Comment dois-je envisager le péché de mon frère?

Simples réflexions à propos de Lévitique 10: 16-18

Porret-Bolens L.

ME 1909 page 441

 

Comment dois-je envisager le péché de mon frère?. 1

«L'amour n'impute pas le mal». 1

la position d'accusateur. 3

la place d'un juge. 3

comme sacrificateurs. 4

 

Nous avons à progresser dans l'intelligence des pensées de Dieu. Combien il importe de ne pas négliger la lecture de la Parole. Elle «est utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, et pour instruire dans la justice, afin que l'homme de Dieu soit accompli et parfaitement accompli pour toute bonne oeuvre» (2 Timothée 3: 16, 17). N'est-elle pas aussi une lampe à nos pieds et une lumière à notre sentier? (Psaumes 119: 105). Puisse-t-elle briller de tout son éclat sur nos voies, afin que nous marchions, en toutes choses, selon la volonté du Seigneur!

Il n'est peut-être pas de sujet concernant lequel nos pensées aient besoin d'être redressées comme celui qui nous est rappelé, d'une manière typique, dans le passage cité en tête de ces lignes.

Avant de considérer la vérité qu'il présente, nous voudrions remarquer une chose qui ne manque pas d'importance. Nous voulons parler de la disposition d'esprit qu'il nous convient d'avoir constamment, les uns à l'égard des autres. N'est-elle pas mentionnée dans sa brève simplicité, au verset 5 du chapitre 13 de la première épître aux Corinthiens, en ces termes:

 «L'amour n'impute pas le mal»

ou, ne pense pas au mal, dans le sens de le soupçonner chez autrui.

Comme l'a dit quelqu'un: «L'amour est le secret de notre vie chrétienne individuelle. Nos rapports les uns avec les autres, n'ont pas d'autre secret; notre conduite personnelle ne doit être réglée que par l'amour. Là où il manque, c'est la ruine morale et irrémédiable; là où il s'affaiblit, Christ est déshonoré et notre témoignage perd toute sa valeur». Oh! combien cela est vrai!

Soyons donc en garde contre la fâcheuse disposition, malheureusement si fréquente, aujourd'hui, parmi nous, de vouloir à tout propos juger nos frères qui sont de la famille de Dieu comme nous-mêmes, et membres du corps de Christ.

Si nous pesions sérieusement ce que dit là Parole, nous serions certes retenus dans nos jugements. Ecoutons, à ce sujet, les déclarations de la sainte Ecriture. Nous tenons à mettre ces citations in extenso sous les yeux du lecteur, en laissant leur divine autorité agir sur chacune de nos consciences:

«Ne parlez pas l'un contre l'autre, frères. Celui qui parle contre son frère, ou qui juge son frère, parle contre la loi, et juge la loi. Or si tu juges la loi, tu n'es pas un observateur de la loi, mais un juge. Un seul est législateur et juge, celui qui peut sauver et détruire; mais toi, qui es-tu qui juges ton prochain?» (Jacques 4: 11, 12).

«Mais toi, pourquoi juges-tu ton frère?… Car nous comparaîtrons tous devant le tribunal de Dieu; car il est écrit: Je suis vivant, dit le Seigneur, que tout genou se ploiera devant moi, et que toute langue confessera hautement Dieu. Ainsi donc, chacun de nous rendra compte pour lui-même à Dieu. Ne nous jugeons donc plus l'un l'autre» (Romains 14: 10-13).

Et le Seigneur lui-même nous dit. «Ne jugez pas, afin que vous ne soyez pas jugés: car du jugement dont vous jugerez, vous serez jugés; et de la mesure dont vous mesurerez, il vous sera mesuré. Et pourquoi regardes-tu le fétu qui est dans l'oeil de ton frère, et tu ne t'aperçois pas de la poutre qui est dans ton oeil? Ou comment dis-tu à ton frère: Permets, j'ôterai le fétu de ton oeil; et voici, la poutre est dans ton oeil? Hypocrite, ôte premièrement de ton oeil la poutre, et alors tu verras clair pour ôter le fétu de l'oeil de ton frère» (Matthieu 7: 1- 5).

La funeste disposition à juger nos frères ne dénote-t-elle pas notre état particulier, une condition pire que celle en laquelle nous pensons voir autrui? Il y a une poutre dans notre oeil, et comment voir clair pour ôter le fétu de l'oeil de notre frère? Commençons par nous-mêmes; jugeons-nous sérieusement devant Dieu, et alors nous apprendrons à user de grâce à l'égard des autres; et c'est ce que l'amour nous enseigne (Ephésiens 5: 1, 2). Hélas! presque toujours, il nous arrive de voir autrui au travers de notre propre état. Si Christ était devant nous — entre nous et notre frère — et que notre coeur fût rempli de son amour, ne verrions-nous pas notre frère sous un jour différent? — Assurément.

En disant ce qui précède, nous sommes loin de méconnaître la nécessité qui nous incombe de veiller les uns sur les autres et de n'être pas indifférents aux fautes de nos frères, avec lesquels nous partageons les mêmes privilèges.

Seulement la question est celle-ci: «Dans quel esprit et de quelle façon devons-nous nous occuper de ces choses?»

Il est une façon particulièrement triste de s'occuper de la faute d'autrui. Nous voulons parler de

la position d'accusateur

que quelques-uns seraient disposés à prendre. En le faisant, on oublie que Satan agit ainsi, et que dans le monde, son domaine, il a beaucoup d'imitateurs. Voudrions-nous lui ressembler, en prenant à l'égard de notre frère une attitude d'adversaire? Si l'on réfléchit au caractère que l'on revêt et au rôle que l'on joue en agissant de la sorte, il est à douter que l'on puisse se maintenir en de telles dispositions. Dans toute l'Ecriture, nous ne trouvons aucune mention d'une pareille manière de faire, si ce n'est celle de l'ennemi de la gloire de Dieu et du bonheur de l'homme. Non seulement Satan pousse ce dernier au mal, mais encore il se charge de l'accuser auprès de Dieu. Dans le livre de l'Apocalypse, il est mentionné sous le caractère d'accusateur (12: 10).

Lequel d'entre nous — enfants de Dieu — ne frémit pas à la pensée d'être pris dans ses filets, en suivant son exemple? Agirions-nous donc comme les fils de ce siècle, au mépris de l'amour dont nous sommes les objets de la part du Seigneur? Ils n'agissent pas autrement les uns à l'égard des autres, mais devons-nous leur ressembler et à celui duquel ils sont les imitateurs? (Zacharie 3: 1).

Une seconde manière d'envisager le péché de notre frère, malheureusement assez fréquente parmi nous, est celle de quelqu'un qui pense être complètement étranger soit à l'acte mauvais, soit à celui qui l'a commis, ou prend, sans peut-être en avoir conscience,

la place d'un juge

et l'on raisonne à peu près ainsi: «Il a péché, c'est son affaire; il doit s'humilier devant Dieu pour être pardonné et restauré. Aussi longtemps qu'il se trouve dans cet état, je ne puis avoir communion avec lui; mais s'il reconnaît sa faute, je suis disposé à pardonner et à fraterniser avec lui». Ce raisonnement peut paraître logique au grand nombre; mais est-il selon Dieu? — Evidemment pas. De part et d'autre, on est en défaut; l'état de celui qui est en faute est mauvais, sans doute, mais pour y remédier, il est nécessaire de suivre le chemin que nous trace la parole de Dieu, et d'agir selon la pensée du Seigneur. Dans la plupart des cas, en agissant selon les pensées des hommes, la conséquence, pour celui qui a péché, est un pénible «statu quo», qui peut durer indéfiniment, comme nous n'en avons que trop d'exemples, et cela au déshonneur du Seigneur et à notre appauvrissement spirituel. Quelle faiblesse nous distingue aujourd'hui, sans parler des difficultés qui surgissent et qui semblent insurmontables! Le Seigneur ne permet-il pas ces choses exceptionnelles pour nous amener à prendre, en sa présence, la place qui nous convient selon sa volonté et à dépendre davantage de Lui? Nous le pensons. Il y a un chemin à suivre que l'oeil humain ne découvrira jamais, mais que Dieu nous fait connaître dans sa Parole. Abandonnons donc nos pensées marquées au coin de l'égoïsme le plus pur, et voyons comment nous avons à agir pour plaire au Seigneur, d'une manière conforme à sa volonté.

A qui s'adresse le passage du Lévitique cité en tête de ces lignes? — Aux sacrificateurs, évidemment. C'est ainsi que tous les croyants sont maintenant envisagés; et quelle bénédiction inappréciable est la nôtre! Vous êtes, est-il écrit, «une sainte sacrificature, pour offrir des sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus Christ» (1 Pierre 2: 5); et nous avons à nous comporter comme tels en toute circonstance: nous avons à agir

comme sacrificateurs

d'après les directions de la sainte parole de notre Dieu.

Il est à remarquer que, dans le cas de lèpre d'une maison, en Israël, il fallait prévenir non le juge, mais le sacrificateur (Lévitique 14: 33-35).

Que devait donc faire le sacrificateur dans le cas qui nous occupe? Il lui fallait, selon l'expression typique du chapitre 10 du Lévitique, 16-18, «manger le sacrifie pour le péché dans un lieu saint». Lisons le passage:

«Et Moïse chercha diligemment le bouc du sacrifice pour le péché; mais voici, il avait été brûlé; et Moïse se mit en colère contre Eléazar et les fils d'Aaron qui restaient, et il leur dit: Pourquoi n'avez-vous pas mangé le sacrifice pour le péché dans un lieu saint? Car c'est une chose très sainte; et Il vous l'a donné pour porter l'iniquité de l'assemblée, pour faire propitiation pour eux devant l'Eternel: Voici, son sang n'a pas été porté dans l'intérieur du lieu saint; vous devez de toute manière le manger dans le lieu saint, comme je l'ai commandé» (Lévitique 10: 16-18).

Que signifie pour nous l'acte de manger le sacrifice pour le péché dans un lieu saint? — Au lieu de charger notre frère ou d'exiger de lui qu'il reconnaisse sa faute et la confesse à Dieu, comme si nous y étions complètement étrangers, nous avons, au contraire, à nous approprier cette faute, comme si elle était la nôtre propre, et à en éprouver dans notre âme l'amertume. Qui pourrait faire cela, si ce n'est le sacrificateur qui est net, en la présence de Dieu? De cette façon, nous sommes associés au Seigneur Jésus, notre souverain Sacrificateur, dans son oeuvre d'intercession; et nous sommes ses imitateurs.

Pour nous réconcilier avec Dieu, il fut seul sur la croix. Là il fit siens tous nos péchés pour les porter en son corps sur le bois (Psaumes 40: 12). Mais dans son service sacerdotal envers ses rachetés, il à daigné nous associer à lui. Combien hélas! nous sommes en défaut à cet égard, et peu conformes au parfait modèle!

Pour notre direction et notre encouragement, considérons la manière d'agir de Daniel à Babylone. Il envisage le péché du peuple, sous les conséquences duquel il est lui-même, comme si c'était son péché à lui. Qu'il est touchant de l'entendre dire: «Je te supplie, Seigneur, le Dieu grand et terrible, qui gardes l'alliance et la bonté envers ceux qui t'aiment et qui gardent tes commandements! Nous avons péché, nous avons commis l'iniquité, nous avons agi méchamment, et nous nous sommes rebellés et nous nous sommes détournés de tes commandements et de tes ordonnances; et nous n'avons pas écouté tes serviteurs les prophètes, qui parlaient en ton nom à nos rois, à nos princes, et à nos pères et à tout le peuple du pays. A toi, Seigneur, la justice, et à nous la confusion de face, comme elle est aujourd'hui, — aux hommes de Juda, et aux habitants de Jérusalem, et à tout Israël, à ceux qui sont près et à ceux qui sont loin, dans tous les pays où tu les as chassés, à cause de leurs infidélités par lesquelles ils ont été infidèles envers toi. Seigneur, à nous la confusion de face, à nos rois, à nos princes, et à nos pères, parce que nous avons péché contre toi» (voir Daniel 9: 4-19).

Nous le voyons, Daniel affligé du déshonneur porté sur le nom de l'Eternel par le péché de son peuple, prend ce péché sur lui-même et s'identifie avec ceux qui l'ont commis, comme s'il avait péché lui-même; et il s'humilie à ce sujet devant Dieu. Quel exemple frappant pour nous! Et notre parfait modèle nous montre, en Jean 13, de quelle façon nous avons à agir nous-mêmes, en pareil cas, à l'égard du péché de nos frères.

L'amour est le mobile de ce service; et le Seigneur qui l'accomplit envers chacun de ses rachetés, daigne nous y associer. Comment serions-nous capables d'accomplir ce saint service en amour, si auparavant nous n'avons pas pris sur nous-mêmes le fardeau du péché pour le confesser à Dieu, comme étant le nôtre propre? Un serviteur de Dieu, maintenant auprès du Seigneur, disait une fois à ce sujet: «C'est par la prière que nous nous lavons les pieds les uns aux autres». En effet, la chose doit commencer nécessairement par là. Alors seulement nous serons aptes à dire la parole capable d'agir sut la conscience. Prenons garde d'agir autrement; nous ferions plus de mal que de bien, car nous avons à manifester l'amour.

Le Seigneur veut nous employer à ce service sacerdotal, qu'il accomplit lui-même envers nous d'une manière parfaite. Nous y faisons défaut quand nous ne réalisons pas l'amour du Seigneur envers nous. Si nos coeurs en sont imprégnés, les manquements de nos frères auront pour effet, non de le refroidir, mais de le mettre en exercice; et le péché de notre frère deviendra une occasion de déployer l'amour et non le jugement. Prenons donc garde de ne pas charger nos frères de leur péché selon la justice, au lieu de «manger le sacrifice pour le péché dans un lieu saint!» Souvenons-nous des paroles du Seigneur: «Si vous savez ces choses, vous êtes bienheureux si vous les faites» (Jean 13: 17).

Nous terminerons par les paroles d'un autre: «Combien nous sommes loin d'être affligés au sujet des fautes de nos frères autant que s'il s'agissait de nos fautes à nous. Avons-nous vraiment, comme sentant le mal, supplié le Seigneur selon l'intercession de la grâce? Cela ne nous arrive que bien rarement; et nous ne nous tenons guère à la brèche, pour ainsi dire. Nous avons tous failli gravement, quant à ces choses. Nous ne sentons pas assez que Christ s'identifie avec ses saints. Cette pensée nous placerait dans la position d'intercesseurs».

Oh! puissions-nous, non seulement connaître ces choses, mais les réaliser pour la gloire de Christ et notre entière bénédiction!