ME 1910 page 389
Cette partie de l'évangile de Luc nous montre la puissance
de Jésus, s'élevant contre celle de Satan, pour chasser les démons, guérir les
malades, ressusciter les morts. Dans le passage que nous venons de lire, une
femme vient par la foi, mais en tremblant, toucher le Seigneur et elle est
guérie. Jaïrus, de son côté, vient demander la vie de sa fille, alors qu'elle
était incapable de s'intéresser à elle-même. La femme a un sentiment intime et
profond de la puissance de Jésus, la fille de Jaïrus n'en a aucun, et c'est la
foi d'autrui qui agit pour elle.
Le péché est une maladie qui ne meurt ni ne guérit, mais qui
tourmente continuellement; la mort est une autre forme du mal; elle ronge, et
ne s'arrête jamais dans son œuvre de destruction; cet état est exprimé par «le
feu qui ne s'éteint point et le ver qui ne meurt point».
Il est précieux de voir, dans tout ce chapitre, que Jésus
est en chemin. Il va de ville en ville, agissant de la même manière,
dans l'activité de la grâce. Il cherche ce qui est perdu; et c'est encore
aujourd'hui le temps favorable, le jour du salut. Son amour, au lieu d'être
épuisé par la mort, y a trouvé une nouvelle occasion pour dire, par le Saint
Esprit, beaucoup plus qu'il ne pouvait dire pendant qu'il était présent sur la
terre. Jésus avait passé la mer de Galilée pour guérir le démoniaque. Les
Gadaréniens l'avaient repoussé, et il s'en revient. Sur le désir du chef de la
synagogue, il va avec lui. En chemin, il est entouré par la foule. Il y avait
alors, comme on le voit aujourd'hui quand l'Evangile est prêché, beaucoup
d'âmes attirées qui ne se convertissaient jamais. Ce que le Saint Esprit fait dans
les autres, les attire, mais ensuite elles se retirent et ne portent pas de
fruit. La semence se répand, indifféremment de leur état, de tous côtés. Cela
n'empêche pas Jésus d'être en chemin. Ecoutez ce que Dieu dit à Israël:
«Pendant que tu es en chemin avec ta partie adverse, efforce-toi de te mettre
en règle avec elle». Aujourd'hui Jésus est en chemin; il a pris la forme de
serviteur; il est là pour répondre aux besoins de vos âmes. Si celui qui
l'insultait hier, le cherche aujourd'hui, il trouvera en Lui le serviteur du
Père pour le recevoir. Jésus a démontré quelle était sa volonté en se dévouant
ainsi à la volonté du Père. On aurait pu répondre à Jaïrus: Ne l'importune pas,
il est occupé; mais Jaïrus comptait sur la bonté de Jésus, à laquelle il n'avait
peut-être guère pensé auparavant, comme chef de synagogue, car un chef de
synagogue vaut plus, dans le monde, qu'un fils de charpentier. Mais la bonté de
Jésus, en se faisant connaître, avait gagné le coeur
de cet homme, et il vient à celui qui ne se refuse pas à son appel. Jésus se
met en chemin, va comme si la jeune fille n'était pas mourante et la trouve
morte.
La femme, par contre, sentait sa maladie et sa misère depuis
fort longtemps. A d'autres, le Seigneur ne dit pas: Venez à moi, vous tous qui sentez
que vos péchés vous travaillent, mais seulement: vous tous qui êtes travaillés
et chargés, vous tous qui avez des besoins et des misères. Je comprends votre
maladie; vous ne sauriez trouver ni soulagement, ni repos. Venez à moi; mon
remède est la grâce de Dieu, et je vous promets le repos. La femme avait
consulté toute sorte de médecins, mais le monde n'a point de remèdes ni de
guérison pour l'âme. Quand le voile qui couvrait la réalité de son mal est ôté,
il ne lui est plus possible de chercher du repos. Le monde craint cette
découverte; il y perdrait la raison; c'est pourquoi il cherche à oublier et à
s'étourdir. Mais alors, de deux choses l'une: ou bien les passions qu'il
cultive pour ne pas penser à son état, s'emparent totalement de son âme, ou
bien il tombe dans l'ennui, ne trouvant pas un objet qui l'intéresse. Il n'est
pas étonnant, dans ce cas, que l'on cherche des médecins, car on ne peut se
contenter de rester dans sa misère. On dépense tous ses biens à chercher ce qui
peut enrayer cette maladie terrible qui nous épuise. Un tel sentiment produit
toujours du malaise, car on n'aime à dévoiler son état, ni aux autres, ni à
soi-même. Mais le monde sait que cette misère existe.
Cette pauvre femme était fermement convaincue que Jésus
avait une ressource pour elle, mais elle se tenait au milieu de la foule sans
oser se présenter devant lui. Elle avait un profond besoin de la grâce, en même
temps que la honte du péché. Peut-être aurait-elle eu plus de courage, si elle
eût rencontré Jésus tout seul? Elle n'osait pas confesser le Fils de Dieu, mais
elle était convaincue qu'en touchant le bord de son vêtement elle serait
guérie. Elle croyait à l'efficace de la personne de Christ d'une manière
remarquable. C'était une âme délicate, angoissée, qui n'osait se montrer, tout
en se confiant en Lui. Aussitôt la puissance de Dieu se manifeste et la guérit.
On touche ici du doigt la différence entre la foi et
l'empressement des mille personnes qui entouraient le Seigneur. Dans une
certaine mesure, tout le monde voudrait de l'Evangile, mais on ne touche pas
Jésus, quoiqu'on le presse et qu'on aille après lui. Dans ce cas, aucune vertu
ne sort de lui, comme cela arrive nécessairement quand on le touche par la foi.
Cette femme aurait voulu être guérie sans être manifestée en
public. Cela arrive à bien des âmes, bénies sous d'autres rapports, qui n'osent
pas même dire à Jésus: C'est toi que je veux. Mais lui, connaissait la présence
de cette femme et voulait établir une relation entre Lui et elle. Comme nous le
voyons, en Luc 18: 39, ceux qui entourent la Parole et l'Evangile, sans
conscience, ne peuvent supporter ceux qui ont de vrais besoins. La femme vient
en tremblant, comme si elle avait mal fait, elle trouve alors une entière
ouverture de cœur. La timidité qui osait à peine toucher le Sauveur déclare
tout, quand il le lui demande. Son cœur obéit instantanément, elle ne cache
rien devant la foule, parce que Jésus est le tout de son âme. Dès ce moment,
elle ne veut rien que Lui, et a maintenant autant de force qu'elle avait
auparavant de faiblesse. Guérie, elle n'a besoin que d'être rassurée,
car la gloire de Jésus est tout pour elle. Il veut la mettre à l'aise vis-à-vis
de lui-même. Il ne lui dit pas: Ma vertu t'a guérie, mais: Ta foi
t'a guérie. Il veut la rassurer, Lui qu'elle craignait tant, mais estimait si
haut, en lui montrant que la foi est l'instrument, le moyen employé, pour la
guérir. En même temps, le Seigneur montre publiquement l'intérêt qu'il lui
porte; sa gloire y est intéressée. Il ne voit que sa foi, là où elle ne voyait
qu'une misère qui la couvrait de honte.
Pour trouver la paix, il faut deux choses: la foi, et la
réponse du Sauveur. La foi réelle peut produire le sentiment du besoin, mais
c'est la réponse de Christ qui affranchit l'âme. Lui qui connaît ses besoins et
sa foi, la rassure, sans rien lui reprocher, pas même d'avoir cherché d'autres
médecins que Lui. Il lui dit: Ta foi t'a sauvée, et veut être avec elle dans
une relation qui soit connue de tout le monde.
Souvenez-vous que Jésus est en chemin pour se mettre en
rapport avec vous; sa présence peut attirer une foule qui n'en remportera aucun
profit, parce qu'elle entoure Jésus en se défendant de l'avoir touché, mais au
milieu d'elle un petit nombre est sauvé. La manière dont le Seigneur reconnaît
la foi, là où il n'y a encore ni paix, ni confiance, et lui donne une réponse,
rassure l'âme.
Quant à nous, chrétiens, mettons Jésus en avant, afin que, s'il se trouve ici une âme avec des besoins, elle se manifeste en y trouvant la réponse. Combien de fois il s'en rencontre au milieu des foules qui entendent la parole du Seigneur. Cela peut arriver à chaque instant; nul de nous ne le sait, mais le Seigneur qui est en chemin, les connaît.