous ne pouvons pas les déployer. Telle fut la vie de Jésus. Il avait conscience d'être un vase de gloire, mais se sentait moralement sous la nécessité de le cacher.

Qu'il est instructif de voir le travail de différents états d'âme. Rien de plus frappant que l'histoire de Pilate. Sans animosité contre Christ, il l'eût volontiers relâché, si en même temps il avait pu garder son caractère dans le monde. L'inimitié des Juifs était celle de la chair contre Dieu. Chez Pilate, c'est la lutte victorieuse que le monde livre à la conscience. Or Pilate désirait naturellement se débarrasser du malaise de sa conscience. Aussi, «ayant entendu parler de la Galilée», il crut y trouver une petite porte de sortie, et aussitôt il en tire avantage. Ah! il ne sert à rien de sortir d'embarras par des portes dérobées. La subtilité du méchant coeur humain les recherche. Pilate envoie donc Jésus à Hérode, et devant celui-ci il ne prononce pas un seul mot. Hérode était absolument pervers. Le Seigneur répond à Pilate, dont le coeur n'avait point de haine; il répond à Caïphe, à cause du serment devant Dieu par lequel il l'adjurait (Matthieu 26: 63); mais pour Hérode, il n'a pas une parole; il passe devant lui sans ouvrir la bouche. Chose terrible que le silence de Dieu. Il vaudrait mieux qu'il nous parlât par des châtiments. «Ne te tais point envers moi; de peur que, si tu gardes le silence envers moi, je ne sois fait semblable à ceux qui descendent dans la fosse» (Psaumes 28: 1). Le silence de Dieu équivaut pour l'homme à être jeté dans une fosse. «Ephraïm s'est attaché aux idoles: laisse-le faire». Les rapports entre le Seigneur et Hérode nous le montrent. «Et Hérode le renvoya à Pilate».

«Or il était obligé de leur relâcher quelqu'un à la fête». Nous arrivons à un moment moral d'une grande solennité. Pourquoi doit-il relâcher quelqu'un à la Pâque? Il n'y a pas de donnée positive là-dessus, mais mon sentiment personnel est qu'on réclamait du gouverneur romain un signe de la dignité qui s'attachait à cette fête — quand le Seigneur du ciel et de la terre opérait pour eux une grande délivrance. Et afin d'en garder le mémorial, les Juifs demandaient que quelqu'un leur fût remis. La Pâque était un souvenir de l'ancienne dignité de la nation. Nous aimons volontiers quelques petites reliques de dignités passées. Or, il arriva qu'à ce moment il y avait un meurtrier en prison, un homme «qui avait été jeté en prison pour une sédition qui avait eu lieu dans la ville, et pour meurtre». Impossible de descendre plus bas moralement. Or cette question se pose: Lequel vont-ils choisir: un homme comme celui-là, ou le Prince de la vie? Au commencement des Actes, Pierre insiste sur ce point. Qu'est-ce que cela nous dit? Que le coeur humain, passé au crible, est exactement le même, en Luc 23, qu'en Genèse 3. En Genèse, l'homme préfère le mensonge du serpent à la vérité de Dieu. Ici, il préfère un meurtrier au Prince de la vie, et si vous ne reconnaissez pas en vous-même le plein développement de la nature d'Adam, vous vous trompez sciemment. Le Juif de Luc 23, n'est autre que l'Adam de Genèse 3, abandonnant pour servir le serpent, le Dieu de grâce, le Dieu de la vie, le Dieu de gloire, auquel on a préféré un meurtrier, car Satan a été «meurtrier dès le commencement». Il en est de même ici.

Ainsi Pilate leur dit pour la troisième fois: «Mais quel mal celui-ci a-t-il fait?» La lutte continue. Ces conflits ne se règlent pas en un moment. La conscience aime trop ses aises pour céder si vite. Jusqu'à sa défaite, Pilate demeure sur le champ de bataille. Ce merveilleux volume met l'homme à nu et révèle Dieu lui-même. L'homme y est vu comme une ruine morale irrémédiable, et Dieu, comme le réparateur des brèches. Et il continue à réparer jusqu'à ce qu'il change en louanges les cris douloureux de la création. Il débute par la conscience. Si la conscience n'est pas restaurée, peu vous importe que la création le soit; mais il commence où nous désirons qu'il commence. Ai-je quelque raison de douter que, si ma conscience de pécheur s'exhale en gémissements de douleur, il ne puisse la revêtir d'un vêtement de louange? C'est ce qu'il va faire quant à la création; bientôt il transformera ses gémissements en louanges; et ma conscience n'est-elle pas aussi digne de son travail que la création?

Enfin Pilate prononce la sentence. C'est la victoire du mal.

Les filles de Jérusalem sont introduites ici. Ce ne sont point les mêmes que les femmes de la Galilée. Comment établir la distinction? La distinction est établie. C'est une preuve nouvelle de l'immense variété morale des Ecritures. Nous avons les disciples — les femmes de la Galilée — les filles de Jérusalem — le centurion et Joseph d'Arimathée. La scène qui nous entoure ne présente-t-elle pas la même variété d'individus? Cela peut vous embarrasser et vous troubler peut-être; mais rejetez sur Christ ce qui est trop grand pour vous. Je puis à peine dire où commence la lumière et où finissent les ténèbres. C'est au delà de ma portée. Je dois le laisser à Dieu. Or, que devez-vous faire de toutes ces diversités? Ne les mettez pas n'importe où. Laissez-les à Christ. «Le Juge de toute la terre ne fera-t-il pas ce qui est juste?» Ne cherchez pas à résoudre la question. Les anges sauront, un peu plus tard, rétablir l'ordre dans le champ. Je m'entretiens chaque jour avec beaucoup de gens, et si on me le demandait, je ne saurais où classer leurs âmes. Les femmes de la Galilée étaient évidemment «élues selon la prescience de Dieu». Mais que dire des filles de Jérusalem? Elles ne se trouvaient point parmi ceux qui ont crucifié Jésus. Elles représentent, je crois, l'âme du résidu de la fin au premier moment de son réveil. «Ne pleurez pas sur moi, mais pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants». Ah! comme le Seigneur s'oublie lui-même! Je ne crois pas que son caractère se révèle d'une façon plus merveilleuse que dans ces dernières scènes. Sous l'étreinte de la douleur, n'estimez-vous pas comme votre droit de vous occuper de vous-même et n'attendez-vous pas des autres qu'ils en fassent autant? Quel magnifique exemple ici de l'amour qui s'oublie! «Femme, voilà ton fils». «Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi». «Père, pardonne-leur».

Nous arrivons maintenant à la croix. Comment entendre le mot «esprit», du verset 46? Etes-vous arrivés à cette paisible conclusion que, délivré du corps, l'esprit du croyant est immédiatement avec Jésus? Lorsqu'Etienne suivit les traces de son Maître, il le fit dans la vie et dans la mort. Ici-bas, les méchants lapident son corps, mais là-haut, le Seigneur reçoit son esprit. Paul est ravi dans le paradis comme un «homme en Christ». L'homme en Christ est indépendant du corps. Le Seigneur revêt le corps d'immortalité et l'esprit de vie impérissable. Dans sa propre personne, le Seigneur était le premier à reconnaître que l'esprit retourne au Père. Il était le premier-né entre plusieurs frères, et le premier-né entre plusieurs esprits.

Nous arrivons maintenant à la confession du centurion. Joseph d'Arimathée semble y avoir puisé du courage. «Il attendait, lui aussi, le royaume de Dieu». Que devons-nous penser de lui? Pourquoi n'avait-il pas franchement pris sa place parmi les disciples du Nazaréen? Nous l'ignorons et n'avons pas à nous en préoccuper. Hardiment il va réclamer le corps de Jésus. Il ne lui coûte pas beaucoup d'aller à Pilate. Pilate n'avait pas de haine. Il eût préféré suivre les disciples, si sa sécurité personnelle eût été garantie. En accédant à sa requête, Pilate aura probablement ajouté: «Va, et fais ce qui te semble bon».

Quel chapitre que celui-ci! Le Seigneur met fin à la vieille création. L'ancien sabbat en célébrait la perfection; la mort de Jésus en célèbre la fin. La vieille création était condamnée dès le commencement, et si nous n'avons pas une place dans la nouvelle, devant Dieu nous ne sommes rien.

Chapitre 24: 1-32

Dans ce chapitre, nous pouvons remarquer, d'une manière générale, que le Seigneur prend les choses en main. Quand il est pris au jardin de Gethsémané, il reconnaît que c'est l'heure du pouvoir des ténèbres. L'homme y joue le rôle principal. L'homme s'est saisi de lui, il l'a cloué au bois, donnant raison à l'expression: «C'est ici votre heure». L'homme fait ce qu'il veut, et cela jusqu'aux trois heures de ténèbres. Alors Dieu reprend les choses en main. C'est le moment où Dieu l'a froissé et a fait de son âme un sacrifice pour le péché. Il est très important que nous voyions le caractère spécial de ce moment. Pendant toute sa vie la face du Père avait rayonné sur lui. Avait-il été abandonné du Père un seul instant? Lisez ce qu'il dit de lui-même au Psaume 16. Mais maintenant, ainsi que les prophètes et Jean le baptiseur l'avaient annoncé, il était là — l'Agneau de Dieu; il remporte aussitôt la victoire. Dieu n'attend pas la résurrection pour sanctionner la mort de Jésus. Il la sanctionne en déchirant le voile; ce n'était pas le sceau public; mais avant le troisième jour fixé pour le sceau public (de la résurrection), Dieu y met son sceau privé. Et la rapidité du fait est magnifique. Nous ne pouvons mesurer le temps écoulé entre l'instant où Jésus remit son esprit et celui où le voile se déchire (Matthieu 27: 50, 51). C'était le sceau de l'entière satisfaction du trône. Il accomplit ici de deux manières la volonté de Dieu. Pendant sa vie, son oeuvre ici-bas avait été, comme au puits de Sichar, de changer les ténèbres en lumière. Ainsi le voulait le Père quand il était un serviteur vivant. Victime mourante, il accomplissait la volonté du trône. Le trône où siégeait le jugement fut satisfait quand Jésus remit son esprit. D'une part, il accomplissait la volonté du Père en grâce, d'autre part, celle de Dieu en jugement. Ayant traversé l'heure de l'homme et l'heure de Dieu, il arrive, dans la résurrection, à son heure propre. Sa propre heure, c'est l'éternité. Quel bonheur d'être dans sa compagnie pour entrer avec Jésus dans une éternité de gloire et d'intimité!

Nous le voyons maintenant dans sa résurrection, et beaucoup de choses réclament notre attention. Aussitôt le sabbat juif passé, les femmes viennent au sépulcre apportant les aromates par elles préparés. Elles voient la pierre roulée de devant le sépulcre, mais n'y trouvent pas le corps de Jésus. Que pensez-vous de tout ceci? Il y a là quelque chose d'infiniment consolant. Nous trouvons l'ignorance et l'affection mêlées. L'ignorance les conduit à chercher parmi les morts celui qui est vivant, l'affection donne au corps mort du Seigneur une valeur supérieure à tout ce qui l'entoure. Que faut-il penser d'une affection ignorante? Ce que Christ en pense. Il peut l'apprécier sans qu'elle le satisfasse. Il ne veut pas que l'amour remplace la foi. L'amour est le principe qui donne, la foi le principe qui prend. Lequel est le plus précieux a son coeur? Il vous le dira dans ce chapitre. Il veut avoir en nous des débiteurs. Il entend occuper la place du «plus heureux». «Seigneur, tu en es digne», répond la foi. Quelqu'un a dit: La foi est le principe qui laisse à Dieu le soin de penser pour nous, et j'ajoute, qui met Dieu à la première place. Quand, pauvre et nu, je viens à lui comme à Celui qui est tout, c'est la foi. La loi met l'homme en premier, Dieu en second; elle fait l'homme actif, Dieu passif. L'Evangile renverse complètement ces positions respectives. Dans l'Evangile, c'est Dieu qui donne, vous qui recevez. Au lieu de la foi, c'est un amour ignorant qui se manifeste ici. Les femmes avaient de l'affection, mais elles ne comprenaient pas la victoire qu'il avait remportée pour elles. C'est Christ qui est venu me chercher dans ma tombe, et non moi qui l'ai cherché dans la sienne. Lui est le vivant, moi le mort.

Les anges rencontrent ces femmes apportant leurs aromates au tombeau. Elles sont en grande perplexité. Elles cherchaient un mort; — elles pouvaient bien être effrayées à la vue d'un étranger étincelant de lumière. Les anges arrivent directement du ciel pour être témoins de la résurrection et de la victoire du Seigneur. Les femmes n'avaient point pensé à cela, aussi les anges les effrayent. Ils leur disent: «Pourquoi cherchez-vous parmi les morts celui qui est vivant? Il n'est point ici, mais il est ressuscité. Souvenez-vous comme il vous parla quand il était encore en Galilée». Voici une réprimande. Aimez-vous a voir l'amour réprimandé? Ce n'est pas agréable, mais c'est de la fidélité. Ces femmes agissaient par amour, mais aussi par incrédulité. Tous les droits de Dieu doivent être maintenus. Alors, «elles se souvinrent de ses paroles». Combien de funestes méprises nous commettons en ne nous souvenant pas de ce que Dieu a dit! Lorsque le Seigneur Jésus fut tenté, il se servit de la parole de Dieu, et par cette simple parole il gagna la victoire dans le combat. Elles commettent cette erreur, parce qu'elles n'avaient pas retenu les plus simples paroles que leurs oreilles avaient pu entendre. Qu'il est doux de voir le Dieu de toute grâce intervenir jusque dans nos méprises! Aimeriez-vous que quelqu'un fût toujours devant un miroir se préparant pour rencontrer votre présence? Ne préféreriez-vous pas qu'il se sentît à l'aise devant vous? Il en est ainsi de Dieu. La réprimande était intentionnelle et bien méritée, mais c'était «une huile excellente, et leur tête ne la refuserait pas» (Psaumes 141: 5). Cette lumière les place sur un chemin tout à fait différent. Que mes erreurs soient un lien avec Christ plutôt que cette condition d'Ephraïm «Laisse-le faire». «Ne te tais point envers moi de peur que, si tu gardes le silence envers moi, je ne sois fait semblable à ceux qui descendent dans la fosse». Rien n'approche de cela ici. C'étaient des réprimandes bien méritées et sévères, mais, je le répète, que mes fautes me mettent en contact avec Jésus, plutôt que de n'être point du tout avec lui.

Les femmes s'en vont donc rapporter ces choses aux apôtres. «Et leurs paroles semblèrent à leurs yeux comme des contes et ils ne les crurent pas». Devons-nous considérer les apôtres comme des Corinthiens qui, par des raisonnements intellectuels, niaient la résurrection? ou des sadducéens, secte dépravée, qui la niaient également? Je ne le pense pas. Je ne les rangerai pas parmi les sadducéens juifs ou les gentils de Corinthe. Que faut-il donc inférer de leur incrédulité? Ah! il est difficile de croire que c'est Dieu qui travaille pour nous en ce monde. Il nous est beaucoup plus facile de travailler pour Christ, que de croire qu'il a fait notre travail.

Aucune forme de religion humaine n'accepte cette pensée. C'est ce qui avait lieu pour les disciples. Ils pouvaient bien apporter leurs aromates et leurs parfums, mais ils n'étaient pas encore capables de croire à ce fait immense qu'il s'était occupé d'eux. Nous pensons que le Seigneur est dur, exigeant, et qu'il cherche du haut des cieux une occasion contre nous. Leurs coeurs étaient comme des vases fêlés laissant échapper les paroles de Christ, et ils viennent comme des vivants, à un mort, au lieu de croire que lui, le Vivant, était venu à nous, les morts. Nous passerons nos jours en pénitences, plutôt que de nous confier en lui. Pierre même en est là. Pierre! Impossible. Celui qui a fait la confession même sur laquelle l'Eglise se fonde!

Une fois qu'il s'agit de mettre en pratique sa confession, Pierre faiblit. Celui qui parmi les onze aurait certes dû le plus rougir, c'était Pierre. Comme on peut quelquefois distinguer un homme de lui-même, sa conduite de ses expériences! Si Pierre eût vraiment compris la portée de sa confession, jamais il ne fût venu chercher parmi les morts, «le Fils du Dieu vivant».

Laissons Pierre, et retournons au Seigneur, que nous trouvons en compagnie de deux disciples. Il rencontre en eux les mêmes principes. La seule exception est là-bas, dans un coin éloigné, à Béthanie. Ni Marie, ni Marthe, ni Lazare, ne viennent au sépulcre, et cependant nous avons vu les deux soeurs à celui de leur frère. Est-ce le manque d'amour qui les tient éloignés d'un tombeau vide? Non certes, mais bien plutôt la foi en Christ. L'amour ignorant y amène les femmes de la Galilée, la foi intelligente en éloigne les soeurs de Béthanie.

Sur le chemin, le Seigneur s'approche de ces deux disciples qu'il voit s'en retournant, les coeurs tristes et mélancoliques, de la ville. Qu'est-ce qui cause leur tristesse? L'incrédulité. Cette tristesse attire le coeur de Jésus. Si l'affection qui apportait des aromates à son tombeau lui était précieuse, la tristesse qui enveloppait leurs coeurs désolés, lui était également précieuse. C'était une réalité. Ne pensez-vous pas que les évangiles nous donnent déjà quelques bribes de l'éternité? Ils mettent de pauvres pécheurs en rapport avec le Seigneur de gloire, et l'éternité vous donnera les mêmes relations. L'intimité avec Christ durant l'éternité est le bonheur suprême. Les évangiles préparent nos coeurs, à en jouir même maintenant, par la confiance. Sans effort de sa part, le Seigneur gagne et conserve la confiance des deux disciples. Il se donne à leur coeur, qui immédiatement se l'approprie tel qu'Il est. Il s'approche et leur demande: «Quels sont ces discours que vous tenez entre vous en marchant, et vous êtes tristes?» Et eux de répondre: «Est-ce que tu séjournes tout seul dans Jérusalem, que tu ne saches pas les choses qui y sont arrivées ces jours-ci?» Nous avons tourné le dos, non seulement à Jérusalem, mais à toutes nos espérances. Or c'est déjà le troisième jour, et maintenant nous retournons chez nous. C'est fait de nous. «O gens sans intelligence et lents de coeur à croire» — à croire quoi? — «toutes les choses que les prophètes ont dites». C'était là le remède et ils étaient restés à court. Oh! combien cela devrait attacher votre coeur et le mien, à chaque syllabe, à chaque iota de la parole de Dieu! Il leur enseigne ensuite combien le Christ devait souffrir et leur explique, dans toutes les Ecritures, les choses qui le regardent. Maintenant, leurs raisonnements se changent en ardeur. Qui a produit ce changement? Jésus s'était interprété lui-même. Quoi de plus naturel alors qu'il «fît comme s'il allait plus loin?» Il se dérobait sous un voile, et comme étranger il ne voulait pas être un intrus pour eux. Mais «ils le forcèrent». Je ne leur sais aucun gré de cette courtoisie, mais bien à cette ardeur qui les embrasait. Nous devons nos remerciements à Celui qui seul est digne de toute reconnaissance. Nous savons comment cela finit. Soyez sûrs que jamais les joies de l'éternité ne vous fatigueront. Là seront les ardeurs brûlantes de l'ordre séraphique. Qu'il y ait en moi l'esprit du séraphin, et autour de moi les gloires de Jésus; ce sera le ciel.

Chapitre 24: 33-53

Arrivés à la fin de cet évangile, nous retrouvons encore la même chose que nous avons examinée la dernière fois — l'incrédulité touchant la résurrection, cachée dans le coeur des disciples. Le Seigneur s'applique à la déraciner. Il faut la détruire, car elle est fatale à la foi des élus de Dieu. Rien ne peut être substitué à la résurrection. De ce fait accompli, dépendent toutes les voies divines à l'égard du pécheur. En plusieurs circonstances, durant le temps de son ministère, le peuple attendait du Seigneur qu'il intervint entre la maladie et la mort. Mais ce n'était pas le dessein de Dieu. Les gages du péché, c'est la mort. Voilà pourquoi lui-même doit entrer dans la mort, rencontrer et vaincre l'ennemi dans sa propre forteresse. L'histoire de la fille de Jaïrus n'est pas autre chose. Le Seigneur tarda tant, que l'enfant mourut. Admirable preuve qu'il n'était pas venu pour arrêter la mort, mais pour la vaincre. Ainsi dans le cas de Lazare, il attend jusqu'à ce que la maladie se soit terminée par la mort. Tous pleuraient, se lamentaient, gémissaient, sur les ravages de la mort. C'était la place qu'il fallait, pour que le Fils de Dieu se manifestât lui-même. Sans doute, il a fait des guérisons et des purifications, mais il est venu ici-bas, non pour intervenir entre la maladie et la mort, mais entre la mort et une nouvelle vie. Il détient la vie victorieuse. S'il eût rencontré la maladie et non la mort, rien ne se fût accompli, parce que les gages du péché, c'est la mort. Est-il venu adoucir le jugement originel: «Au jour que tu en mangeras, tu mourras certainement»? Il ne l'a pas fait, il ne le pouvait pas. Il est venu le rencontrer, le subir, le confirmer, et en sortir victorieux.

Satisfaits maintenant, les deux disciples s'en retournent à la ville, rapporter aux autres ce qu'ils ont vu; et pendant qu'ils parlent, Jésus lui-même se tient au milieu d'eux. Plusieurs choses sont à remarquer ici pour notre instruction, l'une entre autres particulièrement précieuse. Non seulement il est ressuscité, mais encore ressuscité le même qu'il était en mourant. Que serait pour vous un Fils de Dieu qui ne se ressemblerait pas? Sur un trône de gloire aujourd'hui, il n'en demeure pas moins le même qu'il était au puits de Sichar. Pour le connaître tel qu'il est maintenant, étudiez-le dans les quatre évangiles. Voudriez-vous un autre Jésus que Celui présenté par Matthieu, Marc, Luc et Jean? Peut-être nous est-il difficile de comprendre que maintenant il est, dans la gloire, celui qu'il était ici-bas? Mais c'est en partie le propre des scènes postérieures à la résurrection, de nous assurer qu'il est absolument le même. Conservons précieusement cela dans nos coeurs. Notre marche vers le ciel en sera facilitée. Il est entré dans votre sphère, avant même de vous inviter à venir dans la sienne, et la manière de rendre facile le chemin jusque-là, c'est de savoir que vous trouverez dans un monde à venir de gloire, ce même Jésus qui est descendu sur la terre. Le Seigneur des gloires infinies a passé au milieu de mes ruines, et m'a montré qu'il est le Même au milieu des gloires qu'au milieu des ruines. Il appartient aux merveilles morales de l'Evangile, de montrer que notre adorable Seigneur a trouvé moyen d'accommoder aux gloires futures, nos yeux et nos oreilles. Il en a donné de magnifiques garanties: «Paix vous soit!» dit-il, en se présentant à eux. Avait-il jamais dit cela auparavant? De telles paroles ne sont elles pas nouvelles sur ses lèvres? Il confirme ici les gages donnés. Avant de mourir, il disait: «Parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez». Après sa résurrection: «Il souffla en eux et leur dit: Recevez l'Esprit Saint». Encore un témoignage de plus. Avant sa mort, il dit aux disciples: «J'irai devant vous en Galilée». Ne s'y était-il pas engagé? Petit détail, direz-vous peut-être, mais quoi qu'il en soit, c'est un Christ ressuscité, s'acquittant maintenant des promesses faites par un Christ serviteur. Les circonstances ne peuvent le changer; ni les ruines terrestres, ni les gloires céleste, ne peuvent l'affecter. «Je vais vous préparer une place», avait-il dit avant de souffrir, et après s'être relevé d'entre les morts. «Je monte vers mon Père et votre Père». En étudiant les scènes qui suivirent la résurrection, nous retrouvons partout dans le Christ ressuscité, le même Christ qui a servi et qui maintenant accomplit toutes ses promesses, en montrant tous les traits admirables de son caractère qu'il avait fait voir auparavant. La pensée d'une mort subite vous vient-elle parfois? Vous pouvez être transportés en sa présence sans avertissement préalable? Sera-ce pour vous un lieu inconnu? Je puis me sentir étranger à ses circonstances, mais non à lui-même. Par conséquent, plus nous apprenons à connaître Jésus, plus tôt nous entrons dans le ciel. Son palais m'importe moins que sa Personne. Le Seigneur veut nous introduire dans son intimité même. Pour cela, dans les scènes qui suivent sa résurrection, il nous fait savoir que nous le connaissons déjà.

Nous arrivons maintenant à la vérification du fait qu'il est ressuscité. Pourquoi est-ce un point si important? Supposez que Dieu eût dit: «Satan ayant ruiné votre corps, je vous prendrai pour être avec, moi en esprit»; c'eût été rendre manifeste la victoire de Satan sur le corps. Est-ce pour cela que Dieu serait descendu ici-bas? «Si Christ n'est pas ressuscité», dit l'apôtre, «votre foi est vaine». De nous, en nos corps glorifiés, il fait ainsi des témoins de sa victoire. La résurrection n'est pas seulement le sceau de sa victoire. Il a fait une expiation que le trône reconnaît en ressuscitant d'entre les morts notre Garant qui l'a accomplie. Mais, de plus, il faut qu'on voie qu'il a remporté une victoire en ce monde, c'est pourquoi le Seigneur condescend d'une manière merveilleuse à le confirmer. Il leur demande: «Avez-vous ici quelque chose à manger?» Pourquoi le demande-t-il? Simplement pour les convaincre que ce n'était pas seulement un esprit qui se tenait devant eux. Le Seigneur est venu livrer bataille pour vous, Parole faite chair, que l'on pouvait toucher de la main. L'humanité tangible ayant été détruite, elle doit être rachetée tangible. Ayant établi ce fait au verset 44, il y rattache tout le reste. Répétant encore ce qu'il leur avait déjà dit, il lie son ministère du moment avec le précédent. Il leur fait voir dans la loi de Moïse, les prophètes et les Psaumes, toutes les choses qui le concernent. Quelque chose d'analogue se montre dans ses voies à l'égard de Pierre. «Le coq ne chantera point aujourd'hui», avait-il dit, «que premièrement tu n'aies nié trois fois de me connaître». C'est ce qui arriva. Alors le Seigneur le regarde. Par le chant du coq, il réveille sa conscience; par son regard, il le lie de nouveau avec lui. Ressuscité, il se retrouve avec Pierre absolument où il l'a laissé. Pas n'est besoin de réveiller encore sa conscience, ni de renouer des relations, mais il le retrouve au point critique où il l'a laissé, et le rétablit dans son ministère. Le Seigneur connaît le chemin de vos pensées, et vous reprend exactement au point même où vous êtes. Pendant qu'il était avec ses disciples, il leur avait annoncé l'accomplissement de toutes les choses prédites; maintenant il leur ouvre l'intelligence — pour la première fois jusqu'ici — et s'assied pour les leur expliquer. Combien est belle la manière dont il nous enseigne! Merveilleux moment qui se continue jusqu'à aujourd'hui. Il caractérisait la dispensation actuelle, c'est-à-dire que, sous la garantie de sa mort, la rémission des péchés doit être annoncée à chaque pauvre pécheur. Dans un certain sens, jamais nous ne sommes parvenus au delà, et jamais nous n'y parviendrons avant que le dernier des élus soit amené.

Il a maintenant tout achevé, et comme prédicateur au monde, il garde le silence. Il a annoncé la rémission des péchés à un monde de pécheurs. Nous prenons ici congé de Jésus comme évangéliste. Comme souverain sacrificateur, nous ne l'avons pas encore rencontré pleinement, mais cet instant stéréotype le ministère de l'évangéliste. On ne peut rien ajouter à cela. Il m'a dit, à moi pécheur, appartenant à un monde pécheur, que par sa mort et sa résurrection, la rémission des péchés m'est annoncée.

Il les conduit maintenant jusqu'à Béthanie. Probablement ce fut une marche silencieuse. Si mon âme s'abreuve à la simplicité d'un tel Evangile, ce sera avec une satisfaction muette. «Et, levant ses mains en haut, il les bénit». C'est un service sacerdotal. Là, il est «toujours vivant». Jamais le service de ses mains élevées sur nous ne cessera; c'est l'attitude dans laquelle il est monté au ciel, pour y exercer sa sacrificature céleste. Quel effet cela produit-il sur nous: contempler un évangéliste, Jésus, donnant la paix à la conscience; puis le voir remontant au ciel en bénissant? Quel effet en ont ressenti les disciples? Une complète transformation de leur condition religieuse. Ils n'ont plus affaire avec Moïse. Leur service devient celui de la sacrificature eucharistique. «S'en retournant à Jérusalem avec une grande joie, ils étaient continuellement dans le temple, louant et bénissant Dieu». Y a-t-il quelque chose de plus divin? Rien. Et c'est ici que Christ prend congé de vous. Les cieux le retiendront jusqu'au temps du rafraîchissement, mais l'avez-vous perdu d'ici là? Pouvait-il laisser une plus parfaite impression que celle-ci? Il a accompli la rédemption, et il reste toujours vivant pour bénir. Allez à votre Jérusalem, louant et bénissant Dieu continuellement

Le rideau tombe, «Nous, par l'Esprit, sur le principe de la foi, nous attendons l'espérance de la justice». La trace du serpent est partout, mais aussi dans les sentiers lumineux que nous venons de parcourir, nous voyons partout les pas de Jésus. Ce qu'il a commencé, il l'accomplit en perfection.

Et le chemin se termine

Dans ce pays glorieux,

Où luit la face divine

De l'homme victorieux.

Là, parfaits, en ta présence,

Adorant, glorifiés,

Jésus, de ta ressemblance

Nous serons rassasiés.