Trois caractères de l'amour de Christ

Jean 12 v.24; 13 v.1; 14 v.3

Porret-Bolens L.

ME 1910 page 381

 

Assurément, il n'est aucun sujet plus important à considérer que celui de l'amour de Christ pour nous; et il est infiniment plus précieux encore d'en jouir; il surpasse toute connaissance (Ephésiens 3: 19). Abreuvé à cette source, le croyant est rafraîchi et fortifié; et si, à l'exemple du bienheureux apôtre, son coeur est étreint par l'amour de Christ, il jugera «que si un est mort pour tous, tous donc sont morts, et qu'il est mort pour tous, afin que ceux qui vivent ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui pour eux est mort et a été ressuscité» (2 Corinthiens 5: 14, 15). Des effets pratiques s'ensuivront. Le sûr moyen de faire face à la responsabilité qui nous incombe, comme chrétiens, n'est-il pas la réalisation de nos privilèges? Puissent nos âmes progresser dans la connaissance de Christ et croître dans la jouissance de son amour, afin d'être rendues capables de le glorifier!

Un passage de l'épître aux Ephésiens nous rappelle ce que Christ, dans son amour, a fait pour nous — pour son Assemblée — ce qu'il fait actuellement et ce qu'il fera bientôt. Pour faire ressortir la chose, nous citerons le passage en trois alinéas:

  « Christ a aimé l'assemblée et s'est livré lui-même pour elle, afin qu'il la sanctifiât,

  en la purifiant par le lavage d'eau par parole;

  afin que lui se présentât l'assemblée à lui-même, glorieuse, n'ayant ni tache, ni ride, ni rien de semblable, mais afin qu'elle fût sainte et irréprochable »

(Ephésiens 5: 25-27).

En nous appuyant sur les passages cités en tête de ces lignes, nous désirons considérer trois caractères de l'amour de Christ dans le passé, le présent et l'avenir.

Nous remarquerons premièrement que:

l'amour de Christ est grand.

Il est si grand, nous dit la Parole, qu'il surpasse toute connaissance (Ephésiens 3: 19). Le fait merveilleux exprimé dans les mots: «Christ est mort pour nous» (1 Thessaloniciens 5: 10), nous en révèle la grandeur.

La mort de Christ était nécessaire pour l'accomplissement des conseils de Dieu et notre salut. C'est ce que nous donne à connaître le type du grain de blé tombé en terre et qui meurt (Jean 12: 24).

Quelqu'un a dit à ce sujet: «Cette mort est la première pensée qui vient à l'esprit du Seigneur, lorsque l'arrivée des Grecs met en évidence sa dignité de Fils de l'homme. La mort et la malédiction étaient l'héritage de l'homme; il fallait que Jésus les subît, pour relever l'homme de l'état dans lequel il se trouvait et le placer dans la seigneurie qui lui était destinée selon les conseils de Dieu. Il était le second homme, le dernier Adam, mais, le péché étant entré dans le monde, il fallait racheter les cohéritiers, les purifier, pour qu'ils eussent place avec lui».

Nous l'apprenons, Christ, héritier de toutes choses selon les pensées de Dieu, a non seulement voulu avoir des cohéritiers, mais il est venu, de la part de Dieu, mettre sa vie en rançon pour eux. L'homme est égoïste, voulant jouir seul des biens qu'il possède; sa vie est ce qu'il tient encore le plus à conserver. Notre adorable Sauveur, au contraire, en quittant la gloire, a daigné descendre dans les profondeurs de notre misère, dans l'abîme où nous étions tombés, afin de nous amener, au prix de son parfait sacrifice, dans l'intimité la plus grande avec le Père et avec lui-même.

Qu'étions-nous pour lui, lorsqu'il donna sa vie pour nous? L'Ecriture nous le dit: «Car Christ, alors que nous étions encore sans force, au temps convenable, est mort pour des impies. Car à peine, pour un juste, quelqu'un mourra-t-il (car pour l'homme de bien, peut-être, quelqu'un se résoudrait même à mourir); mais Dieu constate son amour à lui envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous» (Romains 5: 6-8). «Etant ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils» (verset 10). Et dans quelle intimité avec lui-même il nous a amenés pour nous appeler ses «amis» et ses «frères»! (Jean 15: 13-15; 20: 17, 18).

Nous nous souviendrons toujours avec adoration que c'est par un effet de son grand amour, manifesté dans sa mort, que nous jouissons d'une telle bénédiction: «Personne n'a un plus grand amour que celui-ci, qu'il laisse sa vie pour ses amis», dit-il aux siens (Jean 15: 13).

Il nous en a laissé le souvenir, pour le temps de son absence, dans les symboles qu'il a institués la veille même de sa mort. C'est aux rachetés qu'il a pensé en se donnant lui-même. Il leur dit: «Ceci est mon corps, qui est donné pour vous; faites ceci en mémoire de moi; …cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang, qui est versé pour vous» (Luc 22: 19, 20).

Il est doux de nous souvenir de Christ, de son amour, de sa mort pour nous, et de l'annoncer en participant au pain et à la coupe, car toutes les fois que nous mangeons ce pain et que nous buvons la coupe, nous annonçons la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne (1 Corinthiens 11: 26).

Chose frappante, dans ce passage, le mot: «mort» ne semble-t-il pas exclure celui de: «Seigneur»? — En effet, mais le croyant a la clef du mystère en ce que, dans cette mort, l'amour du Seigneur s'est manifesté pour lui dans sa grandeur. Nous aimons à le chanter avec des cœurs heureux:

 

L'âme reste confondue

Devant cet amour béni

Plus vaste que l'étendue,

Profond comme l'infini;

Aussi notre coeur désire

Le moment de ton retour,

Pour voir, pour sonder, pour dire

Les grandeurs de ton amour.

 

Puissent nos coeurs en être vivement pénétrés, et dire comme l'apôtre: «Ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu, qui m'a aimé et qui s'est livré lui-même pour moi» (Galates 2: 20).

Nous passerons à un second caractère de l'amour de notre Sauveur, rappelé en Jean 13: 1, lequel nous apprend que

l'amour de Christ est permanent.

«Ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu'à la fin».

Après avoir accompli l'oeuvre de la rédemption, le Seigneur Jésus est entré dans la gloire céleste: Il a été glorifié en lui-même (Jean 13: 32). Ainsi nous voyons Jésus qui a été fait un peu moindre que les anges à cause de la passion de la mort, couronné de gloire et d'honneur. D'après Hébreux 2: 7, 8, nous apprenons qu'il y a, pour ainsi dire, trois pas dans l'accomplissement du conseil de Dieu relativement au Fils de l'homme. Deux ont été réalisés; le troisième, exprimé dans ces mots: «Tu as assujetti toutes choses sous ses pieds», suivra bientôt. Cela aura lieu lorsque les cohéritiers seront réunis; maintenant a lieu leur rassemblement; et pendant ce temps se réalise le service de Christ en faveur de ses rachetés sur la terre, ce dont nous avons une figure au 13e chapitre de Jean.

Dans la gloire, le Seigneur veut être encore le serviteur des «siens»; car son amour est permanent, et l'amour aime à servir.

Adorable Sauveur! quelle place il daigne prendre! Dans ces pays-là, c'était celle du dernier des esclaves. Aussi quelqu'un a-t-il remarqué qu'en cette circonstance (Jean 13) il s'est placé lui-même, en quelque sorte, plus bas qu'à la croix. Le linge dont il se ceint et l'eau qu'il met dans le bassin disent à la fois qu'il est serviteur, et quelle est la nature de son service. L'eau est l'emblème de la Parole qu'il emploie pour agir sur nos consciences, afin de nous purifier des souillures contractées dans notre marche.

Nous le voyons, nos manquements — que du reste rien n'autorise — n'ont pas pour effet d'empêcher la manifestation de son amour; au contraire, cela le met précisément en exercice en notre faveur. Il veut que nous jouissions d'avoir une part avec lui, là où il est, dans la lumière du sanctuaire où tout est saint; et il fera le nécessaire afin que cela ait lieu.

Celui qui aime véritablement, ne désire-t-il pas que l'objet de son amour soit aussi heureux que possible, et ne fera-t-il pas tout ce qui dépend de lui pour lui assurer ce bonheur? Au surplus, le Seigneur ne saurait attendre que ses rachetés soient avec lui pour qu'ils jouissent de la part qu'il leur a acquise; et le péché, à quelque degré que ce soit, est l'ennemi de cette bénédiction. Aussi nous ne la connaîtrions jamais ici-bas sans l'office actuel de notre adorable Sauveur: «Si je ne te lave», dit-il à Simon Pierre, «tu n'as pas de part avec moi» (Jean 13: 8). Pour être au bénéfice de ce service, il importe que nos consciences soient placées sous les effets de la Parole, que nos pieds, selon l'image employée, soient sans cesse entre les mains de Christ, afin d'être maintenus nets en pratique. Le résultat en est un coeur heureux, en communion avec lui et avec le Père auquel il nous a amenés. C'est une chose, de posséder la part que le Seigneur nous a acquise, une autre d'en jouir. La possession dépend uniquement de l'oeuvre de Christ à la croix; la jouissance, de l'oeuvre qu'il accomplit maintenant en notre faveur et qui nous montre que son amour est permanent: «Ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu'à la fin» (Jean 13: 1).

Nous passons au troisième caractère, et nous verrons que

l'amour de Christ est parfait.

Nous l'avons dit, le Seigneur est dans la gloire, dans la maison du Père, où il a préparé une place aux rachetés; c'est là qu'il veut les avoir. Son coeur ne saurait être satisfait à moins. Celui qui aime en vérité désire que l'objet de son amour soit aussi près de lui que possible. Le Seigneur a laissé ici-bas les siens pour lui rendre témoignage; ils sont étrangers dans ce monde comme lui, mais leur place est en haut, là où il est. On a remarqué que la seule fois que le Seigneur Jésus ait manifesté sa volonté — car il était venu faire celle du Père — c'est relativement à la place qu'il a en vue pour ses bien-aimés: «Père, je veux», dit-il, «quant à ceux que tu m'as donnés, que là où moi je suis, ils y soient aussi avec moi» (Jean 17: 24). Mais nous savons que la chose est en parfait accord avec les pensées et la volonté du Père qui voulait avoir beaucoup de fils dans la gloire (Hébreux 2: 10). Christ, les prémices et le gage de la moisson, est dans le grenier céleste, dans le ciel, et bientôt les rachetés, fruit de sa mort, y seront au complet; le grain de blé tombé en terre est mort, et il en résultera une riche moisson pour l'éternité. La place est prête, et Jésus a dit: «Je reviendrai, et je vous prendrai auprès de moi» (Jean 14: 3). Nous avons ici l'annonce de sa venue et le but de cette venue. Le moment est indépendant de quelque événement terrestre que ce soit; et le Seigneur vient pour chercher ses rachetés afin de les introduire en sa présence. Quelle bienheureuse espérance! (Tite 2: 13). Ici, se montre la perfection de l'amour de Christ pour nous. Quelle raison donne-t-il pour qu'il en soit ainsi? Est-ce afin que ses bien-aimés soient délivrés de leurs maux, de leurs difficultés, en un mot de tout ce qui se rattache à leur présence ici-bas dans un corps de faiblesse où le péché se trouve encore? Cela aura lieu, évidemment, et d'une manière parfaite, mais là n'est pas le motif énoncé par le Seigneur pour accomplir sa promesse. C'est afin que là où il est, nous, nous soyons aussi (Jean 14: 3). Ceci n'est-il pas de nature à nous révéler la perfection de l'amour de Christ pour nous, son couronnement? Alors son coeur sera pleinement satisfait: «Il se reposera dans son amour» (Sophonie 3: 17).

Nous apprenons ainsi dans ces manifestations de l'amour de Christ dans le passé, le présent et l'avenir, les trois caractères que nous venons de rappeler. Nous pourrions ajouter que l'amour de Christ est éternel, car il est serviteur à toujours, selon le type de l'esclave hébreu (Exode 21: 2-6); et comme nous le montre, d'une façon touchante, le passage de Luc 12: 37; mais nous nous arrêtons ici.

Avant de terminer, nous désirons considérer ce que nous nommerons la contrepartie du sujet, c'est-à-dire ce qui est relatif à notre amour pour Christ produit spontanément par la jouissance de son amour pour nous.

Et d'abord, de quelle façon témoignerons-nous notre amour à Celui qui nous a tant et si tendrement aimés et qui nous aime jusqu'à la fin? Sera-ce en nous apitoyant sur son absence? Certainement pas. Le Seigneur lui-même dit à ses bien-aimés: «Si vous m'aimez, gardez mes commandements» (Jean 14: 15). En effet, c'est par son obéissance que l'enfant témoigne véritablement son amour à ses parents. «C'est ici mon commandement», dit le Seigneur, «que vous vous aimiez les uns les autres» (Jean 15: 12). Ce commandement semble primer tous les autres; car sa réalisation est une garantie de leur accomplissement. N'oublions pas que l'amour de Christ pour nous est non seulement la source de notre amour pour lui et pour nos frères, mais, en est aussi le modèle et la mesure: «C'est ici mon commandement: Que vous vous aimiez les uns les autres, comme je vous ai aimés», lisons-nous (Jean 15: 12).

Combien souvent nous l'oublions, quand il s'agit de manifester notre amour à l'égard de nos frères! Nous avons à le déplorer, parfois notre amour ressemble peu à celui de Christ. Les manquements de nos frères, leurs torts, ou leurs prétendus torts envers nous, n'ont-ils pas souvent l'effet de refroidir cet amour, voire même de le refouler au-dedans de nous-mêmes, au lieu de le manifester, à l'exemple de Christ? Que nous dit-il à ce propos? «Vous m'appelez Maître et Seigneur, et vous dites bien, car je le suis; si donc moi, le Seigneur et le Maître, j'ai lavé vos pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Car je vous ai donné un exemple, afin que, comme je vous ai fait, moi, vous aussi vous fassiez. En vérité, en vérité, je vous dis: L'esclave n'est pas plus grand que son seigneur, ni l'envoyé plus grand que celui qui l'a envoyé. Si vous savez ces choses, vous êtes bienheureux si vous les faites» (Jean 13: 13-17).

Remarquons-le, nous sommes appelés à accomplir les uns envers les autres le service que le Seigneur lui-même accomplit envers nous. Et de quelle façon ferons-nous la chose? — Un vénéré frère, actuellement dans le repos, nous disait une fois: «C'est par la prière que nous nous lavons les pieds les uns aux autres». Il avait certainement raison, car c'est par là que ce service doit toujours commencer. Ensuite, le Seigneur nous emploiera probablement pour aller, de sa part, porter un message à celui qui a été l'objet de notre intercession. Dans ces conditions, le résultat ne peut qu'être béni pour chacun: «Si vous savez ces choses, vous êtes bienheureux», dit le Seigneur, «si vous les faites». Qu'il est précieux de nous trouver ainsi en communion avec Christ dans l'accomplissement de ce service!

Le Seigneur l'a dit: «Je reviendrai»; sa parole est certaine et nous pouvons y compter. Pour notre encouragement, il nous a dit depuis la gloire par le moyen de l'apôtre Jean — et c'est sa dernière parole — «Oui, je viens bientôt!» (Apocalypse 22: 20). Non seulement il affirme qu'il vient, mais il ajoute que c'est sans retard. L'écho de son amour semble se répercuter dans notre coeur qui répond: «Amen, viens, Seigneur Jésus!», (Apocalypse 22: 20). Telle est la disposition qui plaît au coeur de Christ. L'expression de l'amour de Christ pour son racheté trouve une réponse dans la déclaration de l'amour du racheté pour Lui. Que de fois, hélas! — nous avons à le reconnaître — nous souhaitons que le Seigneur vienne nous chercher, afin que nous soyons délivrés de telle ou telle difficulté que nous rencontrons, de l'épreuve que nous traversons, ou d'une chose que nous appréhendons; le désir est alors singulièrement mélangé d'égoïsme, et ressemble peu à celui de Christ qui désire nous avoir, afin que nous soyons avec Lui.

Puissions-nous l'attendre avec affection, ayant les reins ceints et nos lampes allumées (Luc 12: 35), et répondre ainsi, en quelque mesure, à son grand amour qui surpasse toute connaissance!