ME 1910 page 198
Dans la vie journalière, il se passe souvent de petites
choses, peu importantes en elles-mêmes, mais dont nous pouvons tirer de riches
et précieux enseignements.
Je connaissais un petit garçon qui, s'il lui manquait
quelque chose, avait l'habitude de courir à la chambre de travail de son père,
pour y chercher secours et conseil. Que son jouet fût détraqué, son crayon
émoussé, qu'il lui fallût un cahier de papier, ou qu'il désirât un livre d'images,
l'enfant venait heurter à la porte de son père.
Celui-ci était toujours disposé à s'entretenir avec son
petit garçon. Il pouvait venir quand il voulait, présenter un désir quelconque,
il trouvait toujours une oreille disposée à l'écouter, et une main prête à le
secourir. Ce n'était pas seulement par amour pour son enfant, mais par
obéissance à un principe arrêté que le père agissait ainsi. Il était persuadé
qu'un enfant devait toujours trouver chez son père et sa mère ce qu'il ne
pouvait trouver nulle part ailleurs. Il tenait pour injuste de repousser le
petit enfant, et de l'obliger à s'adresser à des domestiques ou à des
étrangers. Il considérait comme un précieux et saint devoir de venir en aide à
son enfant, quand son temps le lui permettait.
Il avait raison. Nous pensons peu aux tristes conséquences
qui peuvent résulter de l'habitude d'abandonner nos enfants à des domestiques
inconvertis ou inexpérimentés, qui souvent agissent sans réflexion, et parfois
même trouvent leur plaisir à corrompre ces jeunes coeurs.
Combien de personnes ont dû porter, leur vie durant, les suites d'impressions
et d'influences auxquelles elles avaient été exposées dans leur enfance, par la
coupable indifférence ou l'insouciance de leurs parents! Au lieu de garder leurs
enfants avec eux pour les préserver, ils les abandonnaient à des étrangers qui
les négligeaient et leur enseignaient des choses mauvaises.
Malheureusement, bien des pères croyants ont manqué et
manquent encore en cela. On peut avoir pour excuse l'obligation d'aller à la
réunion ou de s'occuper de l'oeuvre du Seigneur;
mais, dans ce cas, il faudrait faire une chose et ne pas négliger l'autre.
L'ennemi profitera sûrement de l'occasion qui lui est offerte d'exercer une
influence nuisible sur les coeurs si influençables
des enfants.
Ce fait sérieux devrait être pris en considération par tous
les parents chrétiens. Celui à qui le Seigneur a donné des enfants, devrait
assurément penser qu'il a envers eux un devoir, dont la négligence ne peut
rester impunie. J'ai à peine besoin de dire que je ne parle pas des besoins
corporels des enfants, car l'éducation du coeur et de
l'esprit, le soin de leurs âmes, sont des choses bien plus importantes que
celles-là. Puissent tous les parents chercher à satisfaire les besoins de leurs
enfants, afin que ceux-ci n'aient aucun motif de se tourner autre part.
Notre petit ami avait donc l'habitude d'aller à son père
avec tous ses besoins, et celui-ci avait à coeur de
ne jamais le repousser. Un jour qu'il était fort occupé, il entendit heurter à
sa porte. «Entrez», cria-t-il, et le petit entra dans la chambre.
– Eh bien! petit homme, que désires-tu?
– Rien, papa, je voudrais seulement être près de toi.
Ayant dit ces mots, il s'assit tranquillement dans un coin
de la chambre, tout content d'être auprès de son père. Cette circonstance est
si simple qu'elle paraît à peine digne d'être racontée; cependant, elle fut
pour le père une leçon qu'il n'oublia jamais. Peut-être les paroles de l'enfant
renferment-elles aussi un avertissement pour nous?
Lecteur, permets-moi cette question: Vas-tu parfois vers ton
Père sans avoir quelque chose à lui demander, mais simplement pour jouir d'être
seul avec lui? Tu t'adresses à lui pour tes besoins, et tu fais bien. Il veut
que nous allions à lui avec tous nos désirs, nos soucis et nos chagrins, et
jamais il ne nous repousse, ni ne nous blâme de ce que nous venons trop souvent
l'importuner. Il ne nous dit jamais: Je n'ai pas le temps de m'occuper de toi.
Il peut bien, parfois, nous faire attendre ou même nous refuser les choses que
nous demandons, mais jamais il ne nous chasse de sa présence bénie. Sa joie est
de nous avoir près de lui, son désir, que nous lui fassions connaître tout ce
qui remplit nos coeurs.
Mais je demande de nouveau: Allons-nous parfois à lui, pour
lui dire que nous n'avons rien à désirer que de demeurer près de lui? Nous
asseyons-nous à ses pieds avec la pleine satisfaction d'un coeur
qui savoure sa proximité?
Que le Seigneur nous l'accorde. Rien ne nous rend plus heureux, plus indépendants de tout ce que la créature peut nous offrir, que cette paisible et secrète communion avec le Père. Assis près de la source toujours jaillissante, nous sommes rafraîchis nous-mêmes, mais aussi rendus capables d'être des canaux de bénédictions pour d'autres.